par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



DEPOT DEFINITION
Dictionnaire juridique

Définition de Dépôt

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Le contrat de "dépôt" est une convention par laquelle une personne, appelée le "dépositaire", se charge gracieusement de la conservation d'un objet mobilier ou d'une somme d'argent que lui remet le "déposant". A la fin de la période de dépôt, le dépositaire doit restituer l'objet déposé et il est tenu de réparer les détériorations de la chose qu'il a reçue. C'est au déposant de prouver que les objets que le dépositaire se propose de lui restituer ne sont pas ceux qui ont été remis à ce dernier (1è Chambre civile 26 septembre 2012, pourvoi n°11-12890, BICC n°774 du 15 janvier 2013 et Legifrance). Il incombe en revanche, au dépositaire d'apporter la preuve que les détériorations constatées sur la chose déposée n'existaient pas à date de sa restitution, ou, à défaut, qu'il avait apporté tous soins utiles pour éviter ce type de désordres pendant le temps où la chose lui avait été confiée (1ère Chambre civile 5 février 2014, pourvoi n°12-23467, BICC n°801 du 1er mai 2014 et Legifrance).

En application des dispositions de l'article 1924 du code civil, exclusives de celles de l'article 1348 du même code, lorsque le dépôt excède le chiffre prévu à l'article 1341 dudit code, le dépositaire, à défaut d'écrit, doit être cru sur le contenu et sur la restitution de la chose qui en faisait l'objet. Les attestations produites selon lesquelles le déposant aurait conservé certains meubles, ne peuvent faire échec aux déclarations du dépositaire soutenant avoir restitué l'intégralité des meubles dont il avait été dépositaire (1ère Chambre civile 14 novembre 2012, pourvoi n°11-24320 11-24576, BICC n°777 du 1er mars 2013 et Legifrance). Consulter aussi, 1re Civ., 31 octobre 2012, pourvoi n° 11-15462, Bull. 2012, I, n° ? ? ? (rejet).

Quand l'objet déposé a été endommagé au cours de la période du dépôt, le dépositaire doit prouver que le dommage n'est pas imputable à sa faute. (CA Aix-en-Provence (10e ch.), 15 mai 2007. - RG n° 04/04302 BICC n°685 du 1er juillet 2008), en établissant qu'il a donné à cette chose les mêmes soins que ceux qu'il aurait apportés à la garde de celles qui lui appartiennent, il peut, par exemple, prouver que cette détérioration existait avant la mise en dépôt. (1ère Civ. - 22 mai 2008 BICC n°689 du 15 octobre 2008). Il peut aussi démontrer que la détérioration est due à la force majeure. Cependant, par principe, le fait du débiteur ou de son préposé ou substitué ne peut constituer la force majeure. Le juge du fond ne peut exonérer le dépositaire de sa responsabilité, sans relever que le fait qualifié de force majeure a trouvé son origine dans l'action d'une personne étrangère à l'entreprise (Première Chambre civile 14 octobre 2010 pourvoi n°09-16967, BICC n°735 du 1er février 2011 et Legifrance). Consulter la note de M. Alexandre Paulin référencée dans la Bibliographie ci-après et 1ère Civ., 22 mai 2008, pourvoi n° 06-17863, Bull. 2008, I, n° 143

Lorsque la remise est faite contre rémunération il ne s'agit plus d'un dépôt, mais d'un louage, comme c'est le cas des coffres-forts que les banques mettent à la disposition de leurs clients. Le dépôt est donc en principe gratuit. Mais ce caractère gratuit n'empêche pas le dépositaire de pouvoir exiger le remboursement des frais qu'il a pu être amené à faire pour la conservation de l'objet reçu en dépôt. Pour assurer ce remboursement il possède d'ailleurs un droit de rétention. Le contrat de dépôt d'un véhicule auprès d'un garagiste existe, en ce qu'il est l'accessoire du contrat d'entreprise, indépendamment de tout accord de gardiennage (1ère chambre civile 8 octobre 2009, pourvoi n°08-20048, BICC n°718 du 15 mars 2010 et Legifrance). Voir aussi : : 1ère Chambre Civile 7 juillet 1992, pourvoi n° 91-10259, Bull. 1992, I, n° 222, et 1ère Civ., 5 avril 2005, pourvoi n° 02-16926, Bull. 2005, I, n° 165 et la note de M. Delpech référencée dans le Bibliographie ci-après.

L'Ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés, contrats et obligations réforme le droit des sûretés. Désormais le sous-titre II du titre II du livre IV comporte un chapitre Ier intitulé : « Des privilèges mobiliers ». Selon les dispositions de l'article 2350 du Code civil, dans sa nouvelle rédaction issu de ladite Ordonnance, le dépôt ou la consignation de sommes, effets ou valeurs, ordonné judiciairement à titre de garantie ou à titre conservatoire, emporte affectation spéciale et droit de préférence au sens de l'article 2333.

Le dépôt est appelé "dépôt nécessaire" lorsqu'un événement, tel qu'un incendie ou une inondation a contraint celui qui est le détenteur ou le propriétaire d'un bien mobilier de le mettre à l'abri. La loi répute dépôt nécessaire celui qui est fait par un voyageur à un hôtelier auquel il confie ses bagages. Le "dépôt" et le "séquestre" sont des institutions juridiques dont le but et les modalités sont différents. Le "séquestre" est un type de dépôt qui possède la particularité de constituer essentiellement une mesure conservatoire relativement à un bien, à un document ou à une somme d'argent à propos de laquelle les parties se trouvent en litige. Le séquestre peut être décidé, soit conventionnellement par les parties elles mêmes, soit par le juge qu'elles ont saisi de leur litige. Il dure le temps que les parties trouvent une solution amiable à leur différend ou le temps que la décision du juge devienne définitive.

Une autre différence réside dans le fait que le dépôt concerne uniquement des biens mobiliers qui peuvent faire l'objet d'une détention, tandis que le séquestre peut avoir pour objet toutes sortes de biens, tels un immeuble, ou un fonds de commerce. Autre différence, contrairement au dépôt, le séquestre n'est pas gratuit.

Au point de vue du vocabulaire il faut noter une autre particularité. Le mot "séquestre" désigne à la fois l'institution et la personne gardienne. On dit "faire désigner un séquestre" pour dire que l'on sollicite le juge de nommer une personne qui assurera la garde et la conservation du bien séquestré. Mais "séquestre" est aussi le nom de l'institution juridique : on dit qu'un immeuble est "placé sous séquestre". Il existe enfin un type de dépôt qui est lié à des opérations de crédit dénommé "warrant" qui n'est pas non plus gratuit.

Le "dépôt à terme" dit aussi "compte à terme", est une opération financière par laquelle une personne détenteur d'un capital, le remet à un établissement financier pendant un délai que fixent les parties. Le dépôt est productif d'un intérêt fixé d'avance. A l'échéance l'opération se dénoue par le remboursement du capital déposé et le règlement des intérêts convenus. Elle peut aussi être renouvelée pour une nouvelle période. Pendant la durée de l'opération le capital reste indisponible. Cependant les parties peuvent insérer dans le contrat de dépôt une clause de résiliation : dans ce cas il peut être convenu d'une pénalité payable par le déposant. Voir aussi : "Bon de caisse".

Sur le régime des sommes déposées sur un compte bancaire personnel à l'un des époux, voir la rubrique : Régimes matrimoniaux.

Textes

  • Code civil, articles 1915 et s., 3250 (nouvelle numérotation résultant de l'Ordonnance du 23 mars 2006).
  • Ordonnance n° 2017-1433 du 4 octobre 2017 relative à la dématérialisation des relations contractuelles dans le secteur financier (applicable a/c 1er avril 2018)
  • Bibliographie

  • Bihl (L.), La notion de dépôt hôtelier, JCP. 1974, I. 2616.
  • Delpech (X.), Le garagiste-réparateur peut réclamer des frais de gardiennage, Recueil Dalloz, n°37, 29 octobre 2009, Actualité jurisprudentielle, p. 2487-2488, note à propos de 1ère Chambre Civile. - 8 octobre 2009.
  • Malaurie (Ph.), Cours de droit civil, Tome VIII. Les Contrats spéciaux, civils et commerciaux, ... .dépôt, Cujas 1995.
  • Mestre (J.) et Fages (B.), observations sous 1ère Civ., 16 mai 2006, Bull. 2006, I, n°239, p. 210, RTC, juillet-septembre 2006, n°3, chroniques-7, p. 556-557. (Obligation alternative de restitution en nature ou en valeur).
  • Paulin (A.), Pas de force majeure en l'absence d'événement extérieur, Revue Lamy droit civil, n°77, décembre 2010, Actualités, n°4038, p. 16, note à propos de 1ère Civ. - 14 octobre 2010
  • Vaugeois (A.), Du sort des actes sous seing privé non conformes aux prescriptions des Art. 1325 et 1326 C. civ. mais déposés aux mains d'un tiers ou même aux minutes d'un officier public, Nancy, impr. Berger-Levrault & Co.
  • Wintersdorff (C.), La Nature et le régime juridique du certificat de dépôt, édité par l'auteur, Thèse Paris, 1993.

  • Liste de toutes les définitions