par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



PRESCRIPTION DEFINITION
Dictionnaire juridique

Définition de Prescription

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En matière civile, la "prescription" est une présomption dont l'effet est, tantôt extinctif, tantôt créatif d'un droit, ne peut s'établir à l'origine que par des actes matériels d'occupation réelle et se conserve tant que le cours n'en est pas interrompu ou suspendu (3ème Chambre civile, pourvoi n°11-25398, BICC n°784 du 15 juin 2013 et Legifrance). Ses effets se produisent à l'échéance d'un délai fixé par la Loi qui, sous réserve de ce qui va être dit ci-après relativement à l'aménagement conventionnel de la prescription qu'à prévue la Loi n°2008-561 du 17 juin 2008 (Article 2254 du Code civil), détermine les circonstances dans lesquelles le délai pour prescrire se trouve suspendu ou interrompu.

La prescription est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli. Les règles de computation des délais de procédure énoncées aux articles 641 et 642 du code de procédure civile, prévoyant que le délai expire à la fin du jour portant le même quantième que celui du point de départ, sont sans application en matière de prescription. (1ère Chambre civile 12 décembre 2018, pourvoi n°17-25697, BICC n°900 du 15 avril 2019 et Legifrance). Consulter la note de M. Yves Strickler, Rev. Procédure 2019, comm. 39.

Pour être interruptive de prescription, une demande en justice doit être dirigée contre celui qu'on veut empêcher de prescrire. Relativement à l'effet d'une action engagée en vue d'une indemnisation, la prescription ne peut interrompre la prescription, qu'à l'égard de la personne qui est partie à cette instance (2e Chambre civile 13 septembre 2018, pourvoi n° 17-20966, BICC n°894 du 15 janvier 2019 et Legifrance) Consulter la note de Madame Stéphanie Porchy-Simon, D. 2018, pan. p.2164).

La demande d'expertise en référé sur les causes et conséquences de désordres et de malfaçons ne tend pas au même but que la demande d'annulation du contrat de construction, de sorte que la mesure d'instruction ordonnée ne suspend pas la prescription de l'action en annulation du contrat. (3e Chambre civile 17 octobre 2019, pourvoi n°18-19611 18-20550, BICC n°918 du 15 mars 2020 et Legifrance).

Jugé, cependant que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent aux mêmes fins, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première. Il en est ainsi lorsque l'action engagée par le vendeur contre le fabricant, bien que fondée sur l'article 1134 du code civil, tendait, comme celle formée précédemment, à la garantie du fabricant en conséquence de l'action en résolution de la vente intentée par l'acquéreur contre le vendeur sur le fondement des vices cachés et au paiement par le fabricant du prix de la vente résolue, (1ère Chambre civile 9 mai 2019, pourvoi n°18-14736, BICC n°910 du 1er novembre 2019 et Legifrance.). Consulter la note de Madame Pauline Fleury, RLDC. 2019, n°6616, p. 5.

La prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure. Cette règle selon laquelle la prescription ne court pas contre celui qui est empêché d'agir ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, à la cessation de l'empêchement, du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription (1ère Chambre civile 13 mars 2019, pourvoi n°17-50053, BICC n°906 du 15 juillet 2019 et Legifrance).

Une demande en justice dont la caducité a été constatée ne peut interrompre le cours de la prescription. Le juge du fond en a déduit à bon droit que le délai d'appel d'un mois, qui courait à compter de la signification du jugement et n'avait pas été interrompu par la première déclaration d'appel frappée de caducité, était expiré lorsque la partie avait interjeté appel et que dès lors, cet appel était irrecevable (2e Chambre civile 21 mars 2019, pourvoi n°17-31502, BICC n°908 du 1er octobre 2019 et Legifrance).

Selon l'article 2239 du code civil, lorsque la prescription a été suspendue par une décision ayant fait droit à une mesure d'instruction présentée avant tout procès, le délai de prescription recommence à courir à compter du jour où la mesure a été exécutée. (3e Chambre civile 22 octobre 2020, pourvoi n°19-17946, Legifrance).

Constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme injustifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l'adversaire, ce qui la différencie de la demande reconventionnelle, par laquelle, en application de l'article 64 du code de procédure civile, le défendeur originel tend à obtenir un avantage autre que le simple rejet des prétentions de son adversaire. Cette prétention qui ne constitue pas un moyen de défense, mais une demande reconventionnelle subit les règle de la prescription. (3e Chambre civile 22 octobre 2020, pourvoi n°18-25111, Legifrance).

Le créancier d'une obligation contractée solidairement peut s'adresser à celui des débiteurs qu'il veut choisir. L'impossibilité d'agir doit être appréciée au regard du lien que fait naître la solidarité entre le créancier et chaque codébiteur solidaire, peu important que le créancier ait la faculté, en application de l'article 2245, alinéa 1er, du code civil, d'interrompre la prescription à l'égard de tous les codébiteurs solidaires, y compris leurs héritiers, en agissant contre l'un quelconque d'entre eux (1ère Chambre civile 23 janvier 2019, pourvoi n°17-18219, BICC n°903 du 1er juin 2019 et Legifrance.). Consulter la note de M. Antoine Touzain, JCP 2019, éd. N, Act. 235.

La suspension de la prescription, en application de l'article 2239 du code civil, lorsque le juge accueille une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès, qui fait, le cas échéant, suite à l'interruption de cette prescription au profit de la partie ayant sollicité cette mesure en référé et tend à préserver les droits de la partie ayant sollicité celle-ci durant le délai de son exécution, ne joue qu'au profit du demandeur en référé. (2e Chambre civile 31 janvier 2019, pourvoi n°18-10011, BICC n°903 du 1er juin 2019 et Legifrance). Consulter la note de Madame Gaëlle Deharo, JCP. 2019, éd. G., Act. 161.

Envisagé comme mode extinctif d'une obligation, l'art. 2219 résultant de la Loi du 17 juin 2008 définit la prescription comme " un mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps". La prescription fait présumer de la libération du débiteur, ce qui se produit en particulier, lorsque ce dernier n'est plus en mesure d'établir la preuve de son paiement, par exemple, lorsqu'il a perdu le document qui établissait qu'il s'était libéré. En revanche s'agissant seulement d'une présomption simple, c'est à dire, contre laquelle il est admis de faire la preuve contraire, la prescription n'a pas d'effet si le débiteur reconnaît n'avoir pas exécuté son obligation. Selon un arrêt de la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation (BICC 15 octobre 2004 N° 1509), il résulte des dispositions de l'article 2248 du Code civil que la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait. Ainsi, la lettre aux termes de laquelle un débiteur sollicite la remise de sa dette vaut reconnaissance de celle-ci et interrompt la prescription. Mais, pour interrompre la prescription, la reconnaissance doit émaner du débiteur ou de son mandataire et que l'expert-comptable n'est ni le mandataire ni le préposé de son client auquel il est lié par un contrat de louage d'ouvrage (1ère Chambre civile 4 mai 2012, pourvoi n°11-15617, BICC n°769 du 15 octobre 2012 et Legifrance. L'impossibilité d'agir dans laquelle s'est trouvée la personne à laquelle la prescription a été opposée, suspend la prescription quinquennale (1ère Chambre civile, 1er juillet 2009, pourvoi : 08-13518, Legifrance). La dénonciation d'une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire interrompt également la prescription. (2e Civ. - 18 juin 2009, pourvoi n°08-15200, BICC n°713 du 15 décembre 2009 et Legifrance). L'article 2241 du code civil ne distingue pas dans son alinéa 2 entre le vice de forme et l'irrégularité de fond, il en résulte que l'assignation même affectée d'un vice de fond a un effet interruptif (3e Chambre civile 11 mars 2015, pourvoi n°14-15198, BICC n°824 du 15 juin 2015 et Legifrance). En revanche, un commandement n'est interruptif de prescription que s'il est fondé sur un titre exécutoire. (Deux arrêts : 3e Chambre civile 23 mai 2013, pourvoi n°12-10157 et n°12-14901, BICC n°791 du 15 novembre 2013 et Legifrance).

La déclaration de créance au passif du débiteur principal mis en procédure collective interrompt la prescription à l'égard de la caution et cette interruption se prolonge jusqu'à la clôture de la procédure collective. La prolongation du redressement judiciaire du débiteur principal tant que le prix de cession n'est pas payé et que tous les actifs non compris dans le plan ne sont pas réalisés est de nature à permettre le désintéressement des créanciers et ne porte pas une atteinte disproportionnée à l'intérêt particulier de la caution, dès lors que son engagement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur. Lorsque la clôture du redressement judiciaire n'est pas intervenue au jour de l'assignation en paiement de la caution, cette absence de clôture n'a pas pour conséquence de rendre imprescriptible la créance de la caution. (Chambre commerciale 23 octobre 2019, pourvoi n°18-16515, BICC n°918 du 15 mars 2020 et Légifrance).

Sur la non-application de la prescription à l'action en revendication relative à la découverte d'une chose cachée ou enfouie trouvé par le pur effet du hasard, consulter l'arrêt de la 1ère Chambre civile du 6 juin 2018, pourvoi n°17-16091, BICC n°891 du 15 novembre 2018 et Legifrance. Selon cet arrêt, celui qui découvre, par le pur effet du hasard, une chose cachée ou enfouie a nécessairement conscience, au moment de la découverte, qu'il n'est pas le propriétaire de cette chose, et ne peut être considéré comme un possesseur de bonne foi. Par suite, il ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article 2276 du code civil pour faire échec à l'action en revendication de la chose ainsi découverte, dont il prétend qu'elle constitue un trésor au sens de l'article 716, alinéa 2, du même code. Conformément à l'article 2227 de ce code, une telle action n'est pas susceptible de prescription. Dès lors, après avoir relevé que des personnes avaient découvert par le pur effet du hasard les lingots litigieux, enfouis dans le sol du jardin de leur propriété, une cour d'appel a retenu, à bon droit, que les dispositions de l'article 2276 précité ne pouvaient recevoir application. L'action en revendication exercée par les revendiquants n'était donc pas prescrite et d'autre part, ces derniers pouvaient librement rapporter la preuve qu'ils étaient propriétaires des biens trouvés.

Il résulte de l'article 2241 du code civil, que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent aux mêmes fins, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première. (1ère Chambre civile 7 juillet 2021, pourvoi n°19-11638, Legifrance).)

Le fait pour une partie de déposer des conclusions avant d'invoquer, à un moment quelconque de la cause, la prescription, n'établit pas sa volonté non équivoque de renoncer à cette fin de non-recevoir (2e Chambre civile 12 avril 2018, pourvoi n°17-15434, BICC n°888 du 1er octobre 2018 et Legifrance). D&écidé aussi, que l'action tendant à voir déclarer un droit prescrit ne constitue pas, par elle-même, la reconnaissance non équivoque de ce droit par le demandeur à cette action (Chambre commerciale 9 mai 2018, pourvoi n°17-14568, BICC n°889 du 15 octobre 2018 et Legifrance).

Les dispositions de l'article 2241, alinéa 2, du code civil ne sont pas applicables aux actes d'exécution forcée, de sorte que l'annulation d'un commandement de payer valant saisie immobilière prive cet acte de son effet interruptif de prescription. (2e Chambre civile 1er mars 2018, pourvoi n°16-25746, BICC n°885 du 1er juillet 2018 et Legifrance).

La "gestion d'affaires" ne relève pas de la prescription édictée par l'article L. 137-2, devenu L. 218-2 du code la consommation en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, applicable uniquement à l'action des professionnels pour les biens et services qu'ils fournissent contractuellement aux consommateurs (1ère Chambre civile 9 juin 2017, pourvoi n° 16-21247, BICC n°872 du 1er décembre 2017 et Legifrance).

Relativement à la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance d'une banque soulevée par le débiteur d'un prêt couvert par une caution hypothécaire, il a été jugé que la France n'ayant pas ratifié la Convention européenne sur la computation des délais conclue à Bâle le 16 mai 1972, les juridictions françaises ne pouvaient l'appliquer. Les règles de computation des délais de prescription doivent être distinguées de celles régissant les délais de procédure et qu'il résulte de l'article 2229 du code civil que la prescription est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli, la cour d'appel en a exactements déduit, sans méconnaître l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale, que dans l'affaire soumise à sa décision, le délai de prescription applicable n'avait pas lieu d'être prorogé au premier jour ouvrable suivant son terme. (2e Chambre civile 7 avril 2016, pourvoi n°15-12960, BICC n°849 du 15 octobre 2016 et Legifrance)

L'interruption de la prescription résultant de la demande en justice, même en référé, même entaché d'un vice de procédure, interrompt les délais de prescription comme de comme de forclusion. Si la demande est entâchée d'un vice de procédure, la forclusion cesse de produire ses effets à compter du prononcé de la décision (1ère Chambre civile 8 février 2017, pourvoi n°15-27124, BICC n°866 du 15 juillet 2017; également, même chambre, 1er juin 2017, pourvoi : n°16-14300 BICC n°872 du 1er décembre 2017 et Legifrance). Consulter aussi les notes de M. Yves Strickler, Rev. Procédures 2017, comm.59 et de M. Bastien Brignon, Ann. Loyers, juin-juillet 2017, p.74.

Toute décision judiciaire apportant une modification quelconque à une mission d'expertise préalablement ordonnée ne fait donc courir un nouveau délai de prescription que si elle a été précédée d'une citation. Mais si l'ordonnance rendue par le juge chargé du contrôle des expertises n'est pas intervenue à la suite d'une citation mais seulement à la suite d'un simple courrier de l'expert demandant l'extension de sa mission, cette ordonnance n'a pu faire courir un nouveau délai de prescription. (3ème Chambre civile 25 mai 2011, pourvoi n°10-16083, BICC n°749 du 15 octobre 2011 et Legifrance).

En revanche, l'interruption de la prescription prévue à l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne s'appliquant qu'aux actions en justice, la demande d'aide juridictionnelle formée en vue de l'exécution d'une décision de justice, lorsque la procédure d'exécution ne nécessite pas la saisine préalable d'une juridiction, n'interrompt pas le délai de prescription de la créance objet de cette demande. (2e Chambre civile 18 février 2016, pourvoi n°14-25790, BICC n°845 du 1er juillet 2016 et Legifrance). Au surplus, l'interruption de la prescription résultant de la demande en justice est non avenue si le juge saisi de cette demande a constaté que le demandeur s'est désisté de sa demande ou a laissé périmer l'instance, ou si le juge a définitivement rejeté cette demande. (2e Chambre civile 2 juin 2016, pourvoi n°15-19618 15-19619, BICC n°852 du 1er décembre 2016 et Legifrance). De même, le dépôt d'une requête en autorisation d'une inscription provisoire de nantissement sur un fonds de commerce ne constitue pas une citation en justice au sens de l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige. (2e Chambre civile 22 septembre 2016, pourvoi n°15-13034, BICC n°857 du 1er mars 2017 et Legifrance)

A l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, en revanche, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité. (1ère Chambre civile 11 février 2016; pourvoi : 14-22938, BICC n°844 du 15 juin 2016 avec une note du SDR et Legifrance.

Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. Après avoir relevé que le décès du dernier co-emprunteur constituait l'événement déclenchant le remboursement du prêt, en ce qu'il rendait la créance exigible, une Cour d'appel a exactement énoncé, sans dénaturer l'acte de prêt, que cet événement n'était pas suffisant pour constituer le point de départ du délai de prescription et qu'il était nécessaire que le prêteur ait connaissance de la survenance du décès mais aussi de l'identité du ou des débiteurs de l'obligation de remboursement (1ère Chambre civile 15 mars 2017, pourvoi n°15-27574, BICC n°866 du 15 juillet 2017 et Legifrance).

Dans le but d'éviter le maintient de situations juridiques incertaines et les procès qu'elles peuvent générer, la loi a fixé un grand nombre de délais de prescription de courte durée (honoraires des professeurs en secteur libéral, sommes dues aux hôteliers et aux traiteurs, rémunération des huissiers, honoraires des professionnels de santé, honoraires des avocats.

Les nouvelles dispositions contenue dans les art. 2254 et suivants du Code civil résultant de la Loi du 17 juin 2008 ont introduit la faculté pour les parties d'aménager la prescription extinctive dont la durée peut être abrégée ou allongée par accord des parties. Le délais de la prescription ne peut toutefois être réduit à moins d'un an, ni étendu à plus de dix ans. Les parties peuvent également, d'un commun accord, ajouter aux causes de suspension ou d'interruption de la prescription prévues par la loi. Il est fait exception à l'application de cette nouvelle faculté pour les actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, aux actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts. Cependant, afin de protéger le consommateur l'article L137-1 du Code de la Consommation a été modifié en ce que, par dérogation à ce qui est précisé ci dessus, les parties aux contrats conclus entre un professionnel et un consommateur, ne peuvent, même d'un commun accord, ni modifier la durée de la prescription, ni ajouter aux causes de suspension ou d'interruption de celle-ci. L'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit uniformément par deux ans. Des dispositions identiques ont été incluses dans le Code des assurances dont l'article L 114-3 reprend les limitations ci-dessus. Voir le mot Subsidiaire sur la question de savoir si le défendeur à l'action qui conteste le montant des sommes réclamées et qui ne reconnaît pas, par là même, le non-paiement de ces sommes qui lui sont réclamées se trouve, ce faisant, privé de la faculté d'opposer la prescription.

Le nouveau texte a aussi modifié le délai de certaines courtes prescriptions. Ainsi, les actions des notaires et des huissiers de justice pour récupérer les sommes qui leur sont dues, se prescrivent d'une manière uniforme, par cinq ans. En revanche, en ce qui concerne les actions en responsabilité engagés par les clients des huissiers de justice pour la perte ou la destruction des pièces qui sont confiées à ces derniers dans l'exécution d'une commission ou la signification d'un acte se prescrivent par deux ans. Pour ce qui concerne les actions en responsabilité civile, leur délai se trouve prescrit par dix ans : ce délai, sous réserve de délais particuliers propres à l'action pénale, est doublé, en cas de préjudice causé par des tortures ou des actes de barbarie, ou par des violences ou des agressions sexuelles commises contre un mineur. La Loi du 17 juin 2008 a inclus dans l'article 10 du Code de procédure pénale, une disposition selon laquelle « Lorsque l'action civile est exercée devant une juridiction répressive, elle se prescrit selon les règles de l'action publique. Lorsqu'elle est exercée devant une juridiction civile, elle se prescrit selon les règles du code civil. En matière de contrat d'assurance, toute clause ayant pour effet de réduire la durée de la garantie de l'assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l'assuré est génératrice d'une obligation sans cause et doit être réputée non écrite (3e Chambre civile 26 novembre 2015, pourvoi n°13-23095, BICC n°840 du 15 avril 2016 et Legifrance).

En ce qui concerne le point de départ de la prescription, s'agissant d'un prêt le point de départ est la date de la convention et, dans les autres cas, la réception de chacun des écrits indiquant ou devant indiquer le taux effectif global appliqué. C'est ainsi qu'il a été jugé que les intérêts payés par un emprunteur qui a obtenu un concours financier pour les besoins de son activité professionnelle, l'exception de nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel ne peut être opposée que dans un délai de cinq ans à compter du jour où il a connu ou aurait dû connaître le vice affectant le taux effectif global ; en cas d'ouverture de crédit en compte courant, la réception de chacun des relevés indiquant ou devant indiquer le taux effectif global appliqué constitue le point de départ du délai de cette prescription (quatre arrêts : Com. du 10 juin 2008, BICC n°690 du 1er novembre 2008). La prescription ainsi que le délai pour agir sont interrompus par une citation en justice, même en référé, un commandement ou une saisie signifiés à celui qu'on veut empêcher de prescrire. Cette énumération est limitative. Ainsi aucun effet interruptif n'est produit par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception (2°chambre civile, 14 mai 2009, pourvoi : 08-17063, BICC n°710 du 1er novembre 2009 et Legifrance).

Le créancier peut poursuivre pendant dix ans l'exécution du jugement portant condamnation au paiement d'une somme payable à termes périodiques, il ne peut, en vertu de l'article 2224 du code civil, applicable en raison de la nature de la créance, obtenir le recouvrement des arriérés échus plus de cinq ans avant la date de sa demande et non encore exigibles à la date à laquelle le jugement avait été obtenu (1ère Chambre civile 8 juin 2016, pourvoi n°15-19614, BICC n°852 du 1er décembre 2016 et Legifrance).

Relativement aux quasi-contrats, l'action en répétition de l'indu, quelle que soit la source du paiement indu, se prescrit selon le délai de droit commun applicable, à défaut de disposition spéciale, aux quasi-contrats ; que l'arrêt s'est fondé à bon droit sur les articles 1235 et 1376 du code civil pour écarter la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances. (2ème Chambre civile 4 juillet 2013, pourvoi n°12-17427, BICC n°794 du 15 janvier 2014 et Legifrance).

Envisagé comme mode d'acquisition de la propriété immobilière, elle prend le nom d'"usucapion". Les effets de la prescription immobilière se produisent après une possession ininterrompue de trente ans. Néanmoins, ce délai est ramené à un temps plus court lorsque la personne qui prescrit prouve avoir été un possesseur de bonne foi, par exemple, elle a pu ignorer le vice dont se trouvait atteint son titre d'acquisition. Sur les effets de la "jonction des possessions", voir le mot "Possession". La Loi nouvelle du 17 juin 2008 a défini la prescription acquisitive (art.2258 du Code civil), comme étant " un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi". Elle a explicité ce qui était déjà admis précédemment, que la prescription acquisitive ne pouvait bénéficier au possesseur précaire. Dans le texte de l'article 2266 nouveau, " le locataire, le dépositaire, l'usufruitier et tous autres qui détiennent précairement le bien ou le droit du propriétaire ne peuvent le prescrire". Pour ce qui est du délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière, il est uniformément fixé à trente ans. Mais, pour celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble ce délai est réduit à dix ans.

Dans le vocabulaires juridique, le verbe "prescrire" qui a donné le substantif "prescription" a un autre sens que celui dont il a été question ci-dessus. La "prescription" désigne un ordre de faire ou de s'abstenir de faire. Une prescription de la loi ou d'un décret emporte une obligation pour la personne à laquelle elle s'adresse et non une faculté. Exemple cette phrase tirée d'un arrêt de la Cour d'appel de Bastia : "En application de l'article 809 alinéa 1er du code de procédure civile, expressément visé, le Président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent". (Chambre civile A, 06 juillet 2016, R. G : 15/ 00790 JD-C, Legifrance). Le mot "prescription" est également utilisé dans le sens d'un ordre écrit provenant d'une autorité qui exige de donner, de faire ou de ne pas faire. On parle ainsi des "prescriptions de la loi".

Au visa de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, l'Ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 accorde sur l'ensemble des dispositions du droit contractuel et du droit procédural une prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et elle statue sur l'adaptation des procédures pendant cette même période.

Consulter aussi : Déceptivité (Droit des marques).

Textes

  • Code civil, Articles 1792-4-1, 1792-4-2 et s., 2219 à 2279.
  • Loi n°2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile.
  • Loi n°85-677 du 5 juillet 1985, tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation, article 22.
  • Code de l'environnement, article L152-1.
  • Code de commerce, articles L110-4, L122-2, L123-14, L124-3, L125-2, L133-6, L141-19, L225-42, L225-90, L228-29-3, L238-1, L321-22, L420-6, L430-7, L430-8, L462-3, L462-6, L470-4-1, L511-50, L511-78.
  • Code de la construction et de l'habitation, articles 1792-4-1, 1792-5 et 1792-6.
  • Code des assurances, articles L114-3.
  • Code de la Sécu. sociale, articles L135-7, L332-1.
  • Code de la mutualité, articles L221-12-1.
  • Décret-Loi du 30 octobre 1935 sur le chèque, articles 52 et s.
  • Loi n°77-4 du 3 janvier 1977 modifiant l'article 189 bis du Code de commerce concernant la prescription en matière commerciale, articles 3 et s.
  • Loi n°2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile.
  • Bibliographie

  • Bandrac (M.), La nature juridique de la prescription extinctive en matière civile, Paris,1986.
  • Bénabent, Sept clefs pour une réforme de la prescription extinctive, Dalloz 5 juillet 2007, n°26, p. 1800-1804.
  • Biguenet-Maurel (C.), Dictionnaire de la prescription civile, 2e édition, éd. Francis Lefebvre, 2014.
  • Bonnieux (C.), La prescription de l'action en responsabilité civile, Paris, édité par l'auteur, 1995.
  • Brault (Ph. -H.), Sur l'application de la prescription biennale à la fixation du loyer renouvelé, JCP 1998, éd. E, 644.
  • Carbonnier (J.), Notes sur la prescription extinctive. Paris, Recueil Sirey, 1952.
  • Chahine (H.), La vérité jurisprudentielle sur la loi applicable à la prescription extinctive de l'obligation, Etudes Weil, p.303.
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  • Liste de toutes les définitions