par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 11 février 2015, 13-21478
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
11 février 2015, 13-21.478

Cette décision est visée dans la définition :
Amiable compositeur




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 mai 2013) que, par actes du 9 janvier 1997, les parts des sociétés Boulogne distribution, Dispasud et Morandis, détenues notamment par les consorts X..., ont été cédées à la société Amidis et Cie (la société Amidis) ; que, par actes du même jour, comprenant une clause compromissoire confiant aux arbitres la mission de statuer en amiable composition, les cédants ont consenti à la société cessionnaire une « garantie de bilan » ; qu'un différend étant survenu entre les parties à la suite de l'appel en garantie formé par la société Amidis, celle-ci a mis en oeuvre la procédure d'arbitrage qui a donné lieu au prononcé d'une sentence arbitrale le 25 octobre 2005, annulée par un arrêt de cour d'appel du 22 mars 2007, qui a statué au fond en amiable composition par un premier arrêt, du 26 février 2009, puis par un second arrêt, à la suite du dépôt du rapport d'expertise ordonné par le précédent, devenu irrévocable ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que la société Amidis fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en garantie d'accroissement de passif au titre d'un redressement fiscal ;

Attendu que le moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la société Amidis fait grief à l'arrêt de dire que les condamnations prononcées contre les cédants, au titre de la « garantie de bilan », porteront intérêts au taux légal à compter de la signification de celui-ci, alors, selon le moyen, que le juge, même statuant en amiable composition, doit respecter les règles tenant à l'ordre public de protection ; qu'en estimant pouvoir n'accorder d'intérêts au taux légal qu'à compter de la signification de l'arrêt, en se fondant sur l'équité, la cour d'appel a violé les articles 1485 (ancien) du code de procédure civile et 1153 du code civil ;

Mais attendu qu'en fixant à la date de signification de l'arrêt le point de départ du cours des intérêts au taux légal portant sur les condamnations prononcées, la cour d'appel n'a pas méconnu son office ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Amidis et Cie aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour la société Amidis et Cie.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

II est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la cessionnaire (la société AMIDIS & Cie) de titres de sociétés, de sa demande en garantie d'accroissement de passif, dirigée contre les cédants (les consorts X...), au titre d'un redressement fiscal ;

AUX MOTIFS QUE les conventions du 25 septembre 1997 fixant le prix définitif des cessions et contenant les engagements de garantie souscrits par les consorts X... étaient intervenues après un audit des comptes provisoires qui avait permis d'arrêter les bilans définitifs de cession au 31 janvier 1997 en enregistrant des provisions pour dépréciation de créances, risques et charges et de convenir corrélativement d'une diminution du prix initialement retenu ; qu'aux termes des conventions de garantie de bilan souscrites, les cédants s'étaient obligés à indemniser la société AMIDIS, sous les réserves et exclusions limitativement énumérées (provisions liées aux immobilisations, provision pour indemnité de départ en retraite et provisions pour garanties données aux clients dans le cadre du service-après-vente) de « tout passif social non comptabilisé mais existant au jour de la cession ou tout passif ayant une cause antérieure à cette date et qui se révélerait ultérieurement» et de « toute insuffisance d'actif» ; qu'ils s'étaient également engagés à indemniser le cessionnaire de « / 'intégralité de toute diminution d'actif ou accroissement de passif par rapport aux valeurs figurant dans les comptes garantis qui se révélerait postérieurement à l'établissement des comptes et qui aurait son origine, sa source ou sa cause dans des faits ou circonstances antérieurs à la date des comptes garantis, soit ceux au 31 janvier 1997»; que se trouvait ainsi exclu de la garantie tout événement ayant fait l'objet d'une provision suffisante au bilan définitif ou qui, n'ayant pas fait l'objet d'une provision, était connu d'AMIDIS au 25 septembre 1997, date de fixation des prix définitifs, l'équité interdisant qu'il soit porté atteinte à l'économie de ces conventions ; qu'il devait également être tenu compte, pour la détermination du préjudice net, de ce que les parties avaient réservé les conséquences résultant d'un redressement fiscal, en prévoyant que celles-ci ne seraient pas prises en considération, « sauf pour les amendes, pénalités, intérêts ou indemnités que le redressement pourrait entraîner », si celui-ci se traduisait par « un simple transfert de bénéfice d'un exercice à un autre » et non «par une charge définitive » ; que, sur le deuxième contrôle fiscal, la société BOULOGNE DISTRIBUTION avait, ensuite d'un avis notifié le 23 septembre 1996, fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 1993 à 1995 ; que ce contrôle, qui s'était déroulé du 2 octobre 1996 au 30 octobre 1997, avait donné lieu, le 12 décembre 1997, à la notification d'un redressement au titre du seul exercice 1994 puis, après contestation du contribuable, à un avis de mise en recouvrement du 30 septembre 2000, portant sur une somme de 24.624.689 F en principal et 5.909.925 F d'intérêts de retard; qu'il était constant qu'à la date de cession, la société AMIDIS avait connaissance du contrôle en cours ce qu'au demeurant, elle avait admis dans son dire à l'expert du 12 janvier 2011 (annexes au rapport, pièce n° 59) ; que, par suite, s'agissant des conséquences d'un événement connu lors de la cession et non provisionné, celles-ci étaient hors du champ de la garantie en sorte que la réclamation d'AMIDIS de ce chef devait être rejetée ; qu'en effet, elles ne sauraient être analysées, comme le soutenait AMIDIS, en une insuffisance d'actif couverte par la garantie, mais devaient être regardées comme un accroissement de passif exclu de la garantie pour ne pas répondre à la condition cumulative stipulée par la convention des parties, de s'être révélées postérieurement à l'établissement des comptes définitifs et d'avoir leur origine, leur source ou leur cause dans des faits ou circonstances antérieurs à la date des comptes garantis, soit ceux arrêtés au 31 janvier 1997 ;

1°/ ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes clairs et précis d'une garantie de bilan ; qu'en l'espèce, la cour, qui a estimé que les conséquences du second redressement fiscal n'étaient pas prises en charge par la garantie de bilan souscrite par les consorts X..., car l'existence du contrôle ayant débouché sur le redressement en cause était connue de la société AMIDIS & Cie au jour de cession, ce qui excluait la mobilisation de la garantie de bilan, quand la convention de garantie comportait deux mentions manuscrites concernant la prise en charge spéciale des contentieux fiscaux en cours, a dénaturé par omission les termes de la convention du 9 janvier 1997, en violation de l'article 1134 du code civil ;

2°/ ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la cour, qui a décidé que les conséquences du second redressement fiscal n'étaient pas prises en charge par la convention de garantie de bilan souscrite par les consorts X..., sans répondre aux conclusions de la société AMIDIS & Cie ayant fait valoir que la couverture des conséquences de ce second redressement découlait de deux mentions manuscrites contenues dans l'acte lui-même et de six éléments extrinsèques et postérieurs à la cession, démontrant la volonté des parties de les inclure dans le champ de la convention de garantie de bilan, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ ALORS QUE nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y avait été invitée, si les consorts X... n'avaient pas reconnu, dans la procédure d'arbitrage ayant abouti à la sentence annulée par la cour, que le second redressement fiscal entrait dans les prévisions de la garantie, de sorte qu'en faisant volte-face sur ce point, ils s'étaient contredits au détriment de la société AMIDIS & Cie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de l'estoppel.

SECOND MOYEN DE CASSATION

II est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que des condamnations prononcées contre des cédants de titres (les consorts X...) tenus à garantie de bilan, porteraient intérêts à compter de la signification de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE si la société AMIDIS sollicitait l'application des dispositions de l'article 1153 du code civil, il convenait, en équité, d'écarter l'application de cette règle de droit et de dire que les sommes dues porteront intérêts à compter de la signification du présent arrêt ;


ALORS QUE le juge, même statuant en amiable composition, doit respecter les règles tenant à l'ordre public de protection ; qu'en estimant pouvoir n'accorder d'intérêts au taux légal qu'à compter de la signification de l'arrêt, en se fondant sur l'équité, la cour violé les articles 1485 (ancien) du code de procédure civile et 1153 du code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Amiable compositeur


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.