par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 13 juillet 2017, 16-17782
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
13 juillet 2017, 16-17.782

Cette décision est visée dans la définition :
Accession




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 29 mars 2016), qu'un arrêt irrévocable du 3 juillet 2006 a déclaré parfaite la vente d'une parcelle par Mme Emilie X..., veuve de Félix Y..., et MM. André et Jean-Francis Y... à Mmes Edith Z..., veuve de Jean Y..., et Josiane Y... et MM. Dieudonné, Christian, Eric et Stéphane Y... (les consorts Y...- Z...) au prix de 78 511, 24 euros ; que Mme Emilie X... et M. Jean-Francis Y... (les consorts Y...- X...) ont assigné les consorts Y...- Z... en nullité de l'acte de dépôt des pièces à la conservation des hypothèques, en revendiquant la propriété des immeubles construits par Jean Y... sur cette parcelle, et en paiement d'une indemnité d'occupation et, subsidiairement, en paiement d'un complément de prix pour les constructions édifiées sur le terrain vendu ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que les consorts Y...- X... font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande en paiement d'un complément de prix ;

Mais attendu qu'ayant retenu, d'abord, par un motif non critiqué, que Félix Y... était, par accession, devenu propriétaire des constructions au fur et à mesure des travaux, ensuite, qu'il incombait au demandeur de présenter, dès l'instance relative à la première demande, l'ensemble des moyens qu'il estimait de nature à fonder celle-ci, enfin, sans dénaturation, que la demande initiale, qui avait donné lieu à l'arrêt du 3 juillet 2006, formée entre les mêmes parties, tendait aux mêmes fins que celle en paiement du prix du bien vendu et ayant relevé l'absence d'évolution de la situation factuelle et juridique depuis le prononcé de cette décision, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que les consorts Y...- X... étaient irrecevables à réclamer un complément de prix en raison de la présence des constructions sur la parcelle, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexé :

Attendu que les consorts Y...- Z... font grief à l'arrêt de les condamner au paiement d'une indemnité d'occupation ;

Mais attendu qu'ayant retenu, d'abord, par un motif non critiqué, que Félix Y... était, par accession, devenu propriétaire des constructions au fur et à mesure des travaux, ensuite, que les consorts Y...- Z... ne pouvaient être tenus pour propriétaires des constructions, quand bien même ils les auraient financées, la cour d'appel a répondu aux conclusions prétendument délaissées ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour les consorts Y...- X....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande des consorts Y...- X... tendant au paiement d'un complément de prix au titre des constructions édifiées sur la parcelle cédée ;

AUX MOTIFS QUE selon arrêt du 12 juillet 2000, la cour d'appel, refusant aux époux Jean Y... le bénéfice de la prescription acquisitive mais consacrant l'existence de la promesse d'achat invoquée par les consorts Y...- X..., a dit que les héritiers de Félix Y... étaient propriétaires indivis de la parcelle AW 51 mise à la disposition de Jean Y..., dit que les époux Jean Y... devraient se rendre chez Me A..., notaire, pour régulariser l'acte de vente de cette parcelle, le prix devant être fixé à dire d'expert choisi par les deux parties, à défaut d'accord, et dit que les époux Jean Y... devraient restituer la parcelle litigieuse aux consorts Y...- X... et détruire l'ensemble des constructions édifiées, s'ils n'obtempéraient pas ; que le 11 janvier 2001, le juge des référés de Vienne a commis M. B... en qualité d'expert afin de donner son avis sur la valeur de la parcelle AW 51 ; que par jugement du 23 septembre 2004, le tribunal de grande instance de Vienne a, sur saisine des époux Jean Y...- Z..., déclaré « parfaite » la vente par Emilie Y... veuve X... épouse Y... de la parcelle cadastrée section AW 0051 moyennant le paiement du prix de 78 511, 24 euros et enjoint aux consorts Y...- X... de se rendre chez Me C..., notaire, pour régulariser l'acte de vente ; que ce jugement a été confirmé par un arrêt rendu le 3 juillet 2006 par cette cour ; que le pourvoi formé contre cette décision a été rejeté par un arrêt de la Cour de cassation du 19 décembre 2007 ; que l'autorité de la chose jugée attachée aux précédentes décisions qui ont déclaré la vente parfaite moyennant un prix de 78 511, 24 euros interdit aux consorts Y...- X... de solliciter un complément de prix au titre des constructions ; qu'en effet, il existe une identité des parties présentes ou représentées à l'instance, une identité de la chose demandée et de la cause ; que les consorts Y...- X... réclament, comme dans l'instance ayant abouti à l'arrêt du 3 juillet 2006, le paiement du prix dû par les consorts Y...- Z... en contrepartie du bien vendu ; que la situation factuelle et juridique n'a pas évolué depuis le prononcé des décisions des 23 septembre 2004 et 3 juillet 2006 puisque les constructions dont le prix est réclamé ont près de cinquante ans et que les consorts Y...- X... ne font pas état d'éléments nouveaux sur les relations contractuelles entre Félix et Jean Y... qui se seraient révélés depuis ces décisions ; qu'il appartenait aux intimés de faire état, dès l'instance originaire, de la présence des constructions s'ils estimaient que celles-ci influaient sur le niveau du prix ; qu'il résulte de ce qui précède que la demande en paiement d'un complément de prix est irrecevable ; que la décision entreprise doit être infirmée en ce qu'elle a dit que le prix de 78 511, 24 euros précédemment fixé devait être complété par la valeur des constructions et commis M. D... en qualité d'expert aux fins d'évaluer la valeur vénale de ces constructions, hors valeur vénale du terrain ;

1/ ALORS QUE l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement et qu'il faut que la chose demandée soit la même ;
que la demande en paiement du prix de vente d'un terrain n'a pas le même objet que la demande en paiement du prix des constructions édifiées sur ce terrain par un tiers et qui appartenaient, par accession, au cédant du terrain ;
qu'en se bornant à relever que les époux Y...- Z... avaient été, par l'arrêt du 12 juillet 2000, enjoints de régulariser devant notaire l'acte de vente de la « parcelle » mise à disposition de Jean Y..., qu'un expert avait été, par ordonnance de référé du 11 janvier 2001, désigné pour donner son avis sur la « valeur de cette parcelle » et que, par le jugement du 23 septembre 2004 confirmé le 3 juillet 2006, la vente de la « parcelle » avait été déclarée parfaite moyennant le prix de 78 511, 24 euros, sans vérifier, par l'analyse des demandes présentées aux juridictions précédemment saisies, que ces dernières avaient eu à statuer sur le sort des constructions et que le terme de « parcelle » se rapportait au terrain et aux constructions, et non pas au seul terrain, comme le soutenaient les exposants (concl. p. 15 et suiv.), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1351 du code civil ;

2/ ALORS, en tout état de cause, QU'il résulte des énonciations de l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 3 juillet 2006 que, dans cette instance, les consorts Y...- X..., appelants, demandaient l'infirmation du jugement qui, sur la demande des époux Y...- Z..., avait déclaré parfaite la vente de la parcelle au prix de 78 511, 24 euros et enjoint les parties de se rendre chez le notaire pour régulariser l'acte de vente, et qu'ils concluaient à ce que les consorts Y...- Z... soient déboutés de cette demande pour ne pas avoir obtempéré à l'arrêt de la même cour du 12 juillet 2000 qui leur avait imparti un délai de trois mois pour faire régulariser par le notaire l'acte de vente de la parcelle au prix fixé, à défaut d'accord, par un expert choisi par les deux parties ; qu'en affirmant que, dans le cadre de cette instance, les consorts Y...- X... avaient réclamé « le paiement dû par les consorts Y...- Z... en contrepartie du bien vendu », la cour d'appel a dénaturé l'arrêt du 3 juillet 2006 et violé les articles 1134 du code civil et 4 du code de procédure civile ;

3/ ALORS QUE, s'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci, il n'est pas tenu de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur les mêmes faits ; que lorsque le juge est saisi d'une demande tendant à voir reconnaître parfaite la vente d'une parcelle et que, sur cette parcelle, ont été édifiées par un tiers des constructions qui sont devenues, par accession, la propriété du cédant, la question du sort et de la valorisation des constructions ne constitue pas un moyen à l'appui de la demande en paiement du prix de vente de la parcelle et ne peut que constituer le fondement d'une demande distincte ; qu'ayant seulement constaté que le jugement du 23 septembre 2004 confirmé le 3 juillet 2006 avait déclaré parfaite la vente de la « parcelle » moyennant un prix de 78 511, 24 euros, après estimation par expert de la « valeur de la parcelle », la cour d'appel ne pouvait pas en déduire que les consorts Y...- X... étaient tenus de faire état, dès cette instance originaire, de la présence des constructions s'ils estimaient que celles-ci influaient sur le niveau du prix ; qu'elle a violé l'article 1351 du code civil ensemble le principe de concentration des moyens.

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour les consorts Y...- Z....


Il est fait grief à l'arrêt attaqué, D'AVOIR condamné in solidum les consorts Y...- Z... à verser aux consorts Y...- X... une somme de 24 905 euros à titre d'indemnité d'occupation ;


AUX MOTIFS QUE selon arrêt du 12 juillet 2000, la cour de céans, refusant aux époux Jean Y... le bénéfice de la prescription acquisitive mais consacrant l'existence de la promesse d'achat invoquée par les consorts Y...- X..., a dit que les héritiers de Félix Y... étaient propriétaires indivis de la parcelle AW 51 mise à la disposition de Jean Y..., dit que les époux Jean Y... devraient se rendre chez Me A..., notaire à Pont de Chéruy, pour régulariser l'acte de vente de cette parcelle, le prix devant être fixé à dire d'expert choisi par les deux parties, à défaut d'accord, et dit que les époux Jean Y... devraient restituer la parcelle litigieuse aux consorts Y...- X... et détruire l'ensemble des constructions édifiées, s'ils n'obtempéraient pas ; que le 11 janvier 2001, le juge des référés de Vienne a commis M. B... en qualité d'expert afin de donner son avis la valeur de la parcelle AW 51 ; que par jugement du septembre 2004, le tribunal de grande instance de Vienne a, sur saisine des époux Jean Y...- Z..., déclaré « parfaite » la vente par Emilie Y... veuve X..., Jean-Francis Y... et André Y... à Jean Y... et Edith Z... épouse Y..., de la parcelle cadastrée section AW 0051, moyennant le paiement du prix de 78. 511, 24 € et enjoint aux consorts Y...- X... de se rendre chez Me C..., notaire, pour régulariser l'acte de vente ; que ce jugement a été confirmé par un arrêt rendu le 3 juillet 2006 par cette cour ; que le pourvoi formé contre cette décision a été rejeté par un arrêt de la Cour de cassation du 19 décembre 2007 ; que l'autorité de chose jugée attachée aux précédentes décisions qui ont déclaré la vente parfaite moyennant un prix de 78. 511, 24 € interdit aux consorts Y...- X... de solliciter un complément de prix au titre des constructions ; qu'en effet, il existe une identité des parties présentes ou représentées à l'instance, une identité de la chose demandée et de la cause ; que les consorts Y...- X... réclament, comme dans l'instance ayant abouti à l'arrêt du 3 juillet 2006, le paiement du prix dû par les consorts Y...- Z... en contrepartie du bien vendu ; que la situation factuelle et juridique n'a pas évolué depuis le prononcé des décisions des 23 septembre 2004 et 3 juillet 2006 puisque les constructions dont le prix est réclamé ont près de cinquante ans et que les consorts Y...- X... ne font pas état d'éléments nouveaux sur les relations contractuelles entre Félix et Jean Y... qui se seraient révélés depuis ces décisions ; qu'il appartenait aux intimés de faire état, dès l'instance originaire, de la présence des constructions s'ils estimaient que celles-ci influaient sur le niveau du prix ; qu'il résulte de ce qui précède que la demande en paiement d'un complément de prix est irrecevable ; que la décision entreprise doit être infirmée en ce qu'elle a dit que le prix de 78. 511, 24 € précédemment fixé devait être complété par la valeur des constructions et commis M. D... en qualité d'expert aux fins d'évaluer la valeur vénale de ces constructions, hors valeur vénale du terrain ; que les consorts Y...- Z... arguent de la prescription de la demande en paiement d'une indemnité d'occupation au motif que le point de départ de la prescription doit être fixé au 11 février 2003 en vertu du principe de concentration des moyens ; que la demande en paiement d'une indemnité d'occupation a un objet radicalement différent de la demande en paiement du prix de vente de la parcelle AW 51 qui a été examinée dans l'instance ayant abouti à l'arrêt du 3 juillet 2006 ; qu'il en résulte qu'il convient de se placer au 24 septembre 2009, date de l'assignation par laquelle Emilie X... veuve Y... et Jean-Francis Y... ont introduit leur action en paiement d'une indemnité d'occupation, pour apprécier la prescription de cette action ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont déclaré l'action recevable pour la période du 24 septembre 2004 au 3 juillet 2006 ; que les appelants n'invoquent aucune convention qui aurait réglé le sort des constructions édifiées sur ra parcelle AW 51 et aurait différé les effets de l'accession ; qu'en conséquence, il convient de retenir que Félix Y... était, par l'effet de l'accession, devenu propriétaire des constructions au fur et à mesure des travaux ; que les consorts Y...-Z..., qui ne peuvent pas être tenus pour propriétaires des constructions, quand bien même les ont-ils financées, sont redevables d'une indemnité en compensation de l'occupation du bien d'autrui jusqu'à sa cession ; qu'il est d'une bonne administration de la justice de donner à l'affaire une solution définitive en liquidant la créance des consorts Y...- X..., même si cette question n'a pas été tranchée par les premiers juges ; que les appelants ne s'opposent d'ailleurs pas à l'évocation de l'affaire sollicitée par leurs adversaires ; que dans son rapport daté du 7 mai 2012, M. D... évalue l'indemnité d'occupation due sur la période du 24 septembre 2004 au 3 septembre 2006 à 24. 905 € ; que les consorts Y...-Z... ne formulant aucune critique à l'encontre du travail de l'expert judiciaire, l'estimation proposée par M. D..., qui repose sur une étude précise et documentée du marché locatif sur les communes de Villette d'Anthon et de Pusignan, sera entérinée par la cour ; que les consorts Y...-Z... seront condamnés à payer une somme de 24. 905 € ;


ALORS QUE toutes constructions, plantations et ouvrages sur un terrain ou dans l'intérieur sont présumés faits par le propriétaire à ses frais et lui appartenir, si le contraire n'est prouvé ; que les consorts Y...- Z... démontraient dans leurs écritures que leur auteur M. Jean Y... avait édifié de ses mains les constructions litigieuses et en déduisaient qu'aucune indemnité d'occupation n'était due (conclusions, pages 14 à 19) ; qu'en allouant toutefois aux consorts Y...- X... une indemnité d'occupation de la parcelle litigieuse telle qu'évaluée par l'expert laquelle comprenait l'occupation du bâti qui avait pourtant été édifié par les consorts Y...- Z..., sans répondre à ces écritures, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.



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Cette décision est visée dans la définition :
Accession


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.