par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 17 mars 2016, 14-26009
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
17 mars 2016, 14-26.009

Cette décision est visée dans la définition :
Propriété commerciale




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 octobre 2014), que la société Generali Vie est propriétaire de locaux commerciaux donnés à bail le 22 janvier 2004 à la Société internationale d'investissements sportifs ; que, par avenants successifs des 5 septembre 2004, 22 avril 2005, 15 mars 2006, 14 août 2006, 1er août 2011 et à effet du 15 janvier 2013, les parties sont convenues de modifier l'assiette des lieux loués en y ajoutant d'autres locaux ; que, le 14 mai 2013, la locataire a demandé la révision du loyer en application de l'article L. 145-39 du code de commerce et sa fixation à une certaine somme ;

Attendu que la société locataire fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande en révision du loyer, alors, selon le moyen :

1°/ que pour déterminer si le preneur d'un bail commercial est recevable à agir en révision de loyer à raison d'une augmentation ou d'une diminution de son loyer de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement, il convient de comparer le prix du loyer tel qu'obtenu par le jeu de la clause d'échelle mobile avec le dernier prix fixé par l'accord des parties hors indexation ; que dès lors, en énonçant, pour juger que la société SIIS développement était irrecevable à agir en révision de loyer sur le fondement de l'article L. 145-39 du code de commerce, qu'il convenait de comparer le loyer en vigueur à la demande de révision tel que résultant de la variation de la clause d'échelle mobile au loyer antérieurement fixé et éventuellement révisé d'un commun accord des parties, quel que soit le fondement de ce réajustement, la cour d'appel a violé l'article L. 145-39 du code de commerce ;

2°/ que chacun des avenants au contrat de bail du 22 janvier 2005 stipulait que « le bailleur loue au preneur une ou des surfaces complémentaires », que « cette location est consentie et acceptée moyennant un loyer principal annuel, hors taxes et hors charges précisément déterminé et correspondant à ces seules surfaces  » et précisait ensuite le montant auquel le loyer total était ainsi « porté » « avec le loyer en cours » (cf. avenant n° 1 en date du 5 septembre 2004, avenant n° 2 en date du 22 avril 2005 avenant n° 3 en date du 15 mars 2006, avenant n° 4 en date du 14 août 2006, avenant n° 5 en date du 1er août 2011 et avenant n° 6, reprenant le bail verbal du 15 janvier 2013) ; qu'en relevant, pour dire que le loyer précédemment fixé contractuellement à prendre en compte pour apprécier la variation du loyer, au sens de l'article L. 145-39 du code de commerce, était le montant mentionné dans le dernier avenant précédant la demande de révision, que chaque avenant constituait autant de fixations conventionnelles du loyer total du bail, peu important qu'il soit écrit que le loyer total soit porté et non fixé à ladite somme, et que les parties étaient clairement convenues lors de la signature de chaque avenant de l'augmentation du loyer total du bail, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de chacun de ces avenants dont il résultait que seul le loyer afférent à chacune des surfaces complémentaires louées était fixé par les parties, le loyer total n'étant calculé que par addition mathématique, indépendante de la volonté des parties, de ce loyer avec le loyer total en cours, et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les parties étaient convenues, à chaque signature des avenants successifs, d'une extension de l'assiette du bail et d'un nouveau loyer, en considération notamment de cette extension, et que les modifications apportées par les avenants impliquaient autant de modifications conventionnelles du loyer, de sorte que la dernière modification par avenant ayant précédé la demande de révision légale devait être considérée comme le prix précédemment fixé conventionnellement au sens de l'article L. 145-39 du code de commerce, la cour d'appel, qui a constaté que la variation entre le loyer en vigueur à la date de la demande de révision et le loyer précédemment fixé conventionnellement n'atteignait pas 25 %, en a exactement déduit que la demande de la société locataire était irrecevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les troisième et quatrième branches du moyen qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société internationale d'investissements sportifs ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Société internationale d'investissements sportifs et la condamne à verser la somme de 3 000 euros à la société Generali Vie ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour la Société internationale d'investissements sportifs développement

La société SIIS Développement fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande de révision de loyer sur le fondement de l'article L. 145-39 du code de commerce comme irrecevable ;

AUX MOTIFS QUE la société d'investissements sportifs fait valoir que le juge, saisi par application de l'article L. 145-39 du code de commerce, ne peut que comparer le prix résultant de l'indexation avec celui précédemment fixé à périmètre constant pour une assiette identique, que les exemples de jurisprudence citées par la bailleresse ne concernent que des cas de retraits de locaux et non d'adjonctions, ce qui est différent du cas d'espèce, que le prix fixé contractuellement à l'origine n'a pas été modifié par les avenants successifs, qu'aucun des avenants n'a opéré de novation du contrat d'origine, que le loyer dont la révision est sollicitée s'entend du loyer d'origine augmenté des loyers postérieurs, hors de toute variation due à l'échelle mobile, que c'est par une dénaturation des termes clairs des avenants que la société Generali Vie prétend qu'un nouveau loyer contractuel a été fixé à chaque avenant lequel ne fixe un nouveau loyer que pour la nouvelle surface, de manière autonome et distincte qui n'emporte pas novation des conditions du bail initial, que l'indication dans chacun des avenants que le prix du loyer total est porté à une certaine somme par la simple addition du loyer de l'avenant ne se confond pas avec la volonté des parties de fixer un nouveau loyer, que toute appréciation contraire reviendrait à considérer que du seul fait de la signature d'un avenant se bornant à constater le montant du loyer total, le preneur aurait manifesté sa volonté de fixer un nouveau prix du loyer ; qu'or, pour apprécier si les conditions de la variation prévue à l'article L. 145-39 du code de commerce sont remplies, il convient de comparer le loyer en vigueur à la date de la demande de révision tel que résultant de la variation de la clause d'échelle mobile au loyer antérieurement fixé, ce qui n'impose pas nécessairement de rechercher le prix d'origine, le loyer à prendre en considération étant celui ayant été éventuellement révisé d'un commun accord des parties, quelque soit le fondement de ce réajustement ; que si en l'espèce, chaque avenant successif prévoit dans des termes identiques le loyer afférent à la surface adjointe par la mention que « cette location est consentie et acceptée moyennant un loyer annuel en principal hors taxes et hors charges » d'un certain montant, il contient également dans la suite immédiate et de manière tout aussi identique l'indication que le « loyer total » est porté à compter de la date d'effet de l'avenant à une certaine somme, ce qui constitue autant de fixations conventionnelles du loyer du bail, peu important qu'il soit écrit que le loyer total est « porté » au lieu de « fixé » ; qu'il est ainsi vainement soutenu que chaque avenant aurait un caractère autonome par rapport à la fixation du loyer initial ou encore par rapport aux avenants précédents alors que sont rappelés en préambule de chaque signature d'un nouvel avenant le bail fixant le bail initial et les avenants successivement intervenus ayant eu pour effet de modifier le loyer total ; que le moyen tiré de la novation à laquelle n'aurait pas consenti la locataire est tout aussi inopérant, les parties étant clairement convenues à chaque signature d'une extension de l'assiette du bail et de l'augmentation corrélative tant du loyer afférent à cette extension que du loyer total, les autres dispositions du bail, à l'exclusion du loyer, continuant à s'appliquer ; qu'il s'ensuit que les modifications successivement apportées à l'assiette du bail par les avenants impliquent autant de modifications conventionnelles du loyer de sorte que la dernière modification par avenant ayant précédé la demande de révision légale doit être considérée comme le prix précédemment fixé conventionnellement au sens de l'article L. 145-39 du code de commerce sans que les parties puissent se référer au prix initial ; qu'il n'est pas contesté que la variation entre le loyer en vigueur à la date de la demande de révision et le loyer précédemment fixé conventionnellement (que ce soit le 1er août 2011 à compter du 1er juillet 2011 ou en 2013 à compter du 15 janvier) n'est pas de 25% et que les conditions de l'application de l'article L. 145-39 ne sont pas réunies à la date de la demande de révision ; que celle-ci est en conséquence irrecevable, contrairement à ce qui a été jugé en première instance ;

1°) ALORS QUE pour déterminer si le preneur d'un bail commercial est recevable à agir en révision de loyer à raison d'une augmentation ou d'une diminution de son loyer de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement, il convient de comparer le prix du loyer tel qu'obtenu par le jeu de la clause d'échelle mobile avec le dernier prix fixé par l'accord des parties hors indexation ; que dès lors, en énonçant, pour juger que la société SIIS Développement était irrecevable à agir en révision de loyer sur le fondement de l'article L. 145-39 du code de commerce, qu'il convenait de comparer le loyer en vigueur à la demande de révision tel que résultant de la variation de la clause d'échelle mobile au loyer antérieurement fixé et éventuellement révisé d'un commun accord des parties, quel que soit le fondement de ce réajustement, la cour d'appel a violé l'article L. 145-39 du code de commerce ;



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Cette décision est visée dans la définition :
Propriété commerciale


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.