par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 12 mai 2015, 14-16208
Dictionnaire Juridique

site réalisé avec
Baumann Avocats Droit informatique

Cour de cassation, chambre commerciale
12 mai 2015, 14-16.208

Cette décision est visée dans la définition :
Chose jugée




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu les articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, se prévalant du non-règlement de redevances par M. X..., locataire-gérant de son fonds de commerce, M. Y... l'a assigné en constatation de la résiliation du contrat en application de la clause résolutoire à compter du 15 décembre 2005 et en paiement des redevances jusqu'à la libération des lieux par M. X... fin août 2006 ; qu'un arrêt devenu irrévocable du 7 mars 2007 a rejeté la demande de redevances pour la période postérieure à la résiliation du contrat au motif que M. Y... aurait dû former une demande en dommages-intérêts ; que celui-ci a de nouveau assigné M. X... en réparation du préjudice résultant de son occupation des lieux entre le 15 décembre 2005 et le 1er septembre 2006 ;

Attendu que pour écarter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 7 mars 2007, soulevée par M. X..., et le condamner à payer à M. Y... des dommages-intérêts, l'arrêt retient que la règle de la concentration des moyens n'a pas lieu d'être appliquée puisque la demande de M. Y... repose sur un autre fondement que la précédente ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci et qu'elle constatait que, comme la demande originaire, la demande dont elle était saisie, formée entre les mêmes parties, tendait aux mêmes fins de paiement au titre de l'occupation par M. X... des locaux de M. Y... postérieurement à la résiliation du contrat de location-gérance, peu important que celui-ci ait invoqué un fondement juridique différent, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement condamnant M. X... à payer à M. Y... la somme de 67 576 euros, à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 5 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement qui avait condamné M. X... à payer à M. Y... la somme de 67.576 euros à titre de dommages-intérêts, après avoir écarté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 7 mars 2007 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « c'est par des motifs que la cour approuve que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée et de la règle de la concentration des moyens, en retenant à juste titre que la demande repose sur un autre fondement que les demandes sur lesquelles il a été précédemment statué ; qu'en effet, par l'arrêt du 7 mars 2007, M. Y... a été débouté d'une partie de sa demande en paiement des redevances de location-gérance qu'il estimait lui être dues ; qu'il agit à présent en réparation du préjudice né de l'occupation des locaux par M. X..., sans droit ni titre, postérieurement à la résiliation du contrat de location-gérance ; que la demande n'est pas la même ; qu'elle est fondée sur une autre cause ; qu'il est par ailleurs de principe que s'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance initiale relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci, il n'est pas tenu de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur les mêmes faits ; que la règle de la concentration des moyens invoquée par M. X... est sans application en l'espèce ; que la demande de M. Y... est recevable » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' « il n'est pas contesté que M. X... est resté dans la boutique faisant l'objet de la location-gérance au-delà du 15 décembre 2005, date d'acquisition de la condition résolutoire, validée par la Cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 7 mars 2007, et cela jusqu'au 4 septembre 2006 ; que dans ledit arrêt, la Cour relève : « considérant que M. Y... sollicite l'allocation d'une somme globale de 122.206,67 euros, qu'il inclut dans ce total les redevances dues jusqu'au mois d'août 2006 ; que la redevance n'était due que dans le cadre de l'exécution du contrat ; que celui-ci a pris fin le 15 décembre 2005 ; qu'à compter de cette date, M. X... n'était plus redevable d'une somme à ce titre ; qu'il est pas présenté de demande en dommages-intérêts ; qu'il convient de rejeter la demande excédant la somme définie plus haut ; que dans ce considérant, la cour constate très explicitement qu'il n'a pas été demandé de dommages-intérêts et que c'est la raison de ce rejet partiel ; qu'il n'y a donc pas autorité de la chose jugée pour une demande présentée sur un fondement qui n'avait pas été présenté précédemment, et sur lequel le tribunal de céans ou la cour aurait donc déjà statué ; que M. Y... ne pouvait formuler sa demande de dommages-intérêts qu'à partir du moment où il était statué de façon définitive sur la demande de résiliation du contrat de location-gérance, ce qui n'est intervenu que le 7 mars 2007 ;


ALORS QU' il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci ; que l'obligation de concentration des moyens fait obstacle à ce que soit introduite une nouvelle action tendant aux mêmes fins, peu important que soit invoqué un fondement juridique différent dès lors qu'il y a identité d'objet de la demande ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a expressément constaté que l'arrêt du 7 mars 2007 avait débouté M. Y... d'une partie de sa demande en paiement de la somme totale de 122.206,67 euros sollicitée au titre des redevances de location-gérance qu'il estimait dues jusqu'au 1er septembre 2006, aux motifs que le contrat avait été résilié le 15 décembre 2005 et qu'il aurait dû présenter une demande de dommages-intérêts, et non une demande de paiement de redevances, pour les sommes relatives à la période allant du 15 décembre 2005 jusqu'au 1er septembre 2006, date à laquelle M. X... avait quitté les lieux ; que la Cour d'appel a ensuite relevé que dans la présente instance, M. Y... sollicitait la condamnation de M. X... à lui payer la somme de 67.576 euros en réparation du préjudice résultant de l'occupation des lieux par M. X... postérieurement à la résiliation du contrat de location-gérance, entre le 15 décembre 2005 et le 1er septembre 2006 ; qu'il résultait de ces constatations que la nouvelle action de M. Y... tendait aux mêmes fins que celle ayant donné lieu à l'arrêt du 7 mars 2007, celui-ci sollicitant, sur le fondement délictuel, le complément des sommes qui ne lui avaient pas été allouées lors de la première procédure sur le fondement contractuel ; qu'en conséquence, la seule différence de fondement juridique était insuffisante à écarter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 7 mars 2007 ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile.



site réalisé avec
Baumann Avocat Contentieux informatique

Cette décision est visée dans la définition :
Chose jugée


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.