par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 27 mai 2009, 08-14376
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
27 mai 2009, 08-14.376

Cette décision est visée dans la définition :
Enclave




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 13 février 2008), que MM Pierre, François et Michel X... se sont partagé le fonds dont ils étaient propriétaires indivis, laissant en indivision le lot B 1125 ; que la parcelle B 1123 a été attribuée à M. François X..., la parcelle B 1124 à M. Pierre X..., la parcelle B 1122 à M. Michel X... lequel l'a vendue à M. Jean-Pierre Y... ainsi que ses droit indivis sur la parcelle B 1125 ; qu'il est mentionné dans l'acte de vente que la parcelle B 1122 est grevée d'une servitude conventionnelle de forage dont M. Jean-Pierre Y..., M. François X... et M. Pierre X... sont chacun propriétaire du tiers/indivis ; que le forage se situe sur la parcelle B 1593 détachée de la parcelle B 1122 devenue B 1592 et 1593 ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. François X... et M. Jean-Pierre Y... font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande relative à l'aggravation de la servitude de "puisage", alors, selon le moyen, que la servitude suppose que le fonds servant et le fonds dominant appartiennent à des propriétaires différents ; qu'une servitude peut exister entre un fonds propre et un fonds indivis, ces fonds appartenant à des propriétaires différents ; qu'en l'espèce, en énonçant "qu'il n'est donc pas possible de reconnaître à des propriétaires indivis d'un fonds un droit de passage sur ce même fonds", sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, s'il n'existerait pas une servitude de passage entre le fonds indivis 1125 et les fonds propres 1592, 1123 et 1124, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 637 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les parties à l'instance étaient propriétaires indivis de la parcelle B 1125 et exactement retenu qu'une servitude étant une charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire, il n'était pas possible de reconnaître à des propriétaires indivis d'un fonds un droit de passage sur ce même fonds, la cour d'appel, qui en a déduit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que M. François X... ne pouvait se prévaloir d'une servitude de passage sur le fonds indivis, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Mais, sur le premier moyen :

Vu l'article 565 du code de procédure civile ;

Attendu que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande de M. François X... et M. Jean-Pierre Y... relative à l'aggravation de la servitude de puisage, l'arrêt retient que la demande visant à voir interdire aux nus-propriétaires, usufruitiers et occupants de la parcelle B 1747 d'user du forage situé sur la parcelle B 1593, n'a pas été soumise au premier juge, qu'elle ne tend pas aux mêmes fins que la demande principale, qu'elle n'en est ni l'accessoire, ni la conséquence ou le complément ;

Qu'en statuant ainsi alors que les demandes présentées en appel tendaient aux mêmes fins que celles présentées aux premiers juges, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable la demande relative à l'aggravation de la servitude de puisage, l'arrêt rendu le 13 février 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bastia, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour M. François X... et M. Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de François X... et Jean-Pierre Y... relative à l'aggravation de la servitude de puisage ;

Aux motifs que, « Sur l'aggravation de la servitude de puisage:
Attendu que la demande visant à voir interdire aux nus-propriétaires, usufruitiers et occupants de la parcelle cadastrée section B n° 1747 d'user du forage situé sur la parcelle B n° 1593 n'a pas été soumise au premier juge; qu'elle ne tend pas aux mêmes fins ; qu'elle n'en est ni l'accessoire, la conséquence ou le complément ; qu'elle est donc irrecevable ».

Aux motifs adoptés qu'« il n'est pas davantage démontré, la pièce n'étant pas produite, que l'acte de division de la parcelle B 1122 dédie la parcelle B 1593 à l'alimentation en eau des seuls terrains B 1123, B 1124 et B 1592 appartenant respectivement à François X..., Pierre X... et Jean-Pierre Y.... Cette affectation exclusive ne saurait se déduire de la provenance originelle de ces terrains d'un même fonds indivis, ne pouvant, être établie que par convention entre les coïndivisaires. La circonstance qu'un rapport géologique de 1976 sur le projet de lotissement familial évoque l'hypothèse d'un forage commun n'est pas de nature à démontrer que les frères X... entendaient réserver cette parcelle indivise à la viabilisation des seuls terrains issus de la division de 1974. Dans ces conditions, le demandeur ne démontre pas que l'utilisation de ces parcelles indivises serait exclusivement réservée aux lots B 1123, 1124 et 1592 et par suite, que Pierre X..., en utilisant l'accès et le forage au profit d'un autre terrain, en ferait un usage contraire à leur destination. Il est enfin relevé que François X... ne soutient pas que son frère affecterait les fonds indivis à un autre usage que l'alimentation, en eau et l'accès à sa propriété privée. Il en ressort que ne peut être reproché à Pierre X... aucun abus de son droit de propriétaire indivis et que François X... sera débouté de sa demande en interdiction pour Pierre X... d'utiliser le forage pour alimenter sa parcelle B 1747 ».

Alors que, selon l'article 5 du nouveau Code de procédure civile, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé ; qu'une demande n'est pas nouvelle si elle tend aux mêmes fins, nonobstant le changement de fondement juridique ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions récapitulatives de première instance, Monsieur François X... demandait au Tribunal d'interdire à Pierre X... et à son épouse d'utiliser le forage sis sur le lot B 1593 destiné aux seuls parcelles B 1123, B 1124 et B 1592 ; que le Tribunal a rejeté, au fond, cette demande au motif qu'il ne serait pas démontré que ledit forage serait destiné à l'alimentation en eau des seuls terrains B 1123, B 1124 et B 1592 ; qu'en appel, cette prétention figurait de nouveau dans les conclusions récapitulatives de François X... et J.-P. Y... ; qu'en déclarant, néanmoins, cette demande irrecevable car « nouvelle », la Cour d'appel a, nécessairement, violé les articles 5, 565 et 566 du nouveau Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de François X... et Jean-Pierre Y... relative à l'aggravation de la servitude de puisage ;

Aux motifs que, « Attendu que Français X... soutient que la parcelle cadastrée B 1125 est constitutive d'une servitude de passage dont l'assiette a été déplacée et qui a été aggravée; Mais attendu qu'une servitude est une charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire; qu'il n'est donc pas possible de reconnaître à des propriétaires indivis d'un fonds un droit de passage sur ce même fonds; Attendu en l'espèce que les parties à l'instance sont propriétaires indivis de la parcelle cadastrée B 1125; que François X... ne peut donc se prévaloir d'une servitude de passage sur ce fonds; que ses demandes étant toutes fondées sur l'existence d'une telle servitude doivent, dès lors, être rejetées; que le jugement déféré doit donc être confirmé sur ce point ».


Alors que, la servitude suppose que le fonds servant et le fonds dominant appartiennent à des propriétaires différents ; qu'une servitude peut exister entre un fonds propre et un fonds indivis, ces fonds appartenant à des propriétaires différents ; qu'en l'espèce, en énonçant « qu'il n'est donc pas possible de reconnaître à des propriétaires indivis d'un fonds un droit de passage sur ce même fonds », sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, s'il n'existerait pas une servitude de passage entre le fonds indivis 1125 et les fonds propres 1592, 1123 et 1124, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 637 du Code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Enclave


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.