par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 31 mai 2017, 15-29226
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Cour de cassation, chambre sociale
31 mai 2017, 15-29.226

Cette décision est visée dans la définition :
Gratification




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, ordonne la jonction des pourvois n° B 15-29.225 à D 15-29.227 et Q 15-29.237 à Y 15-29.245 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. X... et onze autres salariés de l'association BTP CFA Picardie ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé l'existence d'une situation de souffrance morale constatée par le médecin du travail, la cour d'appel qui a fait ressortir l'existence pour les travailleurs d'un motif raisonnable de penser que cette situation présentait un danger grave ou imminent pour leur vie ou leur santé, a légalement justifié sa décision ;

Sur le quatrième moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'après avoir constaté que l'employeur avait manqué à ses obligations et ainsi causé un dommage aux salariés, la cour d'appel a, sans dénaturation, caractérisé le préjudice subi par l'évaluation qu'elle en a fait ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit et partant irrecevable en sa seconde branche, ne peut être accueilli ;

Mais, sur le premier moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'un rappel d'indemnité de congés payés l'arrêt retient qu'il ne peut être valablement soutenu que la prime de gratification perçue pour une année entière ne devait être versée et intégrée dans l'assiette de calcul des congés payés qu'après déduction de la part correspondant à la période de congés payés ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'employeur qui soutenait qu'en réalité la gratification était calculée de façon plus favorable que les prévisions de l'accord collectif et intégrait les périodes de congés payés, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et attendu que, conformément à l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur le premier moyen, du chef du rappel d'indemnité de congés payés entraîne la cassation par voie de conséquence sur le second moyen du chef des dommages-intérêts pour résistance abusive ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'association BTP CFA Picardie à payer aux salariés un rappel d'indemnité de congés payés et des dommages-intérêts pour résistance abusive et déboute l'employeur de ses demandes en répétition de l'indû, les arrêts rendus le 27 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E... et Mmes F..., G..., H... et I... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits aux pourvois par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'association BTP CFA Picardie.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné l'association BTP CFA Picardie aux dépens et à payer à chacun des salariés défendeurs aux pourvois une somme au titre de l'indemnité de congés payés, des dommages et intérêts pour résistance abusive outre une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR débouté l'association BTP CFA Picardie de l'ensemble de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE selon les dispositions de l'accord collectif du 22 mars 1982 : « Pour une année de travail effectif ou assimilé réalisé au cours de la période de référence légale (du 1er juin de l'année précédente au 31 mai de l'année en cours), le personnel enseignant, d'éducation et d'animation bénéficie au total de soixante-dix jours ouvrables ou non de congés. Ces congés se composent : - d'une part des congés légaux, - d'autre part, de congés supplémentaires accordés à chaque membre du personnel enseignant, d'éducation et d'animation en raison de sa participation à la mission d'enseignement assumée par le CFA. Les congés annuels du personnel enseignant, d'éducation et d'animation sont fixés comme suit : a) Congés d'été Les congés sont pris du 13 juillet au soir au 1er septembre au matin. Par convention, les congés payés légaux se situent obligatoirement à l'intérieur des congés d'été. b) Congés d'hiver et de printemps * à l'occasion des fêtes de fin d'année : Deux semaines de sept jours ouvrables ou non qui seront la semaine comprenant le 25 décembre et la semaine comprenant le 1er janvier. * à l'occasion des fêtes de Pâques : Une semaine de sept jours ouvrables ou non qui sera fixée par l'association gestionnaire en fonction des vacances scolaires de l'Académie. Les congés prévus aux paragraphes "a" et "b" ne pourront, par ailleurs, se cumuler avec les Jours de congés supplémentaires, notamment d'ancienneté, accordés par la convention collective ni avec une éventuelle augmentation des congés légaux ou conventionnels. Tout congé supplémentaire ou toute augmentation de congés qu'imposerait la loi ou la convention collective s'imputera donc d'abord sur les congés accordés au présent article » ; que selon les dispositions de l'article L.3141-22 du code du travail, lorsque la durée du congé diffère de celle qui est prévue à l'article L.3141-3 du même code, l'indemnité de congés payés est calculée, à proportion de la durée du congé effectivement dû selon la règle du 1/10ème de la rémunération totale perçue par le salarié au cours de la période de référence, à moins qu'elle ne s'avère moins favorable que celle qui aurait été perçue pendant la période de congés si le salarié avait continué à travailler ; que de la lecture combinée des dispositions qui précèdent, résulte pour l'employeur l'obligation, afin de permettre à chaque salarié de bénéficier de l'indemnisation la plus favorable, de calculer l'indemnité de congés payés due à l'intéressé sur la base du rapport 60/30ème, ce qui semble être admis par l'association BTP CFA Picardie, mais cela sans qu'il y ait lieu, ainsi que le soutient cette dernière, de déduire de cette indemnité la rémunération des jours fériés inclus dans la durée des congés payés ; que s'agissant de l'assiette de calcul de l'indemnité litigieuse, que selon les dispositions de l'article 208 de l'accord collectif du 22 mars 1982 : « Chacun des membres du personnel enseignant, d'éducation et d'animation reçoit : a) une gratification de fin d'année dont le montant est fixé à 50 % du salaire brut de base servi à l'intéressé au cours du dernier mois de l'année civile et payable avec le salaire de décembre au prorata du nombre de mois de travail effectif ou assimilé assuré dans l'établissement (période de référence : 1er janvier - 31 décembre). En cas de départ avant décembre, le salaire de référence pour le calcul au prorata sera celui du dernier mois complet de présence. b) une prime de vacances dont le montant est fixé à 30 % du salaire brut de base servi à l'intéressé au titre du mois de juillet, au prorata du nombre de mois de travail effectif ou assimilé assuré dans l'établissement (période de référence : 1er juillet - 31 août). Cette prime est payable avec le salaire de juillet. En cas de départ avant juillet, le salaire de référence pour le calcul au prorata sera celui du dernier mois complet de présence. c) Pour les salariés occupés successivement à temps complet et à temps partiel ou inversement au cours de la période de référence : La gratification de fin d'année et la prime de vacances seront calculées proportionnellement aux périodes d'emploi effectuées à temps plein et à temps partiel » ; qu'aux termes de cet article, est mal fondé le raisonnement de l'employeur concluant à un trop perçu du salarié au titre des congés payés durant la période considérée ; qu'il ne peut en effet être valablement soutenu que la prime de gratification perçue pour une année entière ne devait être versée et intégrée dans l'assiette de calcul des congés payés qu'après déduction de la part correspondant à la période de congés payés ; qu'ainsi, la demande reconventionnelle de l'association BTP CFA Picardie ne pourra prospérer ; que l'employeur ne démontre pas que n'aurait eu pour but que de gonfler de manière artificielle le reliquat de congés payés sollicités, la méthode utilisée pour le calcul de ces derniers, et ayant consisté en la comparaison des sommes versées en application de la règle du maintien du salaire et celles qui auraient dû être versées sur la base du rapport 60/30ème, sans déduction des jours fériés tombant pendant les congés et après inclusion de la prime conventionnelle de fin d'année dans l'assiette de calcul ; qu'en tout état de cause, le décompte des sommes qu'il prétend lui être dues, tel qu'il est présenté chaque salarié, ne contrevient pas aux principes légaux et conventionnels rappelés par le présent arrêt ; qu'en conséquence qu'il y aura lieu de confirmer en son principe la décision du conseil de prud'hommes d'accorder au salarié le rappel de congés payés sollicités, sauf à le réactualiser dans son quantum ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE vu l'article L 3141-3 du code du travail, vu l'article L 3141-22 du même code, l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982 indique « pour une année de travail effectif ou assimilé réalisé au cours de la période de référence légale (du 1er juin de l'année précédente au 31 mai de l'année en cours), le personnel enseignant d'éducation et d'animation bénéficie au total de soixante-dix jours ouvrables ou non de congés » ;

1) ALORS QU'un élément de salaire, calculé pour l'année entière, périodes de travail et de congé confondues sans être affecté par le départ du salarié en congé, n'entre pas dans l'assiette de calcul des indemnités de congés payés ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que si l'article 208 de l'accord collectif du 22 mars 1982 prévoyait une gratification de fin d'année payée au prorata du nombre de mois de travail effectif ou assimilé, il avait en pratique, et par faveur, payé la gratification de fin d'année sans proratisation, pour l'année entière, sans que son montant soit affecté par la prise des congés, si bien qu'elle ne pouvait pas entrer dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés (notamment conclusions d'appel page 20 et page 12) ; que cependant la cour d'appel a validé le calcul des salariés réalisé « après inclusion de la prime conventionnelle de fin d'année dans l'assiette de calcul [des congés payés] » (arrêt page 7, § 6), sans s'intéresser aux conditions dans lesquelles l'employeur avait effectivement payé cette gratification, après avoir tout au plus rappelé la lettre de l'article 208 susvisé et relevé qu'il ne pouvait « être valablement soutenu que la prime de gratification perçue pour une année entière ne devait être versée et intégrée dans l'assiette de calcul des congés payés qu'après déduction de la part correspondant à la période de congés payés » (arrêt du dossier pilote page 7, § 4) ; qu'en admettant ainsi l'inclusion de la gratification de fin d'année dans l'assiette de calcul des congés payés sans constater que contrairement à ce que soutenait l'employeur, cette prime n'avait pas été effectivement versée pour l'année entière, périodes de travail et de congé confondues, sans être affectée par le départ en congé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982 et de l'article L. 3141-22 du code du travail ;

2) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir (conclusions d'appel page 21) que les salariés avaient, à tort, inclus dans l'assiette de calcul des congés payés des primes exceptionnelles, payées de manière discrétionnaire au titre tant des périodes de travail que des périodes de congés, si bien que leur montant n'étant pas affecté par ces congés, elles ne pouvaient être incluses dans l'assiette de calcul des congés payés ; qu'en omettant de répondre à ce moyen avant d'entériner le calcul des salariés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3) ALORS en outre QUE pour le calcul de l'indemnité de congés payés, la comparaison à opérer, entre l'indemnité calculée en application de la règle du dixième et celle calculée en application de la règle du maintien du salaire, doit être effectuée en prenant en compte les mêmes éléments de salaire dans l'assiette de calcul ; que dès lors, comme le soutenait l'employeur, si la gratification de fin d'année était incluse dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés, elle devait l'être de la même manière non seulement pour appliquer la règle du 10e, mais également pour le calcul selon la méthode du maintien de salaire ; qu'il soulignait que la comparaison opérée par les salariés pour fonder leurs demandes était fausse dès lors qu'elle ne prenait pas en compte la gratification de fin d'année dans leur calcul selon la règle du maintien de salaire (conclusions d'appel page 21) ; que cependant, la cour d'appel a validé le calcul des salariés après avoir seulement relevé qu'ils avaient opéré une comparaison « des sommes versées en application de la règle du maintien du salaire et celles qui auraient dû être versées sur la base du rapport 60/30ème, sans déduction des jours fériés tombant pendant les congés et après inclusion de la prime conventionnelle de fin d'année dans l'assiette de calcul » ; qu'en se bornant ainsi à constater que la prime conventionnelle de fin d'année avait été incluse dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés selon la méthode du 10e (sur la base du rapport 60/30ème), sans constater qu'elle avait été prise en compte pour l'application de la méthode du maintien de salaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982, portant statut du personnel des associations chargées de la gestion des CFA du bâtiment, relevant du CCCA et de l'article L. 3141-22 du code du travail ;

4) ALORS QUE même à supposer que le motif selon lequel les salariés avaient opéré une comparaison « des sommes versées en application de la règle du maintien du salaire et celles qui auraient dû être versées sur la base du rapport 60/30ème, sans déduction des jours fériés tombant pendant les congés et après inclusion de la prime conventionnelle de fin d'année dans l'assiette de calcul » puisse se lire comme affirmant que les salariés avaient pris en compte les gratifications de fin d'année, y compris pour l'application de la méthode du maintien de salaire, la cour d'appel aurait dénaturé les tableaux de calcul présentés par chaque salarié (pièces adverses n° 52 à 63), en violation du principe faisant interdiction au juge de dénaturer les pièces versées aux débats et de l'article 1134 du code de procédure civile ;

5) ALORS en outre QU'il résulte de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982, portant statut du personnel des associations chargées de la gestion des CFA du bâtiment, relevant du CCCA et de l'article L. 3141-22 du code du travail, que pour le calcul de l'indemnité de congés payés, la comparaison à opérer entre l'indemnité calculée en application de la règle du dixième et celle calculée en application de la règle du maintien du salaire, doit être effectuée sur la base du même nombre de jours de congés, sans exclusion de la rémunération des jours fériés et chômés compris dans la durée desdits congés payés ; qu'en l'espèce, l'employeur montrait précisément (conclusions page 15 et suivantes) que le calcul des salariés était erroné dès lors que pour l'application de la méthode du maintien de salaire, ils comptaient seulement les jours ouvrables pour déterminer le nombre de jours de vacances à prendre en compte, et rapportaient ce chiffre à un nombre de jours dans le mois en incluant les jours fériés ; que la cour d'appel a néanmoins validé le calcul des salariés en affirmant qu'ils avaient opéré une comparaison « des sommes versées en application de la règle du maintien du salaire et celles qui auraient dû être versées sur la base du rapport 60/30ème, sans déduction des jours fériés tombant pendant les congés » ; qu'en omettant ainsi de vérifier, bien qu'elle y était invitée (conclusions d'appel de l'employeur page 18 particulièrement), si le calcul des salariés prenait correctement en compte les jours fériés pour le calcul du maintien de salaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982 et de l'article L. 3141-22 du code du travail ;

6) ALORS QUE même à supposer que le motif selon lequel les salariés avaient opéré une comparaison « des sommes versées en application de la règle du maintien du salaire et celles qui auraient dû être versées sur la base du rapport 60/30ème, sans déduction des jours fériés tombant pendant les congés » puisse se lire comme affirmant que les salariés avaient correctement pris en compte les jours fériés parmi les jours de congés, y compris pour l'application de la méthode du maintien de salaire, la cour d'appel aurait dénaturé les tableaux de calcul présentés par chaque salarié (pièces adverses n° 52 à 63), en violation du principe faisant interdiction au juge de dénaturer les pièces versées aux débats et de l'article 1134 du code de procédure civile ;

7) ALORS QU'en tout état de cause, compte tenu de l'imprécision de sa motivation, qui ne permet pas de s'assurer que les calculs des salariés, qu'elle a entérinés, avaient été correctement réalisés conformément aux règles découlant de l'article 209 de l'accord collectif du 22 mars 1982 et de l'article L. 3141-22 du code du travail, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné l'association BTP CFA Picardie aux dépens et à payer à chacun des salariés défendeurs aux pourvois des dommages et intérêts pour résistance abusive outre une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE si on ne peut contester à quiconque le droit d'ester en justice pour défendre ce qu'il pense être ses droits ou ses intérêts, il est d'évidence, en l'espèce, que l'association BTP CFA Picardie a tardé à s'incliner devant une jurisprudence désormais constante en ce qu'elle reconnaît les droits des salariés tels que résultant des dispositions conventionnelles régissant leur statut ; que le maintien de sa position par l'employeur a eu pour effet de retarder le règlement des sommes auxquelles chaque salarié était légitimement en droit de prétendre ; que ce retard a causé à l'intéressé un indéniable préjudice, lequel sera réparé par l'attribution de dommages et intérêts ;

1) ALORS QUE la cassation sur le fondement du premier moyen emportera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné l'employeur à payer des sommes à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, par application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE la condamnation à payer des dommages et intérêts pour résistance abusive suppose une faute faisant dégénérer en abus le droit d'ester en justice ; qu'en l'espèce cependant, la cour d'appel s'est bornée à affirmer que l'association BTP CFA Picardie a tardé à s'incliner devant une jurisprudence désormais constante en ce qu'elle reconnaît les droits des salariés tels que résultant des dispositions conventionnelles régissant leur statut et que le maintien de sa position par l'employeur a eu pour effet de retarder le règlement des sommes auxquelles chaque salarié était légitimement en droit de prétendre ; qu'en statuant par des motifs impropres à établir une faute de l'exposante caractérisant un abus, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné l'association BTP CFA Picardie aux dépens et à payer à chacun des salariés défendeurs aux pourvois un rappel de salaire au titre d'une retenue jugée abusive outre une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE selon les dispositions de l'article L.4131-1 du code du travail : « Le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection. Il peut se retirer d'une telle situation. L'employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une défectuosité du système de protection » ; que selon les conclusions de l'association BTP CFA Picardie, l'exercice de son droit de retrait par chaque salarié aurait été essentiellement motivé par la mise à pied à titre conservatoire infligée à M. J..., enseignant, pour avoir insulté et exercé des violences sur un jeune apprenti ; qu'en réalité, les salariés défendeurs au pourvoi ainsi que certains de leurs collègues, ont, le 16 juin 2011, justifié le retrait de leur poste de travail dans les termes suivants : « Suite à la décision de l'employeur de sanctionner lourdement M. J... sans l'avoir écouté, et constatant la multiplication des situations difficiles dues à la dégradation du comportement des jeunes, nous nous trouvons dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent pour notre santé. À la situation de stress permanent lié à notre fonction s'ajoute le refus caractérisé d'écoute et de soutien de notre Direction. Nous constatons que seule la parole de l'apprenti est prise en compte et que celui-ci peut en abuser à sa guise pour se venger d'un formateur. Pour ces raisons, et après vous avoir alerté, nous vous faisant part de notre volonté d'exercer notre droit de retrait en ce qui concerne le face à face avec les apprentis et vous demandons au plus vite de réunir un CHSCT extraordinaire » ; que si la mesure dont a fait l'objet M. J... a sans doute joué le rôle de catalyseur, les pièces du dossier révèlent une situation antérieure particulièrement difficile au sein de l'établissement de Laon ; qu'en effet, par courtier du 22 juin 2011, le docteur K..., Médecin du travail en charge de la surveillance des salariés du CFA BTP de Laon, a appelé l'attention du Président de cet établissement sur « l'émergence d'une souffrance morale chez un certain nombre de salariés de cette structure » ; que ce praticien indiquait avoir été à plusieurs reprises « sollicité par les délégués du personnel pour des situations de souffrance morale dont j'ai pu vérifier la véracité à l'occasion des visites médicales et périodiques occasionnelles » ; qu'il précisait « avoir alerté le CHSCT et proposé une enquête sur le stress au travail », laquelle, réalisée au cours du premier trimestre 2010, avait conclu à « l'existence d'un risque de stress lié à un ressenti par les membres du personnel d'un manque de soutien de l'encadrement et à moindre degré de leurs collègues » ; que le docteur K... terminait son propos en recommandant au destinataire de sa missive « de réagir en urgence afin de faire cesser cette situation que je qualifierai de tension extrême » ; que si cette « tension extrême » résultait pour partie des événements récents, il n'en demeure pas moins que le malaise était depuis plusieurs mois manifestement persistant ; que dans un tel contexte, peut être comprise la réaction de salariés qui s'estimant déjà peu soutenus par leur Direction, se sont soustraits, en exerçant leur droit de retrait, à ce qu'ils ont estimé constituer la potentialité d'un danger grave et imminent pour leur santé et leur sécurité ; que dans les circonstances ci-dessus décrites, aucun salarié ne pouvait pas être sanctionné ; qu'il est fondé à solliciter la part de salaire qui lui a été retenue ;

ALORS QUE l'exercice par un salarié de son droit de retrait suppose qu'il ait un motif raisonnable de penser que la situation de travail présentait un danger grave et imminent pour sa sécurité et pour sa santé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a seulement relevé que « peut être comprise » la réaction des salariés qui se sont soustraient « à ce qu'ils ont estimé constituer la potentialité d'un danger grave et imminent pour leur santé et leur sécurité » ; qu'en statuant ainsi sans constater qu'en plus de pouvoir être comprise, la réaction des salariés était fondée sur un motif raisonnable de penser qu'un danger grave et imminent existait présentement qui n'était pas qu'une simple potentialité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.4131-1 et suivants du code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné l'association BTP CFA Picardie aux dépens et à payer à chacun des salariés défendeurs aux pourvois des dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité outre une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE selon les dispositions de l'article L.4132-3 du code du travail : « En cas de divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, notamment par arrêt du travail, de la machine ou de l'installation, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est réuni d'urgence, dans un délai n'excédant pas vingt-quatre heures... » ; qu'il résulte des pièces du dossier que les exigences de cet article n'ont pas été satisfaites ; qu'en effet, l' employeur, bien qu'ayant, par courrier du, clairement exprimé sa désapprobation de l'exercice par certains salariés de leur droit de retrait qu'il a qualifié de « motif futile », n'en a pas pour autant convoqué l'instance précitée ; qu'en raison de la divergence de points de vue entre et l'employeur et les salariés sur le caractère justifié de l'exercice de leur du droit de retrait par ces derniers, l'employeur, en sa qualité de chef d'entreprise et de président du CHSCT, devait prendre l'initiative de convoquer la réunion de cette instance dans les délais prévus ; que si la violation d'un intérêt collectif ne peut en soi ouvrir droit à indemnisation individuelle, il n'en demeure pas moins que par sa carence, l'employeur a causé un préjudice à chacun des salariés ; qu'eu égard à sa carence reconnue lors de l'audience, il y aura lieu de condamner l'association BTP CFA Picardie à verser à chaque salarié les dommages et intérêts sollicités à hauteur de la somme indiquée au dispositif ;

1) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas méconnaitre les termes du litige tels qu'ils sont fixés par les prétentions respectives des parties ; que dans leurs conclusions oralement soutenues à l'audience (arrêt page 4), les salariés sollicitaient des dommages et intérêts, non pas à raison de l'absence de réunion du CHSCT, mais en se prévalant d'un manquement de l'employeur à ses obligations de prévention caractérisé par son inertie à la suite à la lettre du médecin du travail du 22 juin 2011 et de la décision du CHSCT du 29 juin 2011 (conclusions d'appel adverses page 17) ; qu'en allouant des dommages et intérêts aux salariés au prétexte que l'employeur n'avait pas convoqué le CHSCT à la suite du droit d'alerte comme l'aurait exigé selon elle l'article L.4132-3 du code du travail, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE l'article L.4132-3 du code du travail impose une réunion en urgence du CHSCT que dans l'hypothèse où un droit d'alerte a été exercé par un représentant du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et s'il existe une divergence entre ce dernier et l'employeur sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser ; qu'en retenant en l'espèce qu'en raison de la divergence de points de vue entre l'employeur et les salariés sur le caractère justifié de l'exercice de leur du droit de retrait, l'employeur, en sa qualité de chef d'entreprise et de président du CHSCT, devait prendre l'initiative de convoquer la réunion de cette instance dans les conditions de l'article L.4132-3, la cour d'appel a violé ce texte ;


3) ALORS en tout état de cause QUE l'absence de réunion du CHSCT en cas de divergence sur la réalité du danger ayant motivé un droit de retrait ou la façon de le faire cesser n'engendre pas, en soi, pour ceux qui ont exercé ce droit, un préjudice personnel et direct ; qu'en affirmant que si la violation d'un intérêt collectif ne peut en soi ouvrir droit à indemnisation individuelle, il n'en demeure pas moins que par sa carence, l'employeur a causé un préjudice à chacun des salariés, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé ce préjudice, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 du code civil et L.4132-3 du code du travail.



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Cette décision est visée dans la définition :
Gratification


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.