par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 20 avril 2017, 15-28304
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Cour de cassation, chambre sociale
20 avril 2017, 15-28.304

Cette décision est visée dans la définition :
Temps de travail




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1132-1 du code du travail dans sa rédaction applicable en la cause, ensemble l'article L. 1237-9 du même code ;

Attendu que le principe de non-discrimination en raison de l'âge n'est pas applicable à la rupture d'un contrat de travail résultant de l'adhésion volontaire d'un salarié à un dispositif de pré-retraite prévu par un accord collectif ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé le 16 mai 1977 en qualité d'ouvrier spécialisé par la société Peugeot Citroën automobiles ; que son contrat de travail a été transféré à la société Sense, aux droits de laquelle vient la société Véolia industries global solutions ; que le 17 février 2005, le salarié a adhéré à un régime de cessation anticipée d'activité des salariés âgés (CASA) institué par un accord collectif du 26 juillet 1999 ; qu'il a été admis à la retraite le 31 décembre 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement d'un complément d'indemnité de retraite, de dommages et intérêts pour défaut d'information relatif aux droits à la retraite, ainsi que la requalification de son départ en licenciement nul et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, outre la condamnation aux indemnités de rupture ;

Attendu que pour juger discriminatoire le départ en retraite anticipée du salarié et l'analyser en un licenciement nul, l'arrêt retient qu'il ressort de l'accord du 26 juillet 1999 que le dispositif CASA était réservé aux salariés âgés de plus de 55 ans ayant travaillé dans des conditions spécifiques de pénibilité telles que le travail posté ou le travail continu ; qu'il s'agit d'une différence de traitement liée à l'âge ; qu'il résulte des articles 6 § 1 de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail et de l'article L. 1133-2 du code du travail, que nonobstant l'article 2 § 2 de la directive, les Etats membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination, lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ; qu'il appartient au juge saisi d'une différence de traitement liée à l'âge de procéder à un contrôle de légitimité impliquant que le traitement différencié réponde à une raison objective et à un contrôle de proportionnalité supposant que les moyens mis en oeuvre pour réaliser cet objectif soient appropriés et nécessaires ; que l'employeur n'a pas justifié de l'objectif légitime poursuivi en proposant le dispositif CASA à ses salariés et plus particulièrement à M. Y... et notamment par des objectifs de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la rupture du contrat de travail de M. Y... par la mise à la retraite est une mesure discriminatoire qui s'analyse en un licenciement nul et condamne la société Sense à lui payer les sommes de 15 302,88 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, de 5 100,48 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de 510,04 euros au titre des congés payés, l'arrêt rendu le 8 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Véolia industries global solutions

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que la rupture du contrat de travail de M. Y... du fait de sa mise à la retraite anticipée était une mesure discriminatoire qui s'analysait en un licenciement nul, d'AVOIR condamné l'employeur à payer au salarié la somme de 15 302,88 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, 5100,48 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 510,04 € au titre des congés payés y afférents, d'AVOIR condamné l'employeur à payer à M. Y... la somme de 2000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens de la procédure tant de première instance que d'appel ;

AUX MOTIFS QUE « M. Abou Y... a été engagé le 16 mai 1977 selon un contrat à durée indéterminée verbal par le société Peugeot Citroën Automobiles en qualité d'ouvrier spécialisé.

Le dernier poste occupé par ce dernier était agent d'entretien, mais la prestation de nettoyage ayant été externalisée au profit de l'entreprise SENSE, celle-ci a repris au 1er janvier 2004, le contrat de travail de M. Y... avec maintien de son ancienneté acquise.

Le 17 février 2005, M. Y... a adhéré au régime de préretraite dite de cessation anticipée d'activité des salariés âgés (CASA) mis en oeuvre au sein de la Société Peugeot Citroën Automobiles le 18 mai 2000, en application de l'accord national professionnel du 26 juillet 1989 en signant l'avenant de suspension de son contrat de travail.

À compter du 31 décembre 2010, M. Abou Y... a été admis à la retraite, il est sorti du dispositif CASA et a perçu le solde de l'indemnité de mise à la retraite de 3684,54 €. (
)

L'adhésion à certains dispositifs de préretraite se traduit pour les salariés concernés par une simple dispense d'activité, jusqu'à ce qu'ils remplissent les conditions requises pour bénéficier d'une retraite vieillesse à taux plein et être alors mis à la retraite par l'employeur. Tel est le cas des dispositifs de préretraite de branche qui s'inscrivent dans le cadre des dispositions relatives aux conventions d'allocation pour cessation anticipée d'activité prévues de l'article R. 5123-22 du code du travail à l'article R. 5123-39 du code du travail.


En l'espèce, il est établi que M. Y... qui est né le [...]         , a été, après avoir adhéré au dispositif CASA, dispensé d'activité à compter du 1er mai 2006 et est parti à la retraite à compter du 31 décembre 2010 soit à l'âge de 62 ans.

Sur l'application de l'accord casa au sein de l'entreprise SENSE

L'article 3 de l'Accord CASA du 26 juillet 1999 fixe le champ d'application de celui-ci "(...) aux salariés titulaires d'un contrat de travail employés par une entreprise ou un établissement relevant par son activité principale définie par l'accord national du 16 janvier 1979 modifié (...). Les entreprises concernées doivent en outre figurer sur une liste annexée au présent accord."

Il était toutefois expressément prévu que lorsque du fait d'une cession ou d'un changement d'activité, l'entreprise ou l'établissement soumis au présent accord sort du champ d'application de celui-ci, l'accord continue à produire ses effets tant pour les salariés bénéficiaires du dispositif cessation d'activité que pour ceux susceptibles d'en bénéficier. ».

Il est acquis aux débats que M. Abou Y... a été salarié de l'entreprise PSA Peugeot Citroën du 16 mai 1977 au 1er janvier 2004 date à laquelle son contrat de travail a été repris par la Société SENSE créée dans le cadre de la filialisation des services techniques généraux des sites PSA Peugeot Citroën de Sochaux, Mulhouse et Vesoul et détenue au 18 mai 2004 (Annexe 14 de l'appelante) majoritairement par Peugeot Citroën Automobiles.

Il n'est pas contesté que le groupe PSA Peugeot Citroën était éligible au dispositif CASA et il ne peut être reproché à la société SENSE de ne pas figurer sur la liste visée à l'accord précité du 26 juillet 1999 puisqu'elle n'existait pas à cette date.

Par ailleurs, il ressort de l'esprit de l'article 3 précité qui dispose que l'accord continue à produire ses effets pour les salariés qui auraient été susceptibles d'en bénéficier même en cas de cession ou un changement d'activité de l'établissement ou l'entreprise devait sortir du champ d'application de celui-ci, une volonté de faire profiter largement les salariés de ce dispositif dans la mesure où ils auraient pu en profiter s'ils étaient restés dans l'entreprise initiale.

Si la reprise du contrat de travail de M. Abou Y... n'est pas intervenue dans le cadre d'une cession au sens strict, elle l'a été dans le cadre d'une filialisation avec changement d'activité, de sorte, qu'il convient d'admettre que les salariés de la société SENSE susceptibles d'en bénéficier comme M. Abou Y... étaient éligibles au dispositif CASA.

Cela est confirmé, en outre, par le fait que les services de l'État ont accepté de financer et de prendre en charge les allocations de cessation anticipée d'activité et les autres cotisations de retraite complémentaires de M. Y... sans difficultés.

Sur l'indemnisation du retard de paiement de l'indemnité de mise à la retraite

Mis à la retraite à compter du 31 décembre 2010, il a été versé à M. Y... le solde de l'indemnité de mise à la retraite convenue au moment de son entrée dans le dispositif CASA et dont il avait à cette date perçu 90 % du montant.

Toutefois, il est acquis aux débats, qu'un décret du 18 juillet 2008 a institué un doublement de cette indemnité et que la société SENSE a accepté d'appliquer rétroactivement la nouvelle réglementation et a payé à M. Y... la différence due que ce dernier a réclamée pour la première fois devant le Conseil de Prud'hommes saisi en référé.

M. Y... réclame une somme de 3000 € à titre de dommages et intérêts estimant que l'employeur lui a versé avec retard cette indemnité.

Par application de l'article 1153 du code civil, le retard d'exécution des obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme d'argent, est réparé par la condamnation au paiement des intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement inapplicables en l'espèce, qui sont dus sans que le créancier n'ait à en justifier d'aucune perte et qui courent à compter de la mise en demeure ou de la demande en justice.

Par ailleurs, le créancier auquel son débiteur a causé par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant du retard de paiement, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

Il est acquis aux débats que la société SENSE a devant le Conseil de Prud'hommes admis le principe du rappel d'indemnité et l'a réglé à M. Y... lequel ne justifie ni d'un préjudice indépendant du retard de paiement ni de la mauvaise foi de l'employeur. Il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts de ce chef et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour défaut d'information sur les droits à la retraite



Il est établi que le dispositif CASA a fait l'objet d'une négociation entre l 'Etat, l'Unedic et les organisations syndicales et que les organisations syndicales représentatives des salariés de la société PSA ont été consultées tout comme le comité central d'entreprise.

Il est constant que M. Y... a adhéré volontairement au dispositif CASA après remise contre décharge d'une fiche d'information sur le dispositif en date du 23 décembre 2004, d'un courrier de proposition d'adhésion au dispositif contre-signé en date du 17 janvier 2005, d'une convocation d'invitation à un entretien pour le 17 février 2005 et d'une acceptation du dispositif du même jour après entretien avec le gestionnaire de personnel.

M. Y... soutient à l'appui de sa demande qu'il n'a toutefois pas été informé de ce que la période de préretraite CASA n'était pas prise en considération pour le calcul du salaire moyen annuel déterminant le montant de la pension de retraite.

Toutefois, il est admis que le calcul du salaire annuel moyen déterminant le montant de la retraite est fait sur la base des salaires versés en contrepartie d'un travail.

Or il ressort de l'avenant liant les parties qu'il était convenu que l'entrée du salarié dans le dispositif entraînait la suspension de son contrat de travail, celui-ci étant dispensé d'activité professionnelle et de présence dans l'entreprise et qu'il était versé pendant toute la durée de la cessation anticipée d'activité une allocation qui ne peut être assimilée à un salaire.

Il convient d'estimer qu'en considération des informations données, la société SENSE n'a pas failli à son obligation d'information loyale des salariés.

Sur la demande de requalification de la mise à la retraite

Sur la décision de mise à la retraite Il est constant que le dispositif CASA est un dispositif de préretraite qui s'inscrit dans le cadre des dispositions relatives aux conventions d'allocation pour cessation anticipée d'activité prévues de l'article R. 5123-22 du code du travail à l'article R. 5123-39 du code du travail et qui instaurent un régime dérogatoire du droit commun de la mise à la retraite.

L'article 3.3 de l'avenant de suspension du contrat de travail de M. Y... adhérant au dispositif de cessation anticipée d'activité prévoit qu'une allocation est versée au bénéficiaire par l'intermédiaire du centre national CASA qui effectue un versement mensuel au salarié jusqu'à ce que celui-ci remplisse les conditions pour bénéficier d'une retraite à taux plein.

L'article 9.1.1 poursuit en outre qu'afin de pouvoir partir à la retraite dès que cette condition est remplie, le salarié accepte sa mise à la retraite à l'initiative de l'employeur conformément aux dispositions de l'article 6.6 de de l'accord CASA du 26 juillet 1999. Cette acceptation prend effet de façon anticipée à compter de l'adhésion du salarié à l'ensemble du dispositif.

Il résulte de l'article 6.6 de l'accord CASA du 26 juillet 1999 modifié en 2003 que lorsque le salarié justifie du nombre de trimestres nécessaires pour bénéficier d'une retraite à taux plein, l'employeur procède (...) à la mise à la retraite du salarié ayant adhéré au dispositif de cessation anticipée d'activité.

Il doit en être déduit que le principe de la mise à la retraite est acquis dès l'adhésion au dispositif CASA, qui se réalise au jour où le salarié a atteint le nombre de trimestres nécessaires pour bénéficier d'une retraite à taux plein sans formalisme particulier, ce qui ouvre droit au paiement du solde de l'indemnité de mise à la retraite à l'exclusion de toute autre somme s'agissant d'un dispositif de mise en retraite anticipée autonome qui ne fait pas mention notamment d'un délai de préavis.

Il s'en suit que les griefs du salarié relatifs à l'absence de notification par courrier recommandé par l'employeur de « sa mise à la retraite » et à l'absence de délai de préavis sont inopérants.

Sur le caractère discriminatoire de la mise à la retraite avant l'âge légal

Aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, « aucune personne (...) ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de (...) rémunération, (...), classification, promotion professionnelle (...), en raison (...) de son âge... » ;

L'article L.1134-1 dispose qu'en cas de survenance d'un litige au sujet d'une discrimination invoquée par un salarié, celui-ci doit seulement présenter « des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte... », l'employeur devant, au vu de ces éléments, « trouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination... » ;

En l'espèce, M. Y... fait valoir que la mesure d'âge permettant de procéder à la mise à la retraite avant l'âge légal dans le cadre du dispositif CASA constitue une discrimination prohibée.

Il ressort de l'accord du 26 juillet 1999 que le dispositif CASA était réservé aux salariés âgés de plus de 55 ans ayant travaillé dans des conditions spécifiques de pénibilité telles que le travail posté ou de travail continu et qu'il s'agissait d'une différence de traitement fondée sur l'âge.

Il doit être admis que M. Y... fait la preuve d'éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte.

Il résulte des articles 6§1 de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail et de l'article L1133-2 du code du travail, que nonobstant l'article 2§ 2 de la directive, les Etats membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination, lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires.

Il appartient au juge saisi d'une différence de traitement liée à l'âge de procéder à un contrôle de légitimité impliquant que le traitement différencié réponde à une raison objective et à un contrôle de proportionnalité supposant que les moyens mis en oeuvre pour réaliser cet objectif soient appropriés et nécessaires.

Cet objectif légitime est considéré par la Cour de justice de la communauté européenne comme un objectif général distinct des motifs individuels propres à la situation des parties.

Toutefois, il convient d'admettre que la société SENSE même en cause d'appel n'a pas justifié de l'objectif légitime poursuivi en proposant le dispositif CASA à ses salariés et plus particulièrement à M. Y... et notamment par des objectifs de politique de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires. Il doit par conséquent en être déduit qu'il s'agissait d'une mesure discriminatoire. (Cass.soc.17 mars 2015).

Par application de l'article L1132-4 du code du travail toute disposition ou tout acte contraire à l'égard d'un salarié est nul de plein droit. Dès lors la rupture du contrat de travail par la mise à la retraite de M. Y... doit être requalifiée en licenciement nul et indemnisée comme tel.

Sur les conséquences financières

Sur le préjudice résultant de la nullité du licenciement

Le préjudice résultant pour M. Y... de la nullité de son licenciement sera justement évalué à un montant qui ne peut être inférieur à 6 mois de salaire quels que soient les effectifs de l'entreprise et l'ancienneté du salarié soit un total en l'espèce de 15 302,88 € par référence à une rémunération brute mensuelle de 2550,48 € non contestée dans son quantum, étant observé que par ailleurs M. Y... a bénéficié du dispositif CASA et a été dispensé d'activité professionnelle avec une indemnité mensuelle non négligeable.

Sur le complément d'indemnité de licenciement réclamé par M. Y... M. Y... qui a perçu une indemnité de mise à la retraite équivalent à l'indemnité conventionnelle de licenciement réclame un complément d'indemnité sur la base de ce qui est prévu pour les ingénieurs et cadres de la convention collective de la métallurgie au regard du principe de l'égalité de traitement.

Il est constant que les différences de traitement entre catégories opérées par voie de conventions ou d'accords collectifs, négociés et signés par des organisations syndicales représentatives, investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote prévues dans les conventions collectives sont présumées justifiées de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle. (Cass sociale, 27 janvier 2015, n 13-22-179.)


En l'espèce, M. Y... se contente de demander le bénéfice des dispositions de la catégorie des ingénieurs et cadres à laquelle il n'appartient pas pour obtenir un complément d'indemnité conventionnelle de licenciement par rapport à l'indemnité de mise à la retraite qu'il a d'ores et déjà perçue.

Faute de démontrer une différence de traitement étrangère à une considération professionnelle, il sera débouté de sa demande.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis M. Y... est en droit de prétendre à ce titre à deux mois de salaires à titre d'indemnité compensatrice de préavis soit un montant de 5100,48 € majoré de 510,04 € au titre des congés payés y afférents non contestés dans leur quantum.

Sur le surplus

L'équité commande d'allouer à M. Y... un montant de 2000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société SENSE qui succombe au principal supportera les entiers frais et dépens de la procédure tant de première instance que d'appel » ;

1°) ALORS QUE si une mise à la retraite d'office, avant que soit atteint l'age légal, doit être justifiée par un objectif légitime et constituer un moyen approprié et nécessaire en vue d'atteindre cet objectif, sous peine d'être jugée discriminatoire, cette exigence ne s'impose pas en cas de départ en retraite à l'occasion d'un dispositif de préretraite volontaire ; qu'il ressort de l'arrêt attaqué que négocié entre l'Etat, l'Unedic et les organisations syndicales, le dispositif de cessation anticipée d'activité des salariés âgés (CASA) permettait aux salariés âgés de 55 ans ayant travaillé dans des conditions spécifiques de pénibilité, qui faisaient le choix d'y adhérer volontairement (articles 4 à 6), de faire l'objet d'une suspension de leur contrat de travail jusqu'à la date de leur « mise à la retraite » dont le principe était acquis et à laquelle ils avaient consenti dès leur adhésion au dispositif (article 6.6), de percevoir une indemnité de départ à la retraite, dont un acompte de 90 % était versé dès leur entrée dans le dispositif (article 6.4), le solde étant versé à la sortie (article 6.6), et de bénéficier mensuellement d'une allocation spécifique de cessation anticipée d'activité (article 6.3 à 6.3.8) jusqu'à ce qu'ils remplissent les conditions pour bénéficier d'une retraite à taux plein (articles 6.6 et 9) ; que dans le cas de M. Y..., la cour d'appel a constaté qu'en vertu du dispositif CASA auquel il avait volontairement adhéré, après avoir été loyalement informé par son employeur, ce salarié avait été dispensé d'activité à compter du 1er mai 2006, et était parti à la retraite à compter du 31 décembre 2010 soit à l'âge de 62 ans ; qu'en jugeant que puisque réservé aux salariés âgés, ce dispositif ne pouvait être licite qu'à la condition qu'il soit justifié par un objectif légitime, cependant qu'il ressortait de ses constatations que le salarié était parti à la retraite à l'occasion d'un dispositif de préretraite volontaire, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-13 du code du travail, devenu les articles L. 1237-5 et L. 1237-9 du code du travail, l'article 1134 du code civil, ensemble les dispositions de l'accord national professionnel de cessation d'activité anticipée (CASA) du 26 juillet 1999 et les articles 6, § 1, de la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, L.122-45 devenu L. 1132-1, et L. 122-45-4 devenu L. 1133-2 du code du travail ;


2°) ALORS subsidiairement QUE les différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées par un objectif légitime, notamment de politique de l'emploi, ou par le souci de préserver la santé ou la sécurité des travailleurs, de favoriser leur insertion professionnelle, d'assurer leur emploi, leur reclassement ou leur indemnisation en cas de perte d'emploi, et lorsque les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que s'inscrivant dans le cadre des dispositions relatives aux conventions d'allocation pour cessation anticipée à destination des salariés ayant effectué des travaux pénibles prévues aux articles R. 5123-22 à R. 5123-39 du code du travail, le dispositif CASA permettait aux salariés âgés de 55 ans ayant « travaillé dans des conditions spécifiques de pénibilité telles que le travail posté ou de travail continu » et qui choisissaient d'y adhérer (articles 4 à 6), de percevoir une indemnité de départ à la retraite (dont un acompte de 90 % leur était versé dès leur entrée dans le dispositif, le solde étant versé à la sortie) (article 6.4 et 6.6), et une allocation mensuelle (correspondant à 65 % du salaire de référence pour la part n'excédant pas le plafond fixé par le code de la sécurité sociale, et 50 % pour la part comprise entre une et deux fois ce plafond) (article 6.3 à 6.3.8) pendant la durée du dispositif, et ce jusqu'à ce qu'ils remplissent les conditions pour bénéficier d'une retraite à taux plein (articles 6.6 et 9) ; que la cour d'appel a en outre constaté que M. Abou Y... avait été engagé, en qualité d'ouvrier spécialisé, le 16 mai 1977, et qu'il occupait en dernier lieu le poste d'agent d'entretien ; que cependant la cour d'appel a déclaré le dispositif CASA discriminatoire, faute pour l'employeur de justifier l'objectif légitime poursuivi en proposant le dispositif CASA à ses salariés et plus particulièrement à M. Y... et notamment par des objectifs de l'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle et que les moyens de réaliser cet objectif étaient appropriés et nécessaires ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations dont il ressortait que le dispositif CASA répondait à un objectif de préservation de la santé et de la sécurité des travailleurs dont les conditions de travail étaient particulièrement pénibles tout en garantissant aux salariés concernés une retraite à taux plein et a violé les articles 6, paragraphe 1, de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, L.122-45 devenu L. 1132-1 et L. 122-45-4 devenu L. 1133-2 du code du travail, ensemble les dispositions de l'accord national professionnel de cessation d'activité anticipée (CASA) du 26 juillet 1999.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.