par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 16 septembre 2015, 14-10291
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Cour de cassation, chambre sociale
16 septembre 2015, 14-10.291

Cette décision est visée dans la définition :
Temps de travail




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 10 janvier 2010 par Mme Y... en qualité d'auxiliaire de vie selon contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel ; que l'employeur avait, le 25 novembre 2010, demandé à son expert-comptable d'établir les documents de rupture du contrat de travail consécutifs à la démission de la salariée à la date du 30 novembre 2010 ; que l'employeur a, le 9 décembre 2010, convoqué la salariée à un entretien fixé au 20 décembre suivant en vue d'une rupture conventionnelle homologuée du contrat de travail ; que la salariée ne s'est pas présentée à cet entretien ; que l'intéressée a, le 17 mars 2011, saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en résiliation judiciaire du contrat de travail, alors, selon le moyen,

1°/ que la salariée avait fait valoir dans ses conclusions que par courrier du 9 décembre 2010 l'employeur l'avait convoquée à un entretien préalable fixé au 20 décembre 2010 en vue d'une rupture conventionnelle et versait aux débats aux débats un courrier remis par l'employeur qui précisait que : « Je vous envoie le certificat de travail, le solde de tout compte. Concernant l'attestation d'employeur, je vous envoie si vous le voulez celle avec le motif « démission ». Comme je vous l'ai expliqué, après l'entretien du 20 décembre 2010, il faut attendre un mois pour obtenir l'attestation avec le motif « rupture conventionnelle » ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions établissant que l'employeur avait accepté la rupture conventionnelle, la cour d'appel n'a pas donné de motifs à sa décision en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que le contrat de travail peut être rompu d'un commun accord ; que la cour d'appel a bien constaté l'acceptation momentanée de l'employeur de substituer au motif de rupture celui de rupture conventionnelle et les démarches effectuées par lui en ce sens ; qu'en refusant de déduire de ces constatations une volonté de rupture réciproque, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

3°/ que si le salarié peut rétracter sa décision de démissionner sans que l'employeur ne soit tenu de l'accepter, en revanche son acceptation prive d'effet la démission, tel est le cas lorsque l'employeur, postérieurement à la démission rétractée, convoque le salarié à un entretien préalable à une rupture conventionnelle ; qu'en constatant que l'employeur avait accepté, même momentanément, la rupture conventionnelle, la cour d'appel ne pouvait retenir contre la salariée une démission ; que la rupture conventionnelle n'ayant pas abouti, le contrat de travail n'a jamais été rompu et en retenant que la salariée aurait démissionné, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 1237-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé que postérieurement à la démission de la salariée, celle-ci avait été convoquée par l'employeur à un entretien, auquel elle ne s'était pas présentée, en vue d'une rupture conventionnelle qui n'avait pas été signée, la cour d'appel, motivant sa décision, a pu en déduire l'absence de renonciation à la rupture du contrat de travail qui résultait de la démission de la salariée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article L. 3123-14 du code du travail ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que si le contrat de travail à temps partiel des salariés des associations et entreprises d'aide à domicile peut ne pas mentionner la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, il doit néanmoins mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle de travail ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein, l'arrêt, après avoir constaté que le contrat de travail stipulait une durée hebdomadaire de travail pouvant varier entre 10 et 30 heures, retient que pour les entreprises d'aide à domicile, il suffit que soit mentionnée au contrat la durée hebdomadaire ou mensuelle garantie au salarié, et que tel est le cas en l'espèce, la durée hebdomadaire garantie à l'intéressée ayant été fixée à 10 heures dans le contrat ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le contrat de travail ne mentionnait pas la durée exacte de travail convenue, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme X... de sa demande en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein, l'arrêt rendu le 27 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Y... à payer à Me Ricard la somme de 3 000 euros à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyens produits par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la salariée de ses demandes relatives au prononcé la résiliation judiciaire du contrat avec effet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse AUX MOTIFS QUE :
Sur les demandes liées à la rupture du contrat de travail :
Mme Y... soutient que fin novembre 2010 Mme X... l'avait contactée par téléphone pour lui dire qu'elle ne pouvait plus remplir ses fonctions car elle devait désormais s'occuper de ses enfants pour la garde desquels elle ne trouvait pas de solution du fait de la maladie de ses deux parents ; que quelques jours plus tard et en tout cas avant le 07 décembre, elle a téléphoné à Mme X... pour demander à celle-ci de venir prendre chez elle les documents préparés par son comptable pour régulariser sa démission et que la salariée lui a alors déclaré qu'après s'être renseignée, elle souhaitait la mise en oeuvre d'une procédure de rupture amiable et la modification de l'attestation Pôle Emploi afin que sa démission n'apparaisse plus sur ce document et ce afin de pouvoir bénéficier des allocations chômage.
Mme X... indique seulement dans ses écritures que " le contrat de travail de la salariée n'a jamais été rompu ni par une démission, qu'elle n'a jamais donnée, ni par une rupture conventionnelle ". Elle reconnaît toutefois avoir demandé la mise en oeuvre d'une procédure de rupture amiable et la rectification de l'attestation Pôle Emploi qui faisait état de sa démission sans toutefois avoir donné les motifs de cette démarche.
Elle ne conteste ni l'interruption de sa prestation ni son intention de rompre le contrat travail. Elle n'a jamais demandé à reprendre son poste alors que Mme Y... était toute disposée à l'accueillir de nouveau, n'ayant manifesté aucune volonté de se séparer d'elle.
L'employeur justifie de ses déclarations par un courriel adressé à son comptable le 25 novembre pour lui demander d'établir les documents de rupture consécutifs à la démission de Mme X... à la date du 30 novembre et par une attestation de celui-ci en date du 07 juin 2011 qui confirme avoir effectué les démarches demandées par Mme Y..., dans un premier temps pour une démission de la salariée, puis, dans un second temps, pour une rupture conventionnelle.
La démarche effectuée par Mme Y... le 25 novembre 2010 auprès de son comptable pour régulariser la démission de Mme X... ne peut s'expliquer que par la volonté exprimée par cette dernière de mettre fin à son contrat de travail que confirme d'ailleurs sa demande de rupture conventionnelle.
Les motifs de cette demande, non précisés par la salariée, ne peuvent être autres que ceux indiqués par l'employeur dans ses écritures et dans sa lettre du 25 février, à savoir les problèmes liés à la maladie de ses parents et à la garde de ses enfants invoqués par la salariée lors de leur conversation téléphonique de fin novembre, motifs dont Mme X... ne contredit pas la réalité.
Le motif du recours à une procédure de rupture amiable, que l'employeur n'avait aucune raison de mettre en oeuvre, ne peut être que celui invoqué par Mme Y..., à savoir la possibilité pour Mme X... de percevoir les indemnités de chômage qui lui était fermée par la démission, ce qui explique d'ailleurs sa demande de rectification de l'attestation Pôle Emploi.
L'acceptation momentanée de Mme Y... et les démarches effectuées en ce sens, alors que celle-ci n'avait aucun motif de se séparer de Mme X..., ne pouvaient avoir d'autre but que d'épargner à sa salariée, avec laquelle elle était encore en bons termes, les conséquences pécuniaires de sa démission. On ne peut aucunement en déduire une volonté de rupture réciproque.
La crainte des conséquences pécuniaires de la démission ne suffit pas à vicier la volonté unilatérale de la salariée de mettre fin à son contrat de travail qui résulte clairement de son attitude.
Cette volonté n'était pas affectée par des pressions de l'employeur ou un affaiblissement psychologique de la salariée et cette décision sur laquelle Mme X... avait toute possibilité de revenir n'a pas été prise dans un mouvement d'humeur.
Les déclarations faites par la salariée au téléphone pour justifier la cessation de sa prestation et l'attitude qu'elle a adoptée par la suite démontrent son intention claire et sans équivoque de rompre son contrat de travail.
C'est donc à juste titre que le Conseil de Prud'hommes a débouté Mme X... de ses demandes relatives à l'indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés y afférents, à l'indemnité de licenciement, aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour non-respect de la procédure de licenciement.
Il n'y a pas lieu de prononcer la résiliation judiciaire du contrat ni de condamner Mme Y... au paiement des salaires échus jusqu'à ce jour.

ALORS QUE la salariée avait fait valoir dans ses conclusions que par courrier du 9 décembre 2010 l'employeur l'avait convoquée à un entretien préalable fixé au 20 décembre 2010 en vue d'une rupture conventionnelle et versait aux débats aux débats un courrier remis par l'employeur qui précisait que : « Je vous envoie le certificat de travail, le solde de tout compte. Concernant l'attestation d'employeur, je vous envoie si vous le voulez celle avec le motif'démission'. Comme je vous l'ai expliqué, après l'entretien du 20 Décembre 2010, il faut attendre 1 mois pour obtenir l'attestation avec le motif'rupture conventionnelle'. » ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions établissant que l'employeur avait accepté la rupture conventionnelle, la cour d'appel n'a pas donné de motifs à sa décision en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS QUE le contrat de travail peut être rompu d'un commun accord ; que la cour d'appel a bien constaté l'acceptation momentanée de l'employeur de substituer au motif de rupture celui de rupture conventionnelle et les démarches effectuées par lui en ce sens ; qu'en refusant de déduire de ces constatations une volonté de rupture réciproque, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS QUE si le salarié peut rétracter sa décision de démissionner sans que l'employeur ne soit tenu de l'accepter, en revanche son acceptation prive d'effet la démission, tel est le cas lorsque l'employeur, postérieurement à la démission rétractée, convoque le salarié à un entretien préalable à une rupture conventionnelle ; qu'en constatant que l'employeur avait accepté, même momentanément, la rupture conventionnelle, la cour d'appel ne pouvait retenir contre la salariée une démission ; que la rupture conventionnelle n'ayant pas abouti, le contrat de travail n'a jamais été rompu et en retenant que la salariée aurait démissionné, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 1237-1 du code du travail ;

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la salariée de ses demandes de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein, de rappels de salaires pour les périodes de janvier à novembre 2010 et de décembre 2010 à juin 2011 ainsi qu'aux demandes concernant les congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE :
Sur la demande de requalification du contrat :
Si l'article L. 3123-14 du Code du travail dispose que le contrat de travail à temps partiel mentionne " la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ", ces obligations ne s'appliquent pas aux entreprises d'aide à domicile en raison des contraintes particulières et des variations horaires importantes qu'elles supposent. Il suffit que soit mentionnée au contrat la durée hebdomadaire ou le cas échéant mensuelle garantie au salariée. Il importe également que les horaires soient communiqués chaque mois au salarié.
En l'espèce, la durée hebdomadaire garantie à Mme X... a été fixée à 10 heures dans le contrat et les plannings de travail lui étaient communiqués tous les 15 jours pour la quinzaine suivante.
Cette communication lui permettait de prévoir quinze jours à l'avance le rythme de ses heures de travail et de s'organiser en conséquence sans être à la disposition permanente de son employeur.

Dès lors la demande de requalification du contrat de travail n'est pas fondée et a été accueillie à tort par le Conseil de Prud'hommes.

ALORS QUE le contrat de travail à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail ; que ne répond pas à cette exigence le contrat de travail à temps partiel qui prévoit une durée variable de 10 à 30 heures par semaine ; qu'en décidant que le contrat de travail comportait une durée minimum de travail garantie de 10 heures par semaine pour dire non fondée la demande de requalification en contrat de travail à temps plein, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du code du travail.



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Cette décision est visée dans la définition :
Temps de travail


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.