par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 7 juillet 2015, 14-13747
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
7 juillet 2015, 14-13.747

Cette décision est visée dans la définition :
Ne varietur




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 17 décembre 2013), que M. et Mme X... (les consorts X...), propriétaires d'une parcelle de terrain, cadastrée AH 14, séparée de celles de MM. Y... et Z..., cadastrées AH 15 et AH 17, par une cour commune permettant d'accéder à la voie publique, ont assigné leurs voisins afin d'être déclarés seuls propriétaires de cette cour, MM. Y... et Z... ne disposant que d'un droit de passage, d'obtenir la désignation d'un expert chargé de délimiter les parcelles en fonction de leur contenance exacte et d'ordonner à M. Y... de retirer un mur de pierres édifié sur la cour et restreignant le passage des véhicules ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que la contenance de la parcelle de M. Y..., qui était de 78 ca dans les titres antérieurs, était passée à 96 ca lors de l'acte du 10 juillet 1995 sans justification de l'acquisition par son vendeur de cette surface complémentaire et que cette portion de terrain litigieuse était située devant la maison de M. Y..., côté cour commune et, par motifs propres, que cet accroissement de surface résultait du remaniement cadastral de 1995 qui était intervenu non contradictoirement, la cour d'appel a souverainement déduit de ces motifs, dont il résultait que la surface contestée avait été prélevée sur la cour commune, que la contenance de la parcelle de M. Y... devait être réduite à 78 ca et retenu, à bon droit, que M. Y..., dont le titre faisait référence à un droit à la cour commune, n'avait pu prescrire contre son titre une partie de cette cour ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant constaté que les propriétés actuelles étaient toutes issues de la division d'une parcelle unique, souverainement retenu, par une interprétation des titres de propriété que leur rapprochement rendait nécessaire, que l'intention commune des auteurs de la division avait été d'attribuer aux propriétaires des fonds divisés un droit identique d'accès à la cour commune et non de créer une servitude par destination du père de famille et exactement retenu que ce droit avait été transmis aux acquéreurs successifs des fonds divisés, la cour d'appel en a justement déduit que les consorts X... n'avaient pas perdu leur droit sur ladite cour et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à Mme Renée A..., veuve X... et à M. Jean-Jacques X... la somme globale de 3 000 euros ; rejette la demande de M. Y... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a décidé que la parcelle AH 15 (Y...) avait une superficie de 78 a (et non 96 a) et que le plan de bornage, précédemment établi, devait être établi en considération de cette superficie et rejeté les demandes de M. Y... ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « M. Y... demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamné sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la date à laquelle le jugement aura acquis un caractère définitif, à enlever le mur de pierres sèches qu'il a édifié à côté de sa maison réduisant le passage d'accès à la propriété X... ; qu'il rappelle que les consorts X... avaient fait constater par Me Sandrine B..., huissier de justice, le 24 avril 2010, la présence dans la cour commune d'un mur en pierres sèches sur une hauteur d'environ 45 centimètres édifié par M. Y... devant son habitation et gênant le passage d'un véhicule ; qu'il fait valoir que ce muret n'existe plus et présente à l'appui de ses dires un procès-verbal de constat établi par la SCP G... H... I... huissiers de justice, le 14 juin 2013. La cour constate au vu des constats d'huissier respectivement dressés le 24 avril 2010 et le 14 juin 2013 que le jugement a sur ce point été volontairement exécuté ; il convient d'en donner acte à M. Y.... Au vu de cette exécution, et en l'absence de tout élément pouvant laisser craindre la mise en place d'un nouvel obstacle au passage il n'y a pas lieu de faire d'ores et déjà défense à M. Y... de rétablir ce muret ou tout autre obstacle sous astreinte. La demande des consorts X... sera rejetée sur ce point ; que sur la contenance de la parcelle AH 15 et les limites de la parcelle AH 14, M. Y... conteste le jugement en ce qu'il a fixé à 78 centiares, la contenance de la parcelle AH 15 qui est sa propriété. Il soutient que son acte de propriété, établi le 10 juillet 1995 porte sur une superficie de 96 centiares en expliquant que l'acte de vente est intervenu postérieurement au remaniement cadastral de l'année 1995, publié le 6 juin 1995, qui n'a pas modifié les limites de propriété, mais qui a permis de redonner à chacune des parcelles sa véritable contenance au regard des délimitations déjà anciennes et de leur géométrie cadastrale inchangée depuis 1938. Selon le procès-verbal de remaniement cadastral, la parcelle AH 14 propriété des consorts X... a une surface de 40 ares 31 centiares, la superficie de la parcelle AH 15 propriété de M. Y... est de 96 centiares au lieu de 78 centiares portés préalablement dans les actes de propriété successifs, et la parcelle AH 16, soit la cour commune, a une superficie de 1 are 70 centiares ; que les consorts X... s'opposent à la demande de M. Y... ; qu'aucune des parties ne critique le jugement déféré en tant qu'il a débouté les consorts X... de leur demande tendant à se voir reconnaître seuls propriétaires de la parcelle AH 14 et faire dire que M. Y... et M. Z... ne disposent que d'un droit de passage. Les premiers juges ont justement relevé au vu des pièces versées au dossier, que l'ensemble constitué par les propriétés X... Z... et Y... était à l'origine propriété des consorts C...- D... qui ont procédé à la division de leur fond au cours de l'année 1902. L'actuelle propriété des consorts X... a fait l'objet d'une vente par adjudication au profit des consorts J...- K... le 26 janvier 1902 et les actuelles propriétés Z... et Y... ont fait l'objet d'une donation-partage au profit des consorts Eugène et Emile C... ; que ces deux propriétés bénéficiaient chacune au jour de la division d'un accès unique à la voie publique et à un puits, constitué par " l'impasse... ", qualifié dans les actes de'cour commune ", Ce droit attaché à chaque fonds, a été transmis aux acquéreurs successifs de ces biens, et notamment aux propriétaires successifs de la parcelle AH 14. 11 n'y a donc pas lieu de dire que la parcelle AH 14 propriété des consorts X... a perdu le droit de cour commune ou qu'elle n'est pas enclavée, même s'il est établi qu'elle dispose d'un accès sur... par une porte simple située au bout d'un talus engazonné dont l'accès comporte quatre marches. Le jugement déféré sera donc confirmé en tant qu'il a décidé que la parcelle AH 16 dite " Impasse... " constitue une cour commune aux propriétés X... AH 14, Y... AH 15 et Z... AH 17 ; que M. Y... sollicite l'homologation pure et simple du rapport établi le 1er septembre 2009 par M. F... expert-géomètre désigné dans le cadre de la procédure de bornage. Cet expert a dans son rapport confirmé qu'aucun bornage n'a été valablement réalisé, que les titres de propriété ne font référence qu'au parcellaire cadastral qui ne correspond pas aux éléments de possession des propriétaires du Hameau ; qu'il précise qu'aucune borne n'a pu être retrouvée sur les lieux et que seules d'anciennes clôtures et les murs des bâtiments servent de repères et constituent pour certains des limites de propriété ; qu'il a dressé son plan figurant en annexe 2 de son rapport en utilisant le plan cadastral et en rétablissant les limites cadastrales de la cour commune telles que définies en 1938, en faisant observer qu'il n'y a pas eu de délimitation contradictoire lors du remaniement cadastral de 1995 ; il a tenu compte des pièces et attestations qui lui ont été produites. Les propositions de l'expert ont, en ce qui concerne la cour commune été fondées sur une application des limites du plan de 1938 à partir des éléments communs existant encore ainsi que de compensations raisonnées. Les premiers juges ont toutefois justement relevé que l'expert n'a pas suffisamment tenu compte de la superficie des parcelles et notamment de la parcelle n° 553 devenue AH15 alors que seul le titre de propriété actuel relatif à la vente de la propriété à M. Y... le 10 juillet 1995, relatif à la vente d'une maison d'habitation fait état d'une surface de 96 centiares sans indiquer la présence du terrain se trouvant devant la maison ; que les titres antérieurs relatifs au transfert de cette même propriété versés aux débats, cession L... à M... du 10 janvier 1979, cession N... à O... du 22 juin 1970 et les trois ventes communes aux propriétés Y... et Z... des 10 octobre 1958, 23 décembre 1932 et 18 janvier 1902 font quant à eux état de la vente d'une maison " tenant du midi à la cour commune " sans mentionner l'existence d'une parcelle de terrain entre le bâtiment et la dite cour, et font tous état d'une contenance de 78 centiares ; que cette superficie est passée à 96 centiares lors du remaniement du cadastre intervenu en 1995 qui s'est effectué sans qu'aucune concertation contradictoire des personnes intéressées ; qu'il ne peut donc être simplement admis comme le fait M. Y... que ce remaniement a redonné à chacune des parcelles son exacte contenance au regard des délimitations anciennes et n'a pas modifié les limites de propriété ; qu'au vu de ces éléments les premiers juges, qui ont de plus justement constaté, en l'absence de toute délimitation des parcelles sur le terrain, qu'il n'est pas justifié d'une possession trentenaire en qualité de propriétaire et que M. Y... ne peut prescrire contre son propre titre qui fait référence à une cour commune, ont à juste titre considéré que le projet de bornage de l'expert ne peut pas être réalisé sur la base du dernier titre de propriété de la parcelle AH 15 et du plan cadastral de 1995 faisant état d'une superficie de 96 centiares. Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a fixé à 78 centiares la superficie de la parcelle n° AH 15 et dit que le projet de bornage de l'expert devra être modifié en réduisant sa superficie de 18 centiares au besoin en supprimant la parcelle de terrain situé à l'est de la maison. Les demandes de M. Y... seront donc rejetées et le jugement déféré sera confirmé en tant qu'il a sursis à statuer sur la délimitation des propriétés Y..., X... et de la cour commune, a ordonné un complément d'expertise aux fins de faire rectifier le plan de bornage proposé portant sur la délimitation des parcelles AH 15, AH 16 et AH 14 et défini les éléments dont l'expert devra tenir compte et notamment des surfaces suivantes : AH 16 cour commune, 1 are 70 centiares, AH 15 Y... 78 centiares » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « les demandeurs concluent à l'exclusion de la propriété Y... au profit de la cour commune, du terrain se trouvant devant la maison de ce dernier ; que selon eux, la limite entre les deux parcelles AH 15 et AH 16 se trouve au droit du pignon est de la maison Z... ; qu'à cet égard, il apparaît que le titre de propriété actuel relatif à la vente du 10 juillet 1995 se contente de décrire la maison à usage d'habitation en ajoutant uniquement : " Le tout cadastré section AH numéro 15 1'" Impasse... " pour 0 a 96 ca Droit à la cour commune cadastrée section AH numéro 16 lieudit pour I a 70 ca " ; que comme indiqué par l'expert, ces mentions ne sont d'aucun recours pour la délimitation des propriétés et la détermination du contenu de chacune ; que s'agissant des titres antérieurs, seuls sont versés aux débats les actes relatifs à la cession L... à M... du 10 janvier 1979, à celle P... à O... du 22 juin 1970, ainsi qu'aux trois ventes communes aux propriétés Y... et Z..., des 10 octobre 1958, 23 décembre 1932 et 18 janvier 1902 ; qu'or, si tous ces actes font effectivement référence à une propriété avec maison " tenant du midi à une cour commune ", sans faire état d'une quelconque parcelle entre le bâti et ladite cour, cela ne suffit pas à en exclure l'existence ; que toutefois, il apparaît également et de manière plus surprenante, que la propriété litigieuse d'une contenance permanente dans les premiers titres de 78 ca, est passée soudainement, dans l'acte de vente M.../ Y... du 10 juillet 1995, à 96 ca, sans aucune justification notamment d'acquisition par Monsieur M..., d'une manière ou d'une autre, de cette surface supplémentaire (qui correspondrait selon les époux X... précisément à la superficie du terrain litigieux situé côté est de la maison, en bordure de cour commune) ; que dans la mesure où Monsieur M... n'a pu céder plus de droit qu'il n'en disposait, cette extension de propriété ne saurait être validée, quand bien même elle correspondrait au plan cadastral de 1995 qui, par définition, ne peut valoir titre de propriété ; que le titre de Monsieur Y... ne lui permet donc pas de revendiquer aujourd'hui une parcelle de 96 ca ; que la seule issue pour ce dernier serait donc de faire valoir la prescription acquisitive de la surface ; que toutefois, cette hypothèse s'avère également exclue ; qu'en effet, si en application des dispositions de l'article 2258 du code civil ; que la prescription acquisitive est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi ; que la prescription trentenaire est un moyen d'acquérir la propriété sans titre, elle suppose de justifier d'une possession trentenaire non viciée, en qualité de propriétaire ; que par ailleurs on ne peut prescrire contre son propre titre, comme précisé à l'article 2270 anciennement 2240 du Code civil ; qu'ainsi, en l'espèce, le titre de Monsieur Y... faisant expressément référence à une cour commune ", cadastrée AH 16, il ne saurait valablement faire valoir aujourd'hui avoir possédé une partie de cette dernière en qualité de propriétaire ; que la parcelle de la propriété Y..., AH 15 est donc d'une superficie de 78 ca ; qu'en conséquence, le projet de bornage de l'expert réalisé sur la base du dernier titre et du plan cadastral mentionnant une superficie de 96 on, ne saurait être validé ; qu'il devra être modifié en réduisant la parcelle AH 15 de 18 ca, au besoin en supprimant purement et simplement le terrain situé à l'est de la maison ; qu'en conclusion, il n'y a pas lieu à homologation du rapport déposé par Monsieur Jean-Pierre F... le 1 " septembre 2009 ; qu'un complément d'expertise sera ordonné, dans le cadre duquel Monsieur F... devra proposer un nouveau plan de bornage tenant compte : des dispositions du jugement du tribunal d'instance de TROYES du 18 mars 2010 ;- des dispositions du présent jugement des superficies des différentes parcelles en cause, à savoir : Cour commune-AH 16 : 1 a 70 ca, Propriété X...- AH 14 42 a 15 ca, Propriété Z...- AH et AH 18 2 a 12 za + 2 a 04 ca = 4 a 16 za Propriété Y...- AH 15 : 78 ca » ;

ALORS QUE, premièrement, pour invoquer la prescription décennale, telle que prévue à l'article 2272 alinéa 2 du Code civil, à raison de sa bonne foi et d'un juste titre, M. Y... soutenait qu'il possédait à titre de propriétaire une superficie de 96 ca (et non 78 ca) et que cette superficie était comprise dans le titre en vertu duquel il a acquis (conclusions du 29 juillet 2013, p. 8) ; qu'à cette occasion, il a précisé que cette superficie de 96 ca laissait intacte la superficie de la cour commune fixée à 1 a 70 ca (p. 8) ; qu'en se bornant à opposer « que M. Y... ne peut prescrire contre son propre titre qui fait référence à une cour commune » (p. 4, dernier alinéa), sans rechercher si, or de tout empiètement sur la cour commune et donc sans qu'on puisse lui opposer de vouloir prescrire contre son propre titre, une superficie de 96 ca ne devait pas lui être attribuée, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 2272 alinéa 2 du Code civil (ancien article du Code civil), ensemble l'article 2270 du Code civil (ancien article 2240 du Code civil) ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, le juge ne peut opposer à une demande une règle qui ne coïncide pas avec la manière dont elle est formulée ; qu'ainsi, les juges du second degré ne pouvaient opposer la règle figurant à l'article 2270 du Code civil (ancien article 2240) selon lequel on ne peut prescrire contre son titre au motif que le titre d'acquisition de M. Y... faisait état d'une cour commune, dans la mesure où celui-ci soulignait bien que s'il revendiquait une superficie de 96 ca, cette revendication ne concernait en rien la cour commune dont la superficie était fixée ne varietur à 1 a 70 ca ; qu'en opposant une règle qui n'avait pas vocation à s'appliquer, eu égard à la manière dont M. Y... formulait sa demande, les juges du fond ont violé les articles 2272 alinéa 2 du Code civil (ancien article 2265 du Code civil), ensemble l'article 2270 du Code civil (ancien article 2240 du Code civil).

SECOND MOYEN DE CASSATION

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a décidé qu'il n'y avait pas lieu de constater que la parcelle AH 14 (X...) n'avait pas de droit à la cour commune ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'« aucune des parties ne critique le jugement déféré en tant qu'il a débouté les consorts X... de leur demande tendant à se voir reconnaître seuls propriétaires de la parcelle AH 14 et faire dire que M. Y... et M. Z... ne disposent que d'un droit de passage. Les premiers juges ont justement relevé au vu des pièces versées au dossier, que l'ensemble constitué par les propriétés X... Z... et Y... était à l'origine propriété des consorts C...- D... qui ont procédé à la division de leur fond au cours de l'année 1902. L'actuelle propriété des consorts X... a fait l'objet d'une vente par adjudication au profit des consorts J...- K... le 26 janvier 1902 et les actuelles propriétés Z... et Y... ont fait l'objet d'une donation-partage au profit des consorts Eugène et Emile C... ; que ces deux propriétés bénéficiaient chacune au jour de la division d'un accès unique à la voie publique et à un puits, constitué par " l'impasse... ", qualifié dans les actes de'cour commune ", Ce droit attaché à chaque fonds, a été transmis aux acquéreurs successifs de ces biens, et notamment aux propriétaires successifs de la parcelle AH 14. 11 n'y a donc pas lieu de dire que la parcelle AH 14 propriété des consorts X... a perdu le droit de cour commune ou qu'elle n'est pas enclavée, même s'il est établi qu'elle dispose d'un accès sur... par une porte simple située au bout d'un talus engazonné dont l'accès comporte quatre marches. Le jugement déféré sera donc confirmé en tant qu'il a décidé que la parcelle AH 16 dite " Impasse... " constitue une cour commune aux propriétés X... AH 14, Y... AH 15 et Taure ! AH 17 ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « l'article 694 du Code civil prévoit que : si le propriétaire de deux héritages entre lesquels il existe un signe apparent de servitude, dispose de l'un des héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle continue d'exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsqu'un fonds unique fait l'objet de par la volonté de son auteur, d'une division en deux fonds distincts dont l'un se trouve manifestement dépendant de l'autre, notamment au regard leurs situations respectives, le premier bénéficie de plein droit d'une servitude sur le second ; que ces dispositions présentent néanmoins un caractère supplétif de volonté, en ce sens où elles ne sont applicables qu'à défaut de dispositions contractuelles contraires à leur application ; qu'en d'autres termes, l'auteur commun peut parfaitement, à l'occasion de la division de son héritage, décider d'exclure l'existence d'une telle servitude et prévoir d'autres modalités d'aménagements des lieux ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'ensemble constitué par les propriétés X..., d'une part, et Z...- Y..., d'autre part, appartenait à l'origine à un auteur unique, en l'espèce les consorts C...- D... ; que ces derniers ont procédé à la division de leur héritage en deux fonds distincts, au cours de L'année 1802, la future propriété X... faisant l'objet d'une vente par adjudication au profit des consorts J...- K..., le 26 janvier 1902, la future propriété Z...- Y... étant quant à elle cédée dans le cadre d'une donation-partage réalisée le 18 janvier 1902, au profit des consorts Eugène et Emile C... ; que c'est donc à l'occasion de ces deux actes qu'il convient d'apprécier l'existence ou non des conditions de mise en oeuvre des dispositions susvisées et l'éventuelle naissance d'une servitude ; que s'agissant de l'existence d'un " signe apparent de servitude " entre les deux fonds, il ressort clairement des pièces du dossier que les deux propriétés bénéficiaient au jour de leur division, d'un accès unique à la voie publique, via la cour cadastrée à l'époque, A 554, lieudit " Impasse... " ; que dès lors, l'attribution de la pleine propriété de cette cour à l'un ou l'autre des deux fonds aurait nécessairement engendré une situation de dépendance du fonds non bénéficiaire de cet allotissement par rapport à l'autre, justifiant, conformément à l'article 394 du Code civil, la reconnaissance d'une servitude de passage à son profit sur la cour ; que toutefois, la lecture des actes de cession alors établis les 18 et 26 janvier 1902, démontrent que l'intention des cédants fut alors tout autre, qu'en effet, l'acte de donation-partage des consorts C...- D... à Emile et Eugène C..., fait expressément référence à une " cour commune ". Cette dernière est mentionnée dans le paragraphe précisant les limites de la maison : " Le tout tenant du midi à une cour commune, ou levant à un passage commun ", puis reprise dans le paragraphe relatif à la grange et au jardin, dont il est indiqué qu'ils sont séparés de la maison par la " cour commune " ; que de même, l'acte d'adjudication du 26 janvier relatif au fonds qui deviendra, le 10 juin 1960, celui des époux X..., fait état d'une " cour commune " ; qu'en conséquence, il peut être affirmé de manière certaine, que l'intention des auteurs communs des deux fonds litigieux fut à l'époque d'attribuer l'Impasse... " non pas à l'un d'eux, le second bénéficiant seulement sur la cour d'une servitude de " bon père de famille ", mais au contraire de conférer aux propriétaires des deux fonds un droit identique d'accès et d'utilisation de cette parcelle, dans le respect l'un de l'autre ; que par ailleurs, on relèvera que ce " droit à une cour commune " constituant un droit réel attaché au fonds lui-même et non à son propriétaire, fut transmis au fur et à mesure des cessions, aux acquéreurs successifs ; que c'est ainsi qu'on le retrouve mentionné dans l'ensemble des actes versés aux dossiers relatifs tant à la propriété devenue celle des consorts X..., qu'à celle appartenant aujourd'hui aux consorts Y...- Z.... Les deux seuls actes qui ne le mentionnent pas expressément correspondent en effet à la vente K.../ Q... de la propriété X..., en date du 28 octobre 1938, ainsi qu'à celle R...- S.../ T...- U... de la même propriété, en date du 16 septembre 1957. Toutefois, sur ces deux actes, seul le second indique clairement que la cession inclut celle de la parcelle A 554 qu'il désigne d'ailleurs comme étant un verger. Le second acte, bien que ne faisant pas textuellement référence à une " cour commune ", ne portait pour autant que sur les parcelles A 546, 547 et 548 et n'incluait donc pas la parcelle litigieuse ; qu'enfin, force est de constater que le titre même du 10 juin 1960, reçu en l'Etude de Maître J-R V..., dont se prévalent aujourd'hui les requérants, délimite leur propriété notamment par rapport à la " cour commune ci-après : cour commune cadastrée section A, n° 554 pour I are 70 ca, permettant d'accéder à la route ; avec puits commun " ; qu'or, indépendamment même du recours à la formule " cour commune ", le fait que ladite parcelle permette de définir les contours de la propriété X... exclut, par définition, qu'elle en fasse partie ; Au vu de l'ensemble de ces éléments, il est établi que la cour correspondant à la parcelle section AH 16, dite " Impasse... " constitue un bien commun aux propriétaires X..., d'une part, Y...- Z..., d'autre part, indépendamment d'ailleurs de l'état ou non d'enclave de la propriété X... ; que les requérants seront déboutés de leur demande tendant à se voir reconnaître la pleine propriété exclusive de cet espace, avec seul droit de passage au profit des défendeurs » ;

ALORS QUE, premièrement, les consorts X... ne pouvaient revendiquer que les droits que les consorts C...- D... ont transmis aux consorts J...- K... lors de l'adjudication du 7 février 1902 dès lors qu'ils tiennent leurs droits des consorts J...- K... ; que l'acte d'adjudication, après avoir décrit les biens transférés, énonçait : « le tout tenant du levant à l'article 45 ci-dessus et par la hache du jardin à plusieurs, du couchant à M. J...- K... et à une cour commune, du midi à MM. C... Eugène et C... Auguste, du nord à plusieurs » ajoutant : « droit à un puits commun » ; qu'en s'abstenant de rechercher si, eu égard au libellé de cet acte, les consorts X..., ayant-droits des consorts J...- K..., pouvaient prétendre à un droit sur la cour commune, l'acte n'évoquant qu'un droit à un puits commun, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 544 et 1134 du Code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, lorsque plusieurs transmissions se succèdent, le dernier propriétaire ne peut revendiquer un droit que pour autant qu'à l'occasion des transmissions intermédiaires ce droit ait été transféré ; qu'en l'espèce, M. Y... soutenait qu'en toute hypothèse plusieurs des actes de transmission, postérieurement à l'adjudication intervenue au profit des consorts J...- K..., ne mentionnait pas la cour commune, celle-ci n'étant évoquée que comme limite de propriété ; qu'en s'abstenant de rechercher si à raison du contenu de ces actes intermédiaires il y avait bien eu transfert d'un droit à la cour commune, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard des articles 544 et 1134 du Code civil ;

ET ALORS QUE, troisièmement, lorsque les propriétaires riverains ont un auteur commun, il faut évidemment se référer aux actes conclus par cet auteur commun pour déterminer quels droits ont été transférés ; qu'au surplus, et à supposer qu'un droit ait été transféré par l'acte conclu par l'auteur commun, en toute hypothèse, le droit en cause doit avoir été ultérieurement transmis à leurs successeurs par les propriétaires intermédiaires ; qu'en l'espèce, M. Y... soutenait précisément que les actes intermédiaires ne mentionnaient pas le droit à la cour commune (conclusions du 29 juillet 2013, p. 5, dern. alinéa) ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 544 et 1134 du Code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Ne varietur


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.