par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 10 juillet 2013, 12-17196
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Cour de cassation, chambre sociale
10 juillet 2013, 12-17.196

Cette décision est visée dans la définition :
Ordre




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 7 mars 2012), que la société RTE EDF Transport, gestionnaire du réseau public de transport d'électricité français, a, pour répondre aux évolutions technologiques, souhaité réorganiser son réseau de télécommunications de sécurité comprenant un niveau national et un niveau régional et, dans cette perspective, a soumis au comité central d'entreprise (CCE) un projet dénommé "CASTER" portant création de centres d'administration, de supervision et de télémaintenance régionaux ; qu'ayant estimé que la phase d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel était achevée, la société a pris, le 4 juillet 2011, la décision de mettre en place le cadre national d'organisation du domaine "contrôle commande" des réseaux ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société RTE EDF Transport fait grief à l'arrêt de rejeter son exception d'incompétence, d'ordonner la suspension de la décision du 4 juillet 2011 et de lui faire interdiction de poursuivre la mise en oeuvre du projet litigieux tant que le CCE n'aura pas émis un avis dans les quinze jours suivant la transmission qui lui sera faite par cette société des avis des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) concernés, alors, selon le moyen :

1°/ que tout litige relatif à une décision ou à acte préparatoire se rapportant à l'organisation de missions de service public a une nature administrative et relève de la compétence du juge administratif ; que la société RTE EDF Transport avait rappelé que ses missions de service public, précisées dans le contrat de service public conclu avec l'Etat, étaient notamment la sécurisation du réseau public de transport, l'insertion environnementale du réseau de transport, la sécurité d'approvisionnement, la qualité d'alimentation et le raccordement du réseau ; qu'elle avait fait valoir que la décision du 4 juillet 2011 portant organisation d'un cadre national de l'activité contrôle commande avait été prise dans le cadre desdites missions ; qu'en ne recherchant pas si la réorganisation des activités de contrôle commande mise en oeuvre par la société RTE EDF Transport ne se rapportait pas à l'exercice de ses missions de service public, lequel excluait toute compétence du juge judiciaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790, ensemble le principe de la séparation des pouvoirs ;

2°/ que le juge administratif est seul compétent pour trancher un litige relatif à la procédure de consultation préalable des institutions représentatives du personnel quand est en cause une décision relative à la validité des actes préparatoires à la mise en oeuvre de modifications touchant à l'organisation structurelle du service public ; que la décision du 4 juillet 2011 relative à la réorganisation des services chargés de la maintenance et de la gestion du réseau, et portant mise en place d'un cadre national, avait notamment pour objet d'instituer des centres d'administration, de supervision et de télémaintenance régionale ; que la société RTE EDF Transport avait fait valoir que la décision précitée avait pour objet de maintenir un service public de haut niveau et à cette fin, d'améliorer le service public offert aux clients, en ce que notamment, le centre de supervision avait pour objet d'agir à distance pour des actions de télémaintenance afin d'assurer dans des délais compatibles avec les niveaux de service, le rétablissement des fonctionnalités et services concernés et en initiant des opérations de dépannage auprès des équipes ou fournisseurs, tout en restant en relation constante avec les exploitants des ouvrages électriques pour l'identification des impacts sur ceux-ci ; qu'en se bornant à énoncer qu'il n'était pas démontré que les modifications envisagées, qui ont trait à une réorganisation de certaines tâches, aient une incidence sur la distribution et le transport de l'énergie, non plus que sur la situation des clients et relevaient du fonctionnement du service public, pour exclure la compétence du juge administratif, sans rechercher si l'amélioration du service public offert n'avait pas une incidence sur l'efficacité de la distribution et sur la situation des clients, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790, ensemble le principe de la séparation des pouvoirs ;

3°/ que, subsidiairement, à supposer que la réorganisation litigieuse ait un impact sur les seules conditions de travail et d'emploi des salariés, cette circonstance ne suffit pas à exclure la compétence des juridictions administratives dès lors que les salariés sont affectés à l'exécution d'une mission de service public et que la modification de leurs conditions de travail se rattache, dans le cadre de l'exécution du contrat conclu avec l'Etat, à la bonne réalisation de la mission confiée à la société RTE EDF Transport ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble le principe de la séparation des pouvoirs ;

Mais attendu que, si le juge de l'ordre administratif est compétent pour trancher un litige relatif à une procédure de consultation préalable des institutions représentatives du personnel lorsqu'est en cause une décision relative à l'organisation du service public assuré par un établissement public à caractère industriel ou commercial ou par une société de droit privé, le juge judiciaire est, en revanche, compétent pour trancher un tel litige lorsque la décision de réorganisation ne tend pas à affecter directement le service public concerné ; que la cour d'appel a retenu que la société anonyme RTE EDF Transport n'avait pas démontré que la décision en cause entraînait une modification de l'organisation du service public et a constaté, en procédant à l'examen du projet, qu'il ne portait que sur le fonctionnement interne de ce service, sans que les modifications envisagées, qui avaient trait à une réorganisation de certaines tâches, eussent une incidence sur la distribution et le transport de l'énergie, non plus que sur la situation des clients ; qu'elle a ainsi, se livrant à la recherche prétendument omise de savoir si la réorganisation des activités de contrôle commande se rapportait à l'exercice d'une mission de service public dont la société RTE EDF Transport est en charge, fait ressortir que la décision contestée ne constituait pas directement, par son objet, une mesure d'organisation du service public de la distribution d'électricité et en a exactement déduit que le litige ressortissait à la compétence du juge judiciaire, peu important que les salariés de cette société, soumis à des relations de droit privé et au code du travail, soient affectés à l'exécution d'une mission de service public ; que le moyen, qui manque en fait en sa première branche et n'est pas fondé en ses deux autres branches, ne peut être accueilli ;

Sur les deuxième et troisième moyens réunis :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de faire droit aux demandes du CCE de la société RTE EDF Transport et de la Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie CGT (FNME-CGT), alors, selon le moyen :

1°/ que le rejet d'une résolution par le comité central d'entreprise constitue l'aboutissement du processus d'information et de consultation, que la régularité de la consultation soit ou non en cause ; en décidant le contraire après avoir constaté que la résolution litigieuse avait été sans équivoque rejetée le 29 juin 2011, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 2327-2 du code du travail, ensemble l'article 809 du code de procédure civile ;

2°/ que seule l'évidence du droit revendiqué permet de caractériser un trouble manifestement illicite ; que l'appréciation du cadre de mise en oeuvre des dispositions légales sur l'information et la consultation des différentes institutions représentatives du personnel au regard de la nature de la décision qui sera prise par l'employeur et de son degré de spécificité, relève de la seule compétence du juge du fond ; en procédant à une telle appréciation, en l'absence de dispositions légales relatives à une obligation de consultation de chaque comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, préalablement à la consultation du comité central d'entreprise et antérieurement à la prise d'une simple décision de principe, générale et à caractère national, sur un projet sans impact local immédiat, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article 809 du code de procédure civile ;

3°/ que le comité central d'entreprise, consulté sur un projet relatif à une décision de principe générale à caractère national n'est pas fondé à réclamer la consultation de chaque comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail pour disposer de leur avis préalable ; seule la mise en oeuvre d'une décision prise par un directeur d'établissement et les dispositions spécifiques à l'établissement nécessitées par l'application d'une décision de principe émanant de la direction générale d'une entreprise, doivent faire l'objet d'une consultation préalable pour avis de chaque comité d'établissement concerné ; les comités d'établissement n'ont pas à être consultés sur une décision de principe prise par la direction générale de l'entreprise relative au projet de réorganisation d'une activité, sans impact local immédiat, décision relevant de la consultation exclusive du comité central d'entreprise ; en statuant comme elle l'a fait, sans vérifier si la décision litigieuse, dont elle relevait qu'il s'agissait d'un projet, avait en elle-même des conséquences directes et immédiates en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail, conséquences qu'elle devait être en mesure de constater, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2323-37 et L. 4612-8 du code du travail ;

4°/ que le comité central d'entreprise, consulté sur un projet relatif à une décision de principe générale à caractère national n'est pas fondé à réclamer la consultation de chaque comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail pour disposer de leur avis préalable ; seule la mise en oeuvre d'une décision prise par un directeur d'établissement et les dispositions spécifiques à l'établissement nécessitées par l'application d'une décision de principe émanant de la direction générale d'une entreprise, doivent faire l'objet d'une consultation préalable pour avis de chaque comité d'établissement et de chaque comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail concerné par l'application au niveau local de ladite décision ; une décision prise par la direction générale de l'entreprise relative au principe de la réorganisation d'une activité relève de la compétence exclusive du comité central d'entreprise, seule institution représentative du personnel à devoir être consultée à ce stade du projet de réorganisation ; en statuant comme elle l'a fait, sans distinguer la prise d'une décision de principe de sa mise en oeuvre, ni tenir compte des périmètres d'intervention spécifiques aux institutions représentatives du personnel disposant d'un comité central d'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2323-37 et L. 4612-8 du code du travail ;

5°/ qu'en toute hypothèse, l'intervention de l'organisme national créé par voie conventionnelle, compétent en matière de santé et de sécurité, qui procède, dans la limite des pouvoirs qui lui ont été octroyés, à l'examen d'un projet relatif à une décision prise par la direction générale d'une entreprise et portant sur le seul principe de la réorganisation d'une activité, permet à l'employeur de justifier avoir satisfait à ses obligations, aucune consultation des CHSCT locaux ne s'imposant avant la mise en oeuvre, au niveau local, de la décision de principe prise au niveau national et ayant seulement relevé de la consultation du comité central d'entreprise, ce qui exclut que tous les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail aient à être consultés au niveau local, aucune mise en oeuvre de la réorganisation n'étant encore en cause ; qu'en ne déduisant pas de l'examen du projet litigieux par le comité santé sécurité que la société RTE-EDF Transport avait satisfait à ses obligations au stade d'une prise de décision d'ordre général sans application locale immédiate, ce qui excluait de caractériser un trouble manifestement illicite, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 2323-37 et L. 4612-8 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le projet soumis pour avis au CCE aboutissait à une transformation importante des postes de travail découlant d'une réorganisation conséquente de certaines tâches, la cour d'appel, qui a fait ressortir que, par sa décision du 4 juillet 2011, le président du directoire de la société avait non seulement adopté le principe même de cette réorganisation mais également décidé, à cette même date, de sa mise en oeuvre immédiate, a exactement retenu que le CCE était dès lors fondé, pour pouvoir émettre un avis sur ce projet, à demander que lui soient transmis préalablement les avis des CHSCT existant dans les entités affectées par la réorganisation et a pu en déduire, la procédure d'information ne pouvant alors être tenue pour achevée, que le trouble invoqué était manifestement illicite ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société RTE EDF Transport aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne également à payer au comité central d'entreprise de la société RTE EDF Transport et à la Fédération nationale des syndicats des salariés des Mines et de l'énergie CGT la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société RTE EDF Transport.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société RTE EDF Transport, d'avoir ordonné la suspension de la décision du 4 juillet 2011 et fait interdiction à la société RTE EDF Transport de poursuivre la mise en oeuvre du projet litigieux tant que le comité central d'entreprise de la société RTE EDF Transport n'aura pas émis un avis dans les quinze jours suivant la transmission qui lui sera faite par cette société des avis des Chsct concernés ;

AUX MOTIFS QUE la société RTE EDF Transport ne peut utilement s'emparer, pour tenter de justifier la compétence qu'elle entend voir reconnaître au juge administratif, d'extraits de réponses ou de propos isolés de leur contexte ; qu'elle ne démontre pas que la décision en cause entraîne une modification de l'organisation du service public et qu'il résulte au contraire de l'examen du projet qu'il ne porte que sur le fonctionnement interne de ce service, sans que les modifications envisagées, qui ont trait à une réorganisation de certaines tâches, aient une incidence sur la distribution et le transport de l'énergie, non plus que sur la situation des clients ; que ce qui, comme en l'espèce, se rapporte au seul fonctionnement du service public relève de la compétence du juge judiciaire ;

1/ ALORS QUE tout litige relatif à une décision ou à acte préparatoire se rapportant à l'organisation de missions de service public a une nature administrative et relève de la compétence du juge administratif ; que la société RTE EDF Transport avait rappelé que ses missions de service public, précisées dans le contrat de service public conclu avec l'Etat, étaient notamment la sécurisation du réseau public de transport, l'insertion environnementale du réseau de transport, la sécurité d'approvisionnement, la qualité d'alimentation et le raccordement du réseau ; qu'elle avait fait valoir que la décision du 4 juillet 2011 portant organisation d'un cadre national de l'activité contrôle commande avait été prise dans le cadre desdites missions ; qu'en ne recherchant pas si la réorganisation des activités de contrôle commande mise en oeuvre par la société RTE EDT Transport ne se rapportait à l'exercice de ses missions de service public lequel excluait toute compétence du juge judiciaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790, ensemble le principe de la séparation des pouvoirs ;

2/ ALORS QUE le juge administratif est seul compétent pour trancher un litige relatif à la procédure de consultation préalable des institutions représentatives du personnel quand est en cause une décision relative à la validité des actes préparatoires à la mise en oeuvre de modifications touchant à l'organisation structurelle du service public ; que la décision du 4 juillet 2011 relative à la réorganisation des services chargés de la maintenance et de la gestion du réseau, et portant mise en place d'un cadre national, avait notamment pour objet d'instituer des centres d'administration, de supervision et de télémaintenance régionale ; que la société RTE EDF Transport avait fait valoir que la décision précitée avait pour objet de maintenir un service public de haut niveau et à cette fin, d'améliorer le service public offert aux clients, en ce que notamment, le centre de supervision avait pour objet d'agir à distance pour des actions de télémaintenance afin d'assurer dans des délais compatibles avec les niveaux de service, le rétablissement des fonctionnalités et services concernés et en initiant des opérations de dépannage auprès des équipes ou fournisseur, tout en restant en relation constante avec les exploitants des ouvrages électriques pour l'identification des impacts sur ceux-ci ; qu'en se bornant à énoncer qu'il n'était pas démontré que les modifications envisagées, qui ont trait à une réorganisation de certaines tâches, aient une incidence sur la distribution et le transport de l'énergie, non plus que sur la situation des clients et relevaient du fonctionnement du service public, pour exclure la compétence du juge administratif, sans rechercher si l'amélioration du service public offert n'avait pas une incidence sur l'efficacité de la distribution et sur la situation des clients, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790, ensemble le principe de la séparation des pouvoirs

3/ ALORS QUE subsidiairement, à supposer que la réorganisation litigieuse ait un impact sur les seules conditions de travail et d'emploi des salariés, cette circonstance ne suffit pas à exclure la compétence des juridictions administratives dès lors que les salariés sont affectés à l'exécution d'une mission de service public et que la modification de leurs conditions de travail se rattache, dans le cadre de l'exécution du contrat conclu avec l'Etat, à la bonne réalisation de la mission confiée à la société RTE EDF Transport ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble le principe de la séparation des pouvoirs.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société RTE EDF Transport, d'avoir ordonné la suspension de la décision du 4 juillet 2011 et fait interdiction à la société RTE EDF Transport de poursuivre la mise en oeuvre du projet litigieux tant que le comité central d'entreprise de la société RTE EDF Transport n'aura pas émis un avis dans les quinze jours suivant la transmission qui lui sera faite par cette société des avis des Chsct concernés ;

AUX MOTIFS QUE la société RTE EDF Transport, pour faire obstacle à l'examen des demandes de ses contradicteurs, prétend que le comité central d'entreprise susnommé est dépourvu d'intérêt à agir car le processus d'information et de consultation le concernant s'est achevé par son vote en date du 29 juin 2011, étant indiqué qu'aucun quorum n'est fixé pour l'adoption d'une résolution ou d'un avis d'un comité de cette nature, la délibération prise par un seul de ses membres à la suite du départ des autres étant régulière ; mais qu'en l'espèce la résolution a été sans équivoque rejetée, une seule voix s'étant prononcée en faveur de son adoption quand trois ont été exprimées en sens contraire ; qu'il n'est pas établi qu'à la date à laquelle le premier juge a eu à statuer la procédure d'information et de consultation pouvait être tenue pour achevée ; que le comité central d'entreprise de la société RTE EDF Transport justifie être en droit d'agir et que la fin de non-recevoir qui lui est opposée doit être rejetée ; que le fait que la décision du 4 juillet 2011 ait été prise alors que le processus de consultation du comité central d'entreprise ne pouvait assurément pas être tenu pour achevé puisque la prétention qu'il avait à bon droit exprimée de disposer des avis des Chsct pour être en mesure de se prononcer n'avait pas été satisfaite constitue un trouble manifestement illicite qu'il entre dans les pouvoirs du juge des référés de faire cesser ;

ALORS QUE le rejet d'une résolution par le comité central d'entreprise constitue l'aboutissement du processus d'information et de consultation, que la régularité de la consultation soit ou non en cause ; qu'en décidant le contraire après avoir constaté que la résolution litigieuse avait été sans équivoque rejetée le 29 juin 2011, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et aviolé l'article L.2327-2 du code du travail, ensemble l'article 809 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné la suspension de la décision du 4 juillet 2011 et d'avoir fait interdiction à la société RTE EDF Transport de poursuivre la mise en oeuvre du projet litigieux tant que le comité central d'entreprise de la société RTE EDF Transport n'aura pas émis un avis dans les quinze jours suivant la transmission qui lui sera faite par cette société des avis des Chsct concernés ;

AUX MOTIFS qu'aux termes de l'article L.4612-8 du code du travail le Chsct est consulté avant toute décision d'aménagement importante modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et, notamment, avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l'organisation du travail ; qu'il est évident, et ne peut être sérieusement contesté par l'intimée si l'on se réfère à la description qu'elle-même en fait dans ses écritures, que le projet litigieux aboutit à une transformation importante des postes de travail découlant d'une réorganisation conséquente de certaines taches ; qu'elle dénie d'ailleurs d'autant moins la nécessité de la saisine de tous les Chsct locaux, indépendamment de la consultation du Comité santé sécurité, qu'elle déclare qu'ils ont été convoqués et se sont réunis ; qu'il s'avère néanmoins que ces réunions ont été postérieures à. la décision du 4 juillet 2011, intervenue alors que le comité central d'entreprise, quel qu'ait pu être le nombre des précédentes consultations et l'importance des informations qui lui avaient été communiquées, n'était pas en possession des avis exprimés par les Chsct concernés, dont il avait légitimement et en temps utile souhaité obtenir la communication, n'avait dés lors pas été mis à même se prononcer en pleine connaissance de cause ; que le fait que la décision du 4 juillet 2011 ait été prise alors que le processus de consultation du comité central d'entreprise ne pouvait assurément pas être tenu pour achevé puisque la prétention qu'il avait à bon droit exprimée de disposer des avis des Chsct pour être en mesure de se prononcer n'avait pas été satisfaite constitue un trouble manifestement illicite qu'il entre dans les pouvoirs du juge des référés de faire cesser en prescrivant les mesures de remise en état qui s'imposent, lesquelles consistent en la suspension de la décision susmentionnée et en l'interdiction faite à l'intimée de poursuivre la mise en oeuvre du projet litigieux tant que le comité central d'entreprise n'aura pas émis un avis dans le délai de quinze jours suivant la transmission qui lui sera faite des avis des Chsct, sans qu'il s'avère nécessaire d'assortir cette transmission d'une astreinte ;

1/ ALORS QUE seule l'évidence du droit revendiqué permet de caractériser un trouble manifestement illicite ; que l'appréciation du cadre de mise en oeuvre des dispositions légales sur l'information et la consultation des différentes institutions représentatives du personnel au regard de la nature de la décision qui sera prise par l'employeur et de son degré de spécificité, relève de la seule compétence du juge du fond ; qu'en procédant à une telle appréciation, en l'absence de dispositions légales relatives à une obligation de consultation de chaque comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, préalablement à la consultation du comité central d'entreprise et antérieurement à la prise d'une simple décision de principe, générale et à caractère national, sur un projet sans impact local immédiat, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article 809 du code de procédure civile ;

2/ ALORS QUE le comité central d'entreprise, consulté sur un projet relatif à une décision de principe générale à caractère national n'est pas fondé à réclamer la consultation de chaque comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail pour disposer de leur avis préalable ; que seule la mise en oeuvre d'une décision prise par un directeur d'établissement et les dispositions spécifiques à l'établissement nécessitées par l'application d'une décision de principe émanant de la direction générale d'une entreprise, doivent faire l'objet d'une consultation préalable pour avis de chaque comité d'établissement concerné ; que les comités d'établissement n'ont pas à être consultés sur une décision de principe prise par la direction générale de l'entreprise relative au projet de réorganisation d'une activité, sans impact local immédiat, décision relevant de la consultation exclusive du comité central d'entreprise ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans vérifier si la décision litigieuse, dont elle relevait qu'il s'agissait d'un projet, avait en elle-même des conséquences directes et immédiates en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail, conséquences qu'elle devait être en mesure de constater, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.2323-37 et L.4612-8 du code du travail ;

3/ ALORS QUE le comité central d'entreprise, consulté sur un projet relatif à une décision de principe générale à caractère national n'est pas fondé à réclamer la consultation de chaque comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail pour disposer de leur avis préalable ; que seule la mise en oeuvre d'une décision prise par un directeur d'établissement et les dispositions spécifiques à l'établissement nécessitées par l'application d'une décision de principe émanant de la direction générale d'une entreprise, doivent faire l'objet d'une consultation préalable pour avis de chaque comité d'établissement et de chaque comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail concerné par l'application au niveau local de ladite décision ; qu'une décision prise par la direction générale de l'entreprise relative au principe de la réorganisation d'une activité relève de la compétence exclusive du comité central d'entreprise, seule institution représentative du personnel à devoir être consultée à ce stade du projet de réorganisation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans distinguer la prise d'une décision de principe de sa mise en oeuvre, ni tenir compte des périmètres d'intervention spécifiques aux institutions représentatives du personnel disposant d'un comité central d'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.2323-37 et L.4612-8 du code du travail ;

4/ ALORS QUE en toute hypothèse, l'intervention de l'organisme national créé par voie conventionnelle, compétent en matière de santé et de sécurité, qui procède, dans la limite des pouvoirs qui lui ont été octroyés, à l'examen d'un projet relatif à une décision prise par la direction générale d'une entreprise et portant sur le seul principe de la réorganisation d'une activité, permet à l'employeur de justifier avoir satisfait à ses obligations, aucune consultation des Chsct locaux ne s'imposant avant la mise en oeuvre, au niveau local, de la décision de principe prise au niveau national et ayant seulement relevé de la consultation du comité central d'entreprise, ce qui exclut que tous les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail aient à être consultés au niveau local, aucune mise en oeuvre de la réorganisation n'étant encore en cause ; qu'en ne déduisant pas de l'examen du projet litigieux par le comité santé sécurité que la société RTE-EDF Transport avait satisfait à ses obligations au stade d'une prise de décision d'ordre général sans application locale immédiate, ce qui excluait de caractériser un trouble manifestement illicite, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L.2323-37 et L.4612-8 du code du travail.



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