par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 28 avril 2011, 10-13979
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Cour de cassation, chambre sociale
28 avril 2011, 10-13.979

Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Lyon, 6 janvier 2010), que Mme X... employée par la Société d'exploitation des thermes de Divonne (la société) en qualité de responsable des cures thermales, a été convoquée à un entretien préalable à licenciement le 6 février 2006 ; qu'ensuite de cet entretien, l'employeur, par courrier du 1er mars 2006, lui a proposé la modification de ses fonctions et lui a demandé de signer un avenant à son contrat de travail ; que la salariée ayant refusé, elle a fait l'objet d'un licenciement disciplinaire le 30 novembre 2006 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que Mme X... a fait l'objet d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen, qu'une modification du contrat de travail, prononcée à titre disciplinaire contre un salarié ne peut lui être imposée, et que son acceptation ne peut résulter de son silence et de la seule poursuite du contrat de travail aux conditions nouvelles, en l'absence d'autres éléments manifestant sa volonté non équivoque d'y consentir ; que l'employeur, qui se heurte au refus d'une mesure de rétrogradation impliquant une modification du contrat, peut, dans l'exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction, aux lieu et place de la sanction refusée ; qu'ayant relevé que Mme X... avait refusé de signer un avenant à son contrat de travail emportant à titre disciplinaire une rétrogradation de ses fonctions et avait sollicité sa réintégration dans ses fonctions et responsabilités antérieures, ce dont il résultait que la salariée avait refusé de consentir à la modification de son contrat de travail, peu important qu'elle ne se soit occupée à compter du 1er mars 2006 que du seul service d'hygiène, du ménage, du linge et des vestiaires, compte tenu du retrait de la gestion des cures, la cour d'appel, en énonçant que Mme X... "ayant déjà fait l'objet le 1er mars 2006 d'une mesure disciplinaire (rétrogradation) à raison de faits d'insuffisance professionnelle formulés dans les mêmes termes que ceux visés dans la lettre de licenciement, seuls les faits survenus postérieurement à cette date pourraient être pris en considération pour déterminer si le licenciement querellé est ou non causé, l'employeur ayant épuisé son pouvoir disciplinaire au titre de la période antérieure" et en décidant en conséquence que le licenciement de la salariée était dépourvu de cause réelle et sérieuse, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 1232-1, L. 1331-1, L. 1232-1 et L. 1332-2 du code du travail ;

Mais attendu que lorsque le salarié refuse une mesure de rétrogradation disciplinaire notifiée après un premier entretien préalable, l'employeur qui envisage de prononcer un licenciement au lieu de la sanction initiale doit convoquer l'intéressé à un nouvel entretien dans le délai de la prescription de deux mois prévu à l'article L. 1332-4 du code du travail ; que le refus du salarié interrompt ce délai ;

Et attendu que l'arrêt relève que Mme X... a refusé le 6 avril 2006 et le 17 mai 2006 la modification de son contrat de travail proposée à titre de sanction disciplinaire par son employeur, puis a été en arrêt maladie du 23 mai au 16 octobre 2006 pour être ensuite convoquée le 10 novembre 2006 à un nouvel entretien préalable, soit plus de deux mois après le refus opposé à sa rétrogradation ; qu'il en résulte que la prescription étant acquise, le licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ; que par ce motif de pur droit substitué à ceux critiqués, après avertissement donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, l'arrêt se trouve légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société d'exploitation des thermes de Divonne aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Société d'exploitation des thermes de Divonne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Laugier et Caston, avocat aux Conseils, pour la Société d'exploitation des thermes de Divonne.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que Madame Renée X... a fait l'objet d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société LES THERMES DE DIVONNE à lui payer la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné d'office la société LES THERMES DE DIVONNE à rembourser à PĂ »LE EMPLOI le montant, plafonné à six mois de telles indemnités, des prestations de base de l'allocation chômage susceptibles d'avoir été versées à la salariée à la suite de son licenciement ;

AUX MOTIFS QUE Madame X... a justement fait valoir qu'ayant déjà fait l'objet le 1er mars 2006 d'une mesure disciplinaire (rétrogradation) à raison de faits d'insuffisance professionnelle formulés dans les mêmes termes que ceux visés dans la lettre de licenciement, seuls les faits survenus postérieurement à cette date pourraient être pris en considération pour déterminer si le licenciement querellé est ou non causé, l'employeur ayant épuisé son pouvoir disciplinaire au titre de la période antérieure ; qu'en effet, le courrier du 1er mars 2006 est bien constitutif d'une sanction disciplinaire en ce que :

- l'insuffisance professionnelle dénoncée a été accompagnée d'un comportement fautif, l'employeur ayant indiqué, concernant la baisse de fréquentation de l'établissement, que la salariée avait été « rappelée à l'ordre à de multiples reprises verbalement et par écrit » et fait également état de l'existence d'un « très mauvais relationnel avec les autres membres du personnel devenu source de tensions et de conflits au sein de notre équipe… vous avez souvent entretenu des relations conflictuelles avec vos collègues de travail ou subordonnés. Cette attitude n'est plus aujourd'hui supportable d'autant que vous continuez systématiquement à rejeter la responsabilité des faits qui vous sont reprochés sur vos collaborateurs » ;

- le retrait de la gestion des cures, aux fins de permettre à la salariée de se concentrer sur le service hygiène, ménage, linge, vestiaires, a bien eu pour effet d'affecter la fonction exercée par Madame X..., ce à quoi celle-ci a obtempéré en indiquant dans son courrier du 6 avril 2006, tout en sollicitant sa réintégration dans ses fonctions et responsabilités, qu'elle ne s'était plus occupée dès réception de l'avenant le 8/03/06 que des salariés, du ménage, du vestiaire et des commandes ;


que l'intimée n'est pas fondée à reprocher à la salariée d'avoir persévéré dans son refus de signer un avenant à son contrat de travail qui modifiait ses conditions de travail : Madame X... ayant été parfaitement en droit de refuser de signer ledit avenant, elle n'a commis aucune faute ce qui prive ce premier grief tiré du refus de signer l'avenant de tout fondement ; que pas davantage, la société THERMES DE DIVONNE n'est fondée à lui reprocher une insuffisance professionnelle aux motifs qu'à compter du 1er mars 2006 Madame X... n'a plus eu en charge la responsabilité des cures thermales, que pour la majeure partie du temps ayant couru du 1er mars 2006 au licenciement querellé elle a été en arrêt de travail pour maladie suite à un accident de la vie privée (du 23 mai au 16 octobre 2006) et qu'au surplus il n'est produit aucune pièce utile se rapportant à ladite période ; qu'il y a lieu en conséquence, réformant, de dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;


ALORS QU'une modification du contrat de travail, prononcée à titre disciplinaire contre un salarié ne peut lui être imposée, et que son acceptation ne peut résulter de son silence et de la seule poursuite du contrat de travail aux conditions nouvelles, en l'absence d'autres éléments manifestant sa volonté non équivoque d'y consentir ; que l'employeur, qui se heurte au refus d'une mesure de rétrogradation impliquant une modification du contrat, peut, dans l'exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction, aux lieu et place de la sanction refusée ; qu'ayant relevé que Madame X... avait refusé de signer un avenant à son contrat de travail emportant à titre disciplinaire une rétrogradation de ses fonctions et avait sollicité sa réintégration dans ses fonctions et responsabilités antérieures, ce dont il résultait que la salariée avait refusé de consentir à la modification de son contrat de travail, peu important qu'elle ne se soit occupée à compter du 1er mars 2006 que du seul service d'hygiène, du ménage, du linge et des vestiaires, compte tenu du retrait de la gestion des cures, la Cour d'appel, en énonçant que Madame X... « ayant déjà fait l'objet le 1er mars 2006 d'une mesure disciplinaire (rétrogradation) à raison de faits d'insuffisance professionnelle formulés dans les mêmes termes que ceux visés dans la lettre de licenciement, seuls les faits survenus postérieurement à cette date pourraient être pris en considération pour déterminer si le licenciement querellé est ou non causé, l'employeur ayant épuisé son pouvoir disciplinaire au titre de la période antérieure » et en décidant en conséquence que le licenciement de la salariée était dépourvu de cause réelle et sérieuse, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles L. 1232-1, L. 1331-1, L. 1232-1 et L. 1332-2 du Code du travail.



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Licenciement


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.