par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 14 avril 2010, 09-11909
Dictionnaire Juridique
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
14 avril 2010, 09-11.909
Cette décision est visée dans la définition :
Juge de l'exécution (JEX)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu qu'en exécution d'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 7 juillet 1993, déclaré exécutoire en Côte d'Ivoire le 5 janvier 1994, M. Vincent X... a fait pratiquer le 23 avril 2004, une saisie-attribution entre les mains de la Banque internationale pour le commerce en Côte d'Ivoire (ci-après BICI-CI) où Mme Y..., sa débitrice avait ouvert un compte ; que cette saisie a été dénoncée par Mme Z... ; qu'estimant que la banque avait commis une faute à son préjudice en organisant l'insolvabilité de sa débitrice, M. X... a assigné la BICI-CI en responsabilité, devant le tribunal de grande instance de Paris en invoquant l'article 14 du code civil ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 4 décembre 2008) d'avoir dit que le tribunal de grande instance de Paris était incompétent pour statuer sur son action à l'encontre de la BICI-CI et, en conséquence, de l'avoir renvoyé à mieux se pourvoir, alors, selon le moyen, que les juridictions françaises sont compétentes pour statuer sur une action en responsabilité civile exercée par un Français à l'encontre d'un tiers saisi étranger ; qu'en relevant, pour écarter la compétence des juridictions françaises, que l'action en responsabilité dirigée contre le tiers saisi, dont elles étaient saisies, découlait directement des voies d'exécution pratiquées à l'étranger, quand les demandes formées ne visaient pas la régularité des saisies mises en oeuvre à l'étranger qui échappe seule, en cette matière, à la compétence des juridictions françaises fondée sur l'article 14 du code civil, la cour d'appel a violé cette disposition par fausse interprétation et refus d'application ;
Mais attendu que la cour d'appel a justement rappelé que l'article 14 du code civil, qui permet au plaideur français d'attraire un étranger devant les juridictions françaises, doit être exclu pour des demandes relatives à des voies d'exécution pratiquées hors de France ; qu'ayant retenu que l'action engagée par M. X... contre la BICI-CI découlait directement des voies d'exécution pratiquées entre les mains de celle-ci en Côte d'Ivoire, elle en a déduit, à bon droit, que M. X... ne pouvait se prévaloir de ce texte, peu important que la régularité de la saisie litigieuse n'eût pas été contestée ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que le Tribunal de grande instance de Paris était incompétent pour statuer sur l'action de Monsieur X... à l'encontre de la Banque Nationale pour le Commerce et l'Industrie de la Côte d'Ivoire et, en conséquence, d'AVOIR renvoyé Monsieur Vincent X... à mieux se pourvoir ;
AUX MOTIFS QUE la BICI-CI soulève l'incompétence du Tribunal de grande instance de Paris au profit du Tribunal de première instance d'Abidjan, pris en sa qualité de juge de l'exécution, faisant valoir que les demandes de M. X..., qui exerce à son encontre l'action dont le saisissant dispose contre le tiers saisi qui n'a pas rempli son obligation déclarative, sont relatives à la mise en oeuvre des mesures d'exécution ; que l'appelant soutient qu'il exerce contre la banque une action en responsabilité quasi délictuelle, fondée sur l'article 1382 du Code civil à raison d'une faute dépassant le cadre de la saisie et détachable de celle-ci ayant consisté à favoriser l'organisation par sa débitrice, Mme Y..., de son insolvabilité ; que l'article 14 du Code civil prévoit que l'étranger, même résidant en France, pourra être cité devant les tribunaux français pour l'exécution des obligations par lui contractées en France ou en pays étranger envers des Français ; que l'article 14 qui permet au plaideur français d'attraire un étranger devant les juridictions françaises a une portée générale s'étendant à toutes les matières, à l'exclusion, toutefois, des actions réelles immobilières, des demandes en partage portant sur des immeubles situés à l'étranger et des demandes relatives à des voies d'exécution pratiquées hors de France ; qu'il est constant que M. X... a fait pratiquer le 12 janvier 2004 en Côte-d'Ivoire à l'encontre de Mme Y..., entre les mains de la BICI-CI, une première saisie-attribution ; que la banque a déclaré à l'huissier de justice que le compte de sa cliente était créditeur de 11. 870. 518 FCFA et que, compte tenu de ses frais et d'un avis à tiers détenteur antérieur d'un montant de 1. 545. 000 FCFA, elle bloquait une somme de 11. 837. 000 FCFA ; que par un arrêt du 8 juin 2004, confirmant une ordonnance du 19 mars 2004, la Cour d'appel d'Abidjan a dit nulle cette saisie ; que M. X... a fait pratiquer le 23 avril 2004 une nouvelle saisie-attribution contre sa débitrice entre les mains de la banque ; que celle-ci a déclaré à l'huissier de justice que le compte de sa cliente était débiteur de 3. 629 FCFA ; que M. X... fait grief à la BICI-CI de cette réponse, soutenant qu'à la date de sa seconde saisie, l'indisponibilité consécutive à la saisie du 12 janvier 2004 continuait de produire ses effets empêchait que le compte puisse subir une quelconque variation ; qu'il reproche encore à la banque d'avoir apposé son timbre horodateur du 3 décembre 2003 sur un avis à tiers détenteur d'un montant de 62. 953. 550 FCFA qui est, selon lui, un faux et de l'existence duquel elle n'avait pas fait état à l'occasion de la première saisie, mais qu'elle a remis à Mme Y..., laquelle l'a produit au cours de la procédure en contestation de ladite saisie, ce qui a aidé l'intéressée à organiser son insolvabilité et fait obstacle au recouvrement de sa créance ; qu'aux termes de l'article L. 213-6 du Code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, non seulement des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, mais aussi des demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageable des mesures d'exécution ; que l'article 60 du décret du 31 juillet 1992 dispose que le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus est condamné, à la demande du créancier, à payer les sommes dues à ce dernier sans préjudice de son recours contre le débiteur, peut aussi être condamné à des dommages et intérêts en cas de négligence fautive ou de déclaration inexacte ou mensongère ; que M. X... fustige manifestement le comportement de la BICI-CI dans son rôle de tiers saisi à l'occasion des saisies-attribution des 12 janvier et 23 avril 2004 (déclaration inexacte ou mensongère, visa et remise d'un ATD douteux, le tout au profit du saisi et au préjudice du saisissant) ; qu'en réponse la BICI-CI argue, notamment, de la nullité de la saisie pratiquée entre ses mains le 23 avril 2004 et discute des effets de la décision ayant dit nulle la saisie du 12 janvier 2004 ; que comme l'a justement retenu le juge de la mise en état, l'action dirigée par M. X... contre la BICI-CI découle directement des voies d'exécution pratiquées entre les mains de celle-ci ; que l'appelant en a, d'ailleurs, lui-même conscience puisqu'il invoque à l'appui de ses prétentions, outre les dispositions de l'article 1382 du Code civil, celles de l'Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution pris en application du traité portant organisation du droit des affaires en Afrique, « OHADA », dont l'article 38 dispose que « les tiers ne peuvent faire obstacle aux procédures en vue de l'exécution ou de la conservation des créances. Ils doivent y apporter leurs concours lorsqu'ils en sont requis. Tout manquement par eux à ces obligations peut entraîner leur condamnation à verser des dommages et intérêts » et dont l'article 152 alinéa 2 ajoute que toute déclaration inexacte du tiers saisi l'expose à être condamné au paiement des causes de la saisie « sans préjudice d'une condamnation à des dommages et intérêts » ; que ses demandes étant relatives à des voies d'exécution, le privilège de juridiction qu'invoque M. X... n'est donc pas applicable ; que le juge de l'exécution territorialement compétent est celui du lieu où sont situés les biens saisis ; que cette règle de compétence interne est applicable dans l'ordre international ; que les deux saisies pratiquées par M. X... contre Mme Y... l'ont été en Côte-d'Ivoire, selon les dispositions de l'OHADA et en exécution d'un jugement français exequaturé par une ordonnance du Président du Tribunal de première instance d'Abidjan du 5 janvier 1994 ; que le tribunal de grande instance de Paris est, dès lors, incompétent pour connaître des demandes de M. X... ; que l'ordonnance dont appel est, en conséquence, confirmée en toutes ses dispositions ;
ALORS QUE les juridictions françaises sont compétentes pour statuer sur une action en responsabilité civile exercée par un Français à l'encontre d'un tiers saisi étranger ; qu'en relevant, pour écarter la compétence des juridictions françaises, que l'action en responsabilité dirigée contre le tiers saisi, dont elles étaient saisies, découlait directement des voies d'exécution pratiquées à l'étranger, quand les demandes formées ne visaient pas la régularité des saisies mises en oeuvre à l'étranger qui échappe seule, en cette matière, à la compétence des juridictions françaises fondée sur l'article 14 du Code civil, la Cour d'appel a violé cette disposition par fausse interprétation et refus d'application.
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Juge de l'exécution (JEX)
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.