par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 15 juin 2017, 16-19198
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
15 juin 2017, 16-19.198

Cette décision est visée dans la définition :
Accident du travail




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses première et quatrième branches :

Vu les articles L. 114-17-1, III et VII, R. 147-11, 5°, et R. 147-11-1 du code de la sécurité sociale, applicables à la date de la pénalité litigieuse, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu qu'il résulte de la combinaison des trois premiers de ces textes que le montant de la pénalité encourue par un assuré qui a exercé, sans autorisation médicale, une activité ayant donné lieu à rémunération, revenus professionnels ou gains, pendant une période d'arrêt de travail indemnisée au titre des assurances maladie, maternité ou accident du travail et maladie professionnelle, ne peut être inférieure au dixième du plafond mensuel des cotisations de sécurité sociale ; que s'il appartient au juge du contentieux général de la sécurité sociale de contrôler l'adéquation de la sanction à l'importance de l'infraction commise, ce contrôle doit s'exercer dans les limites fixées par le texte qui institue la pénalité ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'affiliée au régime d'assurance maladie et maternité des travailleurs indépendants, Mme Y... a perçu des indemnités journalières pendant un arrêt de travail du 18 mars au 15 mai 2013 ; que le directeur de la caisse du régime social des indépendants Midi-Pyrénées (la caisse) lui a infligé une pénalité pour avoir exercé sans autorisation une activité rémunérée au cours du mois d'avril 2013 ; que Mme Y... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour réduire le montant de la pénalité à la somme de 59,85 euros, le jugement, après avoir constaté que l'assurée reconnaissait la fraude, retient que Mme Y... a fraudé par nécessité ;

Qu'en réduisant ainsi le montant de la pénalité à une somme inférieure au dixième du plafond mensuel des cotisations applicable à la date de celle-ci, le tribunal a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 14 avril 2016, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Cahors, remet en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Agen  ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse du régime social des indépendants Midi-Pyrénées ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la caisse régime social des indépendants Midi-Pyrénées

Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné Mme Emmanuelle Y... à payer au RSI Midi-Pyrénées une somme ramenée à 59,85 € à titre de pénalité financière, et débouté le RSI Midi-Pyrénées du surplus de ses demandes,

AUX MOTIFS QU'

aux termes des dispositions de l'article R147-11 du code de la sécurité sociale :

« sont qualifiés de fraude...

5° Le fait d'avoir exercé sans autorisation médicale, une activité ayant donné lieu à rémunération, revenus professionnels ou gains, pendant une période d'arrêt de travail indemnisée au titre de l'assurance maladie, maternité ou accident du travail et maladie professionnelle » ;

ces faits justifient, outre le remboursement des sommes perçues à tort, l'application d'une pénalité financière conformément aux articles LI62-1-14 et R 147-2 dudit code ;

Que l'article L 162-1-14 précise dans son paragraphe III :

« le montant de la pénalité mentionnée au 1 est fixé en fonction de la gravité des faits reprochés, soit proportionnellement aux sommes concernées dans la limite de 50 % ... » ;

Qu'en l'espèce, Mme Y... a fait l'objet d'un arrêt de travail du 18 mars au 15 mai 2013, et a perçu pendant cette période des indemnités journalières s'élevant à 1187, Il € ;

Qu'elle a effectué dans le même temps, une déclaration mensuelle de chiffre d'affaire, établissant qu'elle travaillait :

Que néanmoins, il apparaît que le montant de la pénalité doit être fixé en fonction de la gravité des faits reprochés, et de la mauvaise foi du fraudeur ;

Que Mme Y... a reconnu la fraude, mais l'a expliquée par la précarité de sa situation familiale, et les difficultés de son commerce, qui est aujourd'hui fermé ;

Que le Tribunal constate que pour le mois d'avril 2013, qui est le seul mois pendant lequel Mme Y... ne pouvait intégralement pas travailler, elle a déclaré 993 € de chiffre d'affaires et a perçu 593 € d'indemnités journalières :

Qu'il en résulte que si Mme Y... a fraudé, elle l'a fait par nécessité ;

Que dès lors, la gravité des faits reprochés ne justifie pas le montant de la pénalité qui lui a été appliquée ;

Que compte tenu des faibles ressources et des difficultés de Mme Y..., à l'origine de la fraude, le Tribunal fixera la pénalité à 5% du montant des indemnités versées, soit à la somme de 59,85 € ;

Que le RSI sera débouté du surplus de ses demandes,

ALORS QU'aux termes des articles L 162-1-14 VII, R 147-11, R 147-11-1 et R 147-12 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction applicable en l'espèce, en cas de fraude établie d'un bénéficiaire d'un régime obligatoire de sécurité sociale, la pénalité prononcée ne peut être inférieure au dixième du plafond mensuel de la sécurité sociale ; que si les articles L 162-1-14 III et R 147-6-1 prévoyaient que la pénalité prononcée au titre de l'article R 147-6 était fixée en fonction de la gravité des faits reprochés et à un montant maximum de 50 % des sommes indûment présentées au remboursement ou prises en charge par l'organisme social, ils précisaient n'être applicables qu'à condition que les faits ainsi reprochés ne relèvent pas d'une fraude au sens des articles R 147-11 et R 147-12 ; qu'en faisant application en l'espèce des dispositions de l'article L 162-1-14 III du code de la sécurité sociale pour réduire le montant de la pénalité appliquée à Mme Y... en fonction de la gravité des faits reprochés à cette dernière, le tribunal, qui a constaté la fraude de cette assurée, a violé par fausse application les articles L 162-1-14 III, R 147-6 et R 147-6-1 du code de la sécurité sociale, et par refus d'application les articles L 162-1-14 VII, R 147-11, R 147-11-1 et R 147-12 du même code,

ALORS QU'aux termes des articles L 162-1-14 VII, R 147-11, R 147-11-1 et R 147-12 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction applicable en l'espèce, en cas de fraude établie d'un bénéficiaire d'un régime obligatoire de sécurité sociale, la pénalité prononcée ne peut être inférieure au dixième du plafond mensuel de la sécurité sociale ; que si les articles L 162-1-14 III et R 147-6-1 prévoyaient que la pénalité prononcée au titre de l'article R 147-6 était fixée en fonction de la gravité des faits reprochés et à un montant maximum de 50 % des sommes indûment présentées au remboursement ou prises en charge par l'organisme social, ils précisaient n'être applicables qu'à condition que les faits ainsi reprochés ne relèvent pas d'une fraude au sens des articles R 147-11 et R 147-12 ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant expressément la fraude de l'assurée, le tribunal n'a en outre pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard des articles L 162-1-14 VII et R 147-11-1 du code de la sécurité sociale, qu'il a violés par refus d'application,

ALORS QUE les dispositions législatives et réglementaires régissant le droit de la sécurité sociale sont d'ordre public et ne peuvent être écartées par quelque motif que ce soit, a fortiori de simple équité ; qu'en écartant l'application des dispositions impératives des articles L 162-1-14 VII et 147-11-1 du code de la sécurité sociale, par des motifs tirés de la gravité des faits reprochés, les faibles ressources et les difficultés de l'assurée, le tribunal a méconnu le principe du caractère d'ordre public des textes susvisés,


ALORS QU'une pénalité prononcée par un organisme de sécurité sociale constitue une obligation à caractère civil, et non une sanction pénale ; que par ailleurs, l'état de nécessité tel que prévu par l'article 122-7 du code pénal n'exonère que d'une responsabilité pénale ; qu'en réduisant le montant de la pénalité appliquée à Mme Y... sur le fondement des articles L 162-1-14 VII et 147-11-1 du code de la sécurité sociale, au motif que cette assurée aurait fraudé par nécessité, le tribunal a statué par un motif inopérant au regard des textes susvisés, qu'il a violés par fausse application.



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Cette décision est visée dans la définition :
Accident du travail


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.