par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 17 mars 2016, 15-12494
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
17 mars 2016, 15-12.494

Cette décision est visée dans la définition :
Droit de la Consommation




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 137-2 du code de la consommation, ensemble l'article L. 110-4 du code de commerce ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 26 mai 2008, le Crédit foncier de France (la banque) a consenti à M. et Mme X... (les emprunteurs) un prêt immobilier, dit « prêt relais », cautionné par la société Crédit et services financiers (la caution) ; que, le prêt n'ayant pas été intégralement remboursé à son échéance, la caution, après en avoir réglé le solde au créancier qui lui a délivré quittance subrogative, a assigné les emprunteurs en paiement ;

Attendu que, pour écarter la fin de non-recevoir tirée de la prescription et condamner les emprunteurs à payer une certaine somme à la caution, l'arrêt retient qu'il n'est pas démontré que le cautionnement en cause soit un service financier au sens de l'article L. 137-2 du code de la consommation et de la jurisprudence applicable, et que, dès lors, le délai de prescription de l'action personnelle exercée par la caution, est le délai quinquennal de droit commun ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le cautionnement litigieux était un service financier fourni aux emprunteurs par un professionnel en vue de garantir le remboursement d'un crédit immobilier accordé à ceux-ci par un établissement bancaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne la société Crédit et services financiers aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Crédit et services financiers à payer à M. et Mme X... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....

IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné solidairement avec exécution provisoire les époux X... à payer à la société Creserfi la somme de 34.483,15 € au taux de 5 % l'an à compter du 19 mars 2012 ;

AU MOTIF QUE c'est à tort que les époux X... invoquent les dispositions de l'article L.311-52 du code de la consommation, le délai de forclusion étant applicable aux seuls crédits à la consommation ce que n'est pas le prêt relais du 26 mai 2008. C'est à juste titre que la banque réplique que seule peut s'appliquer la prescription telle qu'elle résulte de l'article L.137-2 du code de la consommation, selon lequel, l'action des professionnels, pour les biens et les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans. Conformément à ce que soutient la société Creserfi, le crédit relais fonctionne selon un mécanisme de différé total, permettant aux époux X... d'en rembourser le capital et les intérêts par la vente du bien dont ils étaient propriétaires; comme l'indiquent les époux X..., le prêt relais souscrit le 26 mai 2008 pour une durée de 24 mois avait pour terme le 26 mai 2010. Les époux X... opposent à Creserfi les dispositions de l'article 2308 du code civil selon lequel « lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans en avoir averti le débiteur principal, elle n'aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte ; sauf son action en répétition contre le créancier ». Creserfi a réglé le Crédit Foncier le 1er juillet 2010. A cette date, le délai de prescription de l'article L137-2 précité n'avait couru que depuis le 27 mai 2010 et était donc loin d'être expiré. Les époux X... ne disposaient alors d'aucun moyen de prescription à opposer au Crédit Foncier. Les époux X... soutiennent encore que l'action de Creserfi à leur encontre était enfermée dans le même délai de prescription de deux années édicté à l'article L.137-2 du code de la consommation et qu'ainsi, l'assignation en paiement à leur encontre aurait dû être délivrée avant le 1er juillet 2012. L'assignation n'ayant été délivrée que le 17 août 2012, l'action serait prescrite. Toutefois, il n'est pas démontré que le cautionnement apporté par Creserfi soit un service financier au sens de l'article L.137-2 du code de la consommation et de la jurisprudence applicable. La société Creserfi est intervenue en qualité de caution et le fondement de son action contre les époux X... se trouve dans les dispositions de l'article 2305 du code civil au titre de son recours personnel. Le délai de prescription de l'action sur ce fondement est le délai quinquennal de droit commun institué par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, dont le point de départ se situe au jour du paiement par la caution. L'assignation du 17 août 2012 est donc délivrée dans le délai de prescription de cinq ans ayant commencé à courir le 1er juillet 2010. Les fins de non-recevoir opposées par les époux X... seront rejetées et la décision déférée confirmée, étant relevé que les époux X... ne développent aucun moyen à l'encontre du quantum de la condamnation et de l'intérêt de retard.

- ALORS QUE D'UNE PART les sociétés qui délivrent, comme la CRESERFI, filiale du Crédit Foncier de France, des cautions financières offrent leur services aux consommateurs en répondant lors de la mise en place d'un crédit au besoin de garantie du prêteur et en permettant des formalités simplifiées et un déblocage accéléré du prêt ; qu'aux termes de l'article L. 137-2 du Code de la consommation, issu de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, « L'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans » ; que cet article est applicable pour régir les relations entre les professionnels et les consommateurs au titre des fournitures de biens et de services, dont font partis les crédits immobiliers consentis aux consommateurs par les banques mais également les cautions consenties par un organisme financier professionnel aux consommateurs en garantie d'un prêt relais ou d'un crédit immobilier ; que le texte exclut l'application de la règle du droit commun fixé par l'article L. 110-4 du code de commerce, tel qu'issu de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ; qu'en décidant cependant d'écarter l'exception de prescription en vue de faire constater l'extinction de la créance de la CRESERFI, au motif qu'il n'était pas démontré que le cautionnement apporté par CRESERFI soit un service financier au sens de l'article L. 137-2 du code de la consommation et que le délai de prescription de l'action était le délai quinquennal de droit commun institué par la loi du 17 juin 2008 quand ils étaient pourtant en présence d'une caution consentie par un organisme financier professionnel envers des consommateurs pour un prêt relais immobilier, relevant ainsi des relations entre les professionnels et consommateurs, les juges du fond, qui ont constaté que la CRESERFI avait réglé en sa qualité de caution le Crédit Foncier le 1er juillet 2010 et qu'elle n'avait assigné les époux X... que le 17 août 2012, soit plus de deux ans après, ont violé, par refus d'application, l'article L. 137-2 du code de la consommation, et par fausse application l'article L. 110-4 du code de commerce ;

- ALORS QUE D'AUTRE PART la cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'il n'était pas démontré que le cautionnement apporté par CRESERFI soit un service financier au sens de l'article L. 137-2 du code de la consommation ; qu'en statuant par de tels motifs, dont la généralité ne permet pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile, ensemble 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ;

- ALORS QU'EN TOUT ETAT DE CAUSE il résulte de l'article L. 311-2 du Code de la consommation, que la protection du consommateur est applicable « à toute opération de crédit ainsi qu'à son cautionnement éventuel » ; qu'il s'en évince que le recours après paiement de la caution est soumis, à partir du moment où le paiement a été effectué par la caution, au délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation ; que dès lors en décidant que la société Creserfi, filiale du Crédit Foncier de France, est intervenue en qualité de caution, que le fondement de son action contre les époux X... se trouvait dans les dispositions de l'article 2305 du code civil au titre de son recours personnel et que le délai de prescription de l'action était le délai quinquennal de droit commun institué par la loi du 17 juin 2008, les juges du fond, qui ont constaté que la CRESERFI avait réglé en sa qualité de caution le Crédit Foncier le 1er juillet 2010 et qu'elle n'avait assigné les époux X... que le 17 août 2012, soit plus de deux ans après ledit paiement, ont violé, par refus d'application, les articles L. 311-2 et L 311-37 du code de la consommation, et par fausse application l'article L. 110-4 du code de commerce -

ALORS QUE DE QUATRIEME PART aux termes de l'article 2305 du code civil, la caution qui a payé à son recours contre le débiteur et aux termes de l'article 2308 du même code, lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n'aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte sauf son action en répétition contre le créancier : qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour que la Creserfi, en sa qualité de caution, agissait en paiement sur le fondement d'une quittance subrogative qui lui avait été délivrée par le Crédit foncier le 1er juillet 2010 de sorte qu'elle exerçait un recours subrogatoire ; qu'en rejetant les fins de non recevoir opposées par les époux X..., motifs pris que l'assignation du 17 août 2012 avait été délivrée dans le délai de prescription de cinq ans sans constater que la caution avait payé après avoir été poursuivie par le créancier, ou dans l'hypothèse inverse, après avoir averti les emprunteurs, la cour d'appel a violé les articles 2305 et 2308 du code civil ;


- ALORS QU'ENFIN, les époux X..., qui avaient rappelé que le Crédit Foncier n'avait jamais prononcé la déchéance du terme ni justifié du non-paiement des échéances antérieurement à la saisine directe de la caution (cf leurs conclusions notamment p 11 § 5), avaient fait valoir (cf leurs conclusions p 9 §4) qu'outre la prescription de l'article L 137-2 du code de la consommation qu'ils pouvaient opposer au Crédit Foncier, ils auraient également pu solliciter l'annulation ou la résolution des prêts souscrits compte tenu de l'absence de capacités financières suffisantes pour s'acquitter des sommes prêtées mais également de la violation par le Crédit Foncier de ses obligations pré-contractuelles (bordereau de rétractation détachable absent, absence de mise en garde, absence de tableau d'amortissement pour ce prêt etc ¿) ; que dès lors en se bornant à énoncer qu'au 1er juillet 2010, le délai de prescription de l'article L 137-2 du code de la consommation n'avait couru que depuis le 27 mai 2010 et était donc loin d'être expiré de telle sorte que les époux X... ne disposaient alors d'aucun moyen de prescription à opposer au Crédit Foncier sans constater que la caution qui agissait en paiement sur le fondement d'une quittance subrogative qui lui avait été délivrée par le Crédit foncier le 1er juillet 2010 et qui exerçait donc un recours subrogatoire avait payé après avoir été poursuivie par le créancier, ou dans l'hypothèse inverse, après avoir averti les emprunteurs, la cour d'appel a violé les articles 2305 et 2308 du code civil.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.