par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 14 janvier 2016, 14-10787
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
14 janvier 2016, 14-10.787

Cette décision est visée dans la définition :
Avocat




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, que M. et Mme X..., assignés en paiement de facture à la suite de travaux réalisés à leur domicile, ont confié la défense de leurs intérêts à la société Y... et associés, avocat (l'avocat) ; que le bâtonnier de l'ordre, saisi par M. X... d'une contestation du montant des honoraires qui lui étaient réclamés, les a fixés à une certaine somme ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que l'avocat fait grief à l'ordonnance de fixer à une certaine somme les honoraires qui lui sont dus par M. X..., alors, selon le moyen, que, dans le cadre des pouvoirs qu'il exerce sur recours de la décision du bâtonnier, le premier président ne peut examiner l'utilité des diligences dont il constate l'existence ; qu'en prenant en compte l'utilité de la procédure de référé pour émettre des doutes sur l'intérêt de cette procédure, le magistrat a violé les articles 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

Mais attendu qu'il entre dans les pouvoirs du bâtonnier, et sur recours, du premier président de la cour d'appel, saisis d'une demande de fixation des honoraires, de refuser de prendre en compte les diligences manifestement inutiles de l'avocat ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour fixer à une certaine somme les honoraires dus à l'avocat, l'ordonnance énonce que, sans déduire du rejet de la demande d'expertise dans le cadre de la procédure de référé une faute ou un manquement éventuel de l'avocat, il convient cependant, au regard de la nature et de la difficulté de l'affaire, de dire que cette procédure de référé n'était sans doute pas nécessaire alors que le juge du fond était saisi ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs dubitatifs, le premier président a méconnu les exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle déclare recevable le recours de la société Y... et associés, l'ordonnance rendue le 19 décembre 2013, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance de taxe et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Paris ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Y... et associés ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Y... et associés

L'ordonnance attaquée encourt la censure ;

EN CE QU'elle a, confirmant l'ordonnance du 21 janvier 2013, fixé à une certaine somme le montant des honoraires dus par Monsieur X... à la SCP Y... ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « d'une part, la procédure spéciale prévue par les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 a pour seul objet la fixation et le recouvrement des honoraires d'avocats ; que dans le cadre de cette procédure, ni le Bâtonnier en première instance ni le premier président ou son délégataire n'ont le pouvoir de se prononcer sur les fautes ou manquements éventuels, à les supposer établis, qu'aurait pu commettre l'avocat dans le suivi de sa mission qui lui a été confiée ni à plus forte raison procéder à la réduction d'honoraires facturées dont est justifiée, aux motifs d'une insuffisance de qualité de celles-ci, ni ordonner le remboursement par l'avocat de condamnations personnelles prononcées à l'encontre du client ; qu'aucune convention d'honoraires n'a été régularisée entre monsieur X... et la SCP Y... & associés ; que selon l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, à défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci ; que les époux X... ont saisi la SCP Y... & associés alors qu'ils étaient déjà assignés devant le tribunal de grande instance de Versailles pour paiement du solde de la facture de travaux réalisés à leur domicile ; que la SCP Y... & associés justifie de ses diligences réalisées pour le compte des époux X... et notamment une assignation en référé pour demander une expertise ; que sans déduire du rejet de la demande d'expertise dans le cadre de cette procédure de référé, une faute manquement éventuels de la SCP Y... & associés, il convient cependant au regard de la nature et de la difficulté de dire que cette procédure de référé n'était sans doute pas nécessaire alors que le juge du fond était déjà saisi ; qu'ainsi, les honoraires attenants à cette procédure de référé ne doivent pas être supportés par monsieur X... et son épouse » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « qu'il convient de constater qu'aucune convention d'honoraires n'a été signée entre Monsieur X... et la SCP Y... ; qu'aux termes des dispositions de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 à défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci ; que si également l'avocat est libre de la stratégie qu'il entend utiliser dans le cadre de l'affaire qui lui est confiée, il n'en demeure pas moins que la jurisprudence considère que les diligences effectuées doivent être utiles à la défense des intérêts de son client ; qu'il convient de remarquer qu'en engageant une action en référé alors que le tribunal avait été précédemment saisi au fond, la SCP Y... a pris le risque d'une procédure inutile ; qu'eu égard aux élément du dossier rappelés ci-dessus, du fait que les écritures reprises devant le juge de la mise en état ont été très proches de celles développées à l'occasion de la procédure de référé, nous considérerons que le montant des sommes versées, à savoir 2 392 € TTC constitue une juste rémunération des diligences de l'avocat » ;

ALORS QUE, PREMIEREMENT, dans le cadre des pouvoirs qu'il exerce sur recours de la décision du bâtonnier, le premier président de la Cour d'appel, appelé à fixer le montant des honoraires dus à l'avocat, ne peut examiner l'utilité des diligences dont il constate l'existence ; qu'en prenant en compte l'utilité de la procédure de référé pour émettre des doutes sur l'intérêt de cette procédure, le magistrat délégataire du premier président de la Cour d'appel de VERSAILLES a violé les articles 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et subsidiairement, à supposer que le premier président ait eu le pouvoir de se prononcer sur l'utilité de la procédure de référé, il ne pouvait le faire, en tout cas, qu'en constatant l'inutilité de la procédure ; qu'en se bornant à émettre un doute, le juge du fond a statué en tout état de cause aux termes de motifs dubitatifs.



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Avocat


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.