par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 30 janvier 2014, 12-20249
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
30 janvier 2014, 12-20.249

Cette décision est visée dans la définition :
Révision




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er mars 2012) que M. X... a interjeté appel d'un jugement du 31 mai 2006, assorti de l'exécution provisoire, qui l'avait condamné à payer certaines sommes à la société Sofigere ; qu'à la demande de cette dernière, le conseiller de la mise en état a, par ordonnance du 30 juin 2007, prononcé la radiation du rôle de l'affaire sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile ; que la péremption de cette instance a été constatée par ordonnance du 22 juin 2009 ; que, cependant, le 21 novembre 2008, M. X... a formé un recours en révision contre le jugement du 31 mai 2006 en invoquant la dissimulation d'une pièce décisive dont il avait pris connaissance le 23 octobre 2008 ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de déclarer son recours irrecevable, alors, selon le moyen :

1°/ que le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu'il soit à nouveau statué en droit et en fait ; que la condition tenant à la force de chose jugée de la décision doit s'apprécier au jour où le juge de la révision statue ; qu'en considérant néanmoins que le recours en révision de M. X... est irrecevable parce qu'introduit antérieurement à la date à laquelle la décision en question a acquis force de chose jugée, quand elle constatait pourtant qu'au jour où les premiers juges ont statué et, a fortiori, où jour elle a statué elle-même, cette décision était passée en force de chose juge, la cour d'appel a violé l'article 593 du code de procédure civile ;

2°/ que le délai du recours en révision est de deux mois et court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de la révision qu'elle invoque ; qu'en considérant que le recours en révision de M. X... est irrecevable parce qu'introduit antérieurement à la date à laquelle la décision dont il était demandé la rétractation a acquis force de chose jugée, sans rechercher, comme ils y étaient pourtant invités, si ce dernier n'avait pas été contraint d'introduire son recours dans le délai de deux mois sans pouvoir attendre que cette décision passe en force de chose jugée, les juges du second degré ont privé leur décision de base légale l'article 596 du code de procédure civile ;

3°/ que le délai de péremption d'instance est de deux ans et son acquisition ne peut être constatée que sur une demande d'une partie ; qu'en considérant que le recours en révision de M. X... est irrecevable parce qu'introduit antérieurement à la date à laquelle la décision dont il était demandé la rétractation a acquis force de chose jugée, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si ce dernier n'était pas dans l'impossibilité de demander immédiatement la péremption de l'instance ou si, en tout état de cause, il ne lui aurait pas été impossible d'obtenir une décision d'un juge constatant la péremption dans le délai de deux mois pour introduire un recours en révision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 386 et 596 du code de procédure civile ;

4°/ que lorsque le premier président de la cour d'appel radie du rôle une affaire en raison de la non-exécution par l'appelant de la décision frappée d'appel, la réinscription de l'affaire au rôle de la cour d'appel ne peut se faire que sur justificatif de l'exécution de la décision attaquée ; qu'en considérant néanmoins, pour déclarer irrecevable le recours en révision présenté par M. X..., qu'il pouvait solliciter le rétablissement de l'affaire en justifiant des conséquences manifestement excessives que pouvait avoir pour lui la radiation de l'instance d'appel eu égard à la découverte d'une nouvelle preuve qui lui avait été dissimulée, quand cette circonstance était pourtant impuissante à permettre la réinscription de l'affaire au rôle, la cour d'appel a violé l'article 526 du code de procédure civile ;

5°/ que l'existence de conséquences manifestement excessives justifiant l'arrêt de l'exécution provisoire est appréciée au regard d'un seul critère économique lié au patrimoine des parties ; qu'en considérant néanmoins, pour déclarer irrecevable le recours en révision présenté par M. X..., qu'il pouvait solliciter le rétablissement de l'affaire en justifiant des conséquences manifestement excessives que pouvait avoir pour lui la radiation de l'instance d'appel eu égard à la découverte d'une nouvelle preuve qui lui avait été dissimulée, quand cette circonstance était pourtant impuissante à établir l'existence de conséquences manifestement excessives, la cour d'appel a violé de plus fort l'article 526 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'il résulte des articles 593 et 595 du code de procédure civile que le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit et que, dans tous les cas, le recours n'est recevable que si son auteur n'a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu'il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée ;

Et attendu qu'ayant relevé que le jugement contre lequel M. X... avait introduit son recours en révision, le 21 novembre 2008, n'avait acquis force de chose jugée que le 22 juin 2009 et que M. X... aurait eu la possibilité de se prévaloir en appel de la pièce dont il avait eu connaissance de la dissimulation le 23 octobre 2008 en faisant valoir devant le conseiller de la mise en état son impossibilité d'exécuter la décision pour éviter la radiation de l'affaire prononcée le 30 juin 2007, la cour d'appel, qui s'est justement placée à la date d'introduction du recours pour apprécier la condition de recevabilité tenant à la force de chose jugée de la décision dont la révision était demandée et qui a souverainement retenu que M. X... ne s'était pas trouvé dans l'impossibilité de faire valoir la cause de révision avant que la décision ne passe en force de chose jugée, a exactement décidé que le recours en révision de M. X... n'était pas recevable ;

D'où il suit que le moyen, inopérant dans ses quatrième et cinquième branches pour s'attaquer à un motif surabondant, n'est pas fondé sur le surplus ;

PAR CES MOTIFS ,

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer aux sociétés Sofigere et CA Consumer finance la somme globale de 3 000 euros ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable le recours en révision formé par Monsieur X... contre le jugement du 31 mai 2006 rendu par le Tribunal de grande instance de PARIS ;

Aux motifs propres que, «le 21 novembre 2008, Monsieur Didier X... a introduit un recours en révision contre un jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 31 mai 2006 qui l'a condamné à payer diverses sommes au titre d'un prêt de 17 millions de francs qui lui a été consenti le 27 janvier 1997 par la Banque Générale du Commerce, devenue la société Finaref ABN AMRO, puis la société Finaref laquelle a cédé sa créance à la société Sofigere, à l'encontre duquel il avait interjeté appel le 26 juin 2006 ;

Considérant que Monsieur Didier X... fait grief au jugement déféré d'avoir déclaré irrecevable son recours en révision aux motifs que le jugement avait acquis force de chose jugée postérieurement à l'introduction de sa demande et qu'il ne pouvait exciper d'une violation de l'article 6.1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme compte tenu de sa propre carence dans l'administration de la preuve de son impossibilité d'exécuter le jugement assorti de l'exécution provisoire alors qu'il a découvert, le 23 octobre 1998 à la suite de la réouverture des opérations de liquidation amiable de la société Difa le 30 janvier 2007 et des investigations du nouveau liquidateur amiable, l'existence d'une lettre la Banque Générale du Commerce datée du 9 juin 1999, qui lui a été dissimulée, aux termes de laquelle la banque abandonnait sa créance au titre du prêt de 17 millions de francs rendant impossible la cession de la créance éteinte à la société Sofigere ; qu'il avait l'obligation d'exercer son recours en révision dans les deux mois à compter du jour où il avait découvert la cause de révision en application de l'article 596 du Code de procédure civile, qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir réglé les causes du jugement du 31 mai 2006 compte tenu de l'impossibilité de payer le montant de la condamnation eu égard à sa ruine consécutive au comportement de la banque ; qu'il ne peut pas être privé de la possibilité d'exercer les voies de recours légales contre le jugement le condamnant au motif qu'il n'a pas exécuté les causes de ce jugement, ce qui est contraire au principe de libre accès aux voies de recours et de procès équitable de l'article 6.1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme; qu'il n'a commis aucune faute dans l'administration de la preuve de son incapacité à exécuter la condamnation prononcée à son encontre par le jugement du 31 mai 2006, ce qui est sans incidence sur son droit à exercer son droit de recours qui est absolu et ne peut pas être limité par le juge de la mise en état ; qu'il prétend que son recours est recevable et bien-fondé puisque la société Sofigere n'a pas qualité pour agir en paiement d'une créance abandonnée et donc éteinte depuis le 9 juin 1999 ;

Considérant que la société Sofigere et la société CA Consumer Finance, venant aux droits de la société anciennement dénommée Finaref et Finaref ABN AMRO, font valoir que les demandes de Monsieur X... tendant à voir juger que la société Sofigere serait irrecevable ou mal fondée pour défaut de qualité à agir en paiement d'une créance éteinte sont irrecevables en application de l' article 564 du Code de procédure civile comme étant nouvelles en appel, puisque Monsieur X... ne les avaient pas reprises dans le dernier état de ses écritures de première instance du 17 décembre 2009 ; qu'au moment de l'introduction de l'instance en révision par Monsieur X..., le jugement était frappé d'appel de sorte que les conditions d'application de l'article 593 du Code de procédure civile ne sont pas réunies et que le recours de Monsieur X... est irrecevable ; que l'appel de Monsieur X... contre le jugement du 31 mai 2006 a été radié du rôle par application de l'article 526 du Code de procédure civile le 30 janvier 2007 et que l'appelant pouvait le faire réinscrire avant de faire constater la péremption de l'instance par conclusions du 3 mars 2009 postérieurement à son recours en révision ; qu'il ne peut pas exciper d'une violation du droit à un procès équitable dès lors qu'il a été défaillant dans l'administration de la preuve de son impossibilité d'exécuter la décision et l'est toujours ;

Considérant que le Ministère Public conclut également à l'irrecevabilité du recours en révision introduit par Monsieur X... le 21 novembre 2008 au motif que le jugement n'a acquis force de chose jugée qu'à compter de l'ordonnance du 22 juin 2009 constatant la péremption de l'instance postérieurement à l'introduction du recours en révision ; que l'instance étant en cours d'appel quand Monsieur X... a formé son recours en révision, il lui appartenait de demander le rétablissement de l'affaire au rôle de la cour et de demander la suspension de l'exécution provisoire s'il ne pouvait pas payer les sommes mises à sa charge par le jugement en application de l'article 524 du Code de procédure civile, ce qu'il n'a pas fait, de sorte qu'il est fautif et ne peut prétendre à la révision demandée ; que le jugement doit être confirmé ;

Considérant qu'en vertu de l'article 593 du Code de procédure civile, le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu'il soit statué à nouveau en fait et en droit ;

Considérant que si le juge déclare le recours recevable, il doit statuer par le même jugement sur le fond du litige en application de l'article 601 du Code de procédure civile, de sorte que les parties intimées ne peuvent soutenir que les demandes au fond de Monsieur Didier X... sont irrecevables, comme étant nouvelles en appel, au prétexte qu'en première instance, il n'a fait que répondre, dans ses dernières écritures à leur exception d'irrecevabilité du recours en révision ; que la société SOFIGERE et la société CA Consumer Finance seront déboutées de leur demande de ce chef ;

Considérant qu'il est établi et non contesté que le jugement contre lequel Monsieur X... a introduit son recours en révision le 21 novembre 2008 n'avait pas force de chose jugée compte tenu de l'appel qu'il avait interjeté le 26 juin 2006 contre cette décision toujours en cours à cette date et que ce jugement du 31 mai 2006 n'a acquis force de chose jugée qu'à la suite de l'ordonnance constatant la péremption de l'instance en date du 22 juin 2009 postérieurement à l'introduction du recours en révision ;

Considérant que Monsieur X... est mal fondé à se prévaloir d'une violation de l'article 6.1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et de son droit à un procès équitable, alors qu'il n'a pas été privé d'un libre accès aux voies de recours contre le jugement qu'il conteste, mais ne les a pas ou les a mal utilisées ; qu'en effet au jour où il a introduit sa demande de révision de cette décision, l'appel qu'il avait interjeté le 26 juin 2006 contre cette même décision était toujours pendant devant la cour d'appel, qu'il n'a pas demandé le rétablissement de l'affaire, nonobstant la radiation prononcée en application de l'article 526 du Code de procédure civile par ordonnance du 30 juin 2007, avant le 11 février 2009 postérieurement à l'introduction de son recours en révision et une fois l'instance périmée ; qu'il ne peut considérer que la radiation prononcée le 30 juin 2007 en application de l'article 526 du Code de procédure l'a privée de son droit d'appel dès lors qu'il a pu se défendre devant le juge de la mise en état et justifier de son impossibilité d'exécuter les condamnations mises à sa charge pour éviter la radiation sollicitée par le créancier, laquelle n'est que facultative et laissée à l'appréciation du juge, qu'il pouvait solliciter le rétablissement de l'affaire en justifiant des conséquences manifestement excessives que pouvait avoir pour lui la radiation de l'instance d'appel eu égard à la découverte d'une lettre du 9 juin 1999, qui lui aurait été dissimulée, de nature à rendre éteinte la créance de la banque cédée à la société SOFIGERE ;

Considérant que le recours en révision introduit par Monsieur Didier X... avant que le jugement du 31 mai 2006 n'ait acquis force de chose jugée est irrecevable ; que le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions et Monsieur Didier X... débouté de son appel » ;

Alors, d'une part, que le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu'il soit à nouveau statué en droit et en fait ; que la condition tenant à la force de chose jugée de la décision doit s'apprécier au jour où le juge de la révision statue ; qu'en considérant néanmoins que le recours en révision de Monsieur X... est irrecevable parce qu'introduit antérieurement à la date à laquelle la décision en question a acquis force de chose jugée, quand elle constatait pourtant qu'au jour où les premiers juges ont statué et, a fortiori, où jour elle a statué elle-même, cette décision était passée en force de chose juge, la Cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure civile ;

Alors, d'autre part, que le délai du recours en révision est de deux mois et court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de la révision qu'elle invoque ; qu'en considérant que le recours en révision de Monsieur X... est irrecevable parce qu'introduit antérieurement à la date à laquelle la décision dont il était demandé la rétractation a acquis force de chose jugée, sans rechercher, comme ils y étaient pourtant invités, si ce dernier n'avait pas été contraint d'introduire son recours dans le délai de deux mois sans pouvoir attendre que cette décision passe en force de chose jugée, les juges du second degré ont privé leur décision de base légale l'article 596 du Code de procédure civile ;

Alors, en outre, que le délai de péremption d'instance est de deux ans et son acquisition ne peut être constatée que sur une demande d'une partie ; qu'en considérant que le recours en révision de Monsieur X... est irrecevable parce qu'introduit antérieurement à la date à laquelle la décision dont il était demandé la rétractation a acquis force de chose jugée, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si ce dernier n'était pas dans l'impossibilité de demander immédiatement la péremption de l'instance ou si, en tout état de cause, il ne lui aurait pas été impossible d'obtenir une décision d'un juge constatant la péremption dans le délai de deux mois pour introduire un recours en révision, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 386 et 596 du Code de procédure civile ;

Alors, au surplus, que lorsque le premier président de la Cour d'appel radie du rôle une affaire en raison de la non-exécution par l'appelant de la décision frappée d'appel, la réinscription de l'affaire au rôle de la Cour ne peut se faire que sur justificatif de l'exécution de la décision attaquée ; qu'en considérant néanmoins, pour déclarer irrecevable le recours en révision présenté par Monsieur X..., qu'il pouvait solliciter le rétablissement de l'affaire en justifiant des conséquences manifestement excessives que pouvait avoir pour lui la radiation de l'instance d'appel eu égard à la découverte d'une nouvelle preuve qui lui avait été dissimulée, quand cette circonstance était pourtant impuissante à permettre la réinscription de l'affaire au rôle, la Cour d'appel a violé l'article 526 du Code de procédure civile ;


Alors, enfin et en tout état de cause, que l'existence de conséquences manifestement excessives justifiant l'arrêt de l'exécution provisoire est appréciée au regard d'un seul critère économique lié au patrimoine des parties ; qu'en considérant néanmoins, pour déclarer irrecevable le recours en révision présenté par Monsieur X..., qu'il pouvait solliciter le rétablissement de l'affaire en justifiant des conséquences manifestement excessives que pouvait avoir pour lui la radiation de l'instance d'appel eu égard à la découverte d'une nouvelle preuve qui lui avait été dissimulée, quand cette circonstance était pourtant impuissante à établir l'existence de conséquences manifestement excessives, la Cour d'appel a violé de plus fort l'article 526 du Code de procédure civile.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.