par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 15 mars 2017, 15-14141
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Cour de cassation, chambre sociale
15 mars 2017, 15-14.141

Cette décision est visée dans la définition :
Délai de carence




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1242-12 du code du travail ;

Attendu que le recours au contrat de travail à durée déterminée d'usage ne dispense pas l'employeur d'établir un contrat écrit comportant la définition précise de son motif ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par M. Y... en qualité d'aide cuisinière à temps partiel dans le cadre d'un contrat à durée déterminée du 16 septembre 2004 au 15 mars 2005 ; que ce contrat a été prolongé jusqu'au 15 mars 2006 par avenant du 14 mars 2005 ; que les parties ont ensuite conclu deux contrats de travail pour les périodes du 1er février 2007 au 31 octobre 2007 et du 2 mai 2008 au 31 décembre 2008 ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminé et en paiement de diverses sommes ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande en requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, l'arrêt retient que l'employeur n'avait pas à préciser dans les contrats conclus de motif particulier, tel le remplacement d'un salarié ou un accroissement temporaire d'activité, puisqu'aux termes de l'article L. 1242-2 du code du travail, il s'agit en l'espèce d'un cas de recours au contrat à durée déterminée, différent du cas de remplacement d'un salarié et du cas d'un accroissement temporaire d'activité ;

Qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er décembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à la SCP Matuchansky, Vexliard et Poupot la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour Mme X....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté madame X..., salariée, de ses demandes envers monsieur Y..., employeur,

AUX MOTIFS QU'il résulte des dispositions des articles L. 1242-2-3° et R. 1242-1 du code du travail, que des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour l'exécution de tâches précises et temporaires, notamment pour occuper des emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ; que selon l'article R. 1242-1 du même code, le secteur de la restauration est l'un des secteurs d'activité dans lesquels les contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ; qu'en l'espèce, monsieur Y... a conclu différents contrats de travail avec madame X..., en sa qualité de restaurateur ; qu'il est d'usage dans ce secteur d'activité, en raison des fluctuations de la fréquentation touristique en Guadeloupe, de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée, notamment pour un emploi d'aide-cuisinière, lequel dépend directement du niveau d'activité lié à la fréquentation touristique ; que le premier contrat à durée déterminée a été renouvelé le 14 mars 2005 en respectant la durée maximale de 18 mois prévue par les articles 1243-8 et 1243-13 du code du travail ; que par ailleurs, si un deuxième contrat a été conclu ultérieurement à compter du 1er février 2007 pour occuper ce même poste , il y a lieu de rappeler qu'en vertu des dispositions de l'article L. 1244-4-3° du code du travail, le délai de carence entre deux contrats successifs, tel que prévu par l'article L. 1244-3 du code du travail, n'est pas applicable en l'espèce, puisque comme il a été exposé ci-avant, l'emploi occupé par madame X... était un emploi par nature temporaire dans un secteur d'activité où il est d'usage de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée ; que l'employeur n'avait pas à préciser dans les contrats conclu avec madame X..., de motif particulier tel le remplacement d'un salarié ou un accroissement temporaire d'activité, puisqu'aux termes de l'article L. 1242-2 du code du travail, il s'agit en l'espèce d'un cas de recours au contrat à durée déterminée, différent du cas de remplacement d'un salarié et du cas d'un accroissement temporaire d'activité ; qu'enfin, il ne peut être soutenu que l'employeur a eu recours de façon récurrente et systématique à madame X..., puisque les période d'emploi de cette dernière, sont précisément définies, limitées dans le temps et dans leur nombre, étant relevé que les périodes d'emploi ont été séparées de près d'un an la première fois et de six mois la deuxième fois ; qu'ainsi, le recours à l'embauche de madame X... n'avait pas pour objet d'assurer des fonctions permanentes au sein de l'entreprise ; qu'en conséquence, madame X... doit être déboutée de sa demande de requalification de ses contrats de travail en contrat à durée indéterminée ; qu'elle ne peut donc prétendre aux indemnités de rupture qu'elle revendique (arrêt attaqué, pp. 3 ‒ 4),

ALORS, D'UNE PART, QU'un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ; que si certains emplois relevant des catégories définies aux articles L. 1242-3° et D. 1242-1 du code du travail peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée, lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, il appartient au juge de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, même dans ce cas, est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi ; qu'en se limitant à constater que l'emploi de madame X... relevait du secteur de l'hôtellerie-restauration, sans rechercher si le recours à des contrats à durée déterminée successifs était justifié par des raisons objectives reposant sur des éléments concrets de nature à établir le caractère temporaire de son emploi d'aide-cuisinière au sein de l'établissement exploité par M. Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes précités ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE le contrat à durée déterminée d'usage ne dispense pas l'employeur d'établir un contrat écrit comportant la définition précise de son motif ; qu'en retenant que l'employeur n'avait pas à préciser de motif particulier dans les contrats à durée déterminée successivement conclus avec la salariée, la cour d'appel a violé l'article L. 1242-12 du code du travail.



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Cette décision est visée dans la définition :
Délai de carence


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.