par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 13 juillet 2016, 15-22004
Dictionnaire Juridique

site réalisé avec
Baumann Avocats Droit informatique

Cour de cassation, 1ère chambre civile
13 juillet 2016, 15-22.004

Cette décision est visée dans la définition :
Espèce




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les deux moyens réunis :

Attendu, selon le jugement attaqué (juridiction de proximité de Tulle, 22 mai 2015), que Mme X...a sollicité le paiement, par M. et Mme Y..., de ses honoraires d'architecte, au titre d'un contrat conclu le 11 mai 2005 ;

Attendu que Mme X... fait grief au jugement de déclarer son action en paiement prescrite et de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge, qui doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, est tenu de s'assurer de ce que les conclusions qui lui sont remises par une partie ont été régulièrement communiquées à la partie adverse ; qu'en l'espèce, en se bornant à viser les écritures en réponse de M. et Mme Y..., sans s'assurer de ce qu'elles avaient bien été communiquées à Mme X..., la juridiction de proximité a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que M. et Mme Y... faisaient état, devant la juridiction de proximité, d'un délai de prescription de cinq ans applicable à l'action en paiement de Mme X... ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de l'applicabilité à la demande formée par Mme X... de la prescription biennale prévue par l'article L. 137-2 du code de la consommation, sans provoquer au préalable les observations contradictoires des parties, la juridiction de proximité a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°/ que, dans son certificat médical du 18 avril 2007, M. Z...attestait du fait que Mme X... présentait plusieurs affections de longue durée dont l'une rendait délicate toute intervention chirurgicale ; qu'en énonçant que ce certificat médical mentionnait une unique affection de longue durée, la juridiction de proximité en a dénaturé les termes clairs et précis en violation de l'article 1134 du code civil ;

4°/ que la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la force majeure ; qu'en l'espèce, en affirmant péremptoirement que l'affection de longue durée, assortie de périodes d'hospitalisation, dont s'était trouvée atteinte Mme X..., ne l'avait pas placée dans l'impossibilité d'agir en justice contre M. et Mme Y..., sans expliquer en quoi la gravité et la récurrence des difficultés de santé dont elle souffrait n'étaient pas de nature à établir qu'elle s'était heurtée à cet égard à un cas de force majeure, la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que, s'agissant d'une procédure orale et le jugement mentionnant que les parties étaient présentes ou représentées à l'audience, les moyens et documents retenus par le juge ou soulevés d'office sont présumés, sauf preuve contraire non rapportée en l'espèce, avoir été débattus contradictoirement ;

Attendu, en second lieu, que, sous le couvert de griefs non fondés de dénaturation et de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en cause, devant la Cour de cassation, l'appréciation souveraine par laquelle le juge du fond a estimé que Mme X... ne s'était pas trouvée dans l'impossibilité d'agir pendant le délai de prescription ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que l'action en paiement de Mme Jacqueline X... à l'encontre des époux Y... était prescrite, et de l'AVOIR déboutée de l'ensemble de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE dans les écritures en réponse M. et Mme Y... exposent que MME X... a négligé sa mission de recherches d'entreprises de maçonnerie, de charpente et de couverture. Ils indiquent que M. A...en tant que collaborateur de MME X... venait constater la réalisation des travaux. Ils font valoir que la demande de paiement est prescrite parce qu'ils n'ont reçu aucune facture entre l'année 2008 et le mois de mai 2014. Ils s'étonnent de ne jamais avoir été informé de la maladie de MME X... par M. A.... Ils demandent que MME X... soit déboutée de l'ensemble de ses demandes et qu'elle soit condamnée à leur payer les sommes suivantes :

-1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
-1000 euros pour l'ensemble des frais de déplacements et de recherches entreprises dans les procédures conduites par MME X....
- le montant des dépens y compris ceux de de l'ordonnance de payer.

ALORS QUE le juge, qui doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, est tenu de s'assurer de ce que les conclusions qui lui sont remises par une partie ont été régulièrement communiquées à la partie adverse ; qu'en l'espèce, en se bornant à viser les écritures en réponse des époux Y..., sans s'assurer de ce qu'elles avaient bien été communiquées à Mme Jacqueline X..., la juridiction de proximité a violé l'article 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que l'action en paiement de Mme Jacqueline X... à l'encontre des époux Y... était prescrite, et de l'AVOIR déboutée de l'ensemble de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE « M et MME Y... se prévalent de la prescription de 5 ans énoncée par les dispositions de l'article 2224 du code civil ; qu'il résulte du contrat signé par les parties le 11 mai 2005 que MME X... Jacqueline a ag (i) en tant que professionnel pour obtenir le paiement de ses honoraires d'architecte ; que M. et MME Y... ont signé le contrat précité en tant que particulier (s) afin de faire construire une maison ; qu'aux termes de l'article L137-2 du code de la consommation : « l'action des professionnels pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par 2 ans (») ; que le montant de la facture émise par Madame X... n'est pas contesté par les défendeurs ; que ces derniers prétendent n'avoir jamais reçu cette facture et les courriers de relance postérieurs ; que MME X... produit plusieurs copies de courriers de relance ; que le premier courrier de relance est daté du 10 novembre 2009 ; que cette date correspond à celle où MME X... a connu l'impayé qui lui permet d'exercer la présente action à l'encontre de M. et MME Y... ; qu'en application des dispositions de l'article 2224 du code civil, cette date constitue le point de départ du délai de prescription de deux ans applicable au cas d'espèce et prévu par l'article L137-2 du code de la consommation ; que dès lors l'action en paiement de MME X... à l'encontre de M. et et MME Y... était prescrite au 11 novembre à 24 H ; que le fait pour M. et MME Y... de s'être engagés par contrat signé le 11 mai 2005 ne constitue pas un acte de reconnaissance d'avoir à payer la somme réclamée interrompant le délai de prescription puisque la date du contrat est antérieure à la date constituant le point de départ de la prescription ; que MME X... se prévaut d'une cause de suspension du délai de prescription fondée sur la force majeure qui serait constituée par la maladie dont elle souffre ; qu'à l'appui de son argumentation MME X... verse aux débats les pièces suivantes :- un certificat médical daté du 23 mars 2006 mentionnant qu'elle est atteinte d'une affection de longue durée et un certificat médical daté du 18 avril 2007 mentionnant une affection de longue durée plus la mention d'une intervention chirurgicale,- un bulletin de situation indiquant qu'elle a été hospitalisée entre le 16 juillet 2010 et le 19 juillet 2010 pour des soins intensifs en cardiologie ;- plusieurs bulletins de situation mentionnant des consultations au service des urgences de l'hôpital de Brive la Gaillarde, dont une le 30 novembre 2008, une le 15 juillet 2010 et les autres postérieurement à la date de fin du délai de prescription précité ; que le fait que MME X... ait souffert d'une affection de longue durée en avril 2007 comprenant une intervention chirurgicale et qu'elle ait été hospitalisée pour des soins intensifs en cardiologie pendant quatre jours en juillet 2010 ne permet pas de démontrer que la maladie entraînait pour elle une impossibilité absolue d'agir en justice à l'encontre de M. et MME Y... entre le 10 novembre 2009 et le 11 novembre 2011, c'est à dire pendant le délai de prescription ; qu'en conséquence les dispositions de l'article 2234 du code civil concernant la suspension du délai de prescription ne peuvent être appliquées en faveur de MME X... ; que le 27 mai 2014 date du dépôt de la requête en injonction de payer, l'action en paiement de MME X... était prescrite ; que dès lors il y a lieu de débouter celle-ci de l'ensemble de ses demandes » ;

1° ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que les époux Y... faisaient état, devant la juridiction de proximité, d'un délai de prescription de cinq ans applicable à l'action en paiement de Mme Jacqueline X... ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de l'applicabilité à la demande formée par Mme Jacqueline X... de la prescription biennale prévue par l'article L. 137-2 du code de la consommation, sans provoquer au préalable les observations contradictoires des parties, la juridiction de proximité a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2° ALORS QUE dans son certificat médical du 18 avril 2007, M. Jean Henri Z...attestait du fait que Mme Jacqueline X... présentait plusieurs affections de longue durée dont l'une rendait délicate toute intervention chirurgicale ; qu'en énonçant que ce certificat médical mentionnait une unique affection de longue durée, la juridiction de proximité en a dénaturé les termes clairs et précis en violation de l'article 1134 du code civil.

3° ALORS QUE la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la force majeure ; qu'en l'espèce, en affirmant péremptoirement que l'affection de longue durée, assortie de périodes d'hospitalisation, dont s'était trouvée atteinte Mme Jacqueline X..., ne l'avait pas placée dans l'impossibilité d'agir en justice contre les époux Y..., sans expliquer en quoi la gravité et la récurrence des difficultés de santé dont elle souffrait n'étaient pas de nature à établir qu'elle s'était heurtée à cet égard à un cas de force majeure, la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du code civil.



site réalisé avec
Baumann Avocat Droit informatique

Cette décision est visée dans la définition :
Espèce


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.