par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 24 septembre 2015, 14-20132
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
24 septembre 2015, 14-20.132

Cette décision est visée dans la définition :
Adjudication




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 19 juin 2014) et les productions, que le Trésor public représenté par le comptable public d'Agde (le Trésor public) ayant, suivant commandement aux fins de saisie immobilière publié le 15 septembre 2004 et dont les effets ont été prorogés par jugement du 29 juin 2007, fait pratiquer une saisie immobilière à l'encontre de M. et Mme X..., l'adjudication de l'immeuble saisi a été prononcée par jugement du 20 octobre 2009 ; qu'un jugement d'incident a donné lieu à un arrêt du 29 octobre 2010 ; que le jugement d'adjudication a été publié le 20 octobre 2011 ; que M. et Mme X..., soutenant que le commandement était périmé, ont assigné le 27 mai 2013 le Trésor public et les adjudicataires de l'immeuble afin d'annulation de la saisie immobilière ;

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande en annulation de la saisie immobilière pratiquée par le Trésor public, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne peut relever d'office le moyen tiré de l'autorité de chose jugée sans l'avoir préalablement soumis à la discussion contradictoire des parties ; qu'en ayant relevé, d'office, l'autorité de chose jugée par un jugement sur incident du 20 octobre 2009 et un arrêt du 29 avril 2010 dont les intimés ne s'étaient pas prévalus, sans soumettre au préalable ce moyen à la discussion contradictoire des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que l'autorité de la chose jugée n'a lieu que si la chose demandée est la même ; qu'en considérant qu'un arrêt rendu le 29 avril 2010 et un jugement rendu le 20 octobre 2009 avaient pu statuer sur une demande visant à faire reconnaître la péremption d'un commandement de saisie immobilière au 29 juin 2010, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;

3°/ que l'autorité de chose jugée ne s'applique que si la demande est identique, fondée sur la même cause et formée entre les mêmes parties ; que le jugement du 20 octobre 2009 auquel la cour d'appel fait allusion, distinct du jugement d'adjudication, était un jugement sur incident rendu entre les époux X... et le trésorier principal d'Agde statuant sur la caducité du commandement à défaut pour le jugement de prorogation de comporter une date de prononcé ; qu'en considérant que l'autorité de chose jugée par ce jugement s'opposait à une demande tendant à voir reconnaître la péremption du commandement de saisie au 29 juin 2010 formée entre les époux X... et les adjudicataires de leur maison, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 1351 du code civil ;

4°/ que lorsqu'un commandement de saisie est périmé antérieurement à la publication du jugement d'adjudication, cette publication ne peut faire revivre le commandement périmé et le juge ne peut pas relever les parties des déchéances encourues ; qu'en l'espèce, le commandement de saisie était périmé depuis le 29 juin 2010, le jugement d'adjudication n'ayant été publié que le 20 octobre 2011, soit plus de trois ans après la publication du commandement, comme l'a constaté le tribunal ; qu'en s'étant fondée sur la circonstance que le jugement d'adjudication emportait purge de tous les vices antérieurs, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard des articles 694 et 715 de l'ancien code de procédure civile ;

5°/ que la purge des vices de la procédure antérieure ne peut être constatée en cas de fraude ; qu'à défaut d'avoir recherché, comme elle y était invitée, si une fraude n'était pas avérée, tenant à la consignation tardive du prix et à l'absence de versement de sommes au Trésor public en vue de l'apurement de la dette, dans le but de faire courir les intérêts de retard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la règle fraus omnia corrumpit ;

Mais attendu que lorsque, dans la même instance, il est statué sur les suites d'une précédente décision passée en force de chose jugée, le juge qui retient cette chose jugée pour rejeter des moyens tendant à la remettre en cause n'a pas à provoquer les explications des parties ;

Attendu qu'en relevant d'office la fin de non-recevoir, tirée de l'autorité de la chose précédemment jugée par le jugement du 20 octobre 2009 et l'arrêt du 29 avril 2010, rendus dans la même procédure de saisie immobilière, la cour d'appel n'avait pas à provoquer les explications des parties ;

Et attendu qu'ayant constaté que le jugement d'adjudication avait été publié le 20 octobre 2011, la cour d'appel a exactement décidé que sa publication emportait purge de tous les vices antérieurs et, procédant à la recherche prétendument omise, souverainement retenu qu'il n'était pas démontré de fraude de la part du saisissant ; que la cour d'appel a, par ces seuls motifs, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deuxième et troisième branches du moyen unique, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne in solidum à payer la somme globale de 3 000 euros à la société CBL immo et à la société Groupe MP ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils pour M. et Mme X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de M. et Mme X... en annulation de la saisie immobilière pratiquée par le Trésor Public ;

Aux motifs propres que les époux X... soutenaient que le commandement de saisie immobilière délivré le 15 septembre 2004 et soumis aux dispositions des articles 673 et suivants de l'ancien code de procédure civile, était atteint de péremption au 29 juin 2010 ; qu'il avait déjà été statué sur le moyen de la péremption du commandement et ce, notamment par arrêt du 29 avril 2010 et que le pourvoi en cassation formé à l'encontre du jugement sur incident rendu le 20 octobre 2009 avait été déclaré non admis ; que ce moyen, soulevé de nouveau par les époux X..., se heurtait à l'autorité de chose jugée ; que surabondamment, c'est à juste titre que le juge de l'exécution avait rappelé que la publication, le 20 octobre 2011, du jugement d'adjudication emportait purge de tous les vices antérieurs ; que les époux X... ne démontraient aucune fraude antérieure de la part du saisissant et n'expliquaient pas en quoi la publication tardive du jugement d'adjudication, tardiveté liée aux diverses procédures par eux engagées, était susceptible de constituer une fraude de la part du saisissant ; Et aux motifs, adoptés du tribunal, que le juge de l'exécution, statuant en matière de saisie immobilière, était compétent pour constater la péremption d'un commandement postérieurement au jugement d'adjudication, mais que cette demande n'était plus recevable dès la publication du jugement d'adjudication qui purgeait la procédure de tous ses vices ; que les demandeurs entendaient voir prononcer la péremption du commandement de payer publié le 15 septembre 2004, prorogé le 29 juin 2007 et la nullité de la procédure de saisie immobilière ; qu'il ressortait toutefois des pièces produites que le jugement d'adjudication du 20 octobre 2009 avait été publié au bureau des hypothèques de Béziers le 20 octobre 2011 ; que la demande présentée par assignation le 27 mai 2013 était irrecevable ;

Alors 1°) que le juge ne peut relever d'office le moyen tiré de l'autorité de chose jugée sans l'avoir préalablement soumis à la discussion contradictoire des parties ; qu'en ayant relevé, d'office, l'autorité de chose jugée par un jugement sur incident du 20 octobre 2009 et un arrêt du 29 avril 2010 dont les intimés ne s'étaient pas prévalus, sans soumettre au préalable ce moyen à la discussion contradictoire des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

Alors 2°) que l'autorité de la chose jugée n'a lieu que si la chose demandée est la même ; qu'en considérant qu'un arrêt rendu le 29 avril 2010 et un jugement rendu le 20 octobre 2009 avaient pu statuer sur une demande visant à faire reconnaître la péremption d'un commandement de saisie immobilière au 29 juin 2010, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;

Alors 3°) que l'autorité de chose jugée ne s'applique que si la demande est identique, fondée sur la même cause et formée entre les mêmes parties ; que le jugement du 20 octobre 2009 auquel la cour d'appel fait allusion, distinct du jugement d'adjudication, était un jugement sur incident rendu entre les époux X... et le trésorier principal d'Agde statuant sur la caducité du commandement à défaut pour le jugement de prorogation de comporter une date de prononcé ; qu'en considérant que l'autorité de chose jugée par ce jugement s'opposait à une demande tendant à voir reconnaître la péremption du commandement de saisie au 29 juin 2010 formée entre les époux X... et les adjudicataires de leur maison, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 1351 du code civil ;

Alors 4°) que lorsqu'un commandement de saisie est périmé antérieurement à la publication du jugement d'adjudication, cette publication ne peut faire revivre le commandement périmé et le juge ne peut pas relever les parties des déchéances encourues ; qu'en l'espèce, le commandement de saisie était périmé depuis le 29 juin 2010, le jugement d'adjudication n'ayant été publié que le 20 octobre 2011, soit plus de trois ans après la publication du commandement, comme l'a constaté le tribunal ; qu'en s'étant fondée sur la circonstance que le jugement d'adjudication emportait purge de tous les vices antérieurs, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard des articles 694 et 715 de l'ancien code de procédure civile ;


Alors 5°) que la purge des vices de la procédure antérieure ne peut être constatée en cas de fraude ; qu'à défaut d'avoir recherché, comme elle y était invitée, si une fraude n'était pas avérée, tenant à la consignation tardive du prix et à l'absence de versement de sommes au Trésor Public en vue de l'apurement de la dette, dans le but de faire courir les intérêts de retard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la règle fraus omnia corrumpit.



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Adjudication


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.