par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 2, 8 janvier 2015, 13-21044
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
8 janvier 2015, 13-21.044
Cette décision est visée dans la définition :
Juge de l'exécution (JEX)
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 14 mars 2013), que la Société générale (la banque), a consenti à la société civile immobilière Fontenoy (la SCI) deux prêts garantis par une hypothèque sur l'immeuble acquis et par le cautionnement solidaire et hypothécaire de M. X... et Mme Y..., son épouse, sur un immeuble leur appartenant ; que les cautions hypothécaires ont vendu l'immeuble grevé à la société Gulf Stream Property (le tiers détenteur) selon un acte reçu par M. Z..., notaire associé de la SCP Z... et A... ; que la banque, interrogée par M. Z... et la SCP Z... et A... (les notaires) a déclaré que le prêt consenti à M. et Mme X...- Y... avait été remboursé par anticipation ; que l'inscription n'a pas été purgée ; que le bien de la SCI a fait l'objet d'une saisie immobilière ; que la banque a exercé contre le tiers détenteur des poursuites aux fins de saisie immobilière ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le tiers détenteur fait grief à l'arrêt de mettre hors de cause les notaires, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge de l'exécution connaît de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci ou des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ; qu'en considérant le juge de l'exécution incompétent pour statuer sur une demande en responsabilité contre le notaire pour n'avoir pas accompli des formalités qui, si elles avaient été effectuées, auraient retiré au poursuivant la possibilité de saisir l'immeuble de son débiteur entre les mains de son tiers détenteur, la cour d'appel a violé l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ;
2°/ que constitue une fin de non-recevoir le moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande pour défaut de droit d'agir tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ; qu'en justifiant son refus de prononcer le renvoi de l'affaire devant la juridiction compétente par le fait que le moyen tiré du défaut de pouvoir du tribunal pour statuer sur la responsabilité du notaire constituait une fin de non-recevoir et non une exception d'incompétence, la cour d'appel a violé les articles 75 et 122 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant rappelé que le juge de l'exécution connaît des demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageables des mesures d'exécution forcée puis relevé que la responsabilité des notaires était recherchée du fait de l'inaccomplissement de formalités dans la rédaction de l'acte de vente, c'est à bon droit que l'arrêt retient que cette demande qui est étrangère aux conditions d'exécution de la saisie n'entrait pas dans le champ des attributions du juge de l'exécution ;
Et attendu que la cour d'appel, pour justifier l'absence de renvoi de l'affaire, retient exactement que le moyen tiré du défaut de pouvoir juridictionnel de la juridiction saisie constitue une fin de non-recevoir et non une exception d'incompétence ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen, tel que reproduit en annexe :
Attendu que le tiers détenteur fait grief à l'arrêt d'ordonner la vente forcée de l'immeuble lui appartenant ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments qui lui étaient soumis et sans inverser la charge de la preuve, que la cour d'appel, après avoir constaté que la période d'effet de l'hypothèque s'étendait jusqu'au 7 juillet 2016, a retenu que le courrier laconique et approximatif de la banque adressé au notaire ne pouvait être tenu pour un aveu judiciaire faisant foi contre son auteur des assertions qui y étaient contenues, procédant ainsi à la recherche prétendument omise, et a jugé que le tiers détenteur ne rapportait pas la preuve de l'extinction de l'hypothèque à la suite du paiement du prêt garanti ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Gulf Stream Property aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Gulf Stream Property à payer à M. Z... et à la société Arnaud Z... et Emmanuel A... la somme globale de 2 000 euros et à la Société générale celle de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt.
Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Gulf Stream Property.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir mis hors de cause M. Arnaud Z... et la SCP Z... A..., notaires ;
Aux motifs que le juge de l'exécution connaissait des demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageables des mesures d'exécution forcée ou des mesures conservatoires ; que tel n'était pas le cas de l'action récursoire intentée par la société Gulf Stream Property contre M. Z... ; qu'il était reproché au notaire, non une faute liée à l'exercice de la saisie ou à la réalisation de ses effets, mais à l'inaccomplissement de formalités qui, si elles avaient été effectuées, auraient retiré au poursuivant la possibilité de saisir ultérieurement l'immeuble de son débiteur entre les mains de son tiers détenteur ; que dans ces conditions, il n'appartenait pas au juge de l'exécution de se prononcer sur une éventuelle responsabilité encourue par le notaire dont l'appréciation sortait du champ de ses attributions ; que le moyen tiré du défaut de pouvoir du tribunal saisi constituait une fin de non-recevoir et non une exception d'incompétence ; qu'il convenait par la suite de mettre purement et simplement le notaire et la société civile professionnelle hors de cause, sans prononcer le renvoi de l'affaire les concernant devant une juridiction désignée comme compétente ;
Alors 1°) que le juge de l'exécution connaît de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci ou des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ; qu'en considérant le juge de l'exécution incompétent pour statuer sur une demande en responsabilité contre le notaire pour n'avoir pas accompli des formalités qui, si elles avaient été effectuées, auraient retiré au poursuivant la possibilité de saisir l'immeuble de son débiteur entre les mains de son tiers détenteur, la cour d'appel a violé l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ;
Alors 2°) que constitue une fin de non-recevoir le moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande pour défaut de droit d'agir tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ; qu'en justifiant son refus de prononcer le renvoi de l'affaire devant la juridiction compétente par le fait que le moyen tiré du défaut de pouvoir du tribunal pour statuer sur la responsabilité du notaire constituait une fin de non-recevoir et non une exception d'incompétence, la cour d'appel a violé les articles 75 et 122 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir ordonné la vente forcée de l'immeuble appartenant à la société Gulf Stream Property, tiers détenteur, situé à Neufchatel Hardelot sur une mise à prix de 765 000 Euros après avoir évalué à 544 180, 51 Euros la créance dont la Société Générale était titulaire sur la SCI Fontenoy ;
Aux motifs que dans sa lettre du 12 juillet 2005 adressée à la Société Générale à l'occasion de la vente de l'immeuble des consorts X... Y... à la société Gulf Stream Property, la SCP Z... rappelait que le bien en question était « affecté à la sûreté et garantie du remboursement du prêt sus-référencé d'un montant en principal de 457 347, 05 Euros que vous avez consenti suivant acte reçu par M. B..., notaire à Boulogne-sur-Mer le 9 juin 1998 au profit de M. X... et Mme Y... » ; que le notaire demandait à l'établissement financier de lui faire parvenir un état de sa créance dans un délai rapproché, la réalisation de la vente étant prévue pour le 20 juillet 2005 au plus tard ; que le lendemain, le chargé d'études de la Société Générale répondait brièvement : « nous avons l'honneur de vous informer que le prêt de 457 347, 05 Euros consenti en 1998 aux consorts X... Y... a été remboursé par anticipation » ; qu'en raison du laconisme de la réponse apportée par la Société Générale à la demande de renseignements émise par le notaire et des données approximatives fournies par lui, dans lesquelles les consorts X... Y... apparaissaient comme des emprunteurs au lieu et place de la SCI Fontenoy, l'affirmation contenue dans le courrier de l'organisme de prêt ne pouvait être tenue pour un aveu faisant foi contre son auteur des assertions contenues ; que les circonstances dans lesquelles la Société Générale avait rédigé cette réponse qui visait en objet le « dossier de M. et Mme X... Y... » ne permettaient pas de déduire qu'elle ait eu pleine conscience que l'acquéreur de l'immeuble hypothéqué pouvait tirer parti des déclarations par elle faites et qu'il se trouverait dispensé, en les invoquant, d'avoir à prouver la réalité du paiement contesté, de même que l'extinction de la sûreté dont elle était titulaire sur ce bien ; que dans ces conditions, la société Gulf Stream Property ne rapportait pas la preuve que l'hypothèque inscrite sur l'immeuble de Neufchatel Hardelot dont la période d'effet s'étendait jusqu'au 7 juillet 2016, se soit trouvée éteinte à la suite du paiement du prêt qu'elle garantissait ;
Alors 1°) que le créancier poursuivant a la charge de prouver l'obligation dont le paiement est garanti par une hypothèque ; qu'en ayant mis à la charge de la société Gulf Stream Property la preuve que l'hypothèque inscrite sur l'immeuble qui lui avait été cédé s'était trouvée éteinte à la suite du paiement du prêt qu'elle garantissait, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
Alors 2°) que le créancier poursuivant a la charge de prouver l'obligation dont le paiement est garanti par une hypothèque ; qu'il incombait donc à la Société Générale de démontrer que sa déclaration contenue dans la lettre du 21 juillet 2005 aux termes de laquelle le prêt de 457 347, 05 Euros consenti en 1998 avait été remboursé par anticipation ne concernait pas le prêt litigieux mais un autre prêt, d'un montant identique au centime près, dont la preuve de l'existence lui incombait aussi ; qu'en considérant que cette déclaration du créancier poursuivant ne dispensait pas la société Gulf Stream Property de démontrer la réalité du paiement contesté, la cour d'appel a de nouveau inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;
Alors 3°) que l'hypothèque s'éteint par l'extinction de l'obligation principale ; que la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si la preuve de l'extinction de la créance hypothécaire ne résultait pas des mentions de l'acte notarié du 26 août 2005 selon lesquelles (p. 15) suite à la demande de décompte de remboursement anticipé adressée à la Société Générale par les soins du notaire M. Z..., le créancier avait répondu que le prêt objet de l'inscription hypothécaire prise le 3 juillet 1998 avait été remboursé par anticipation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2488 du code civil.
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Cette décision est visée dans la définition :
Juge de l'exécution (JEX)
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.