par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 3, 18 juin 2014, 12-20714
Dictionnaire Juridique
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
18 juin 2014, 12-20.714
Cette décision est visée dans la définition :
Propriété commerciale
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, après avis de la deuxième chambre civile en application de l'article 1015-1 du code de procédure civile :
Vu l'article 843 du code de procédure civile en sa rédaction antérieure au décret du 1er octobre 2010, ensemble l'article L. 145-1 du code de commerce dans sa version antérieure à la loi du 4 août 2008 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 avril 2012), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ, 13 juillet 2010, pourvoi n° 09-67.506), que M. X..., propriétaire d'un appartement donné à bail à M. Y..., a assigné Mme Z..., fille de ce dernier aujourd'hui décédé, aux fins de faire juger que cette dernière est occupante sans droit ni titre et ordonner son expulsion ; que Mme Z... a soulevé l'incompétence du tribunal d'instance en revendiquant un bail commercial ;
Attendu que pour dire que Mme Z... n'a pas droit au bénéfice du statut des baux commerciaux, l'arrêt retient qu'elle a été assignée devant le juge des référés du tribunal d'instance à l'audience du 5 juillet 2007, que l'affaire a été renvoyée à l'audience du 6 septembre 2007 puis au 4 octobre 2007, puis a fait l'objet d'un renvoi au fond à l'audience du 6 décembre devant le tribunal, que l'oralité de la procédure devant le tribunal d'instance, statuant en référé et au fond, impose aux parties de comparaître ou de se faire représenter pour formuler valablement leurs prétentions, qu'il n'est pas discuté que Mme Z... était représentée par son avocat lors de l'audience du 6 septembre 2007 au cours de laquelle elle a revendiqué par conclusions le bénéfice du statut des baux commerciaux, lesquelles ont ensuite été reprises lors de l'audience devant le tribunal d'instance statuant au fond, et que le 6 septembre 2007, Mme Z... n'était pas inscrite au registre du commerce et des sociétés puisque son inscription date du 20 septembre suivant ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le preneur qui revendique le statut des baux commerciaux doit justifier d'une immatriculation à la date de sa demande en justice et qu'en procédure orale, une demande en justice présentée dans un écrit n'est valablement formée que lorsqu'elle est oralement soutenue à l'audience des débats, la cour d'appel, qui a constaté que Mme Z... n'avait soutenu oralement sa demande que le 6 décembre 2007, a violé les textes sus-visés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer la somme de 3 000 euros à Mme Z... ; rejette la demande de M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit juin deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme Z....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que Mme Z... n'a pas droit au bénéfice du statut des baux commerciaux, dit que la loi du 1er septembre 1948 est seule applicable en l'espèce, et d'AVOIR, en conséquence, rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Mme Z... au profit du tribunal de grande instance de Paris, dit que celle-ci est occupante sans droit ni titre de l'appartement situé 13 rue Rambuteau à Paris 4e appartenant à M. X..., et ordonné son expulsion ;
AUX MOTIFS QUE sur l'exception d'incompétence au profit du tribunal de grande instance de Paris : que Mme Frances Z... se prévaut du caractère commercial du bail consenti en 1961 à son père, artiste peintre renommé ayant pendant de nombreuses années exercé son activité dans cet appartement, du fait qu'elle est en droit de bénéficier du statut des baux commerciaux en tant que membre de l'indivision successorale puisqu'elle est inscrite depuis le 20 septembre 2007 au registre du commerce et exploite le fonds pour le compte de l'indivision, seul le tribunal de grande instance de Paris étant, d'après elle compétent, pour statuer sur le litige l'opposant à M. Louis X... qui relève de l'application du décret du 30 septembre 1953, que M. Louis X... réplique qu'en dépit des assertions péremptoires sur la nature commerciale du bail consenti à Stephen Y..., l'appelante n'établit pas que les parties ont manifesté dès l'origine la volonté de soumettre le bail portant sur un appartement au statut des baux commerciaux et que l'article L 145-1 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 4 août 2008, subordonne le bénéfice du statut des baux commerciaux à l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ; Considérant que l'article L 145-1 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige soit antérieure à la loi du 4 août 2008 ne prévoyait pas qu'en cas de décès du titulaire d'un bail commercial, les dispositions du chapitre V intitulé "Du bail commercial" s'appliquent à ses héritiers ou ses ayants droit qui, bien que n'exploitant pas de fonds de commerce ou de fonds artisanal, demandent le maintien de l'immatriculation de leur ayant cause pour les besoins de la succession" mais énonçaient que les dispositions de ce chapitre V s'appliquent aux baux des immeubles ou locaux dans lequel un fonds est exploité, que ce fonds appartienne soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés soit à un chef d'une entreprise immatriculée au répertoire des métiers, accomplissant ou non des actes de commerce ; qu'il convient de rechercher si à la date à laquelle Mme Frances Z... a revendiqué le bénéfice du statut des baux commerciaux, qui ne peut être, comme l'a retenu le tribunal celle de l'assignation en justice du 15 juin 2007 délivrée par M. Louis X..., elle était inscrite au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers. Considérant que Mme Frances Z... a été assignée devant le juge des référés du tribunal d'instance du 4e arrondissement de Paris pour l'audience du 5 juillet 2007 ; que l'affaire a été renvoyée à l'audience du 6 septembre 2007 lors de laquelle, représentée par son conseil, elle a déposé des conclusions aux termes desquelles elle s'est prévalue de l'incompétence du tribunal d'instance pour statuer sur l'application du statut des baux commerciaux qu'elle revendiquait et de l'existence d'une contestation sérieuse excédant les pouvoirs du juge des référés, en l'absence d'urgence, de dommage imminent et de trouble manifestement illicite (pièce 17 de l'appelante) ; que l'affaire a ensuite été renvoyée, selon le jugement entrepris, à l'audience du 4 octobre 2007 lors de laquelle elle a fait l'objet, en application de l'article 849-1 du code de procédure civile, d'un renvoi au fond à l'audience du 6 décembre devant le tribunal qui a statué le 10 janvier 2008, Considérant que Mme Frances Z... se prévaut en vain de ce que la procédure étant orale devant le tribunal d'instance, les conclusions échangées n'ont qu'une simple valeur d'information permettant le respect du principe du contradictoire et que c'est à la date à laquelle cette argumentation a été reprise oralement, soit le 6 décembre 2007, que la cour doit se placer ; qu'en effet, si l'oralité de la procédure devant le tribunal d'instance, statuant en référé et au fond, impose aux parties de comparaître ou de se faire représenter pour formuler valablement leurs prétentions, il n'est pas discuté que Mme Frances Z... était représentée par son avocat lors de l'audience du 6 septembre 2007 au cours de laquelle elle a revendiqué par conclusions le bénéfice du statut des baux commerciaux, lesquelles ont ensuite été reprises lors de l'audience devant le tribunal d'instance statuant au fond ; que le 6 septembre 2007, Mme Frances Z... n'était pas inscrite au registre du commerce et des sociétés puisque son inscription date du 20 septembre suivant ; qu'elle ne peut en conséquence revendiquer le bénéfice du statut des baux commerciaux, le fait qu'elle se soit inscrite au registre du commerce "dans un délai raisonnable" à compter du décès de son père étant inopérant ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence au profit du tribunal de grande instance de Paris et dit que Mme Frances Z... n'a pas droit au bénéfice du statut des baux commerciaux mais infirmé en ce qu'il a ajouté "du fait qu'elle n'était pas inscrite au registre du commerce au moment où l'assignation lui a été délivrée" ;
1) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que dans ses conclusions d'appel, M. X... se bornait à faire valoir que Mme Z... avait adressé par télécopie du 5 septembre 2007 ses conclusions pour l'audience de référé du tribunal d'instance du 6 septembre 2007, dans lesquelles elle invoquait l'application du statut des baux commerciaux ; qu'il ne soutenait pas que Mme Z... était représentée par son avocat lors de cette audience ; que de son côté, Mme Z... faisait valoir que son argumentation n'avait été soutenue oralement qu'à l'audience au fond du 6 décembre 2007, à laquelle l'affaire avait été renvoyée ; qu'en retenant, pour dire que Mme Z... ne pouvait bénéficier du statut des baux commerciaux, qu'il n'était pas discuté que lors de l'audience du 6 septembre 2007 elle était représentée par son conseil, qui avait déposé des conclusions invoquant l'application du statut des baux commerciaux, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2) ALORS subsidiairement QUE l'oralité de la procédure devant le tribunal d'instance impose à la partie de comparaître ou de se faire représenter pour formuler valablement des prétentions et les justifier ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les conclusions déposées par Mme Z... le 6 septembre 2007 avaient été reprises oralement à l'audience de fond du 6 décembre 2007, date à laquelle Mme Z... était immatriculée au registre du commerce et des sociétés ; qu'en retenant, pour considérer que Mme Z... ne pouvait bénéficier du statut des baux commerciaux, qu'il n'était pas discuté qu'elle était représentée par son avocat lors de l'audience du 6 septembre 2007 au cours de laquelle elle avait revendiqué par conclusions le bénéfice du statut des baux commerciaux, quand ces conclusions n'étaient devenues opérantes qu'au jour où elles avaient été reprises oralement, soit le 6 décembre 2007, la cour d'appel a violé l'article 843 du Code de procédure civile en sa rédaction applicable en l'espèce, ensemble l'article L. 145-1 du Code de commerce dans sa version antérieure à la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 applicable en l'espèce ;
3) ALORS en toute hypothèse QUE la condition d'immatriculation est remplie dès lors qu'un héritier du locataire décédé s'inscrit au registre du commerce et des sociétés dans un délai raisonnable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté elle-même que M. Y... était décédé le 12 janvier 2007 et que sa fille Mme Z... s'était inscrite au registre du commerce et des sociétés dès le 20 septembre 2007, ce dont il résultait que cette dernière s'était immatriculée dans un délai raisonnable ; qu'en relevant que Mme Z... ne pouvait prétendre au bénéfice du statut des baux commerciaux dès lors qu'elle n'était pas immatriculée à la date du 6 septembre 2007 et que le fait qu'elle se soit inscrite dans un délai raisonnable était inopérant, la cour d'appel a violé l'article L. 145-1 du code de commerce, dans sa version antérieure à la loi n° 2008-776 du 4 août 2008.
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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.