par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 30 juin 2011, 10-20246
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
30 juin 2011, 10-20.246

Cette décision est visée dans la définition :
Accident du travail




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'en cas d'accident du travail dont est victime un salarié mis à disposition par une entreprise de travail temporaire auprès d'une entreprise utilisatrice, cette dernière, responsable des conditions d'exécution du travail de ce salarié, n'a pas la qualité de tiers à l'égard de celui-ci, de sorte que sa responsabilité ne peut être engagée en application des dispositions de l'article susvisé ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Adecco (l'entreprise de travail temporaire), a été victime, à l'occasion de la manipulation d'un chariot élévateur par M. Y..., d'un accident, alors qu'il travaillait pour le compte de la société Somaref (l'entreprise utilisatrice), laquelle était assurée par la société AGF, aux droits de laquelle vient la société Allianz IARD (l'assureur) ; que cet accident ayant été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de la Dordogne, M. X... a assigné l'entreprise utilisatrice et M. Y... devant le tribunal de grande instance sur le fondement des articles 1382 et 1384 du code civil, afin d'obtenir réparation de son préjudice corporel ; que l'entreprise utilisatrice a assigné en garantie son assureur ;

Attendu que pour accueillir la demande de M. X..., l'arrêt retient que l'entreprise de travail temporaire est l'employeur du salarié et que l'entreprise utilisatrice est un tiers au contrat de travail, de même que son préposé, de sorte que M. X..., victime d'un accident du travail alors qu'il était employé par l'entreprise de travail temporaire, est recevable à agir sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile contre l'entreprise utilisatrice et contre M. Y..., lesquels doivent être considérés comme "d'autres personnes que l'employeur ou ses préposés" au sens de l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 avril 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Allianz IARD ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils pour la société Allianz IARD

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir écarté l'exception d'incompétence soulevée par la société Allianz Iard au profit du tribunal des affaires de sécurité sociale de Périgueux ;

AUX MOTIFS QUE M. X... a été embauché en qualité d'intérimaire par la société Adecco ; que le 17 juin 2005, il a été victime d'un accident alors qu'il travaillait sur un chantier de la société Somaref en compagnie de M. Y... salarié de cette entreprise ; que les 26 août, 15 et 17 septembre 2008, M. X... a fait assigner M. Y..., la société Somaref et la CPAM de la Dordogne à comparaître devant le tribunal de grande instance de Bergerac afin d'obtenir la réparation de son préjudice ; que la société Somaref a appelé son assureur, la compagnie AGF dans la procédure ; que par ordonnance du 26 juin 2009, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Bergerac, statuant sur les prétentions dont M. X... l'avait saisi, a rejeté la demande de provision formulée et a ordonné une expertise médicale afin de déterminer l'étendue de son préjudice corporel ; que pour adopter cette décision, le juge de la mise en état a rejeté l'exception d'incompétence au profit du tribunal des affaires de sécurité sociale qui était invoquée par la compagnie Agf et M. Y... en considérant qu'en application de l'article L.454-1 du code de la sécurité sociale, la victime conserve le droit de demander réparation de son préjudice à l'auteur de l'accident selon le droit commun lorsque la lésion dont elle est atteinte est imputable à une autre personne que l'employeur ou ses préposés, et que M. X... qui employé par l'entreprise de travail temporaire, n'est pas salarié de la société Somaref et qu'il peut donc agir contre celle-ci et son préposé ;

ET AUX MOTIFS QU'il résulte des dispositions de l'article L.454-1 du code de la sécurité sociale que la victime conserve le droit de demander réparation de son préjudice à l'auteur de l'accident conformément aux règles de droit commun lorsque la lésion dont elle est atteinte est imputable à une autre personne que l'employeur ou ses préposés ; que l'article L.412-6 du code de la sécurité sociale prévoit pour sa part que l'entreprise de travail temporaire est seule tenue des conséquences financières de l'accident du travail dont son employé a été victime, sous réserve du recours dont elle dispose en cas de faute inexcusable contre l'entreprise utilisatrice ; qu'il apparaît donc que l'entreprise de travail temporaire est bien l'employeur du salarié et que l'entreprise utilisatrice est un tiers par rapport au contrat de travail de même que son préposé ; que M. X... qui a été victime d'un accident du travail alors qu'il était employé par l'entreprise de travail temporaire Adecco est donc recevable à agir sur le fondement du droit commun contre la société Somaref et contre M Y... qui doivent être considérés comme étant « d'autres personnes que l'employeur ou ses préposés » au sens de l'article L.454-1 du code de la sécurité sociale ; que l'ordonnance entreprise qui a retenu la compétence du tribunal de grande instance pour organiser l'expertise médicale alors sollicitée par M. X..., sera en conséquence confirmée ; que les règles applicables étant celles du droit commun, c'est par ailleurs à tort que la compagnie Allianz invoque l'application de la législation sur les accidents du travail pour soutenir qu'il existe une contestation sérieuse ; qu'elle ne peut pas non plus demander que la mission de l'expert soit limitée à la détermination du préjudice personnel de M. X..., lequel peut prétendre à la réparation intégrale de son préjudice selon les règles du droit commun ; qu'elle ne peut pas non plus, pour échapper au paiement d'une provision, invoquer l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, lequel n'a pas vocation à s'appliquer, seule la législation de droit commun régissant les rapports des parties ;

ET AUX MOTIFS, NON CONTRAIRES, ADOPTES qu'en vertu des articles L.454-1 et L.452-5 du code de la sécurité sociale, aucune action en réparation d'un accident du travail ne peut être exercée conformément au droit commun par la victime ou ses ayants droit, sauf dans l'hypothèse d'une faute intentionnelle de l'employeur ou de l'un de ses préposés ; qu'en vertu de l'article L.454-1 du même code, la victime conserve le droit de demander réparation de son préjudice à l'auteur de l'accident conformément aux règles du droit commun lorsque la lésion dont elle est atteinte est imputable à une autre personne que l'employeur ou ses préposés ; qu'en vertu de l'article L.412-6 dudit code, l'entreprise de travail temporaire est seule tenue des conséquences financières de l'accident du travail dont son employé a été victime, sous réserve du recours dont elle dispose en cas de faute inexcusable contre l'entreprise utilisatrice ; que M. Sébastien X... exerce une action de droit commun à l'encontre de la Sarl Somaref et de son préposé M. Laurent Y... et non à l'encontre de l'entreprise de travail temporaire dont il était l'employé au jour de l'accident ; que cette action exercée par la victime d'un accident du travail à l'encontre d'un tiers est en conséquence recevable ;


ALORS, QU'en cas d'accident du travail imputable à la faute inexcusable d'une entreprise utilisatrice, l'entreprise de travail temporaire, seule tenue en sa qualité d'employeur de la victime des obligations prévues aux articles L.452-1 à L.452-4 du code de la sécurité sociale, dispose d'un recours contre l'entreprise utilisatrice pour obtenir simultanément ou successivement le remboursement des indemnités complémentaires versées à la victime et la répartition de la charge financière de l'accident du travail ; que l'entreprise utilisatrice, responsable des conditions d'exécution du travail, n'a pas la qualité de tiers vis-à-vis de la victime ; qu'en relevant que «l'entreprise utilisatrice est un tiers par rapport au contrat de travail de même que son préposé», pour juger M. X... recevable à agir sur le fondement du droit commun contre la société Somaref, entreprise utilisatrice, et contre son préposé, M. Y..., la cour d'appel a excédé ses pouvoirs, en violation de l'article L.454-1 du code de la sécurité sociale.



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Cette décision est visée dans la définition :
Accident du travail


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.