par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 3, 1er juin 2011, 10-18855
Dictionnaire Juridique
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
1er juin 2011, 10-18.855
Cette décision est visée dans la définition :
Propriété commerciale
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 26 novembre 2009) que M. Alain X... et Mme Jocelyne Y... ont pris à bail en 1992 des locaux à usage commercial ; que les époux X... ont divorcé par jugement du 17 décembre 1997 ; que les bailleurs leur ont délivré congé sans offre de renouvellement ni indemnité d'éviction par acte du 23 avril 2007, en invoquant le défaut d'immatriculation au registre du commerce de M. X... ; que Mme Y... a assigné les bailleurs, en présence de son ex-époux, en paiement d'une indemnité d'éviction ;
Attendu que les bailleurs font grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le défaut d'immatriculation de l'un des cotitulaires du bail prive l'ensemble des copreneurs du bénéfice du statut des baux commerciaux, sauf si les copreneurs sont des époux communs en biens ou des héritiers indivis ; qu'en jugeant que l'immatriculation de Mme Y... au registre du commerce suffisait à conférer aux preneurs le bénéfice du statut des baux commerciaux, quand il résultait de ses propres constatations que le bail litigieux avait été consenti à Mme Y... et son époux, M. X..., qui avaient ensuite divorcé et étaient désormais soumis au régime de l'indivision post-communautaire, de sorte que les deux anciens époux, qui n'étaient plus communs en biens et n'étaient pas des héritiers indivis, devaient être immatriculés au registre du commerce, la cour d'appel a violé l'article L. 145-1 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;
2°/ qu'en toute hypothèse si le défaut d'immatriculation de l'un des anciens époux, soumis au régime de l'indivision post-communautaire et cotitulaires du bail prive, ne prive pas l'ensemble des copreneurs du bénéfice du statut des baux commerciaux, c'est à la condition qu'après leur divorce ils n'aient pas repris l'exploitation du fonds dans d'autres conditions que celles qui existaient lorsqu'ils étaient communs en biens ; qu'en jugeant que l'immatriculation de Mme Y... suffisait à conférer aux preneurs le bénéfice du statut des baux commerciaux, quand elle avait elle-même relevé qu'après leur divorce les anciens époux avaient donné le fonds en location-gérance à la société Jocelyne puis qu'ils avaient repris possession de leurs fonds de commerce, ce dont il résultait que s'ils n'avaient pas à être immatriculés au registre du commerce pendant la période de location gérance, ils devaient ultérieurement être tous les deux immatriculés, la cour d'appel a violé l'article L. 145-1 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les copreneurs, qui avaient été mariés sous le régime de la communauté, se trouvaient en indivision post-communautaire, et que l'ex-épouse, exploitant le fonds dans l'intérêt de l'indivision, était immatriculée au registre du commerce, la cour d'appel, devant laquelle les bailleurs n'ont pas invoqué l'exploitation temporaire du fonds en location-gérance, en a exactement déduit que les bailleurs ne pouvaient se prévaloir du défaut d'immatriculation de l'autre copreneur pour refuser le paiement d'une indemnité d'éviction ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Z... et M. A... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme Z... et M. A....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le congé sans offre de renouvellement ni indemnité d'éviction ne reposait pas sur un juste motif et, en conséquence, d'AVOIR déclaré fondé en son principe le droit à indemnité d'éviction ;
AUX MOTIFS QU'il résulte de l'article L. 145-1 du Code de commerce que l'immatriculation au registre du commerce est une condition nécessaire au bénéfice du statut des baux commerciaux en ce qui concerne le renouvellement du bail ; que cependant selon le dernier alinéa de ce texte « si le fonds est exploité en location-gérance en application du chapitre IV du présent titre, le propriétaire du fonds bénéficie néanmoins des présentes dispositions sans avoir à justifier de l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers » ; que s'agissant d'un fonds de commerce indivis en plusieurs co-propriétaires et exploité par un seul d'entre eux, la condition d'immatriculation au registre du commerce doit être remplie par chacun des co-titulaires du bail ; que le défaut d'immatriculation de l'un des co-titulaires du bail prive l'ensemble des preneurs du bénéfice du statut, sauf si les co-preneurs sont des époux communs en biens ou des héritiers indivis ; que la qualité de commerçant immatriculé au registre du commerce n'est requise qu'en la personne de celui des époux communs en biens ou de celui des membres d'une indivision successorale qui exploite le fonds pour le compte et dans l'intérêt commun des époux ou des indivisaires ; que Monsieur X... et Madame Y... étaient mariés sous le régime de la communauté lors de la conclusion du contrat de bail ; que leur divorce a été prononcé par le jugement du Tribunal de grande instance de BOURGOIN-JALLIEU en date du 17 décembre 1997 ; qu'un procès-verbal de difficulté a été dressé le 19 février 2000 par Maître B..., notaire à L'ISLE D'ABEAU, avec la participation de Maître C..., notaire à SAINT ALBAN DE ROCHE ; que selon procès-verbal en date du 14 novembre 2000, le juge-commissaire a constaté le désaccord des parties et a renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état ; que par jugement en date du 9 mars 2006, le Tribunal de grande instance de BOURGOIN-JALLIEU a fixé les bases du partage en disant notamment que le fonds de commerce de bar « Le Delaunay » devait être évalué à la moyenne HT du chiffre d'affaires pour les trois dernières années entièrement écoulées à la date effective du partage et en attribuant préférentiellement ce fonds à Madame Y... et a renvoyé les parties devant les notaires chargés d'établir les comptes de liquidation-partage ; qu'il n'est pas établi que l'acte de partage définitif soit intervenu et qu'il doit être rappelé que l'attribution préférentielle prend effet à la date du partage ; que les époux X.../ Y... sont donc toujours en indivision post-communautaire ; que l'indivision post-communautaire s'inscrit dans la suite logique de la communauté entre époux ; que tandis qu'il est constant que la qualité de commerçant immatriculé n'est requise que de celui des époux communs en biens qui exploite le fonds pour le compte et dans l'intérêt commun des époux, rien ne justifie qu'à la suite de la dissolution de la communauté par l'effet d'un divorce, l'ex-époux non exploitant du fonds soit tenu de s'immatriculer au registre du commerce pour conserver le bénéfice du droit au statut et donc au renouvellement au profit de l'indivision post-communautaire alors qu'il ne l'était pas à l'époque du mariage ; qu'il n'y a pas de raison de traiter différemment l'indivision post-communautaire de l'indivision successorale, l'une comme l'autre n'étant pas des indivisions conventionnelles ; que deux ex-époux mariés sous le régime de la communauté puis divorcés ne sont pas dans la même situation que deux époux séparés de biens, divorcés ou non, ayant acquis un fonds de commerce en indivision et co-titulaires du bail ; que les époux séparés de biens sont dès l'origine co-indivisaire, les époux communs en biens ne le devenant que par l'effet du divorce ; que d'ailleurs selon l'article 1476 ancien du Code civil applicable en l'espèce, le partage de la communauté, pour tout ce qui concerne ses formes, le maintien dans l'indivision et l'attribution préférentielle, la licitation des biens, les effets du partage, la garantie et les soultes, est soumis à toutes les règles qui sont établies au titre des successions pour les parages entre cohéritiers ; qu'ainsi, il résulte bien tant de l'esprit que de la lettre de ce texte que le législateur a entendu soumettre l'indivision post-communautaire aux mêmes règles que l'indivision successorale ; qu'il ne pourrait en aller différemment que si les ex-époux avaient signé une convention d'indivision substituant ce faisant une indivision conventionnelle à l'indivision post-communautaire, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'il n'était donc point besoin que Monsieur X... soit immatriculé au registre du commerce à la date de délivrance du congé ; qu'il n'est pas contesté que Madame Y... l'était ; qu'il ne peut non plus sérieusement être contesté que l'exploitation du fonds est dans l'intérêt de l'indivision post-communautaire puisqu'en vertu des dispositions applicables en matière d'indivision, les fruits de l'exploitation bénéficient à l'indivision et que surtout elle conserve la valeur patrimoniale du fonds et du droit au bail ; que cela explique qu'au-delà du conflit qui les oppose, Monsieur X... se soit associé à la demande de son ex-épouse devant le Tribunal de grande instance ; que c'est bien en vain que les consorts Z.../ A... distinguent l'intérêt exclusif de Madame Y... et l'intérêt commun, l'intérêt exclusif de Madame Y... étant étroitement lié à l'intérêt commun et dépendant de lui ; que par ailleurs les consorts Z.../ A... font également valoir en vain que sont versés au dossier les bilans d'une EURL JOCELYNE qui n'est nullement dans la cause et qui, semble-t-il, exploite le fonds, ce qui rendrait Madame Y... divorcée X... irrecevable en sa demande de paiement d'indemnité d'éviction si la Cour venait à la voir reconnaître éligible à la condition nécessaire pour obtenir le renouvellement de son bail ; qu'outre le fait que ce moyen est peu explicite, il est justifié de la communication en première instance par le Conseil de Monsieur Alain X... aux conseils de Madame Y... et des consorts Z.../ A... (bordereau de communication de pièces du 23 juillet 2008) de l'acte notarié de location-gérance du fonds de commerce par les époux X...- Y... à l'EURL JOCELYNE dont l'unique associée et gérante était Madame Jocelyne X... née Y... en date du 27 mai 1998 de sorte qu'en l'état d'un contrat de location-gérance tel celui dont s'agit, il ne serait pas même nécessaire que Monsieur X... et/ ou Madame Y... soient immatriculés au registre du commerce pour prétendre au bénéfice du droit au renouvellement ; qu'à cet égard, il convient toutefois de relever que dans ses écritures devant le Tribunal, Monsieur X... expliquait que le contrat de location-gérance avait pris fin, que les époux X...- Y... avaient repris possession de leur fonds de commerce et que celui-ci était désormais exploité par Madame Y... personnellement de sorte que les ex-époux X.../ Y... ne peuvent pas plus se prévaloir d'un contrat de location-gérance que les consorts Z.../ A... d'une exploitation du fonds par une EURL JOCELYNE dans des conditions qui ne seraient pas précisées ; qu'il ne peut non plus être fait état d'une soumission volontaire au statut alors que tel n'est pas le cas en l'espèce ; que dès lors que l'on est en présence d'un bail commercial, indivis entre deux ex-époux qui étaient mariés sous le régime de la communauté et qui se trouvent en indivision post-communautaire, l'ex-épouse exploitant le fonds dans l'intérêt de l'indivision post-communautaire et étant immatriculée au registre du commerce au moment du congé, le défaut d'immatriculation de l'ex-époux au registre du commerce ne peut constituer une cause d'irrecevabilité de la contestation du congé et de la demande d'indemnité d'éviction ; que les consorts Z.../ A... sont mal fondés en leurs moyens tendant à voir déclarer Madame Y... divorcée X... irrecevable en son action en contestation du congé délivré le 23 avril 2007 et en paiement d'une indemnité d'éviction ; que les conditions du droit à renouvellement du bail sont réunies ; que les motifs du refus de renouvellement sans indemnité d'éviction sont mal fondés ; que le droit à indemnité d'éviction est établi ;
1) ALORS QUE le défaut d'immatriculation de l'un des cotitulaires du bail prive l'ensemble des copreneurs du bénéfice du statut des baux commerciaux, sauf si les copreneurs sont des époux communs en biens ou des héritiers indivis ; qu'en jugeant que l'immatriculation de Madame Y... au registre du commerce suffisait à conférer aux preneurs le bénéfice du statut des baux commerciaux, quand il résultait de ses propres constatations que le bail litigieux avait été consenti à Madame Y... et son époux, Monsieur X..., qui avaient ensuite divorcé et étaient désormais soumis au régime de l'indivision post-communautaire, de sorte que les deux anciens époux, qui n'étaient plus communs en biens et n'étaient pas des héritiers indivis, devaient être immatriculés au registre du commerce, la Cour d'appel a violé l'article L. 145-1 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;
2) ALORS QU'en toute hypothèse si le défaut d'immatriculation de l'un des anciens époux, soumis au régime de l'indivision post-communautaire et cotitulaires du bail prive, ne prive pas l'ensemble des copreneurs du bénéfice du statut des baux commerciaux, c'est à la condition qu'après leur divorce ils n'aient pas repris l'exploitation du fonds dans d'autres conditions que celles qui existaient lorsqu'ils étaient communs en biens ; qu'en jugeant que l'immatriculation de Madame Y... suffisait à conférer aux preneurs le bénéfice du statut des baux commerciaux, quand elle avait elle-même relevé qu'après leur divorce les anciens époux avaient donné le fonds en location-gérance à la société JOCELYNE puis qu'ils avaient repris possession de leurs fonds de commerce, ce dont il résultait que s'ils n'avaient pas à être immatriculés au registre du commerce pendant la période de locationgérance, ils devaient ultérieurement être tous les deux immatriculés, la Cour d'appel a violé l'article L. 145-1 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-776 du 4 août 2008.
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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.