par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 23 juin 2010, 09-15963
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
23 juin 2010, 09-15.963

Cette décision est visée dans la définition :
Prêt




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 7 mai 2009), que par acte sous seing privé conclu le 29 juillet 2005 avec le concours de la société Toss Avis immobilier, agent immobilier, M. X... a vendu un immeuble aux époux Y..., sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt avant le 5 septembre 2005, à 18 heures ; qu'estimant que la condition n'avait pas été réalisée dans le délai prévu, M. X... a donné l'immeuble en location à un tiers ; que les époux Y... l'on assigné en paiement de la clause pénale stipulée au contrat, cependant que la société Toss demandait le paiement, à titre de clause pénale, des honoraires dont elle avait été privée du fait du comportement de son mandant ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande des époux Y..., alors, selon le moyen :

1° / que la condition suspensive d'obtention d'un prêt est réputée accomplie dès la délivrance d'une offre ferme et sans réserve caractérisant l'obtention d'un prêt conforme aux stipulations contractuelles ; que la cour d'appel a retenu pour condamner M. X... au paiement du montant d'une clause pénale aux époux Y... et d'honoraires de négociation à la société Toss, qu'il ressortait d'une attestation du Crédit mutuel de Poitiers du 6 septembre 2005 que les époux Y... avaient obtenu le prêt sollicité le 26 août 2005, soit antérieurement à la date d'expiration de la condition suspensive fixée au 5 septembre 2005 à 18 heures, que le compromis de vente n'ayant prévu aucune disposition à propos de l'assurance de l'acquéreur, M. X... ne pouvait prétendre que le prêt n'aurait pas été régulièrement accordé aux époux Y... au motif que ceux-ci ne justifieraient pas d'une assurance pour le remboursement du prêt, et que le mandat exclusif qu'il avait consenti à l'agence n'expirait que le 9 septembre 2005 ; qu'en statuant ainsi, et sans rechercher si l'attestation délivrée par la banque " sous réserve de l'acceptation à l'assurance des emprunteurs " constituait une offre ferme et sans réserve, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1176 du code civil et L. 312-16 du code de la consommation ;

2° / que le compromis du 29 juillet 2005 prévoit au profit de l'acquéreur une condition suspensive d'obtention d'un prêt, avec échéance au 5 septembre 2005 à 18 heures, considérée comme réalisée dès que l'acquéreur aura obtenu, dans le délai fixé un ou plusieurs prêts couvrant le montant global de la somme à financer par emprunt, et possibilité de prorogation sur demande expresse de l'acquéreur formulée par écrit et acceptation écrite du vendeur, et de renonciation par l'acquéreur avec notification avant l'expiration du délai précité ; qu'il est stipulé que si la condition suspensive n'est pas réalisée dans le délai prévu, sans que ce défaut incombe à l'acquéreur et sauf renonciation par ce dernier au bénéfice de la condition dans la forme prévue, chacune des parties retrouvera sa pleine et entière liberté, sans indemnité de part et d'autre ; que la cour d'appel, pour condamner M. X... en paiement du montant d'une clause pénale aux époux Y... et d'honoraires de négociation à la société Toss, a retenu que la clause suspensive d'obtention du prêt était édictée dans un souci de protection des acquéreurs, lesquels pouvaient seuls s'en prévaloir ; qu'en statuant ainsi, bien que le vendeur puisse se prévaloir de l'expiration du délai fixé pour la réalisation de la condition suspensive, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu que la clause " sous réserve de l'acceptation à l'assurance des emprunteurs " ne porte pas atteinte au caractère ferme de l'offre de crédit caractérisant l'obtention d'un prêt au sens de l'article L. 312-16 du code de la consommation ; qu'ayant relevé que les époux Y... produisaient une attestation du Crédit mutuel de Poitiers établissant qu'ils avaient obtenu le prêt sollicité le 26 août 2005, soit antérieurement à la date d'expiration de la validité de la condition suspensive, la cour d'appel en a déduit à bon droit que la condition suspensive d'obtention du prêt devait être considérée comme réalisée et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu, d'une part, que le premier moyen étant rejeté, le grief tiré d'une cassation par voie de conséquence est devenu sans portée ;

Attendu, d'autre part, que M. X... n'ayant pas soutenu que l'opération n'avait pas été effectivement conclue au sens de l'article 6, alinéa 3, de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 ni que le contrat stipulait que la rémunération de l'agent immobilier était à la charge du seul acquéreur, le moyen est nouveau, mélangé de fait et, partant, irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

En ce que l'arrêt attaqué a infirmé le jugement entrepris et condamné M. X... à payer aux époux Y... la somme de 14 000 € et à la société Toss, la somme de 10 600 €, au titre de la clause pénale ;

Aux motifs que a) Sur la demande des époux Y... qu'il était prévu au compromis de vente signé le 29 juillet 2005 par les époux Y... et M. X..., représenté par la SARL TOSS à laquelle un mandat exclusif de vente avait été donné le 9 juin 2005, que l'acte était soumis à la condition suspensive d'obtention d'un prêt dans un délai maximum de 450 jours, expirant le 5 septembre 2005 à 18 heures ; qu'il était en outre mentionné que « la présente condition suspensive sera considérée comme réalisée dès que l'acquéreur aura obtenu dans le délai fixé ci-avant, un ou plusieurs prêts couvrant le montant global de la somme à financer par emprunt et répondant aux caractéristiques définies au paragraphe D », ce dernier paragraphe précisant qu'il s'agissait d'un prêt de 154. 800 € au taux maximum de 3, 80 % pour une durée de vingt ans ; que les époux Y... produisent une attestation établie par le Crédit Mutuel de Poitiers, le 6 septembre 2005, dont il ressort qu'ils ont obtenu le prêt sollicité le 26 août 2005, soit antérieurement à la date d'expiration de la condition suspensive ; que la clause suspensive d'obtention du prêt est édictée dans un souci de protection des acquéreurs, lesquels peuvent seuls s'en prévaloir ; qu'en l'espèce, cette clause, parfaitement claire et non équivoque, exigeait que les acquéreurs aient obtenu leur prêt avant le 5 septembre 2005 à 18 heures, ce qui a été le cas, sans leur imposer d'en informer le vendeur dans le même délai, aucune disposition contractuelle ne leur imposant cette démarche ; qu'il ne peut donc être ajouté à l'acte, comme l'ont fait les premiers juges, en soutenant que l'information du vendeur concernant l'obtention du prêt serait nécessaire pour que la condition soit réalisée ; qu'il est indifférent que le mandat consenti à l'agence par M. X... ait présenté un caractère exclusif, cette circonstance étant sans incidence sur l'interprétation et la mise en oeuvre de la condition suspensive d'obtention du prêt ; que de même, le compromis de vente n'a prévu aucune disposition à propos de l'assurance de l'acquéreur ; que M. X... ne peut donc prétendre que le prêt n'aurait pas été régulièrement accordé aux époux Y... au motif que ceux-ci ne justifieraient pas d'une assurance pour le remboursement du prêt, la condition suspensive d'obtention du prêt ne contenant aucune précision sur ce point ; en conséquence que contrairement à ce qu'ont décidé les premiers juges, M. X... n'était pas fondé à prétendre, dès le 6 septembre 2005, avoir retrouvé " sa pleine et entière liberté, sans indemnité de part et d'autre ", et ceci d'autant moins que le mandat exclusif qu'il avait consenti à l'agence n'expirait que le 9 septembre 2005 ; que le compromis contenait une clause pénale prévoyant le versement d'une indemnisation forfaitaire de 14. 000 € dans le cas où l'une des parties viendrait à refuser de régulariser la vente par acte authentique dans le délai imparti, sauf à justifier de la réalisation d'une condition suspensive ; que tel est le cas en l'espèce, M. X... ayant refusé de conclure la vente alors que les époux Y... avaient obtenu leur prêt dans le délai fixé au compromis ; que les époux Y... avaient le choix, soit de poursuivre la réalisation forcée de la vente, soit de demander l'exécution de la clause pénale ; que M. X... ne peut donc reprocher aux époux Y... de n'avoir pas poursuivi la vente forcée de l'immeuble, qu'il avait d'ailleurs aussitôt loué dès le 7 septembre 2005 ; que M. X... sera donc condamné à payer aux époux Y... la somme de 14. 000 € en application de la clause pénale prévue au contrat ; qu'en revanche, les époux Y... ne justifient pas d'un préjudice spécifique et distinct de celui que répare cette indemnité forfaitaire contractuelle ; qu'ils seront donc déboutés de la demande en dommages et intérêts complémentaires qu'ils ont formée à l'encontre de M. X... ; b) Sur la demande de la société TOSS, qu'il était prévu au compromis, dans le paragraphe relatif à la clause pénale, qu'en cas de refus injustifié de l'une ou l'autre des parties de régulariser l'acte, la rémunération du mandataire serait due intégralement à l'agent immobilier ; que la régularité de cette clause n'est pas contestée par M. X... ; que les honoraires de négociation ont été fixés dans le compromis à 10 600 € ; que M. X... a opposé aux époux Y... un refus injustifié de régulariser la promesse de vente ; en revanche qu'aucune faute ne peut être reprochée à l'agence immobilière qui s'est acquittée de ses obligations contractuelles en présentant un acquéreur aux vendeurs ; qu'aucun élément ne permet de réduire cette indemnité due au titre de la clause pénale ; qu'il y a donc lieu de condamner M. X... à payer à la société TOSS la somme de 10. 600 € à titre de clause pénale, cette somme représentant les honoraires de négociation dont elle a été injustement privée ; que le jugement entrepris sera donc infirmé en toutes ses dispositions ;

1° / Alors que la condition suspensive d'obtention d'un prêt est réputée accomplie dès la délivrance d'une offre ferme et sans réserve caractérisant l'obtention d'un prêt conforme aux stipulations contractuelles ; que la Cour d'appel, Mme Y... et d'honoraires de négociation à la SARL TOSS, a retenu qu'il ressortait pour condamner M. X... en paiement du montant d'une clause pénale à M. et d'une attestation du Crédit Mutuel de Poitiers du 6 septembre 2005 que les époux Y... avaient obtenu le prêt sollicité le 26 août 2005, soit antérieurement à la date d'expiration de la condition suspensive fixée au 5 septembre 2005 à 18 heures, que le compromis de vente n'ayant prévu aucune disposition à propos de l'assurance de l'acquéreur, M. X... ne pouvait prétendre que le prêt n'aurait pas été régulièrement accordé aux époux Y... au motif que ceux-ci ne justifieraient pas d'une assurance pour le remboursement du prêt, et que le mandat exclusif qu'il avait consenti à l'agence n'expirait que le 9 septembre 2005 ; qu'en statuant ainsi, et sans rechercher si l'attestation délivrée par la banque « sous réserve de l'acceptation à l'assurance des emprunteurs » constituait une offre ferme et sans réserve, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1176 du code civil et L. 312-16 du code de la consommation ;

2° / Alors que le compromis 29 juillet 2005 prévoit au profit de l'acquéreur une condition suspensive d'obtention d'un prêt, avec échéance au 5 septembre 2005 à 18 heures, considérée comme réalisée dès que l'acquéreur aura obtenu, dans le délai fixé un ou plusieurs prêts couvrant le montant global de la somme à financer par emprunt, et possibilité de prorogation sur demande expresse de l'acquéreur formulée par écrit et acceptation écrite du vendeur, et de renonciation par l'acquéreur avec notification avant l'expiration du délai précité ; qu'il est stipulé que si la condition suspensive n'est pas réalisée dans le délai prévu, sans que ce défaut incombe à l'acquéreur et sauf renonciation par ce dernier au bénéfice de la condition dans la forme prévue, chacune des parties retrouvera sa pleine et entière liberté, sans indemnité de part et d'autre ; que la Cour d'appel, pour condamner M. X... en paiement du montant d'une clause pénale à M. et Mme Y... et d'honoraires de négociation à la SARL TOSS, a retenu que la clause suspensive d'obtention du prêt était édictée dans un souci de protection des acquéreurs, lesquels pouvaient seuls s'en prévaloir ; qu'en statuant ainsi, bien que le vendeur puisse se prévaloir de l'expiration du délai fixé pour la réalisation de la condition suspensive, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

En ce que l'arrêt attaqué a infirmé le jugement entrepris et condamné M. X... à payer à la SARL TOSS, la somme de 10 600 €, au titre de la clause pénale ;

Aux motifs que b) Sur la demande de la société Toss, qu'il était prévu au compromis, dans le paragraphe relatif à la clause pénale, qu'en cas de refus injustifié de l'une ou l'autre des parties de régulariser l'acte, la rémunération du mandataire serait due intégralement à l'agent immobilier ; que la régularité de cette clause n'est pas contestée par M. X... ; que les honoraires de négociation ont été fixés dans le compromis à 10 600 € ; que M. X... a opposé aux époux Y... un refus injustifié de régulariser la promesse de vente ; en revanche qu'aucune faute ne peut être reprochée à l'agence immobilière qui s'est acquittée de ses obligations contractuelles en présentant un acquéreur aux vendeurs ; qu'aucun élément ne permet de réduire cette indemnité due au titre de la clause pénale ; qu'il y a donc lieu de condamner M. X... à payer à la société TOSS la somme de 10. 600 € à titre de clause pénale, cette somme représentant les honoraires de négociation dont elle a été injustement privée ; que le jugement entrepris sera donc infirmé en toutes ses dispositions ;

1° / Alors que la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation des dispositions condamnant M. X... au profit des époux Y... entraîne par conséquence la condamnation prononcée au profit de la société TOSS, en application des dispositions de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile ;

2° / Alors qu'il résulte des dispositions d'ordre public de l'article 6, alinéa 3, de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 qu'aucune commission ni somme d'argent quelconque ne peut être exigée ou même acceptée par l'agent immobilier ayant concouru à une opération qui n'a pas été effectivement conclue ; que la Cour d'appel qui, pour condamner M. X... à payer la somme de 10 600 € a retenu, en se fondant sur la clause pénale stipulée au compromis du 29 juillet 2005, qu'il avait opposé aux époux Y... un refus injustifié de régulariser la promesse de vente, a violé le texte susvisé, ensemble l'article 74 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;

3° / Alors, subsidiairement, qu'il résulte du compromis de vente du 29 juillet 2005 qu'en cas de refus d'une partie, non justifié par l'application d'une condition suspensive, de régulariser l'acte authentique dans le délai imparti, la rémunération du mandataire restera due intégralement, dans les conditions de forme à la rubrique " négociation ", laquelle stipule une rémunération à la charge du seul acquéreur ; que la Cour d'appel qui, pour condamner M. X... à payer la somme de 10 600 € a retenu, en se fondant sur la clause pénale stipulée au compromis du 29 juillet 2005, qu'il avait opposé aux époux Y... un refus injustifié de régulariser la promesse de vente, a violé l'article 1134 du code civil.



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Prêt


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.