par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 9 novembre 2017, 16-19926
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
9 novembre 2017, 16-19.926

Cette décision est visée dans la définition :
Sécurité sociale




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que licenciée en juin 2007 et admise au bénéfice de l'allocation de retour à l'emploi à compter du 7 novembre 2007, Mme X... a repris en avril 2008 une activité à temps réduit lui permettant de conserver le bénéfice de celle-ci ; qu'elle a demandé à la caisse d'assurance maladie de Paris (la caisse) des indemnités journalières d'assurance maternité en raison d'une grossesse ayant débuté en décembre 2008 ; que la caisse ayant rejeté sa demande, Mme X... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches, qui est recevable :

Vu les articles L. 311-5 et R. 311-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que toute personne percevant un revenu de remplacement au titre de l'assurance chômage conserve la qualité d'assuré et bénéficie du maintien de ses droits aux prestations du régime obligatoire d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès dont elle relevait au moment de la cessation d'activité du fait de chômage lorsque, en cas de reprise d'activité, elle ne justifie pas des conditions d'ouverture du droit à prestation fixées par l'article L. 313-1 du code de la sécurité sociale au terme du délai prévu par le second ; que la reprise d'une activité à temps réduit assortie du maintien du revenu de remplacement ne prive pas l'assuré du maintien de ses droits lorsque les revenus tirés de cette activité ne sont pas suffisants pour lui ouvrir les droits aux prestations d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès ;

Attendu que pour rejeter le recours de Mme X..., l'arrêt relève qu'elle a bénéficié des dispositions de l'article L. 311-5 à compter du 27 octobre 2007, date à laquelle lui ont été versées des indemnités de chômage ; qu'elle a repris une activité en avril 2008 et, à ce titre, été rémunérée en qualité de pigiste ; que cette activité étant insuffisante pour justifier des conditions d'ouverture du droit à prestations fixées à l'article L. 313-1, elle a continué à bénéficier du maintien de ses droits pendant une période de trois mois soit jusqu'au 30 juin 2008 ; que la date présumée de début de grossesse étant le 3 décembre 2008, Mme X... ne bénéficiait plus à cette date du maintien de ses droits prévu par ce texte ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que, tout en conservant le bénéfice de l'allocation de retour à l'emploi, Mme X... exerçait une activité réduite insuffisante à lui ouvrir les droits aux prestations d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur les deuxième et troisième moyens :

Attendu que la cassation intervenue sur le premier moyen emporte la cassation par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, des chefs de l'arrêt rejetant la demande de Mme X... tendant à la condamnation de la caisse à lui payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts et la condamnant à payer un droit d'appel à hauteur de 321,80 euros ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de Paris aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris et la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR refusé de reconnaître à Mme X... le droit au bénéfice des prestations en espèces au titre de son congé maternité ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

« Que Mme X... (...) estime que la caisse primaire d'assurance maladie aurait dû apprécier sa situation au regard de l'article L. 311-5 du code de la sécurité sociale auxquelles sa situation répond et reproche à l'organisme social d'avoir volontairement écarté ce texte et méconnu une circulaire 47/2002 s du 8 mars 2002 sur la "concomitance d'une indemnisation Assedic et d'une activité salariée" ;
Considérant tout d'abord, que les premiers juges rappellent à bon droit qu'une circulaire n'est pas créatrice de droit, qu'elle n'a pas valeur normative et ne s'impose pas à la caisse ;
Considérant ensuite, que l'article L. 311-5 stipule que toute personne percevant l'une des allocations mentionnées à l'article L. 5123-2 ou aux articles L. 1233-65 à L. 1233-69 et L. 1235-16 ou au 8° de l'article L. 1233-68 du code du travail ou l'un des revenus de remplacement mentionnés à l'article L. 5421-2 du même code conserve la qualité d'assuré et bénéficie du maintien de ses droits aux prestations en espèces du régime obligatoire d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès dont elle relevait antérieurement.
Qu'il ajoute que la personne continue à en bénéficier, en cas de reprise d'une activité insuffisante pour justifier des conditions d'ouverture du droit à prestation fixées à l'article L. 313-1, pendant une durée déterminée par décret en Conseil d'Etat ;
Que ce délai, aux termes de l'article R. 311-1 du code de la sécurité sociale est fixé à trois mois à compter de la date de cette reprise d'activité.
Considérant que Mme X... a bénéficié des dispositions de l'article L. 311-5 à compter du 27 octobre 2007, date à laquelle lui ont été versées des indemnités de chômage ;
Qu'elle a repris une activité en avril 2008 et à ce titre, été rémunérée en qualité de pigiste ; que cette activité étant insuffisante pour justifier des conditions d'ouverture du droit à prestations fixées à l'article L. 313-1, elle a continué à bénéficier du maintien de ses droits pendant une période de trois mois fixée soit jusqu'au 30 juin 2008 ;
Que la date présumée de début de grossesse étant le 3 décembre 2008, Mme X... ne bénéficiait plus à cette date, du maintien de ses droits tirés de ce texte ;
Que Mme X..., dans son argumentaire, occulte sa reprise d'activité, situation qui modifie l'article invoqué, élément qui modifie les règles, pour ne se fonder que sur la première partie de l'article L. 311-5 ;
Que ne remplissant donc pas les conditions prévues par ce texte, sa demande ne peut prospérer ;
Considérant enfin s'agissant de l'argumentation du Défenseur des Droits, qu'elle ne peut être retenue ; qu'en effet d'une part, elle se fonde sur une circulaire du 16 avril 2013 postérieure à la date du litige et dépourvue de valeur impérative ; que d'autre part, l'article L. 161-8 du code de la sécurité sociale invoquée dans ses dispositions alors applicables, ne concernent que les personnes qui cessent de remplir les conditions pour relever d'un régime obligatoire, ce qui n'est pas le cas de Mme X... qui a toujours été affiliée au régime général en sa qualité de salarié pigiste ou de bénéficiaire d'allocations versées par pole emploi ;
Considérant enfin qu'aucun élément dans l'application de ses textes par la caisse, ne caractérise une discrimination à l'encontre de Mme X... en raison de son état de grossesse et une atteinte à sa vie privée et familiale ; » ;

ALORS en premier lieu QUE toute personne percevant l'allocation d'assurance prévu aux articles L. 5422-1 et suivants du code du travail conserve la qualité d'assuré et bénéficie du maintien de ses droits aux prestations du régime obligatoire d'assurance maternité dont elle relevait antérieurement ; qu'elle continue à en bénéficier, en cas de reprise d'activité insuffisante pour justifier des conditions d'ouverture du droit à prestation fixées à l'article L. 313-1 du code de la sécurité sociale, pendant une durée de trois mois à compter de la date de cette reprise d'activité ; que cette reprise s'entend d'une reprise complète et durable d'activité ; qu'en l'espèce, il est constant qu'après avoir été licenciée en 2007, Mme X... a été admise au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, qu'en 2008 et 2009, elle a effectué des piges pour divers magazines tout en continuant de percevoir ces allocations et qu'ayant débuté une grossesse en décembre 2008, le point de départ du repos prénatal a été fixé au 23 juillet 2009 ; que la cour d'appel a cependant considéré que Mme X..., à l'occasion de sa pige rémunérée d'avril 2008, avait repris une activité et qu'en raison de l'insuffisance de cette dernière pour ouvrir droit aux prestations fixées à l'article L. 313-1 du code de la sécurité sociale, elle avait continué à bénéficier du maintien de ses droits pendant une période de trois mois fixée jusqu'au 30 juin 2008, de sorte qu'à la date présumée de début de grossesse, le 3 décembre 2008, elle ne bénéficiait plus du maintien de ses droits ; qu'en statuant ainsi, alors que cette reprise d'activité était incomplète et temporaire, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 311-5 du code de la sécurité sociale ;

ALORS en deuxième lieu QUE toute personne percevant l'allocation d'assurance prévu aux articles L. 5422-1 et suivants du code du travail conserve la qualité d'assuré et bénéficie du maintien de ses droits aux prestations du régime obligatoire d'assurance maternité dont elle relevait antérieurement ; que les droits à ces prestations, dont le maintien est alors assuré, s'apprécient à la date de la dernière cessation d'activité ayant entraîné l'indemnisation au titre du chômage ; qu'en l'espèce, il est constant que Mme X... a quitté l'entreprise le 27 octobre 2007 suite à son licenciement pour motif économique et qu'elle a bénéficié, de ce fait, d'allocations d'aide au retour à l'emploi qu'elle a cumulées avec des piges ; que la cour d'appel a néanmoins décidé que la première pige avait fait courir le maintien des droits consécutifs à une reprise d'activité ; qu'en statuant ainsi, alors qu'ayant continué de bénéficier, sans interruption, du versement d'allocations d'aide au retour à l'emploi, le maintien des droits de Mme X... devait s'apprécier à la date de la dernière cessation d'activité ayant entraîné l'indemnisation au titre du chômage, soit le 27 octobre 2007, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 311-5 du code de la sécurité sociale ;

ALORS en troisième lieu QUE constitue une discrimination indirecte en raison de la grossesse ou de la maternité une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner un désavantage particulier pour les femmes enceintes ou les mères ; que toute personne qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction compétente les faits qui permettent d'en présumer l'existence ; qu'au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, Mme X... a avancé dans ses conclusions d'appel (conclusions, p. 9) que le refus opposé par la CPAM de la faire bénéficier des indemnités journalières de l'assurance maternité en raison d'une activité d'une activité occasionnelle de pigiste constituait une discrimination ; qu'elle a invoqué, pour ce faire, les différentes saisines du Défenseur des droits par des mères, femmes et hommes intermittents du spectacle confrontés, de manière similaire, au refus de la caisse d'envisager l'application de l'article L. 311-5 du code de la sécurité sociale et versé aux débats la décision prise par le Défenseur des droits concernant sa propre situation ; que la cour d'appel s'est toutefois bornée à affirmer qu'aucun élément dans l'application de la disposition précitée par la caisse ne caractérise une discrimination à l'encontre de Mme X... en raison de son état de grossesse ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans examiner concrètement les différents éléments versés aux débats par l'assurée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1, 2 et 4 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Mme X... de sa demande tendant à la condamnation de la CPAM au paiement de dommages-intérêts en raison du préjudice subi ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

« Que son recours sera donc rejeté y compris dans sa demande de dommages et intérêts en l'absence de preuve d'une quelconque faute de la caisse primaire d'assurance maladie dans l'appréciation de ses droits ; » ;

ALORS QUE la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; que la cassation s'étend également à l'ensemble des dispositions de la décision cassée ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'ainsi la cassation à intervenir sur les chefs de dispositifs relatifs à la reconnaissance du droit au bénéfice des prestations en espèces au titre de son congé maternité entraînera la cassation des chefs de dispositifs relatifs à la condamnation de la CPAM au paiement de dommages-intérêts en raison du préjudice subi par Mme X....

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné Mme X... au paiement d'un droit d'appel ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

« Que succombant en son appel, Mme X... devra régler un droit d'appel ; » ;

ALORS QUE la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; que la cassation s'étend également à l'ensemble des dispositions de la décision cassée ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'ainsi la cassation à intervenir sur les chefs de dispositifs relatifs à la reconnaissance du droit au bénéfice des prestations en espèces au titre de son congé maternité entraînera la cassation des chefs de dispositifs relatifs au paiement d'un droit d'appel.



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Cette décision est visée dans la définition :
Sécurité sociale


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.