par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 1er juin 2017, 16-16780
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Cour de cassation, chambre sociale
1er juin 2017, 16-16.780

Cette décision est visée dans la définition :
Salaire




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° U 16-16.779 à C 16-160.787 ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Saint-Denis,5 février 2016), que M. X... et huit autres salariés de la société Compagnie réunionnaise des jeux (Coreje) ont saisi le 10 juin 2009 la juridiction prud'homale puis, après décision d'incompétence, le tribunal de grande instance, de demandes en paiement de sommes au titre de la participation aux résultats de l'entreprise pour la période allant du 1er novembre 2004 au 31 octobre 2005 ;

Attendu que la société fait grief aux arrêts de dire que l'effectif de la société avait dépassé les cinquante salariés au cours de la période comprise entre le 1er novembre 2004 et le 31 octobre 2005 et de la condamner à payer à chacun des salariés une somme au titre de la réserve de participation, alors, selon le moyen, que les salariés titulaires d'un contrat à durée déterminée ne sont pris en compte dans l'effectif au prorata de leur temps de présence au cours des douze mois précédents qu'à la condition d'être encore présents dans l'effectif au cours de l'exercice considéré ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 442-1, R. 442-1 et L. 620-10 du code du travail dans leur rédaction alors applicable ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé, par motifs propres et adoptés, d'une part, qu'en application des articles L. 442 -1 et R. 442-1 du code du travail, devenus respectivement les articles L. 3322-2 et R. 3322-1 du même code, les entreprises employant habituellement au moins cinquante salariés garantissent le droit de leurs salariés à participer aux résultats de l'entreprise et que la condition d'emploi habituel est considérée comme remplie dès lors que le seuil d'effectifs prévu a été atteint, au cours de l'exercice considéré, pendant une durée de six mois au moins, consécutifs ou non, d'autre part, que pour l'appréciation du seuil d'effectifs, la règle issue de l'ordonnance n° 2004-602 du 24 juin 2004 avait vocation à s'appliquer, à savoir l'article L. 620-10 du code du travail devenu L. 1111-2 du même code, selon lequel sont notamment pris en compte au prorata de leur temps de présence au cours des douze mois précédents, les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée, sauf s'ils remplacent un salarié absent, la cour d'appel en a exactement déduit que la période de référence s'entendait des douze mois précédant immédiatement la date concernée pour calculer mois par mois les effectifs, peu important qu'à la fin du mois où s'effectue le décompte, le contrat de travail des salariés en contrat à durée déterminée ait pris fin ;

Et attendu qu'ayant constaté, ensuite, que le nombre de salariés s'était élevé à cinquante ou plus pendant huit mois au cours de l'exercice considéré, la cour d'appel en a déduit à bon droit que les conditions légales permettant aux salariés de participer aux résultats de l'entreprise pour cet exercice étaient remplies ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les première et deuxième branches du moyen, ci-après annexées, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Compagnie réunionnaise des jeux aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen commun et identique produit aux pourvois par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie réunionnaise des jeux.

IL EST FAIT GRIEF aux arrêts attaqués d'AVOIR dit que l'effectif de la société COREJE avait dépassé les 50 salariés au cours de la période comprise entre le 1er novembre 2004 et le 31 octobre 2005, et condamné en conséquence la société COREJE à payer à chaque salariés une somme au titre de la réserve de participation et une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens,

AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article L. 442-1 du code du travail applicable à l'époque (devenu L. 3322-2 ) : « toute entreprise employant habituellement au moins 50 salariés, quelles que soient la nature de son activité et sa forme juridique, est soumises aux obligations de la présente section, destinées à garantir le droit de ses salariés à participer aux résultats de l'entreprise » ; que l'article R 442-1 du code du travail (devenu R. 3322-1 ) précise : « la condition d'emploi habituel mentionné à l'article L. 442-1 est considérée comme remplie dès lors que le seuil d'effectif prévu à cet article a été atteint, au cours de l'exercice considéré, pendant une durée de 6 mois au moins, consécutifs ou non. » ; que le premier juge a clairement exposé et démontré que le calcul des effectifs du 1er novembre 2004 au 31 octobre 2005 établi par la SAS COREJE était erroné puisque, compte-tenu des deux seules situations d'Étienne Y... et de Marie Michelle Z..., l'effectif total est : en novembre 2004, de 50,31 au lieu de 49,98, en janvier 2005, de 50 au lieu de 49,67, en mars 2005, de 50,14 au lieu de 49,33 ; que comme en première instance, la SAS COREJE produit aux débats l'attestation de son commissaire aux comptes et le courrier personnel et confidentiel du cabinet Fromont, Briens et associés, tous deux en date du 20 février 2008, qui attestent que sur la base des éléments de calcul transmis, le seuil de 50 salariés n'a effectivement été atteint au cours de l'année 2004-2005 que pendant une période de 5 mois ; que l'étude faite le 24 octobre 2014 par le cabinet CAPSTAN, avocat conseil en droit social, qui précise qu'elle peut être considérée comme fiable et objective et à laquelle sont joints des tableaux, fait les mêmes conclusions ; que ces études, qui contredisent le rapport au comité d'entreprise fait en février 2009 par le cabinet d'expertise comptable ACCE dans le cadre de sa mission de contrôle du calcul de la participation aux résultats de l'entreprise, ne précisent nullement en quoi la démonstration effectuée par ACCE ou celle du jugement déféré serait erronée, et dans ses conclusions, la SAS COREJE n'apporte aucune critique précise au jugement de première instance et ne fait pas de meilleure démonstration ; que c'est donc à bon droit et par des motifs pertinents que la Cour adopte que le premier juge a considéré qu'au cours de la période considérée, le nombre de salariés s'est élevé à 50 ou plus pendant 8 mois, et en a justement déduit que les conditions de l'article L 3322-2 du code du travail sont remplies, permettant ainsi [au salarié] de participer aux résultats de l'entreprise ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Selon l'article L3322-2 du code du travail, les entreprises employant habituellement 50 salariés et plus garantissent le droit de leurs salariés à participer aux résultats de l'entreprise ; que l'article R3322-1 précise que la condition d'emploi habituel prévue est remplie dès lors que l'effectif de 50 salariés prévu a été atteint au cours de l'exercice considéré, pendant une durée de six mois au moins, consécutifs ou non ; que dans les entreprises dont l'activité est saisonnière, cette condition est remplie si cet effectif a été atteint pendant au moins la moitié de la durée d'activité saisonnière ; que la défenderesse soutient que le calcul de l'effectif doit être fait en tenant compte de l'objet même du dispositif légal c'est-à-dire uniquement la participation des salariés au bénéfice de l'entreprise et que les bénéficiaires doivent donc avoir été présents au long de l'exercice considéré ; que cependant, comme la circulaire interministérielle du 14 septembre 2005 renvoie pour l'appréciation du seuil d'effectif aux règles applicables en matière de mise en place des institutions représentatives du personnel, il faut se référer à l'ordonnance du 24 juin 2004 « relative à la simplification du droit dans les domaines du droit du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle» qui a instauré une règle générale et unique de décompte des effectifs en droit du travail ; que de la sorte, sauf disposition expresse contraire qui n'existe pas en l'espèce, cette règle a vocation à s'appliquer toutes les fois qu'un dispositif issu du Code du travail fait référence à une condition d'effectifs ; qu'ainsi L'article 1111-2 applicable en l'espèce, dispose que les effectifs de l'entreprise sont calculés conformément aux dispositions suivantes :
- les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein et les travailleurs à domicile sont pris intégralement en compte dans l'effectif de l'entreprise,
- les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée, les salariés titulaires d'un contrat de travail intermittent, les salariés mis à la disposition de l'entreprise par une entreprise extérieure qui sont présents dans les locaux de l'entreprise utilisatrice et travaillent depuis au moins un an, ainsi que les salariés temporaires, sont pris en compte dans l'effectif de l'entreprise à due proportion de leur temps de présence au cours des 12 mois précédents. Toutefois les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée et les salariés mis à disposition par une entreprise extérieure, y compris les salariés temporaires, sont exclus. du décompte des effectifs lorsqu'ils remplacent un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu, notamment du fait d'un congé de maternité, d'un congé d'adoption ou d'un congé parental d'éducation,
- les salariés à temps partiel, quelle que soit la nature de leur contrat de travail, sont pris en compte en divisant la somme totale des horaires inscrits dans leur contrat de travail par la durée légale ou la durée conventionnelle du travail ;
que sont donc pris en compte intégralement dans l'effectif de l'entreprise les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein ; qu'il en résulte que Etienne Y... embauché dans le cadre d'un CDI le 13/05/2005 à temps plein et démissionnaire le 16/06/2005 devait être comptabilisé en entier pour les mois de mai et de juin 2005 et non pour 0,63 et 0,59 ; que d'autre part, sont notamment pris en compte au prorata de leur temps de présence au cours des 12 mois précédents, les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée, intermittent et les salariés temporaires, sauf s'ils remplacent un salarié absent ; que la période de référence s'entend ainsi des 12 mois qui précèdent immédiatement la date concernée pour calculer les effectifs ; que de la sorte, en cas de détermination de l'effectif en novembre 2004, la période de référence de 12 mois s'étend du 1er novembre 2003 au 31 octobre 2004 ; que peu importe qu'à la date où s'effectue le décompte, le contrat de travail des salariés concernés ait pris fin (Cass. soc., 6/11/1991) ; que le demandeur prend justement pour exemple le cas de Marie Michelle Z... embauchée du 1 er février 2004 au 30 juillet 2004, devant être comptabilisée dans l'effectif jusqu'en juillet 2005 quand bien même elle n'est plus dans l'effectif au cours de l'année comptable prise en considération ; qu'elle doit être ainsi prise en compte à hauteur de :
* 0,5 (6/12ème mois du 1/11/2003 jusqu'au 31/10/2004) en novembre 2004 * 0,5 (6/12ème mois du 1/12/2003 jusqu'au 30/11/2004) en décembre 2004 * 0,5 (6/12ème mois du 1/02/2004 jusqu'au 31/1/2005) en janvier 2005,
* 0,5 (6/12ème mois du 1/11/2003 jusqu'au 31/01/2005) en février 2005,
* 0,41 (5/12ème mois du 1/3/2004 jusqu'au 28/02/2005) en mars 2005,
* 0,33 (4/12ème mois du 1/04/2004 jusqu'au 31/3/2005) en avril 2005,
* 0,25 (3/12ème mois du 1/05/2004 jusqu'au 30/04/2005) en mai 2005,
* 0,17 (2/12ème mois du 1/06/2004 jusqu'au 31/05/2005) en juin 2005,
* 0,08 (1/12ème mois du 1/7/200 jusqu'au 30/06/2005) en juillet 2005,
Qu'en revanche, contrairement à la thèse du demandeur, il ne peut se déduire de l'article L. 1243-11 du code du travail que les CDD se transformant en CDI puissent être comptabilisés comme un temps plein dès le début du contrat à durée déterminée ; qu'en effet, selon le texte précité, le CDD devient un contrat à durée indéterminée de sorte que ce dernier ne peut être réputé s'y substituer depuis le début de la relation contractuelle ; que la situation de Mme Valérie A... n'a donc pas à être modifiée ; que cela étant, les deux exemples précédents suffisent à démontrer que le calcul des effectifs du 1er novembre 2004 au 31 octobre 2005 établi par la société défenderesse est erroné puisque, compte tenu des deux seules situations de M. Y... et Mme Z..., l'effectif total est :
> en novembre 2004, de 50,31 au lieu de 49,98
> en janvier 2005, de 50 au lieu de 49,67
> en mars 2005, de 50,14 au lieu de 49,33
Qu'il en résulte, sans qu'il soit besoin d'examiner la situation des autres salariés, qu'au cours de la période considérée, en novembre, janvier, mars, juin, juillet, août, septembre et octobre, soit huit mois, le nombre de salariés s'est élevé à 50 ou plus ; que les conditions de l'article L. 3322-2 du code du travail sont donc remplies permettant ainsi [au salarié] de participer aux résultats de l'entreprise ;

1. ALORS QUE les juges du fond sont tenus d'analyser les pièces soumises à leur examen ; qu'en l'espèce, l'employeur produisait pour la première fois en cause d'appel une étude détaillée faite le 24 octobre 2014 au terme d'une cinquantaine d'heures de travail par le cabinet Capstan, avocat conseil en droit social, procédant à un nouveau calcul des effectifs mois par mois dont les résultats différaient de celui sur lequel s'était prononcé le jugement et concluant néanmoins que le seuil de 50 salariés n'avait été atteint que 5 mois de l'exercice considéré ; qu'en écartant cette étude au seul prétexte inopérant qu'elle ne précisait pas en quoi la démonstration effectuée par le cabinet d'expertise comptable du comité d'entreprise ou celle du jugement déféré serait erronée, quand il lui incombait d'analyser elle-même cette étude approfondie et le cas échéant d'expliquer en quoi elle était erronée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2. ALORS QU'il résulte des articles L. 442-1 et R. 442-1 du code du travail dans leur rédaction applicable à l'espèce que la mise en place d'une participation aux résultats de l'entreprise est obligatoire lorsque le seuil d'effectif de 50 salariés a été atteint, au cours de l'exercice considéré, pendant une durée de six mois au moins, consécutifs ou non ; que le calcul de l'effectif doit être effectué mois par mois et l'effectif au titre d'un mois donné se calcule nécessairement à la fin de la période considérée ; qu'il en résulte lorsqu'il quitte les effectifs de l'entreprise en cours de mois, le salarié en contrat à durée indéterminée n'est pas décompté dans les effectifs pour le mois considéré ; qu'en jugeant que M. Y... embauché le 13 mai 2005 en contrat à durée indéterminée et démissionnaire le 16 juin 2005 devait être comptabilisé en entier pour le mois de juin, la cour d'appel a violé les articles L. 442-1, R. 442-1, et L. 620-10 du code du travail dans leur rédaction alors applicable ;


3. ALORS QUE les salariés titulaires d'un contrat à durée déterminée ne sont pris en compte dans l'effectif au prorata de leur temps de présence au cours des douze mois précédents qu'à la condition d'être encore présents dans l'effectif au cours de l'exercice considéré ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 442-1, R. 442-1 et L. 620-10 du code du travail dans leur rédaction alors applicable.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.