par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 9 novembre 2016, 15-27246
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
9 novembre 2016, 15-27.246

Cette décision est visée dans la définition :
Aliments




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Aurore X... a été inscrite sur les registres de l'état civil comme née le 5 août 1992 de Mme Agnès X... ; que, par acte du 19 juillet 2012, Mmes Aurore et Agnès X... ont assigné M. Y... devant un tribunal en établissement judiciaire de sa paternité vis-à-vis de la première ; qu'après avoir, avant dire droit, déclaré l'action recevable et ordonné une expertise biologique, le tribunal a dit que M. Y... était le père de Mme Aurore X..., mis à sa charge une contribution à l'entretien et à l'éducation de sa fille, à compter du 19 juillet 2012 jusqu'à la fin de ses études, déclaré Mme Agnès X... irrecevable en sa demande de contribution à l'entretien et à l'éducation de sa fille et rejeté sa demande de dommages-intérêts ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles 331 et 371-2 du code civil ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande de Mme Agnès X... au titre de la contribution du père à l'entretien et à l'éducation de l'enfant depuis sa naissance, l'arrêt retient que, l'action en recherche de paternité ayant été engagée par l'enfant devenue majeure, la mère de celle-ci est désormais sans qualité pour réclamer une contribution à l'entretien et l'éducation, seul l'enfant devenu majeur pouvant exercer cette action ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la recevabilité de l'action en contribution à l'entretien n'est pas subordonnée à celle de l'action en recherche de paternité et que les effets d'une paternité légalement établie remontent à la naissance de l'enfant, ce dont il résulte que Mme Agnès X... était recevable à agir en contribution à l'entretien et à l'éducation de sa fille, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare Mme Agnès X... irrecevable en sa demande de contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, l'arrêt rendu le 8 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme Agnès X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mmes Aurore et Agnès X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de la mère d'un enfant naturel (Mme Agnès X..., exposante) en remboursement de la contribution du père (M. Y...) à l'entretien et à l'éducation de sa fille (Mlle Aurore X..., également exposante) à compter de sa naissance, le 5 août 1992, condamnant ainsi le père à verser à l'enfant seulement la somme mensuelle de 300 € au titre de cette contribution à compter de la date de l'assignation, le 19 juillet 2012, jusqu'à la fin de ses études ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes des articles 327 et 328 du code civil, l'action en recherche de paternité était réservée à l'enfant, le parent à l'égard duquel la filiation était établie ayant seul qualité pour l'exercer durant la minorité de l'enfant ; qu'en l'espèce, l'action ayant été engagée par l'enfant devenue majeure, la mère de celle-ci, Mme Agnès X..., était désormais sans qualité pour réclamer une contribution alimentaire pour l'entretien et l'éducation de l'enfant qui ne pouvait être formulée que par Mlle Aurore X... ; que la demande formée à ce titre par Mme Agnès X... était en conséquence irrecevable ; qu'au vu des revenus et des charges respectives des parties et des besoins de Mlle Aurore X..., il convenait, infirmant le jugement, de fixer à 300 € indexés le montant de la contribution mensuelle du père à l'entretien et à l'éducation de l'enfant et de le condamner à verser cette somme à compter du 19 juillet 2012 jusqu'à la fin des études régulièrement poursuivies par sa fille ;

ALORS QUE les effets de la paternité légalement ou judiciairement établie remontent à la naissance de l'enfant, la règle « aliments ne s'arréragent pas » ne s'appliquant pas à la contribution d'un parent à l'entretien et à l'éducation de son enfant ; qu'en déclarant que, l'action en recherche de paternité ayant été engagée par l'enfant devenu majeur, la mère était sans qualité pour réclamer, depuis la naissance, le remboursement au père de sa contribution alimentaire pour l'entretien et l'éducation de l'enfant, la cour d'appel a violé les articles 327 et 328 du code civil, ensemble les articles 331, 371-2, 373-2-2 et 373-2-5 du même code.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la mère d'un enfant naturel (Mme Agnès X..., l'exposante) de sa demande, à hauteur de 50.000 €, d'indemnisation du préjudice moral subi du fait des agissements fautifs du père (M. Y...) ;

AUX MOTIFS propres et adoptés QUE c'était par des motifs justes et pertinents que la cour adoptait que le tribunal avait rejeté cette demande en observant que Mme Agnès X..., qui n'avait agi pendant la minorité de sa fille ni en recherche de paternité ni aux fins de subsides à l'encontre de M. Y..., ne pouvait faire grief à ce dernier de n'avoir pas contribué à l'entretien et à l'éducation de l'enfant durant la minorité de celle-ci et pas davantage invoquer un préjudice moral en lien avec cette situation (arrêt attaqué, p. 4, alinéa 6) ; que Mme Agnès X... aurait pu agir en établissement judiciaire de la paternité de M. Robert Y... à l'égard de sa fille durant la minorité de celle-ci, ce qui lui aurait permis de lui demander de contribuer à l'entretien et à l'éducation de celle-ci ; qu'elle aurait pu également introduire une action aux fins de subsides ; qu'à défaut d'avoir intenté l'une ou l'autre de ces actions à l'encontre de M. Robert Y..., elle ne pouvait lui imputer à faute de ne pas avoir contribué à l'entretien et à l'éducation de sa fille durant sa minorité ni le tenir pour responsable d'une préjudice moral en lien avec cette situation qu'elle avait elle-même créée (jugement, p. 7, alinéa 2) ;


ALORS QUE l'auteur d'un dommage doit en réparer les conséquences, de sorte que la victime n'est pas tenue de limiter ou de supprimer son préjudice dans l'intérêt du responsable ; qu'en imputant à faute à la mère de ne pas avoir agi durant la minorité de l'enfant et en considérant qu'elle ne pouvait faire grief au père de ne pas avoir contribué à l'entretien et à l'éducation de l'enfant commun durant sa minorité, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Aliments


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.