par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 22 septembre 2016, 14-24277
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
22 septembre 2016, 14-24.277

Cette décision est visée dans la définition :
Contradictoire




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu les articles 493 et 812 du code de procédure civile ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, l'ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse ; que, selon le second, le président du tribunal de grande instance peut ordonner sur requête toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 26 juin 2014), que la société Agay Puy Ricard (SCI) et ses associés, M. X...et Mme Y..., ont conclu avec les consorts Z...une convention relative à l'utilisation d'un garage situé entre leurs propriétés respectives ; que, sur requête des consorts Z..., une ordonnance du 3 avril 2013 a condamné sous astreinte la SCI, M. X...et Mme Y... à débarrasser leurs affaires du bâtiment et à leur remettre un jeu de clefs ; que la SCI, M. X...et Mme Y... ont sollicité la rétractation de l'ordonnance ;

Attendu que, pour rejeter leur demande, l'arrêt retient que le juge des référés saisi de l'instance en rétractation d'une ordonnance sur requête demeure, au terme d'une procédure contradictoire, investi des pouvoirs appartenant à l'auteur de l'ordonnance et que la mesure ordonnée est toujours d'actualité ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir énoncé que la dérogation au principe de la contradiction n'était pas justifiée pour ordonner la mesure contraignante prise, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne les consorts Z...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts Z...et les condamne à payer à la société Agay Puy Ricard, à M. X...et Mme Y... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. X..., Mme Y... et la société Agay Puy Ricard.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance de référé en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à rétractation de l'ordonnance sur requête du 3 avril 2013, qui a condamné la SCI Agay Puy Ricard, Madame Véronique Y... et Monsieur Christian X...à libérer le passage situé dans la partie de garage appartenant aux consorts Z...et à leur remettre un jeu complet des clés du garage ;

AUX MOTIFS QUE l'article 812 du code de procédure civile dispose que : « Le président du tribunal est saisi par requête dans les cas spécifiés par la loi. Il peut également ordonner sur requête toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement.... » ; que par ordonnance sur requête, le président du Tribunal de Grande Instance d'Avignon a condamné la SCI AGAY PUY RICARD, Monsieur X...et Mme Y..., sous astreinte de 2000 € par jour de retard dans le délai de cinq jours francs à compter de la signification de l'ordonnance, à libérer, au bénéfice des requérants, de leurs proches et des personnes à leur service, l'accès au garage du 81 place Philippe de Cabassole à Cavaillon, à débarrasser les affaires qu'ils ont entreposées dans la partie de garage appartenant aux consorts Z...et à leur remettre un jeu complet des clés dudit garage ; que l'urgence visée n'est pas caractérisée ; que la dérogation au principe du contradictoire ne se justifiait pas pour ordonner la mesure contraignante prise ; qu'en effet, aucune circonstance, telle le refus de la SCI et des consorts Y...- X..., ou les procédures administratives engagées par eux, n'exigeait que leur condamnation sous astreinte à libérer l'accès au garage et à débarrasser leurs affaires, obligation de faire, soit prise dans le cadre d'une procédure non contradictoire ; que le juge des référés, sur l'instance en rétractation de l'ordonnance sur requête en application de l'article 493 du code de procédure civile, est investi des pouvoirs appartenant à l'auteur de l'ordonnance, mais dans le cadre de la contradiction ; que l'objet de la requête était de libérer l'accès au garage, sur la partie leur appartenant, nécessaire après la réalisation des travaux dans des conditions difficiles, compte tenu de l'impossibilité d'emprunter le passage du garage, pour emménager dans leur maison ; qu'il appartient au requérant de justifier de ce que sa requête était fondée ; qu'au vu de l'acte de vente du 28 février 1996 et des conventions du même jour, signées entre les parties et annexées à l'acte de vente, il apparaît que seulement une partie du garage était vendue, que ce garage devait être divisé en deux parties égales, que cette division devait être maintenue dans le cas où la commune de Cavaillon n'accepterait pas de réaliser un aménagement sur la place d'Arbaud (permettant aux consorts Z...d'avoir un accès par cette place), qu'obligation était faite à la SCI AGAY PUY RICARD de laisser le libre accès pendant six mois pour faciliter la réalisation de travaux par les consorts Z..., en permettant le passage des matériaux et engins de travaux, et les travaux terminés, une séparation intérieure et extérieure du garage et la création d'une porte supplémentaire au garage devaient être effectuées aux frais des consorts Z...; qu'en conséquence, en l'état de ces constatations sur les accords entre les parties, des justificatifs sur les travaux entrepris et des difficultés d'accès par le garage litigieux dans la partie qui leur appartient, c'est à juste titre que le premier juge a fait droit à la demande des consorts Z...; et que tous les travaux et l'aménagement ne sont pas achevés ; que les consorts Z...doivent en tout état de cause disposer de la partie de garage leur appartenant puisqu'il était convenu d'une séparation matérialisée ; attendu qu'en conséquence, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la mesure ordonnée est toujours d'actualité ; que l'ordonnance déférée doit être confirmée ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE conformément aux dispositions de l'article 812 du code de procédure civile le Président du tribunal peut ordonner sur requête toute mesure urgente lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement ; qu'il convient d'observer que l'ordonnance querellée porte la mention en page 2 de la date du 3 avril 2013 et de la signature du magistrat qui e rendu l'ordonnance condamnant la SCI Agay Puy Ricard Monsieur Christian X...et Madame Véronique Y... sous astreinte de 2000 euros par jour de retard passé un délai de 5 jours francs à libérer au bénéfice des requérants de leurs proches et des personnes à leur service l'accès au garage 81 place Philippe de Cabassoie ; que par conséquent le moyen tiré de la nullité de l'ordonnance ne saurait être retenu et qu'il convient de relever que le conseil des demandeurs s'est borné à produire à l'appui de ses pièces la page 1 de la dite ordonnance qui ne comporte pas la date à laquelle elle a été rendue puisque cette date figure sur la page 2 qui n'a pas été produite à l'appui de la procédure de référé rétractation ; que sur le fond que la dérogation au principe de la contradiction est justifiée et motivée dans ladite ordonnance par l'urgence et commandée par l'efficacité de la mesure sollicitée, que cette motivation expresse pourrait être remise en cause par les allégations des demandeurs qui se bornent à évoquer l'économie d'une convention de 1996 et des procédures administratives en annulation du permis de construire ; que la convention du 28/ 02/ 1996 versée par les consorts Z...au soutien de leur requête mentionnait que le garage litigieux était leur propriété et que les parties avaient convenu dans un premier temps de diviser le garage actuel en deux parties égales dont celle revenant â la SCI, que ces énonciations laissent l'apparence d'un droit d'usage au bénéfice des consorts Z...et qu'il appartiendra au Juge du fond d'interpréter plus avant cette convention ; que par ailleurs l'urgence s'évince de ta nécessité de réaliser des travaux dans la cour Intérieure auquel donne accès le garage et que par conséquent le passage des matériaux et des engins exigeait la libération de la moitié du garage appartenant aux consorts Z...; que par conséquent il n'existe aucun motif pour rétracter ladite ordonnance ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut ordonner sur requête des mesures urgentes que lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement ; qu'en rejetant la demande de rétractation de l'ordonnance sur requête du 3 avril 2013 présentée par la SCI Agay PuyRicard, Madame Y... et Monsieur X..., motifs pris que « le juge des référés sur l'instance en rétractation de l'ordonnance sur requête est investi des pouvoirs appartenant à l'auteur de l'ordonnance, mais dans le cadre de la contradiction », après avoir pourtant constaté que l'urgence visée n'était pas caractérisée et que « la dérogation au principe du contradictoire ne se justifiait pas pour ordonner la mesure contraignante prise », ce dont il s'inférait que le juge statuant sur requête n'avait pas été régulièrement saisi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'inféraient de ses propres constatations et a violé les articles 493, 494 et 812 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la SCI Agay PuyRicard et les consorts X...et Y... faisaient valoir, dans leurs dernières conclusions (déposées et signifiées le 21 mars 2014, p. 8 et 9) que selon les termes de la convention du 28 février 1996, la SCI Agay PuyRicard disposait d'un droit d'usage de la totalité du garage et qu'elle n'avait concédé aux consorts Z...un libre accès sur sa propriété que pour une durée limitée de 6 mois pour leur permettre de réaliser des travaux sur leur propriété ; qu'ils ont ajouté que la permission avait, sur demande, été accordée aux consorts Z...le 1er juin 2011, date à laquelle le délai contractuel de 6 mois avait commencé à courir, pour expirer au 1er décembre 2011 ; qu'en se contentant de relever que la SCI Agay PuyRicard n'avait eu l'obligation de laisser le libre accès aux consorts Z...sur sa propriété que pour un délai de 6 mois, sans répondre au moyen déterminant de la SCI PuyRicard, de Madame Y... et de Monsieur X..., selon lequel les consorts Z...avaient « bénéficié » de ce délai, qui était expiré depuis le 1er décembre 2011, ce dont il s'inférait qu'ils ne pouvaient plus exiger un nouveau droit de passage, peu important que les travaux sur leur propriété n'aient pas été achevés, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en considérant au surplus que les travaux litigieux n'étaient pas achevés, sans examiner, même sommairement, les deux procès-verbaux de constats d'huissier des 22 juillet 2013 et 16 avril 2013 (productions n° 7 et 8) produits par la SCI PuyRicard, Madame Y... et Monsieur X..., à l'appui de leurs dernières conclusions d'appel, déposées et signifiées le 21 mars 2014 (p. 9), qui constataient que les travaux étaient terminés, de sorte que la demande des consorts Z...était infondée, faute d'objet, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.



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Cette décision est visée dans la définition :
Contradictoire


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.