par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 15 septembre 2016, 15-22375
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
15 septembre 2016, 15-22.375

Cette décision est visée dans la définition :
Sécurité sociale




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles L. 4125-3-1 du code de la santé publique et L. 242-1, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale ;

Attendu que le premier de ces textes prévoit que les fonctions de membre d'un conseil départemental, de l'ordre des médecins sont exercées à titre bénévole, mais peuvent toutefois ouvrir droit à une indemnité dont les modalités sont fixées par décret ; que, selon le second, pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale de Champagne-Ardenne ayant mis en demeure le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Aube de lui verser des cotisations sociales assises sur les indemnités de présence versées à ses membres élus, ce conseil a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que, pour rejeter ce recours, l'arrêt énonce que les indemnités versées réunissent les critères de soumission au principe général d'assujettissement à cotisations et ne bénéficient d'aucune exonération légale ou réglementaire ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les membres élus des conseils départementaux de l'ordre des médecins n'en sont pas les salariés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit que les indemnités servies aux membres du conseil départemental des médecins de l'Aube ne sont pas assujetties à cotisations au régime général de la sécurité sociale ;

Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile présentées devant les juridictions du fond ;

Condamne l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale de Champagne-Ardenne aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale de Champagne-Ardenne ; la condamne à payer au conseil Départemental de l'ordre des médecins de l'Aube la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze septembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour le conseil Départemental de l'ordre des médecins de l'Aube.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que les indemnités versées aux membres du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Aube doivent être assujetties à cotisations sociales et d'avoir condamné le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Aube à payer à l'Urssaf la somme de 1228 €, outre pénalités de retard et intérêts au taux légal, à compter du 25 janvier 2012 ;

Aux motifs que l'Urssaf observe d'abord justement que c'est à tort que les premiers juges ont entendu restreindre le principe d'assujettissement à cotisations aux sommes perçues en contrepartie d'un travail exécuté dans le cadre d'un lien de subordination ; que l'Urssaf oppose à bon droit que, selon le statut de salarié ou pas de la personne concernée, il appert des articles L 242-1 et L 136-1 du Code de la sécurité sociale la création d'un principe général de soumission à cotisations des revenus, quelle que soit leur dénomination, perçus en contrepartie ou à l'occasion d'un travail, ou afin de compenser la perte d'une telle rémunération et que partant les dispositions instituant des exonérations de cotisations de sécurité sociale doivent être interprétées strictement ; Que dans ce cadre juridique, c'est à tort que le tribunal a cru pouvoir, ainsi que l'y invitait le demandeur, se déterminer en raisonnant par analogie avec les catégories (comme les élus des chambres des métiers ou d'agriculture) qui bénéficient d'une exonération prévue par un texte d'application stricte ; que de même les premiers juges ont méconnu les principes précédemment énoncés en admettant que dans tous les cas les membres du conseil intimé agissaient comme bénévoles ; que l'Urssaf caractérise exactement le bénévolat par une activité exercée en dehors de toute subordination et surtout sans la moindre contrepartie sous forme de rémunération excédant le remboursement de frais (déplacement, hébergement, nourriture) ; qu'à l'évidence ne réunit pas les éléments constitutifs de cette définition du bénévolat l'activité exercée par les membre du conseil intimé moyennant le versement d'une indemnité excédant les remboursements de frais dans les conditions visées par les articles L 4125-3-1 et D 4125-8 puis D 4125-9 du Code de la santé publique ; que ces textes autorisent le paiement d'une indemnité en contrepartie des participations aux sessions, commissions ou exécution d'une mission ponctuelle, et dans tous les cas en fonction de la charge de travail, sans ‒ au contraire de ce que soutient le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Aube ‒ que le caractère de rémunération ou de revenu d'un travail ne soit modifié par la circonstance que les intéressés sont élus et concourent ainsi à un service public ni par celle que le montant desdites indemnités soit cantonné par décret ; que ces indemnités réunissent les critères de soumission au principe général d'assujettissement à cotisations, et ne bénéficient d'aucune exonération légale ou réglementaire ; que ce constat commande d'infirmer le jugement déféré et, en validant les contraintes, de condamner l'intimé au montant sollicité par l'Urssaf, non subsidiairement critiqué ; que par contre, seul le conseil intimé a la qualité de cotisant sur les indemnités versées par lui à ses élus, de sorte que c'est sans se référer à une règle ayant valeur normative que l'Urssaf ‒ ainsi que celui-là le fait valoir ‒ entend le voir contraindre à lui donner la liste des médecins concernés pour leur réclamer directement les cotisations et voir ordonner la clôture de son compte employeur ;

ALORS D'UNE PART QUE l'assiette des cotisations sociales est déterminée par la loi selon le régime de protection auquel elles ouvrent droit ; qu'en jugeant que les indemnités versées aux membres du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Aube doivent être assujetties à cotisations sociales, en se fondant sur un prétendu principe général de soumission à cotisations des revenus et non sur une disposition légale identifiée, la cour d'appel a statué par voie d'affirmation et n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la conformité de l'arrêt à la règle de droit, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS D'AUTRE PART QUE l'article L 242-1 du Code de la sécurité sociale soumet à cotisations toutes les rémunérations versées aux « travailleurs » en contrepartie ou à l'occasion du travail, c'est-à-dire toutes les sommes versées dans le cadre d'un contrat de travail exécuté dans un lien de subordination ; qu'en soumettant à cotisations les indemnités versées par l'Ordre aux membres élus du conseil départemental qui ne sont pas liés à l'Ordre par un contrat de travail et ne sont pas dans un lien de subordination à son égard, la cour d'appel a violé l'article L 242-1 du Code de la sécurité sociale ;

ALORS ENSUITE et subsidiairement QUE seuls sont soumis à cotisations sociales les revenus professionnels des travailleurs non-salariés ; qu'une indemnité statutaire et aléatoire susceptible d'être allouée aux membres d'un conseil départemental de l'ordre des médecins en considération de leurs responsabilités ordinales et de l'exercice de leurs fonctions électives ne constitue pas un revenu professionnel soumis à cotisations sociales ; qu'en décidant éventuellement le contraire, au motif erroné que cette indemnité aurait un caractère de rémunération ou de revenu du travail, la cour d'appel a violé l'article L 131-6 du Code de la sécurité sociale, ensemble les articles L 4125-3-1, D 4125-8 et D 4125-9 du Code de la santé publique ;


ALORS ENFIN et subsidiairement QU'en condamnant le conseil départemental de l'Ordre des médecins de l'Aube à payer des cotisations sociales qui ont été calculées sur les indemnités versées à ses membres élus par application du régime général, la cour d'appel a violé l'article L 131-6 du Code de la sécurité sociale.



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Cette décision est visée dans la définition :
Sécurité sociale


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.