par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 2, 7 avril 2016, 15-12371
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
7 avril 2016, 15-12.371
Cette décision est visée dans la définition :
Compétence
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 4 décembre 2014), que, la société Union bancaire du Nord (la banque) ayant demandé, par une requête du 13 septembre 2012, à un tribunal d'instance la saisie des rémunérations de M. et Mme X..., ces derniers ont sollicité la suspension des poursuites engagées à leur encontre en application de l'article 8-1 du décret du 4 juin 1999 ;
Mais attendu, d'abord, qu'en vertu du principe de séparation des autorités administratives et judiciaires posé par l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et par le décret du 16 fructidor an III, sous réserve des matières réservées par nature à l'autorité judiciaire et sauf dispositions législatives contraires, il n'appartient qu'à la juridiction administrative de connaître des recours tendant à l'annulation ou à la réformation des décisions prises par l'administration dans l'exercice de ses prérogatives de puissance publique ; que de même, le juge administratif est en principe seul compétent pour statuer, le cas échéant par voie de question préjudicielle, sur toute contestation de la légalité de telles décisions, soulevée à l'occasion d'un litige relevant à titre principal de l'autorité judiciaire ; que ces principes doivent être conciliés tant avec l'exigence de bonne administration de la justice qu'avec les principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions, en vertu desquels tout justiciable a droit à ce que sa demande soit jugée dans un délai raisonnable ; qu'il suit de là que si, en cas de contestation sérieuse portant sur la légalité d'un acte administratif, les tribunaux de l'ordre judiciaire statuant en matière civile doivent surseoir à statuer jusqu'à ce que la question préjudicielle de la légalité de cet acte soit tranchée par la juridiction administrative, il en va autrement lorsqu'il apparaît manifestement, au vu d'une jurisprudence établie, que la contestation peut être accueillie par le juge saisi au principal ;
Attendu, ensuite, que l'article 8-1 du décret du 4 juin 1999, dans sa rédaction applicable au présent litige, était entaché d'illégalité par l'effet de l'abrogation par le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2011-213 QPC du 27 janvier 2012, de sa base légale, l'article 100 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 dans sa rédaction postérieure à l'article 25 de la loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998 ;
Attendu, enfin, que si le litige dont était saisie la cour d'appel de Nîmes conduisait à apprécier la légalité de l'article 8-1 du décret précité, il apparaît manifestement, eu égard à la jurisprudence établie du Conseil d'Etat, qu'une telle contestation pouvait être tranchée par le juge judiciaire saisi du litige au principal ;
Qu'il en résulte que l'application de l'article 8-1 du décret du 4 juin 1999 précité ne pouvait qu'être écartée par la cour d'appel ;
Que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, après avis donné aux parties, la décision déférée se trouve légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté les époux X... de leur demande de sursis à statuer prescrit par l'article 8-1 du décret n° 99-469 du 4 juin 1999 relatif au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée et d'AVOIR, en conséquence, ordonné la saisie les rémunérations des époux X... au profit de la société UBN en paiement de la somme de 1. 608. 458, 15 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les époux X... demandent de surseoir à statuer « dans l'attente de la décision définitive de l'autorité administrative », sous entendant que l'autorité administrative compétente n'aurait toujours pas pris position sur la demande d'aide au désendettement qu'ils ont déposé le 26 novembre 2001, soit depuis près de 13 ans à la date à laquelle il est à nouveau statué, puis affirmant que la juridiction administrative n'aurait pas encore statué ; que l'invraisemblance du sous-entendu le rend totalement inopérant dès lors qu'il n'est étayé par aucun élément ; il n'est d'autre part en rien justifié d'une saisie de la juridiction administrative à l'encontre d'une quelconque décision su bue que le moyen n'est pas étayé ; que les époux X... soutiennent en second lieu que la déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 100 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 de finances pour 1998 n'affecte en rien la disposition réglementaire qui n'est pas visée par la décision du Conseil Constitutionnel ; que l'article 8-1 du décret n° 99-469 en date du 4 juin 1999 dont ils revendiquent l'application au soutien de leur demande de sursis à statuer, la référence qu'ils font à l'article 5 de ce texte étant erronée au regard du contenu des dispositions qu'ils visent, dispose « en application de l'article 100 de la loi de finances pour 1998 (n° 97-1269 du décembre 1997), dans sa rédaction issue de la loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998, tout juge saisi d'un litige entre le débiteur dont la demande est déclarée éligible et un de ses créanciers sursoit à statuer et saisit la commission. Dans ce cas, la commission dispose d'un délai de six mois à compter de la notification qui lui est faite de la décision pour accomplir sa mission. Lorsqu'elle constate l'échec de la négociation, la commission en avise le juge. L'instance est poursuivie à l'initiative des parties ou à la diligence du juge » ; que cette rédaction, qui fait expressément référence à la disposition législative abrogée, conduit à considérer que l'article 8-1 du décret précité est nécessairement abrogé en conséquence de la décision du Conseil Constitutionnel puisqu'il est pris en application de la disposition législative invalidée ; qu'aucun décision de sursis à statuer ne peut donc intervenir ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE la réalité ni le montant de la créance, qui a pour origine un prêt de 2. 113. 958 francs accordé le 1er décembre 1990 par la SAS UBN à la SARL Botte X... depuis en liquidation judiciaire, ne sont contestés et cette dernière s'élève au jour de la requête à 1. 608. 458, 15 euros ; que Mme X... en sa qualité d'héritière de son père bénéficie de la qualité de rapatriée et elle a déposé un dossier d'aide au désendettement des rapatriés auprès du Préfet de Vaucluse le 26 novembre 2011, demande qui est toujours en cours ; que M. X... en sa qualité d'époux bénéficie de la qualité de rapatrié, un dossier d'aide au désendettement des rapatriés ayant été déposé auprès du Préfet de Vaucluse le 26 novembre 2011, demande qui est toujours en cours ; que c'est au vu des dispositions de l'article 100 de la loi du 30 juin 1997 qu'a été ordonnée, par décision du 21 mars 2002, la suspension de la procédure de saisie diligentée à (leur) encontre ; que pour solliciter une nouvelle fois la saisie des rémunérations de M. et Mme X..., la SAS UBN fait état d'un revirement de la Cour de cassation qui, dans un arrêt rendu le 7 avril 2006, a relevé que la suspension automatique des poursuites portait atteinte dans leur substance même aux droits des créanciers et d'une décision du Conseil Constitutionnel qui, le 27 janvier 2012, a déclaré l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997 de finances pour 1998 contraire à la Constitution ; que le Conseil Constitutionnel a prévu que l'abrogation de l'article 100 prenait effet à compter de la date de la publication de la décision et était applicable à toutes les instances non jugées définitivement à cette date ; que tel est le cas de la demande de la SAS UBN et qu'il convient en conséquence d'y faire droit, la demande de suspension des poursuites étant dorénavant privée de base légale, un décret d'application ne pouvant se substituer à la loi ;
ALORS QUE seul doit être considéré comme abrogé le règlement qui, du fait de l'abrogation de la disposition législative dont il procède, est incompatible avec le nouvel état du droit ; qu'en jugeant que l'article 8-1 du décret n° 99-469 du 4 juin 1999 était nécessairement abrogé en conséquence de la décision du Conseil Constitutionnel abrogeant l'article 100 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997, modifié par l'article 25 de la loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998, quand, en dépit de la référence, purement formelle, à cette disposition législative abrogée, à l'égard duquel il était en réalité autonome, l'article 8-1 du décret n° 99-469 du 4 juin 1999 restait compatible avec le nouvel état du dispositif de désendettement des rapatriés, la Cour d'appel a violé l'article 8-1 du décret n° 99-469 du 4 juin 1999.
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Cette décision est visée dans la définition :
Compétence
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.