par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 23 mars 2016, 14-22950
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Cour de cassation, chambre sociale
23 mars 2016, 14-22.950

Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° K 14-22. 950, W 14-22. 960, X 14-22. 961 et Z 14-22. 963 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Caen, 13 juin 2014), que M. X..., salarié protégé de la société Celeos Normandie et trois autres salariés protégés, salariés de la société BCP Normandie, ont été licenciés pour motif économique le 24 décembre 2008 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le liquidateur des sociétés employeurs fait grief aux arrêts de dire recevables les demandes des salariés tendant à contester la régularité de leurs licenciements, de dire irréguliers leurs licenciements économiques, et de fixer à une certaine somme leurs créances au passif de la liquidation judiciaire des sociétés employeurs, alors, selon le moyen, que lorsqu'une autorisation administrative de licenciement a été accordée à l'employeur, le juge judiciaire ne peut sans violer le principe de la séparation des pouvoirs apprécier le caractère réel et sérieux de la cause du licenciement, ni la régularité de la procédure antérieure à la saisine de l'inspecteur du travail dont le contrôle porte notamment sur la régularité de la procédure de licenciement et partant, sur la régularité de l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé l'administrateur à prononcer les licenciements ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les licenciements des salariés protégés avaient été autorisés par l'inspecteur du travail les 22 décembre 2008, 25 novembre 2008 et 4 décembre 2008 ; qu'en jugeant néanmoins les salariés recevables à contester devant le juge judiciaire la régularité de leurs procédures de licenciement, à savoir la régularité des ordonnances du juge commissaire ayant autorisé leurs licenciements, au prétexte erroné que l'inspecteur du travail n'aurait pas exercé de contrôle sur la régularité d'une telle décision faute de l'avoir visée expressément dans sa décision, la cour d'appel a violé la loi du 16-24 août 1790 et l'article L. 2411-1 et L. 2421-3 du code du travail ;

Mais attendu que si, en l'état d'une autorisation administrative de licencier un salarié protégé accordée à l'employeur par l'inspecteur du travail, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, se prononcer sur le caractère réel et sérieux de la cause de licenciement, il résulte de l'article L. 631-17 du code de commerce que lorsqu'un licenciement a été autorisé par une ordonnance du juge-commissaire, le caractère économique du licenciement et la régularité de l'ordonnance du juge commissaire ne peuvent être discutés devant l'administration ; que c'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a retenu que le juge judiciaire était compétent pour apprécier la régularité de l'ordonnance du juge-commissaire ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que le liquidateur des sociétés employeurs fait grief aux arrêts de dire irréguliers les licenciements économiques des salariés et de fixer à une certaine somme leurs créances au passif de la liquidation judiciaire des sociétés employeurs alors, selon le moyen :

1°/ que l'ordonnance du juge-commissaire autorisant les licenciements qui comporte la signature du juge et du greffier est régulière ; qu'elle peut renvoyer à une annexe précisant le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé, ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées, annexe qui n'a pas à être signée ; que, pour dire que les ordonnances rendues par le juge commissaire étaient irrégulières et dépourvues d'effet et que les licenciements prononcés en conséquence étaient dépourvus de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que si lesdites ordonnances, qui comportaient la signature du juge et du greffier, autorisaient « à procéder au licenciement économique des salariés occupant les postes et catégories annexées à la présente ordonnance », cette annexe, constituée d'un tableau mentionnant les emplois et la catégorie professionnelle dont la suppression est autorisée, n'était pas signée ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 631-17 et R. 631-26 du code de commerce, ensemble les articles 455, 456, 458, 480 du code de procédure civile, et les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du code du travail ;

2°/ qu'une annexe listant les emplois et la catégorie professionnelle dont la suppression est autorisée fait corps avec l'ordonnance du juge-commissaire autorisant les licenciements dès lors qu'il vise cette annexe dans son dispositif et que ce document est annexé à sa décision ; qu'en l'espèce, les ordonnances du juge-commissaire autorisaient dans leurs dispositifs l'administrateur « à procéder au licenciement économique des salariés occupant les postes et catégories annexés à la présente ordonnance » et comportaient en annexe un tableau mentionnant les emplois et la catégorie professionnelle dont la suppression était autorisée ; qu'en jugeant qu'une telle annexe ne pouvait faire corps avec la décision de justice que si la décision de justice portait des références précises permettant de rendre l'annexe nettement identifiable et intangible pour faire le lien sans équivoque entre celles-ci, la cour d'appel a violé les articles L. 631-17 et R. 631-26 du code de commerce, ensemble les articles 455, 456, 458, 480 du code de procédure civile, et les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du code du travail ;

3°/ qu'une annexe jointe à la décision du juge commissaire autorisant les licenciements est présumée, sauf preuve contraire, être celle qui est visée par sa décision ; qu'en considérant, pour dire les ordonnances irrégulières, qu'elles ne comportaient aucune mention relative au contenu de l'annexe ce qui rendait impossible le contrôle d'un quelconque lien entre l'annexe et la décision du juge-commissaire, la cour d'appel a violé les articles L. 631-17 et R. 631-26 du code de commerce, ensemble les articles 455, 456, 458, 480 du code de procédure civile, et les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du code du travail ;

4°/ qu'en tout état de cause que les juges ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; que les ordonnances du juge-commissaire précisaient être rendues par « Rémi Y..., juge-commissaire aux opérations de redressement judiciaire de la société » et autorisaient « la société, assistée par M. Michel C..., ès qualités, à procéder au licenciement pour motif économique des salariés occupant les postes et catégories annexés à la présente ordonnance » ; que l'annexe à ces ordonnances précisait le nom de la société en redressement judiciaire, le numéro du greffe, le nom du juge-commissaire et indiquait « annexe à l'ordonnance-liste des postes et catégorie dont la suppression est autorisée » ; qu'en jugeant que le corps des ordonnances ne comportait aucune mention relative au contenu de l'annexe ce qui rendait impossible le contrôle d'un quelconque lien entre l'annexe et la décision du juge-commissaire, la cour d'appel a dénaturé l'ordonnance du juge commissaire du 13 octobre 2008, ensemble l'annexe, en violation de l'article 1134 du code civil ;

5°/ qu'en tout état de cause que le seul défaut de signature de l'annexe jointe à la décision du juge commissaire autorisant les licenciements ou l'absence de référence précise, dans l'ordonnance, sur le contenu de l'annexe ne saurait à elle seule priver le licenciement prononcé en conséquence de cause réelle et sérieuse ; qu'en décidant autrement, la cour d'appel a violé les articles les articles L. 631-17 et R. 631-26 du code de commerce, ensemble les articles 455, 456, 458, 480 du code de procédure civile, et les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du code du travail ;

6°/ que le juge est tenu de respecter faire respecter la contradiction ; que dans leurs conclusions d'appel oralement développées, les salariés se prévalaient exclusivement de ce que l'annexe n'avait pas été signée ; qu'ils ne prétendaient pas que l'annexe ne pouvait faire corps avec l'ordonnance du juge commissaire, faute pour cette dernière de comporter des références précises sur le contenu de l'annexe permettant de la rendre identifiable et de faire le lien entre les deux documents ; qu'en se fondant néanmoins sur de tels éléments pour dire leurs licenciements irréguliers, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en application de l'article R. 631-26 du code de commerce, des licenciements économiques ne peuvent être valablement prononcés en vertu d'une autorisation de licencier donnée par la juridiction qui arrête un plan de cession qu'à la condition que cette décision précise, dans son dispositif, le nombre des salariés dont le licenciement est autorisé, ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées ;

Et attendu que la cour d'appel qui a constaté que l'ordonnance ne déterminait pas elle-même le nombre des salariés dont le licenciement était autorisé ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées mais renvoyait à une annexe, laquelle n'était pas signée, a, par ces seuls motifs, décidé à bon droit que les licenciements pour motif économique étaient sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société TCA représentée par M. D..., ès qualités de mandataire liquidateur, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société TCA représentée par M. D... ès qualités de mandataire liquidateur et le condamne à payer à MM. X..., Z..., A... et B..., la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits aux pourvois par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société TCA, représentée par M. D..., ès qualités de mandataire liquidateur.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR déclaré recevable l'action des salariés tendant à contester la régularité de leurs licenciement et d'AVOIR par conséquent, dit irréguliers leurs licenciements économiques, fixé à une certaine somme leurs créances au passif de la liquidation judiciaire de la société employeur, dit que les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, et d'AVOIR condamné Maître D..., ès-qualité de mandataire liquidateur à payer aux salariés une certaine somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la recevabilité de l'action du salarié ; que représentant du personnel et candidat à l'élection du comité d'entreprise, le licenciement de M. Philippe X... a été autorisé par l'inspecteur du travail suivant décision du 22 décembre 2008 ; qu'en application du principe de la séparation des pouvoirs, le juge judiciaire est incompétent pour statuer sur l'existence de la cause réelle et sérieuse et le respect de l'obligation de reclassement ; que toutefois, dès lors que la contestation dont est saisi le juge judiciaire ne porte pas sur le bien-fondé de la décision administrative ayant autorisé le licenciement mais sur des éléments qui n'ont pas été contrôlés par l'autorité administrative, le juge prud'homal reste compétent ; qu'ainsi, il est notamment compétent pour apprécier de la contestation de la validité du plan de sauvegarde de l'emploi et de l'ordre des licenciements ; que s'agissant de la contestation afférente à la régularité de la procédure, l'examen de la décision rendue par l'inspecteur du travail révèle que l'ordonnance du juge-commissaire dont la régularité est discutée n'y est pas visée expressément ce qui tend à montrer qu'elle n'a pas été soumise à son contrôle, que dès lors, sans violer le principe ci-dessus rappelé, l'action du salarié protégé est recevable ; Sur la régularité du licenciement ; que l'irrégularité de l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé le licenciement est soulevée pour non-respect des prescriptions de l'article R. 363-26 du code de commerce ; que si les organes de la procédure collective soulèvent à juste titre l'incompétence de la juridiction du travail pour statuer sur la nullité de l'ordonnance rendue par le juge-commissaire conformément aux dispositions de l'article 460 du code de procédure civile, pour autant, cette juridiction est compétente pour apprécier de l'existence d'une irrégularité formelle de nature à la priver d'effet ; qu'il résulte des termes de l'article L. 631-17 du code de commerce que l'administrateur qui envisage de procéder à des licenciements économiques au cours de la période d'observation doit y être autorisé par le juge commissaire ; qu'en application de l'article R. 631-26 du code de commerce, l'ordonnance du juge-commissaire doit indiquer le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé, ainsi que les activités et catégories professionnelles concernés ; qu'en l'espèce, sur requête de l'administrateur judiciaire pris en la personne de Me C... en date du 10 octobre 2008, le juge-commissaire aux opérations de redressement de la société CELEOS Normandie l'a autorisé « à procéder au licenciement économique des salariés occupant les postes et catégories annexés à la présente ordonnance » ; que l'ordonnance ainsi libellée est signée par le juge et le greffier ; qu'en revanche, l'annexe constituée d'un tableau mentionnant les emplois et la catégorie professionnelle dont la suppression est autorisée ne comporte aucune signature ; que si une annexe peut faire corps avec la décision de justice dont elle est l'accessoire, encore faut-il qu'elle réponde à un certain formalisme, propre à lui conférer force authentique au même titre que la décision auquel elle s'attache ; que cela suppose que la décision renvoyant à cette annexe porte des références précises permettant de la rendre nettement identifiable et intangible pour permettre de faire le lien sans équivoque entre celles-ci et que l'annexe soit signée par l'autorité qui s'y réfère ; qu'or, l'analyse des pièces produites révèle non seulement que l'annexe dont se prévalent les organes de la procédure n'est pas signée, mais également que le corps de l'ordonnance ne comporte aucune mention relative au contenu de l'annexe, rendant impossible le contrôle d'un quelconque lien entre l'annexe et la décision du juge-commissaire ; que dès lors, l'ordonnance ne respectant pas les termes des textes précités, se trouve dépourvue d'effet et rend dès lors le licenciement de M. Philippe X... sans cause réelle et sérieuse, la cour infirmant ainsi le jugement entrepris ; que le salarié est fondé à solliciter des dommages et intérêts devant être fixés dans les conditions définies par l'article L. 1235-3 du code du travail, son ancienneté étant supérieure à deux ans ; que compte tenu de son emploi, de son âge, de ses perspectives d'évolution de sa situation professionnelle, la cour fixe sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société CELEOS Normandie à la somme de 43. 700 euros (¿) que pour le même motif, il est condamné à payer à M. Philippe X... la somme de 400 euros pour les frais générés par la procédure et non compris dans les dépens.

ET AUX MOTIFS SUPPOSES ADOPTES QUE (s'agissant des pourvois n° K 14-22950, W 14-22960 et Z 14-422963) sur l'irrecevabilité tirée de l'autorisation de licenciement donnée par l'administration ; que les organes de la procédure collective soulèvent l'irrecevabilité de monsieur Philippe X... à remettre en cause le bien fondé de son licenciement, celui-ci ayant été autorisé par l'administration en raison de son statut de salarié protégé ; qu'elles prétendent que monsieur Philippe X... est irrecevable en sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse car l'autorisation de licenciement donnée par l'inspecteur du travail n'a pas fait l'objet d'un recours administratif ; qu'il appartient à l'inspecteur du travail de vérifier la réalité du motif invoqué, de procéder à l'examen des efforts de reclassement, de vérifier le respect de l'ordre des licenciements et de veiller au respect de la procédure de licenciement dans son ensemble ; que dès lors en raison du principe de la séparation des pouvoirs, le juge judiciaire ne peut contrôler ni le motif économique, ni le respect de l'obligation individuelle de reclassement, ni le respect des critères d'ordre de licenciement, ni apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement ; que c'est méconnaître la jurisprudence de la Cour de cassation, chambre sociale qui précise qu'alors même qu'une autorisation administrative a été accordée à l'employeur par l'inspecteur du Travail, il n'appartient qu'au juge judiciaire d'apprécier la mise en oeuvre des critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements notamment dans un arrêt n° 99-44994 du 11 décembre 2001 ; qu'ainsi le salarié peut toujours solliciter l'indemnisation de son préjudice sur la base du non-respect des critères d'ordre de licenciement ; que de plus, l'exception d'irrecevabilité présentée par les défendeurs ne peut qu'être encore écartée car ce n'est pas l'autorisation administrative de licenciement qui est contestée et sa motivation mais le jugement du tribunal de commerce, juridiction de l'ordre judiciaire ; qu'ainsi le Conseil des prud'hommes est parfaitement compétent pour examiner la discussion portant sur la régularité de ce fondement et Monsieur Philippe X... est déclaré recevable en sa contestation de la cause réelle et sérieuse de son licenciement

ALORS QUE lorsqu'une autorisation administrative de licenciement a été accordée à l'employeur, le juge judiciaire ne peut sans violer le principe de la séparation des pouvoirs apprécier le caractère réel et sérieux de la cause du licenciement, ni la régularité de la procédure antérieure à la saisine de l'inspecteur du travail dont le contrôle porte notamment sur la régularité de la procédure de licenciement et partant, sur la régularité de l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé l'administrateur à prononcer les licenciements ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que les licenciements des salariés protégés avaient été autorisés par l'inspecteur du travail les 22 décembre 2008, 25 novembre 2008 et 4 décembre 2008 ; qu'en jugeant néanmoins les salariés recevables à contester devant le juge judiciaire la régularité de leurs procédures de licenciement, à savoir la régularité des ordonnances du juge commissaire ayant autorisé leurs licenciements, au prétexte erroné que l'inspecteur du travail n'aurait pas exercé de contrôle sur la régularité d'une telle décision faute de l'avoir visée expressément dans sa décision, la Cour d'appel a violé la loi du 16-24 août 1790 et l'article L. 2411-1 et L. 2421-3 du Code du travail

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR, dit irréguliers les licenciements économiques des salariés, d'AVOIR fixé à une certaine somme leurs créances au passif de la liquidation judiciaire de la société employeur, dit que les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, et d'AVOIR condamné Maître D..., ès-qualité de mandataire liquidateur à payer aux salariés une certaine somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

AUX MOTIFS QUE Sur la régularité du licenciement ; que l'irrégularité de l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé le licenciement est soulevée pour non-respect des prescriptions de l'article R. 363-26 du code de commerce ; que si les organes de la procédure collective soulèvent à juste titre l'incompétence de la juridiction du travail pour statuer sur la nullité de l'ordonnance rendue par le juge-commissaire conformément aux dispositions de l'article 460 du code de procédure civile, pour autant, cette juridiction est compétente pour apprécier de l'existence d'une irrégularité formelle de nature à la priver d'effet ; qu'il résulte des termes de l'article L. 631-17 du code de commerce que l'administrateur qui envisage de procéder à des licenciements économiques au cours de la période d'observation doit y être autorisé par le juge commissaire ; qu'en application de l'article R. 631-26 du code de commerce, l'ordonnance du juge-commissaire doit indiquer le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé, ainsi que les activités et catégories professionnelles concernés ; qu'en l'espèce, sur requête de l'administrateur judiciaire pris en la personne de Me C... en date du 10 octobre 2008, le juge-commissaire aux opérations de redressement de la société CELEOS Normandie l'a autorisé « à procéder au licenciement économique des salariés occupant les postes et catégories annexés à la présente ordonnance » ; que l'ordonnance ainsi libellée est signée par le juge et le greffier ; qu'en revanche, l'annexe constituée d'un tableau mentionnant les emplois et la catégorie professionnelle dont la suppression est autorisée ne comporte aucune signature ; que si une annexe peut faire corps avec la décision de justice dont elle est l'accessoire, encore faut-il qu'elle réponde à un certain formalisme, propre à lui conférer force authentique au même titre que la décision auquel elle s'attache ; que cela suppose que la décision renvoyant à cette annexe porte des références précises permettant de la rendre nettement identifiable et intangible pour permettre de faire le lien sans équivoque entre celles-ci et que l'annexe soit signée par l'autorité qui s'y réfère ; qu'or, l'analyse des pièces produites révèle non seulement que l'annexe dont se prévalent les organes de la procédure n'est pas signée, mais également que le corps de l'ordonnance ne comporte aucune mention relative au contenu de l'annexe, rendant impossible le contrôle d'un quelconque lien entre l'annexe et la décision du juge-commissaire ; que dès lors, l'ordonnance ne respectant pas les termes des textes précités, se trouve dépourvue d'effet et rend dès lors le licenciement de M. Philippe X... sans cause réelle et sérieuse, la cour infirmant ainsi le jugement entrepris ; que le salarié est fondé à solliciter des dommages et intérêts devant être fixés dans les conditions définies par l'article L. 1235-3 du code du travail, son ancienneté étant supérieure à deux ans ; que compte tenu de son emploi, de son âge, de ses perspectives d'évolution de sa situation professionnelle, la cour fixe sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société CELEOS Normandie à la somme de 43. 700 euros (...) que pour le même motif, il est condamné à payer à M. Philippe X... la somme de 400 euros pour les frais générés par la procédure et non compris dans les dépens.

1°- ALORS QUE l'ordonnance du juge commissaire autorisant les licenciements qui comporte la signature du juge et du greffier est régulière ; qu'elle peut renvoyer à une annexe précisant le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé, ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées, annexe qui n'a pas à être signée ; que, pour dire que les ordonnances rendues par le juge commissaire étaient irrégulières et dépourvues d'effet et que les licenciements prononcés en conséquence étaient dépourvus de cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a retenu que si lesdites ordonnances, qui comportaient la signature du juge et du greffier, autorisaient « à procéder au licenciement économique des salariés occupant les postes et catégories annexées à la présente ordonnance », cette annexe, constituée d'un tableau mentionnant les emplois et la catégorie professionnelle dont la suppression est autorisée, n'était pas signée ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé les articles L. 631-17 et R. 631-26 du Code de commerce, ensemble les articles 455, 456, 458, 480 du Code de procédure civile, et les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du Code du travail ;

2°- ALORS QU'une annexe listant les emplois et la catégorie professionnelle dont la suppression est autorisée fait corps avec l'ordonnance du juge-commissaire autorisant les licenciements dès lors qu'il vise cette annexe dans son dispositif et que ce document est annexé à sa décision ; qu'en l'espèce, les ordonnances du juge-commissaire autorisaient dans leurs dispositifs l'administrateur « à procéder au licenciement économique des salariés occupant les postes et catégories annexés à la présente ordonnance » et comportaient en annexe un tableau mentionnant les emplois et la catégorie professionnelle dont la suppression était autorisée ; qu'en jugeant qu'une telle annexe ne pouvait faire corps avec la décision de justice que si la décision de justice portait des références précises permettant de rendre l'annexe nettement identifiable et intangible pour faire le lien sans équivoque entre celles-ci, la Cour d'appel a violé les articles L. 631-17 et R. 631-26 du Code de commerce, ensemble les articles 455, 456, 458, 480 du Code de procédure civile, et les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du Code du travail.

3°- ALORS QU'une annexe jointe à la décision du juge commissaire autorisant les licenciements est présumée, sauf preuve contraire, être celle qui est visée par sa décision ; qu'en considérant, pour dire les ordonnances irrégulières, qu'elles ne comportaient aucune mention relative au contenu de l'annexe ce qui rendait impossible le contrôle d'un quelconque lien entre l'annexe et la décision du juge-commissaire, la Cour d'appel a violé les articles L. 631-17 et R. 631-26 du Code de commerce, ensemble les articles 455, 456, 458, 480 du Code de procédure civile, et les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du Code du travail.

4°- ALORS en tout état de cause QUE les juges ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; que les ordonnances du juge-commissaire précisaient être rendues par « Rémi Y..., Juge commissaire aux opérations de Redressement judiciaire de la société » et autorisaient « la société, assistée par Maître Michel C..., es-qualités, à procéder au licenciement pour motif économique des salariés occupant les postes et catégories annexés à la présente ordonnance » ; que l'annexe à ces ordonnances précisait le nom de la société en redressement judiciaire, le numéro du Greffe, le nom du juge-commissaire et indiquait « Annexe à l'ordonnance-Liste des postes et catégorie dont la suppression est autorisée » ; qu'en jugeant que le corps des ordonnances ne comportait aucune mention relative au contenu de l'annexe ce qui rendait impossible le contrôle d'un quelconque lien entre l'annexe et la décision du juge-commissaire, la Cour d'appel a dénaturé l'ordonnance du juge commissaire du 13 octobre 2008, ensemble l'annexe, en violation de l'article 1134 du Code civil.

5°- ALORS en tout état de cause QUE le seul défaut de signature de l'annexe jointe à la décision du juge commissaire autorisant les licenciements ou l'absence de référence précise, dans l'ordonnance, sur le contenu de l'annexe ne saurait à elle seule priver le licenciement prononcé en conséquence de cause réelle et sérieuse ; qu'en décidant autrement, la Cour d'appel a violé les articles les articles L. 631-17 et R. 631-26 du Code de commerce, ensemble les articles 455, 456, 458, 480 du Code de procédure civile, et les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du Code du travail ;

6°- ALORS QUE le juge est tenu de respecter faire respecter la contradiction ; que dans leurs conclusions d'appel oralement développées, les salariés se prévalaient exclusivement de ce que l'annexe n'avait pas été signée ; qu'ils ne prétendaient pas que l'annexe ne pouvait faire corps avec l'ordonnance du juge commissaire, faute pour cette dernière de comporter des références précises sur le contenu de l'annexe permettant de la rendre identifiable et de faire le lien entre les deux documents ; qu'en se fondant néanmoins sur de tels éléments pour dire leurs licenciements irréguliers, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce point, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.



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Licenciement


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.