par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. soc., 16 février 2011, 10-16534
Dictionnaire Juridique
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Cour de cassation, chambre sociale
16 février 2011, 10-16.534
Cette décision est visée dans la définition :
Prud'hommes (Conseil de - )
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° G 10-16.423 et D 10-16.534 ;
Sur le moyen unique des pourvois :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 23 février 2010), que M. X... a été engagé à compter du 13 avril 1989 par la société d'exploitation du parking Paillon devenue la société d'exploitation de stations services d'autoroutes (Sessa) aux droits de laquelle vient la société Shell ; que la société Sessa a cédé son activité, avec effet au 18 octobre 2007, à la société Gasolina ; que cette société a repris le contrat de travail de M. X... à compter du 18 octobre 2007 et l'a convoqué le jour même à un entretien préalable en vue de son licenciement ; que M. X... a été licencié le 14 novembre 2007 pour motif économique ; qu'il a cité devant le conseil de prud'hommes de Nanterre la société Sessa, qui avait son siège social dans le ressort de cette juridiction, et la société Gasolina pour demander leur condamnation in solidum à lui verser des dommages-intérêts pour licenciement sans motif réel et sérieux ; que le conseil de prud'hommes de Nanterre s'est déclaré territorialement incompétent pour statuer sur les demandes de M. X... et a renvoyé l'affaire devant le conseil de prud'hommes de Trouville-sur-Mer, dans le ressort duquel la société Gasolina avait son siège social ; que M. X... a formé un contredit de compétence à l'encontre de cette décision ;
Attendu que les sociétés Shell et Gasolina font grief à l'arrêt d'avoir dit que le conseil de prud'hommes de Nanterre était compétent pour connaître des demandes de M. X... et d'avoir ordonné la transmission de l'affaire à ce même conseil de prud'hommes, alors, selon le moyen, pris en ses première et deuxième branches de la société Shell :
1°/ que la prorogation de compétence territoriale prévue à l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile ne peut faire échec à des règles de compétence d'attribution d'ordre public ; que l'article R. 1412-1 du code du travail, qui pose des règles de compétence d'attribution d'ordre public, rappelle que le conseil de prud'hommes territorialement compétent pour connaître des différends opposant un salarié à son employeur est soit celui dans le ressort duquel est situé l'établissement où est accompli le travail, soit, lorsque le travail est accompli à domicile ou en dehors de toute entreprise ou établissement, celui dans le ressort duquel est situé le domicile du salarié et que le salarié peut également saisir les conseils de prud'hommes du lieu où l'engagement a été contracté ou celui du lieu où l'employeur est établi ; qu'en retenant la compétence territoriale du conseil de prud'hommes de Nanterre, dans le ressort duquel se trouvait le siège social de la société Sessa au motif que l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile offre une option au demandeur lorsqu'il existe une pluralité de défendeurs cependant que la prorogation de compétence territoriale prévue à l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile ne peut faire échec à des règles de compétence d'attribution d'ordre public, la cour d'appel a violé les articles R. 1412-1 et R. 1451-1 du code du travail, ensemble l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile ;
2°/ qu'en toute hypothèse, un demandeur ne peut se prévaloir de la prorogation de compétence territoriale prévue à l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile que s'il exerce une action directe et personnelle contre chacune des parties assignées et si la question à juger est la même pour toutes, quelle que soit la mesure en laquelle chacune peut être engagée ; qu'en se bornant à retenir la compétence du conseil de prud'hommes de Nanterre, dans le ressort duquel la société Sessa avait son siège social aux motifs qu'il existait une option au profit du demandeur en présence d'une pluralité de défendeurs sans même constater que la question à juger était la même pour Sessa et Gasolina tandis qu'il s'agissait de juger en ce qui concernait la société Gasolina du caractère réel et sérieux du licenciement et pour la société Sessa de l'existence d'une collusion frauduleuse, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile ;
et alors, selon le moyen pris en ses première et deuxième branches de la société Gasolina :
1°/ que, les dispositions de droit commun du code de procédure civile, et notamment celles régissant la compétence territoriale, ne s'appliquent en matière prud'homale que si elles n'ont pas pour effet de contredire les règles spéciales d'ordre public édictées par le code du travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré qu'il pouvait être fait application de l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile et que le conseil de prud'hommes dans le ressort duquel son ancien employeur, la société Sessa, avait son siège social pouvait être reconnu territorialement compétent, bien que les dispositions spéciales de l'article R. 1412-1 du code du travail ne lui permettent de saisir que celui dans le ressort duquel se trouvait soit l'établissement dans lequel le salarié avait travaillé, soit le lieu où son engagement a été contracté, soit celui du lieu où l'employeur est établi ; qu'en déclarant ainsi compétent un conseil de prud'hommes qui ne l'était pas en application des règles spéciales d'ordre public régissant la compétence en matière prud'homale, la cour d'appel a violé l'article R. 1412-1 du code du travail, ensemble les articles R. 1451-1 du code du travail et 42, alinéa 2, et 749 du code de procédure civile ;
2°/ que, subsidiairement, la prorogation de compétence ouverte en cas de pluralité de défendeurs par l'alinéa 2 de l'article 42 du code de procédure civile suppose que la question soumise au juge soit identique pour tous les défendeurs ; qu'en l'espèce, M. X... imputait à titre principal à la société Sessa, son ancien employeur, d'avoir commis une fraude en transférant son contrat de travail, tandis qu'il reprochait à titre subsidiaire à la société Gasolina, dont il admettait qu'elle était son seul employeur au moment du licenciement, son licenciement abusif ; qu'en faisant cependant application de l'article 42, alinaé 2, sans vérifier si la question de droit posée au juge était unique pour les deux défenderesses, ce qui n'était manifestement pas le cas, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article R. 1451-1 du code du travail et de l'article 749 du code de procédure civile que sous réserve des dispositions du code du travail la procédure devant les juridictions prud'homales est régie par les dispositions du livre premier du code de procédure civile ; qu'aux termes de l'article 42, alinéa 2, de ce code, lorsqu'il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l'un d'eux ;
Attendu qu'après avoir constaté que la société Sessa avait cédé son activité à la société Gasolina et lui avait transféré le contrat de travail de M. X..., l'arrêt relève que le salarié conteste la régularité du transfert de son contrat de travail effectué "de manière fictive et en fraude de ses droits" et du licenciement dont il a fait l'objet, et forme une demande de condamnation in solidum des deux employeurs de sorte que le salarié peut se prévaloir de la prorogation de compétence de l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile ; que la cour d'appel en a exactement déduit que le conseil de prud'hommes de Nanterre, lieu du siège social de la société Sessa, était territorialement compétent pour connaître des demandes de M. X... et qu'il y avait lieu de renvoyer l'affaire devant cette juridiction ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen pris en ses autres branches dont aucune n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les sociétés Shell et Gasolina aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi n° G 10-16.423 par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour la société Shell.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le Conseil de prud'hommes de Nanterre était compétent pour connaître des demandes de Monsieur Richard X... ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... a saisi la juridiction prud'homale de Nanterre, faisant une application combinée des articles R. 1412-1 du Code du travail et 42, alinéa 2 du Code de procédure civile, par requête du 27 décembre 2007 poursuivant la condamnation in solidum des sociétés Sessa et Gasolina à lui payer des dommages et intérêts pour licenciement sans motif réel et sérieux ; qu'au soutien de sa demande de condamnation solidaire, il considère que le transfert de son contrat de travail de la société Sessa à la société Gasolina a été effectué de "manière fictive et en fraude de ses droits » ; que d'une part, il n'est pas contesté que les sociétés Sessa et Gasolina ont été à des périodes successives l'employeur de Monsieur X... justifiant la compétence de la juridiction prud'homale, seule compétente pour trancher les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail entre les employeurs et les salariés qu'ils emploient, au sens de l'article L. 1411-1 du Code du travail ; que d'autre part, le salarié poursuivant la condamnation in solidum des deux sociétés a saisi la juridiction prud'homale de Nanterre, contestant la régularité du transfert de son contrat de travail et le licenciement dont il a été l'objet, litige impliquant que les deux sociétés soient attraites devant la même juridiction ; qu'enfin, selon l'article R. 1412-1 du Code du travail, le conseil de prud'hommes territorialement compétent est soit celui dans le ressort duquel est situé l'établissement où est accompli le travail, soit, lorsque le travail est accompli à domicile ou en dehors de toute entreprise ou établissement celui dans le ressort duquel est situé le domicile du salarié ; que le dernier alinéa de ce même article permet au salarié de saisir les conseils de prud'hommes du lieu où l'engagement a été contracté ou celui du lieu où l'employeur est établi ; que la société Sessa a comme siège social 307 rue d'Estienne d'Orves à Colombes (92708) impliquant la compétence du Conseil de prud'hommes de Nanterre et la société Gasolina a son siège social à Touques (14800) impliquant la compétence du Conseil de prud'hommes de Lisieux, en l'état de la fermeture du Conseil de prud'hommes de Trouville-sur-Mer ; qu'en application de l'article R. 1451-1 du Code du travail, sous réserve de dispositions expresses, la procédure devant les juridictions prud'homales est régie par les dispositions du livre premier du Code de procédure civile ; que selon l'article 42 du Code de procédure civile, s'il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction où demeure l'un d'eux ; qu'il existe entre les demandes dirigées contre les sociétés Sessa et Gasolina un lien de connexité permettant à Monsieur X... de se prévaloir de la prorogation de compétence de l'article 42 alinéa 2 du Code de procédure civile ; que le contredit doit être accueilli et l'affaire renvoyée devant le Conseil de prud'hommes de Nanterre, compétent pour en connaître, le principe du double de degré de juridiction devant être respecté ; que les frais inhérents à la procédure de contredit resteront à la charge des sociétés Sessa et Gasolina qui seront déboutées de leurs demandes d'application de l'article 700 du Code de procédure civile ; que les considérations d'équité justifient que soit allouée à Monsieur X... une indemnité de 1 500 au titre des frais irrépétibles qu'il a été contraint d'exposer en application de l'article 700 du Code de procédure civile » ;
ALORS QUE d'une part la prorogation de compétence territoriale prévue à l'article 42, alinéa 2, du Code de procédure civile ne peut faire échec à des règles de compétence d'attribution d'ordre public ; que l'article R. 1412-1 du Code du travail, qui pose des règles de compétence d'attribution d'ordre public, rappelle que le Conseil de prud'hommes territorialement compétent pour connaître des différends opposant un salarié à son employeur est soit celui dans le ressort duquel est situé l'établissement où est accompli le travail, soit, lorsque le travail est accompli à domicile ou en dehors de toute entreprise ou établissement, celui dans le ressort duquel est situé le domicile du salarié et que le salarié peut également saisir les conseils de prud'hommes du lieu où l'engagement a été contracté ou celui du lieu où l'employeur est établi ; qu'en retenant la compétence territoriale du Conseil de prud'hommes de Nanterre, dans le ressort duquel se trouvait le siège social de la société Sessa au motif que l'article 42, alinéa du Code de procédure civile offrait une option au demandeur lorsqu'il existait une pluralité de défendeurs cependant que la prorogation de compétence territoriale prévue à l'article 42, alinéa 2, du Code de procédure civile était interdite dès lors qu'elle faisait échec à des règles de compétence d'attribution d'ordre public, la Cour d'appel a violé les articles R. 1412-1 et R. 1451-1 du Code du travail, ensemble l'article 42, alinéa 2 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE d'autre part et en toute hypothèse un demandeur ne peut se prévaloir de la prorogation de compétence territoriale prévue à l'article 42, alinéa 2, du Code de procédure civile que s'il exerce une action directe et personnelle contre chacune des parties assignées et si la question à juger est la même pour toutes, quelle que soit la mesure en laquelle chacune peut être engagée ; qu'en se bornant à retenir la compétence du Conseil de prud'hommes de Nanterre, dans le ressort duquel la société Sessa avait son siège social aux motifs qu'il existait une option au profit du demandeur en présence d'une pluralité de défendeurs sans même constater que la question à juger était la même pour Sessa et Gasolina tandis qu'il s'agissait de juger en ce qui concernait la société Gasolina du caractère réel et sérieux du licenciement et pour la société Sessa de l'existence d'une collusion frauduleuse, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 42, alinéa 2 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE de troisième part lorsque que la détermination de la compétence dépend d'une question de fond, le juge doit, dans le dispositif du jugement, statuer sur cette question de fond et sur la compétence par des dispositions distinctes ; que la question de l'existence d'une collusion frauduleuse entre les employeurs successifs constituait une question de fond dont dépendait la détermination de la compétence territoriale du Conseil de prud'hommes ; qu'en retenant la compétence du Conseil de prud'hommes de Nanterre sans même s'expliquer sur l'existence d'une collusion frauduleuse entre les employeurs successifs, la Cour d'appel a violé les articles 77 du Code de procédure civile et R. 1412-1 du Code du travail ;Moyen produit au pourvoi n° D 10-16.534 par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Gasolina.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le Conseil de prud'hommes de Nanterre était compétent pour connaître des demandes de M. X... à l'encontre de la société Gasolina et d'AVOIR ordonné la transmission du dossier à ce même Conseil de Prud'hommes ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... a saisi la juridiction prud'homale de Nanterre, faisant une application combinée des articles R. 1412-1 du Code du travail et 42, alinéa 2 du Code de procédure civile, par requête du 27 décembre 2007 poursuivant la condamnation in solidum des sociétés Sessa et Gasolina à lui payer des dommages et intérêts pour licenciement sans motif réel et sérieux ; qu'au soutien de sa demande de condamnation solidaire, il considère que le transfert de son contrat de travail de la société Sessa à la société Gasolina a été effectué de "manière fictive et en fraude de ses droits » ; que d'une part, il n'est pas contesté que les sociétés Sessa et Gasolina ont été à des périodes successives l'employeur de Monsieur X... justifiant la compétence de la juridiction prud'homale, seule compétente pour trancher les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail entre les employeurs et les salariés qu'ils emploient, au sens de l'article L. 1411-1 du Code du travail ; que d'autre part, le salarié poursuivant la condamnation in solidum des deux sociétés a saisi la juridiction prud'homale de Nanterre, contestant la régularité du transfert de son contrat de travail et le licenciement dont il a été l'objet, litige impliquant que les deux sociétés soient attraites devant la même juridiction ; qu'enfin, selon l'article R. 1412-1 du Code du travail, le conseil de prud'hommes territorialement compétent est soit celui dans le ressort duquel est situé l'établissement où est accompli le travail, soit, lorsque le travail est accompli à domicile ou en dehors de toute entreprise ou établissement celui dans le ressort duquel est situé le domicile du salarié ; que le dernier alinéa de ce même article permet au salarié de saisir les conseils de prud'hommes du lieu où l'engagement a été contracté ou celui du lieu où l'employeur est établi ; que la société Sessa a comme siège social 307 rue d'Estienne d'Orves à Colombes (92708) impliquant la compétence du Conseil de prud'hommes de Nanterre et la société Gasolina a son siège social àTouques (14800) impliquant la compétence du Conseil de prud'hommes de Lisieux, en l'état de la fermeture du Conseil de prud'hommes de Trouville-sur-Mer ; qu'en application de l'article R. 1451-1 du Code du travail, sous réserve de dispositions expresses, la procédure devant les juridictions prud'homales est régie par les dispositions du livre premier du Code de procédure civile ; que selon l'article 42 du Code de procédure civile, s'il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction où demeure l'un d'eux ; qu'il existe entre les demandes dirigées contre les sociétés Sessa et Gasolina un lien de connexité permettant à Monsieur X... de se prévaloir de la prorogation de compétence de l'article 42 alinéa 2 du Code de procédure civile ; que le contredit doit être accueilli et l'affaire renvoyée devant le Conseil de prud'hommes de Nanterre, compétent pour en connaître, le principe du double de degré de juridiction devant être respecté » ;
1°) ALORS QUE les dispositions de droit commun du code de procédure civile, et notamment celles régissant la compétence territoriale, ne s'appliquent en matière prud'homale que si elles n'ont pas pour effet de contredire les règles spéciales d'ordre public édictées par le code du travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré qu'il pouvait être fait application de l'article 42, al. 2, du Code de procédure civile et que le Conseil de prud'hommes dans le ressort duquel son ancien employeur, la société Sessa, avait son siège social pouvait être reconnu territorialement compétent, bien que les dispositions spéciales de l'article R. 1412-1 du Code du travail ne lui permettent de saisir que celui dans le ressort duquel se trouvait soit l'établissement dans lequel le salarié avait travaillé, soit le lieu où son engagement a été contracté, soit celui du lieu où l'employeur est établi ; qu'en déclarant ainsi compétent un Conseil de prud'hommes qui ne l'était pas en application des règles spéciales d'ordre public régissant la compétence en matière prud'homale, la cour d'appel a violé l'article R. 1412-1 du Code du travail, ensemble les articles R. 1451-1 du Code du travail et 42, al. 2, et 749 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la prorogation de compétence ouverte en cas de pluralité de défendeurs par l'alinéa 2 de l'article 42 du Code de procédure civile suppose que la question soumise au juge soit identique pour tous les défendeurs ; qu'en l'espèce, M. X... imputait à titre principal à la société Sessa, son ancien employeur, d'avoir commis une fraude en transférant son contrat de travail, tandis qu'il reprochait à titre subsidiaire à la société Gasolina, dont il admettait qu'elle était son seul employeur au moment du licenciement, son licenciement abusif ; qu'en faisant cependant application de l'article 42, al. 2, sans vérifier si la question de droit posée au juge était unique pour les deux défenderesses, ce qui n'était manifestement pas le cas, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 42, al. 2, du Code de procédure civile ;
3°) ALORS, TRES SUBSIDIAIREMENT, QUE la prorogation de compétence ouverte par l'article 42, al. 2, du Code de procédure civile ne peut être exercée que si le défendeur qui en permet la mise en oeuvre est « réel et sérieux » ; qu'en l'espèce, les sociétés Gasolina et Sessa démontraient dans leurs écritures d'appel qu'à l'évidence, la première était seule employeur de M. X... et la seule concernée par la demande de ce dernier et demandaient la confirmation du jugement entrepris, qui avait constaté qu'aucune fraude à la loi commise lors du transfert de son contrat de travail n'était démontrée ; que dès lors, en faisant droit au contredit, sans s'assurer ni que la société Sessa était un défendeur « réel et sérieux », ni que la demande formulée à son encontre n'était pas artificielle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 42, al. 2, du Code de procédure civile ;
4°) ALORS, ENFIN, QUE lorsque la détermination de la compétence dépend d'une question de fond, le juge doit, dans le dispositif du jugement, statuer sur cette question de fond et sur la compétence par des dispositions distinctes ; que la question de l'existence d'une collusion frauduleuse entre les employeurs successifs constituait une question de fond dont dépendait la détermination de la compétence territoriale du Conseil de Prud'hommes ; qu'en retenant la compétence du Conseil de prud'hommes de Nanterre sans même s'expliquer sur l'existence d'une collusion frauduleuse entre les employeurs successifs, la cour d'appel a violé les articles 77 du Code de Procédure Civile et R.1412-1 du Code du Travail.
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Prud'hommes (Conseil de - )
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.