par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 17 mars 2010, 09-40465
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Cour de cassation, chambre sociale
17 mars 2010, 09-40.465

Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 27 juin 2008), que M. X..., engagé le 10 avril 1995 en qualité d'aide conducteur par la société Desmarescaux, devenue la société DSA emballage (la société), a adressé à son employeur sa démission le 6 novembre 2000, avec préavis d'un mois ; qu'il a été en arrêt de travail pour maladie du 6 novembre au 7 décembre 2000 ; que par lettre du 20 novembre 2000, il a rétracté sa démission, résultant selon lui de son état de santé ; que la société a, le 24 novembre 2000, refusé cette rétractation et pris acte de sa démission ; qu'elle a été mise en redressement, puis en liquidation judiciaire les 2 juin 2003 et 2 juin 2004 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes d'indemnités au titre de la rupture de son contrat de travail ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que la démission ne peut résulter que d'une volonté claire et non équivoque du salarié de rompre le contrat de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le salarié, en arrêt-maladie du 6 novembre au 7 décembre 2000, avait donné sa démission le 6 novembre 2000, après avoir abandonné prématurément son poste de travail, puis s'était rétracté le 20 novembre 2000, et qu'il produisait une attestation du 9 janvier 2001 du docteur Y..., psychiatre, indiquant avoir vu à quatre reprises M. X... à compter du 19 octobre 2000 pour un syndrome dépressif réactionnel à des difficultés professionnelles ayant nécessité la prescription de Prozac ; qu'en considérant, cependant, que la démission litigieuse n'était pas équivoque, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les articles L. 122-4 et L. 122-5, devenus L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail ;

2°/ que la cour d'appel a constaté que le salarié produisait au débat « un certificat médical du 19 octobre 2000 prescrivant le Prozac» ; que sur cette ordonnance figuraient les mentions de la délivrance par la pharmacie Liefooghe de deux boîtes de Prozac le 20 octobre 2000 ; qu'en retenant pourtant que le salarié ne justifiait pas du moment où il avait commencé à prendre son traitement antidépressif, la cour d'appel a dénaturé les mentions claires et précises de l'ordonnance médicale du 19 octobre 2000 et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°/ que lorsque le salarié remet en cause sa démission, en raison de faits ou de manquements imputables à l'employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; qu'en l'espèce, le salarié faisait état de l'affichage en janvier 2000 dans les locaux de l'entreprise de l'avertissement qui lui avait été notifié le 23 décembre 1998, du contrôle préalable de ses heures de délégation, du refus de l'employeur de le laisser utiliser le téléphone de l'entreprise pour appeler l'inspecteur du travail et de propos racistes tenus à son encontre ; que, dès lors, en se bornant à retenir, pour considérer que la démission n'était pas équivoque, que ces faits ne présentaient aucune lien objectif avec l'état de santé du salarié ou qu'ils n'étaient pas significatifs, sans constater que le salarié ne justifiait pas d'un différend antérieur ou contemporain à sa décision l'ayant opposé à son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base au regard des articles L. 122-4 et L. 122-5, devenus L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail ;

4°/ que dans son jugement du 28 janvier 2003, le tribunal correctionnel de Hazebrouck, après avoir constaté que Mme Z... était prévenue d'avoir de décembre 1999 à décembre 200(0) fait entrave au fonctionnement du comité d'entreprise de la société Desmarescaux, devenue la société DSA emballage, a retenu que l'infraction était constituée en ce qui concerne l'établissement de bons de délégation qui, lorsqu'ils l'étaient par Mme Z..., mentionnaient expressément une autorisation d'absence ; qu'ainsi, en affirmant que les faits incriminés étaient situés dans le temps à la fin de l'année 1999 et en janvier 2000, la cour d'appel a dénaturé le jugement du 28 janvier 2003 et violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, a retenu qu'il n'était pas établi que la démission du salarié soit en relation avec son état de santé ;

Attendu, ensuite, que la cour d'appel n'a pas dénaturé le certificat médical du 19 octobre 2000 en retenant que le salarié ne justifiait pas de la date de la prise de son traitement ;

Attendu, enfin, que le salarié ne peut tout à la fois invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission et demander que cet acte de démission soit analysé en une prise d'acte, par lui, de la rupture de son contrat de travail en raison de faits et manquements imputables à l'employeur ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en ses troisième et quatrième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief a l'arrêt attaqué d'avoir dit que Monsieur Sidi Mohamed X... a démissionné de son poste et de l'avoir débouté de sa demande tendant à voir fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société DSA EMBALLAGE, à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis, d'indemnité de licenciement, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur Sidi X... soutient qu'il aurait fait l'objet de harcèlement par sa hiérarchie et de mesures discriminatoires à la suite de sa désignation en tant que délégué syndical qui auraient eu un retentissement sur son état de santé provoquant une dépression réactionnelle et la prise d'antidépresseurs ayant aboli sa conscience de sorte que la lettre de démission qu'il a rédigée le 6 novembre 2000 ne correspondait pas à une volonté libre et éclairée de démissionner ; (…) s'il est établi que l'employeur a été condamné pour avoir « autorisé » la délégation de ce salarié et exercer ainsi un contrôle a priori de celle-ci et commis un acte isolé de discrimination syndicale en affichant au début du mois de janvier 2000, une ancienne lettre d'avertissement du 23 décembre 1998 de Monsieur Sidi X... alors qu'il venait de recevoir le 3 janvier 2000 sa désignation par le syndicat CFTC comme délégué syndical, il n'en demeure pas moins que l'ensemble de ces faits situés dans le temps à la fin de l'année 1999 et en janvier 2000 ne présente aucun lien objectif avec l'état de santé de ce salarié qui souffrait de dépression depuis la fin de l'année 1997 et qui avait évoqué en décembre 1998 un stress dû à une absence de promotion ; que l'évocation par ce salarié de propos de l'employeur concernant l'éventualité de propos racistes dans l'entreprise non circonstanciés ou le refus d'utilisation du téléphone de l'entreprise pour appeler l'inspecteur du travail n'est pas significatif dans la mesure où l'inspecteur du travail dans les circonstances conflictuelles résultant de l'affichage de la délégation syndicale du 3 janvier 2000 a bien été appelé ce jour là et a permis par sa médiation cet affichage litigieux trois jours plus tard ; que presque un an plus tard, par courrier du 6 novembre 2000, reçu le 7 novembre 2000, Monsieur Sidi X... a présenté sa démission en ces termes : « Employé au service de votre entreprise je vous présente ma démission du poste que j'occupe en qualité de conducteur depuis le 10 avril 1995. Sachant que la durée de mon préavis est de un mois, je quitterai le service de votre entreprise le 6 décembre 2000. » ; que ce courrier a été précédé le 5 novembre 2000 de la démission de ce salarié de sa délégation syndicale puis le 6 novembre d'un abandon prématuré de son poste de travail et de sa volonté manifestée auprès de son chef d'équipe de démissionner ; que force est de constater que cette démission n'est pas intervenue sous la pression de l'employeur puisque le courrier a été rédigé après avoir quitté l'entreprise ; que cette démission a été suivie d'un arrêt de travail du 6 novembre au 7 décembre 2000 en maladie, l'employeur ayant convoqué celui-ci à un entretien préalable aux fins de sanction fixé au 9 novembre 2000 pour abandon de poste ; que Monsieur Sidi X... n'a sollicité une rétractation que le 20 novembre 2000 invoquant son état de santé ; que ce salarié qui invoque l'abolition de sa conscience et l'absence de volonté libre et éclairée au moment où il a envoyé sa démission, en raison de son traitement antidépresseur, ne justifie comme la preuve lui incombe, ni du moment où il a commencé effectivement à prendre ce médicament ni de la date de son interruption selon l'attestation du docteur Y..., étant observé que les effets indésirables et « le passage à l'acte » invoqué par ce médecin n'interviennent le plus souvent qu'en début de traitement selon le descriptif versé aux débats, qu'il n'est pas non plus établi à quelle date le traitement a été modifié et s'il est à l'origine de la rétractation tardive du 20 novembre 2000 ; qu'ainsi la démission du 6 novembre 2000 n'est pas équivoque et que l'employeur qui a refusé la rétractation du 20 novembre 2000, a pris acte de la démission du salarié à l'effet du 6 décembre 2000 à la fin du préavis ; que la décision de première instance doit être confirmée de ce chef ;

1) ALORS QUE la démission ne peut résulter que d'une volonté claire et non équivoque du salarié de rompre le contrat de travail ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que le salarié, en arrêt-maladie du 6 novembre au 7 décembre 2000, avait donné sa démission le 6 novembre 2000, après avoir abandonné prématurément son poste de travail, puis s'était rétracté le 20 novembre 2000, et qu'il produisait une attestation du 9 janvier 2001 du docteur Y..., psychiatre, indiquant avoir vu à quatre reprises Monsieur X... à compter du 19 octobre 2000 pour un syndrome dépressif réactionnel à des difficultés professionnelles ayant nécessité la prescription de Prozac ; qu'en considérant, cependant, que la démission litigieuse n'était pas équivoque, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les articles L. 122-4 et L. 122-5, devenus L. 1231-1 et L. 1237-1 du Code du travail ;

2) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la Cour d'appel a constaté que le salarié produisait au débat « un certificat médical du 19 octobre 2000 prescrivant le Prozac » ; que sur cette ordonnance figurait les mentions de la délivrance par la pharmacie LIEFOOGHE de deux boîtes de Prozac le 20 octobre 2000 ; qu'en retenant pourtant que le salarié ne justifiait pas du moment où il avait commencé à prendre son traitement antidépressif, la Cour d'appel a dénaturé les mentions claires et précises de l'ordonnance médicale du 19 octobre 2000 et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

3) ALORS QUE lorsque le salarié remet en cause sa démission, en raison de faits ou de manquements imputables à l'employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; qu'en l'espèce, le salarié faisait état de l'affichage en janvier 2000 dans les locaux de l'entreprise de l'avertissement qui lui avait été notifié le 23 décembre 1998, du contrôle préalable de ses heures de délégation, du refus de l'employeur de le laisser utiliser le téléphone de l'entreprise pour appeler l'inspecteur du travail et de propos racistes tenues à son encontre ; que, dès lors, en se bornant à retenir, pour considérer que la démission n'était pas équivoque, que ces faits ne présentaient aucune lien objectif avec l'état de santé du salarié ou qu'ils n'étaient pas significatifs, sans constater que le salarié ne justifiait pas d'un différend antérieur ou contemporain à sa décision l'ayant opposé à son employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base au regard des articles L. 122-4 et L. 122-5, devenus L. 1231-1 et L. 1237-1 du Code du travail.


4) ALORS QUE dans son jugement du 28 janvier 2003, le Tribunal correctionnel d'HAZEBROUK, après avoir constaté que Madame Z... était prévenue d'avoir de décembre 1999 à décembre 200(0) fait entrave au fonctionnement du comité d'entreprise de la société DESMARESCAUX devenue la société DSA EMBALLAGE, a retenu que l'infraction était constituée en ce qui concerne l'établissement de bons de délégation qui, lorsqu'ils l'étaient par Madame Z..., mentionnaient expressément une autorisation d'absence ; qu'ainsi, en affirmant que les faits incriminés étaient situés dans le temps à la fin de l'année 1999 et en janvier 2000, la Cour d'appel a dénaturé le jugement du 28 janvier 2003 et violé l'article 1134 du Code civil.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.