par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 10 novembre 2009, 08-43805
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Cour de cassation, chambre sociale
10 novembre 2009, 08-43.805

Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° s E 08-43. 805 à Z 08-43. 823 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 3 juin 2008), que la société Alcatel Submarine Networks (ASN) a connu une chute brutale de son activité au cours de l'année 2001 et a, au cours de l'année suivante et au début de l'année 2003, procédé à des licenciements de nombreux salariés pour des motifs personnels, semblables pour tous, et suivis de transactions ; que MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., F..., G..., H..., I..., J..., K..., L..., M..., N..., O..., P... et Mmes D... et E... ont ainsi été licenciés au cours de la période allant du 24 juin 2002 au 24 janvier 2003 ;

Sur le premier moyen, commun aux pourvois :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission des pourvois ;

Sur le second moyen, commun aux pourvois :

Attendu que les salariés font grief aux arrêts de les avoir condamnés à rembourser à la société ASN les sommes versées en exécution de transactions nulles, alors, selon le moyen :

1° / que l'adage Nemo auditur propriam suam turpitudinem allegans fait obstacle à la restitution après nullité d'un contrat pour immoralité de l'objet ou de la cause ; que les salariés ayant conclu au débouté de la demande de restitution de l'indemnité transactionnelle sur le fondement de l'adage Nemo auditur, en s'estimant saisie d'un moyen tiré seulement de la mauvaise foi de l'employeur, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige, et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2° / qu'a une cause immorale comme contraire aux bonnes moeurs inhérentes à l'ordre public de protection sociale, la transaction destinée à dissimuler la fraude de l'employeur qui a éludé délibérément les dispositions impératives de la loi sur les licenciements économiques, et a privé ainsi les salariés des mesures prévues par cette loi destinées à favoriser leur reclassement, et à soutenir la création éventuelle d'activités nouvelles, ainsi que toute action de formation ; qu'en condamnant les salariés à rembourser à la société ASN les indemnités versées en exécution des protocoles transactionnels nuls, la cour d'appel a violé l'adage Nemo auditur propriam suam turpitudinem allegans ;

Mais attendu que le caractère frauduleux de licenciements notifiés pour motifs personnels alors que la cause réelle en est économique affecte la validité des transactions ensuite conclues ; que, toutefois, faute de procéder d'une cause immorale, il ne fait pas obstacle à la restitution par les salariés des sommes perçues en exécution des transactions annulées ; que c'est dès lors sans méconnaître l'objet du litige, ni violer l'adage invoqué par le moyen que la cour d'appel, retenant le caractère frauduleux des licenciements et la mauvaise foi de l'employeur dans les négociations qui les ont suivis a, après avoir prononcé la nullité des transactions, ordonné en conséquence la restitution par les salariés des sommes reçues de l'employeur en exécution de ces dernières ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne les demandeurs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille neuf.



MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens communs produits aux pourvois n° s E 08 43. 805 à Z 08 43. 823 par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., F..., G..., H..., I..., J..., K..., L..., M..., N..., O..., P..., Mmes D... et E... et l'union locale CGT de Chatou

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné la société ASN à indemniser les salariés du préjudice résultant de la perte de salaires par eux subie entre le terme de leur préavis et leur réintégration dans l'entreprise et, renvoyant les parties à faire leurs comptes dans le délai de trois mois de la réintégration des salariés dans l'entreprise, d'AVOIR dit qu'il devra être déduit du montant des salaires nets qui devaient échoir pendant la période ainsi fixée le montant des revenus professionnels ou de remplacement nets perçus par les salariés au cours de la même période ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande en paiement de salaires présentée par le salarié au titre de la période écoulée entre la rupture et sa réintégration, qu'en l'absence de prestation de travail et partant d'exécution du contrat de travail, celui-ci fut suspendu ; que le salarié qui ne peut revendiquer des salaires en l'absence de contrepartie, comme débattu à l'audience, a subi un préjudice qui doit être indemnisé dans la limite du montant net dont il a été privé, sauf à déduire les revenus nets perçus au titre d'une autre activité salariale et / ou les revenus de remplacement pendant la période ;

ALORS QUE sauf à reporter sur des tiers la charge d'une partie de l'indemnisation du préjudice créé par l'employeur auteur d'un licenciement nul prononcé en fraude des dispositions impératives relatives aux licenciements économiques, les salariés doivent bénéficier, en cas de réintégration dans l'entreprise, d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'ils auraient dû percevoir entre leur éviction et leur réintégration, peu important qu'ils aient ou non reçu des salaires ou un revenu de remplacement pendant cette période ; qu'en décidant qu'il devrait être déduit du montant des salaires nets qui devaient échoir aux salariés réintégrés entre le terme de leur préavis et leur réintégration, le montant des revenus professionnels ou de remplacement nets perçus par eux au cours de la même période ; la cour d'appel a violé l'article L. 321-4-1 (codifié L. 1235-10) du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné les salariés à rembourser à la société ASN les sommes versées en exécution de transactions nulles ;

AUX MOTIFS QUE la nullité de la transaction emporte nullité de l'indemnité transactionnelle servie par la société ASN ; que cette indemnité doit être restituée, le moyen tiré de la mauvaise foi de l'employeur ne pouvant pour ce motif prospérer ;

1°) ALORS QUE l'adage Nemo auditur propriam turpitudinem allegans fait obstacle à la restitution après nullité d'un contrat pour immoralité de l'objet ou de la cause ; que les salariés ayant conclu au débouté de la demande de restitution de l'indemnité transactionnelle sur le fondement de l'adage Nemo auditur, en s'estimant saisie d'un moyen tiré seulement de la mauvaise foi de l'employeur, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige, et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'a une cause immorale comme contraire aux bonnes moeurs inhérentes à l'ordre public de protection sociale, la transaction destinée à dissimuler la fraude de l'employeur qui a éludé délibérément les dispositions impératives de la loi sur les licenciements économiques, et a privé ainsi les salariés des mesures prévues par cette loi destinées à favoriser leur reclassement, et à soutenir la création éventuelle d'activités nouvelles, ainsi que toute action de formation ; qu'en condamnant les salariés à rembourser à la société ASN les indemnités versées en exécution des protocoles transactionnels nuls, la cour d'appel a violé l'adage Nemo auditur propriam turpitudinem allegans.



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Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement


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