par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 17 juin 2009, 07-21718
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
17 juin 2009, 07-21.718

Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Quotité disponible
Testament




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Margot X... et M. Karl Y..., de nationalité allemande et domiciliés en Allemagne, ont eu cinq enfants : quatre filles Elisabeth, Margot, Rosemarie, Johanna Michaela, et un fils, Hartmut ; qu'ils ont acquis le 7 janvier 1966 un immeuble à La Roque-sur-Pernes (Vaucluse) ; que par un codicille du 12 août 1967 joint à son testament rédigé le 6 avril 1963, Margot X..., décédée le 28 octobre 1969, attribuait à chacun de ses enfants l'ensemble des biens lui appartenant, sauf l'immeuble édifié en France, spécifiant que " La maison de Provence doit appartenir en propriété à Elisabeth et Hartmut, les autres frères et soeurs ont le droit d'habitation " ; que par acte notarié passé en Allemagne le 3 décembre 1987, Karl Y... faisait donation à M. Hartmut Y... de la moitié indivise de l'immeuble situé en France ; qu'avant son décès intervenu en 1998, il avait renoncé à tout droit dans la succession de son épouse ; que le 30 janvier 1996, M. Hartmut Y... et sa soeur, Mme Johanna Michaela A..., ont conclu une transaction devant le juge du tribunal de grande instance de Bonn, aux termes de laquelle le droit d'habitation conféré à Michaela s'exercerait suivant des modalités prévues dans la transaction, et expirerait le 24 septembre 1999 ;

Attendu que le 3 avril 2001, Mmes Elisabeth Y..., Margot Y..., épouse Z..., Rosemarie Y..., épouse B..., et Johanna Michaela Y..., épouse A..., ont assigné leur frère, M. Hartmut Y... devant le tribunal de grande instance de Carpentras au visa des articles 815 et suivants, 815-9, 843, alinéa 1, 860, 931, 970, 1339, 1340 du code civil ;

Sur les premier et troisième moyens :

Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à justifier de l'admission d'un pourvoi ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. Hartmut Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Nîmes, 24 février 2006) d'avoir donné mission à l'expert de dire si les libéralités consenties par Margot X... et Karl Y... ont dépassé la quotité dont chacun d'eux pouvait disposer sur sa moitié indivise de l'immeuble, alors, selon le moyen, qu'en vertu de l'article 3 du code civil, dans une succession internationale, on doit tenir compte pour apprécier si la réserve héréditaire est atteinte, des avantages obtenus par le réservataire à l'étranger ; qu'en décidant en l'espèce que M. Hartmut Y... ne peut alléguer que les droits réservataires de ses soeurs n'ont pas été affectés par lesdites libéralités, compte tenu des biens qu'elles ont reçus dans la succession ouverte en Allemagne, la cour d'appel a violé l'article 3 du code civil et 1 du protocole n° 1 annexé à la Convention européenne des droits de l'homme ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant justement retenu que l'objet du litige était limité aux droits successoraux des parties sur l'immeuble situé en France et que la loi internationalement compétente était la loi française, c'est selon cette loi que devait être déterminé le montant de la réserve héréditaire pour l'immeuble situé en France ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille neuf.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP DELAPORTE, BRIARD et TRICHET, avocat aux Conseils pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que chacun des cinq héritiers Y... avait droit à un dixième du droit d'habitation sur l'immeuble de La Roque sur Pernes,

Aux motifs que « le fait que Madame Johanna-Michaela Y... ait pu conclure avec son frère devant le LANDGERICHT (T. G. I.) de BONN (Allemagne) en 1996 une transaction relativement à son droit d'habitation d'une part, est inopposable à ses soeurs également titulaires d'un tel droit et d'autre part, ne la prive pas de son droit d'agir devant les juridictions françaises en sa qualité d'héritière réservataire pour solliciter l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des successions lesquelles permettront notamment de déterminer la quotité disponible et le montant d'éventuelles indemnités pour libéralités excédentaires » (cf. arrêt, p. 6) ; et que « Sur les droits successoraux, le Tribunal en a fait une appréciation erronée qu'il y a lieu de corriger ; que les droits respectifs des cinq héritiers réservataires sur l'immeuble litigieux sont aux termes des actes les suivants :- la moitié de la pleine propriété pour Monsieur Hartmut Y...,- un quart de la pleine propriété amputée du droit d'habitation pour Monsieur Hartmut Y...,- un quart de la pleine propriété amputée du droit d'habitation pour Madame Elisabeth-Gabriele Y...,- un dixième du droit d'habitation pour chacun des cinq héritiers ; que c'est par rapport à la loi successorale française qu'il doit être déterminé si les libéralités consenties par Madame Margot X... et par Monsieur Karl Y..., chacun sur sa demi-part indivise de l'immeuble litigieux, excèdent la quotité dont il pouvait disposer ; que la Cour relève que les appelantes renoncent à solliciter le rapport de ce bien à la succession de leurs parents, eu égard aux stipulations expresses des libéralités consenties par ces derniers, testament ou donation ; mais que reste en suspens la question d'une éventuelle réduction, que Monsieur Hartmut Y... ne peut éluder en se contentant d'alléguer que les droits réservataires de ses soeurs n'ont pas été substantiellement affectés par les libéralités qui lui ont été consenties ; que la demande d'évaluation par expert de l'immeuble litigieux qui permettra, le cas échéant, de déterminer le montant des soultes dues aux appelantes se justifie donc pleinement ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a désigner Monsieur C...avec pour mission de donner son avis sur la valeur de l'immeuble litigieux ; que la mission de l'expert judiciaire mérite cependant d'être complétée ou modifiée ; 1°- que celui-ci devra évaluer pécuniairement les parts successorales revenant à Monsieur Hartmut Y... et à Madame Elisabeth-Gabriele Y... par l'effet des libéralités consenties par leurs parents, soit respectivement 3 / 4 en pleine propriété pour Monsieur Hartmut Y... et 1 / 4 en pleine propriété pour Madame Elisabeth-Gabriel Y..., en tenant compte dans cette évaluation de la diminution de la valeur du bien résultant de l'attribution aux autres héritiers réservataires d'un droit d'habitation (et non d'usufruit) portant sur trois dixièmes de l'immeuble (1 / 10ème x 3) ; 2°- que concernant l'indemnité d'occupation réclamée par les appelante, Monsieur Hartmut Y... ne conteste pas avoir eu la jouissance exclusive de la maison de la La Roque sur Pernes depuis le 16 avril 1998, date du décès de son père, alors qu'il ne dispose actuellement sur ce bien que de droits indivis ; qu'il est donc redevable d'une indemnité de jouissance. Mais l'unique créancière de cette indemnité est Madame Elisabeth-Gabriele Y..., copropréitaire indivise de l'immeuble et le montant de sa créance est nécessairement limitée par l'assiette de son droit de propriété ; que Mesdames Margot-Ursula Y..., Rosemarie Y..., Johanna-Michaela Y... n'établissent ni n'allèguent avoir revendiqué leur droit d'habitation depuis le décès de leur père. La première y a même expressément renoncé aux termes d'une transaction à la barre du LANDGERICHT (TGI) de BONNE. Elles ne peuvent donc prétendre à aucune indemnité de ce chef à l'encontre de Monsieur Hartmut Y... (ni d'ailleurs de Madame Elisabeth-Gabriele Y...) ; 3°- que l'expert judiciaire étant tenu, conformément à l'article 868 du Code civil, de calculer l'indemnité éventuellement due aux réservataires par le ou les bénéficiaire (s) des libéralités d'après la valeur du bien à l'époque du partage et leur état au jour où les libéralités ont pris effet, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande indemnitaire de Monsieur Hartmut Y..., lequel ne fournit d'ailleurs à ce titre aucun justificatif des dépenses qu'il dit avoir engagées pour la conservation ou l'amélioration de l'immeuble ; que seule au surplus Madame Elisabeth-Gabriele Y..., coïndivisaire à hauteur d'un quart en pleine propriété (sauf le droit d'habitation reconnu à ses trois soeurs sur sa part coïndivse), pourrait être redevable de cette indemnité » (cf. arrêt, p. 7 et 8),

Alors, qu'en vertu de l'article 2052 du Code civil, les transactions ont entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort ; que dès lors en l'espèce, en reconnaissant en 2006 à Mme Michaela A... un droit d'habitation sur la propriété litigieuse, sans rechercher comme elle y était invitée, si elle n'avait pas convenu avec son frère que son droit d'habitation expirait en 1999, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 2052 du Code civil.


DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt d'avoir donné mission à l'expert, de dire si les libéralités consenties par Mme X... et par M. Y... ont dépassé la quotité dont chacun d'eux pouvait disposer sur sa moitié indivise de l'immeuble,

Aux motifs que « c'est par rapport à la loi successorale française qu'il doit être déterminé si les libéralités consenties par Madame Margot X... et par Monsieur Karl Y..., chacun sur sa demi-part indivise de l'immeuble litigieux excèdent la quotité dont il pouvait disposer ; que la Cour relève que les appelantes renoncent à solliciter le rapport de ce bien à la succession de leurs parents, eu égard aux stipulations expresses des libéralités consenties par ces derniers, testament ou donation ; mais que reste en suspens la question d'une éventuelle réduction, que Monsieur Hartmut Y... ne peut éluder en se contentant d'alléguer que les droits réservataires de ses soeurs n'ont pas été substantiellement affectés par les libéralités qui lui ont été consenties ; que la demande d'évaluation par expert de l'immeuble litigieux qui permettra, le cas échéant, de déterminer le montant des soultes dues aux appelantes se justifie donc pleinement » (cf. arrêt, p. 7).

Alors qu'en vertu de l'article 3 du Code civil, dans une succession internationale, on doit tenir compte pour apprécier si la réserve héréditaire est atteinte, des avantages obtenus par le réservataire à l'étranger ; qu'en décidant en l'espèce que M. Hartmut Y... ne peut alléguer que les droits réservataires de ses soeurs n'ont pas été affectés par lesdites libéralités, compte tenu des biens qu'elles ont reçus dans la succession ouverte en Allemagne, la Cour d'appel a violé l'article 3 du Code civil et 1 du protocole n° 1 annexé à la Convention européenne des droits de l'homme.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt d'avoir donné mission à l'expert de calculer la valeur de l'immeuble au jour de l'évaluation dans son état au jour de la donation consentie par M. Karl Y... à M. Hartmut Y..., soit le 3 décembre 1987,

Aux motifs que l'expert judiciaire est tenu, conformément à l'article 868 du Code civil, de calculer l'indemnité éventuellement due aux réservataires par le ou les bénéficiaire (s) des libéralités d'après la valeur du bien à l'époque du partage et leur état au jour où les libéralités ont pris effet,

Alors que seule la moitié dudit immeuble a été donnée par M. Karl Y... à M. Hartmut Y... le 3 décembre 1987, alors que l'autre moitié a été léguée à M. Hartmut Y... et à sa soeur, Mme Elisabeth Y... par leur mère, décédée le 28 octobre 1969 ; qu'en décidant que l'expert devait évaluer le bien dans son état en 1987, la Cour d'appel a violé l'article 868 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006.



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Quotité disponible
Testament


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 11/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.