par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 8 avril 2009, 07-21496
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
8 avril 2009, 07-21.496

Cette décision est visée dans la définition :
Accession




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le premier moyen :

Vu l'article 1er de la loi du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière ;

Attendu qu'est qualifié de location-accession et soumis aux dispositions de la présente loi le contrat par lequel un vendeur s'engage envers un accédant à lui transférer, par la manifestation ultérieure de sa volonté exprimée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et après une période de jouissance à titre onéreux, la propriété de tout ou partie d'un immeuble moyennant le paiement fractionné ou différé du prix de vente et le versement d'une redevance jusqu'à la date de levée de l'option ; que la redevance est la contrepartie du droit de l'accédant à la jouissance du logement et de son droit personnel au transfert de propriété du bien ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 11 janvier 2007), que les époux X... ont, par un premier acte sous seing privé du 6 août 1997, conclu avec les époux Y... une promesse de vente d'un immeuble, pour un prix de 180 000 francs payable en 60 mensualités de 2 500 francs, la première en septembre 1997, le transfert de propriété devant s'opérer à l'issue du soixantième mois, date où le solde du prix convenu, soit 30 000 francs, serait payé ; que par un second acte sous seing privé conclu le même jour, ils ont donné l'immeuble à bail aux époux Y... moyennant un loyer de 2 500 francs, les deux actes précisant qu'il s'agissait d'une "location avec promesse de vente" ; qu'en 2003, les époux Y... ont assigné les époux X... en réalisation forcée de la vente ;

Attendu que pour débouter les époux Y... de leur demande et prononcer la nullité du premier des deux actes, l'arrêt retient qu'il résulte tant des mentions de la promesse de vente que de celles du contrat de location que les deux parties s'engageaient à conclure la vente à l'issue de la période de cinq ans de location avec paiement de mensualités ; que si le contrat encourt la nullité de ce fait, en vertu de l'article 3 de la loi, cette nullité, alors que la loi exige l'engagement ferme du vendeur, mais interdit celui du candidat à l'accession, est destinée à protéger le candidat acquéreur, est donc relative et ne peut être demandée que par ce dernier ; que, toutefois, l'obligation de conclure le contrat de location-accession par acte authentique constitue une règle d'ordre public dont le non-respect crée une cause de nullité absolue, invoquable par toute partie ;

Qu'en statuant ainsi, alors que ne peut constituer une location-accession le contrat qui ne prévoit pas d'option d'achat au profit de l'accédant mais qui comporte des obligations réciproques de vendre et d'acheter, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 janvier 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne les époux X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des époux X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit avril deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thomas-Raquin et Benabent, avocat aux Conseils pour les époux Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé «la nullité du contrat de location-accession conclu le 6 août 1997», et en conséquence condamné Monsieur et Madame Y... à payer à Monsieur et Madame X... un arriéré de mensualités de 648,78 ainsi qu'une indemnité d'occupation de 300 par mois à compter du 1er septembre 2002, et ordonné l'expulsion des époux Y... ;

AUX MOTIFS QUE «aux termes de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1984, «est qualifié de location-accession et soumis aux dispositions de la présente loi le contrat par lequel un vendeur s'engage envers un accédant à lui transférer, par la manifestation ultérieure de la volonté exprimée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et après une période de jouissance à titre onéreux, la propriété de tout ou partie d'un immeuble moyennant le paiement fractionné ou différé du prix de vente et le versement d'une redevance jusqu'à la date de la levée de l'option. La redevance est la contrepartie du droit de l'accédant à la jouissance du logement et de son droit personnel au transfert de propriété du bien» ; qu'en l'espèce il résulte tant des mentions de la promesse de vente que de celle du contrat de location que les deux parties s'engageaient à conclure la vente à l'issue de la période de cinq ans de location avec paiement de mensualités ; que si le contrat encourt la nullité de ce fait, en vertu de l'article 3 de la loi, cette nullité, alors que la loi exige l'engagement ferme du vendeur, mais interdit celui du candidat à l'accession, est destinée à protéger le candidat acquéreur, est donc relative et ne peut être demandé que par ce dernier ; que toutefois l'obligation de conclure le contrat de location-accession par acte authentique constitue une règle d'ordre public dont le non-respect crée une cause de nullité absolue, invoquable par toute partie ; qu'il y a donc lieu de constater la nullité du contrat de location-accession ; que le rejet de la prétention de Monsieur et Madame Y... ne peut qu'être confirmé ; que la somme demandée au titre des arriérés de mensualités prévues par le contrat n'est pas contestée, et que le jugement, sur ce point encore, ne peut qu'être confirmé ; que le bail a été conclu pour cinq ans ; que depuis son expiration, les époux Y... n'ont rien payé et ne revendiquent pas la poursuite du bail ; que sur le montant de l'indemnité d'occupation, le montant des échéances mensuelles ne comprenait que des amortissements du prix de vente, dès lors que ce dernier fut fixé à 180.000 Frs, et que les époux Y... devaient payer 60 mensualités de 2.500 Frs outre le solde de 30.000 Frs à la fin de la période de location ; qu'il convient d'apprécier le montant de l'indemnité d'occupation, que le premier juge ne pouvait certes pas fixer à un montant précis en l'absence de demande chiffrée, et compte tenu des éléments du dossier à 300 par mois à compter du 1er septembre 2002»;

ALORS QU'il résulte de l'article 1 alinéa 1 de la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 que les dispositions de cette loi ne sont applicables qu'aux contrats «par lesquels un vendeur s'engage envers un accédant à lui transférer, par la manifestation ultérieure de sa volonté …. la propriété de tout ou partie d'un immeuble» ; qu'il résulte de ce texte que la loi de 1984 n'est pas applicable aux contrats prévoyant un engagement ferme des deux parties de conclure la vente ; qu'en l'espèce, il résulte du contrat de location de cinq ans du 6 août 1997 que «les parties s'engagent alors à conclure cette vente» ; que ce contrat ne prévoyait aucunement une option d'achat au profit des acquéreurs mais une promesse synallagmatique de vente dont la validité est régie par les règles de droit commun ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a expressément retenu que «les deux parties s'engageaient à conclure la vente» ; qu'en décidant néanmoins que leurs relations étaient régies par la loi du 12 juillet 1984 et en retenant qu'aux termes de l'article 4 de ce texte, le «contrat de location-accession» du 6 août 1997 était nul faute d'avoir été conclu sous la forme d'un acte authentique, la Cour d‘appel a violé les articles 1 et 4 de la loi du 12 juillet 1984 ainsi que l'article 1589 du Code civil ;

SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, après avoir prononcé «la nullité du contrat de location-accession conclu le 6 août 1997», condamné Monsieur et Madame Y... à payer à Monsieur et Madame X... un arriéré de mensualités de 648,78 , sans ordonner la restitution aux époux Y... de la part du prix de vente qu'ils avaient d'ores et déjà payé en exécution du contrat ainsi annulé ;

AUX MOTIFS QU' «il y a donc lieu de constater la nullité du contrat de location-accession ; que le rejet de la prétention de Monsieur et Madame Y... ne peut qu'être confirmé ; que la somme demandée au titre des arriérés de mensualités prévues par le contrat n'est pas contestée, et que le jugement, sur ce point encore, ne peut qu'être confirmé ; que le bail a été conclu pour cinq ans ; que depuis son expiration, les époux Y... n'ont rien payé et ne revendiquent pas la poursuite du bail ; que sur le montant de l'indemnité d'occupation, le montant des échéances mensuelles ne comprenait que des amortissements du prix de vente, dès lors que ce dernier fut fixé à 180.000 Frs, et que les époux Y... devaient payer 60 mensualités de 2.500 Frs outre le solde de 30.000 Frs à la fin de la période de location ; qu'il convient d'apprécier le montant de l'indemnité d'occupation, que le premier juge ne pouvait certes pas fixer à un montant précis en l'absence de demande chiffrée, et compte tenu des éléments du dossier à 300 par mois à compter du 1er septembre 2002» ;

ALORS QUE, le prononcé de la nullité d'un contrat emporte son effacement rétroactif et a pour effet de remettre les parties dans leur situation initiale ; qu'à la suite de l'annulation d'un contrat de vente, le vendeur doit donc restituer à l'acquéreur le prix de vente ou les acomptes qu'il a perçus ; qu'en l'espèce, après avoir constaté la nullité du contrat de location-accession, la Cour d'appel a relevé que «le montant des échéances mensuelles ne comprenait que des amortissements du prix de vente» (arrêt page 4, § 6) ; qu'en condamnant néanmoins les époux Y... au versement d'un arriéré de mensualité, et en s'abstenant d'ordonner la restitution de la fraction du prix de vente déjà versé, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qu'imposaient, au regard de ses propres constatations, l'annulation du contrat et a par la même violé les articles 1304 et suivants du Code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Accession


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 11/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.