par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 9 juillet 2014, 13-22562
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
9 juillet 2014, 13-22.562

Cette décision est visée dans la définition :
Propriété commerciale




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 145-39 du code de commerce ;

Attendu que par dérogation à l'article L. 145-38, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire ;

Attendu selon l'arrêt attaqué (Versailles, 21 mai 2013), que la société Réseau de transport d'électricité (RTE) est locataire de divers locaux commerciaux appartenant à la société civile immobilière 1 Terrasse Bellini selon bail du 17 décembre 2003 assorti d'une clause d'échelle mobile ; qu'à la suite d'une modification de la surface totale des lieux loués, les parties ont signé le 19 mars 2007 un avenant au bail mentionnant un prix du loyer principal annuel hors taxes, hors charges et hors indexation à compter du 1er janvier 2007 de 8 141 844,91 euros ; qu' invoquant une augmentation de loyer de plus du quart par le jeu de la clause d'échelle mobile, la société RTE a sollicité sa révision ;

Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que l'avenant constitue le nouveau prix fixé contractuellement au sens de l'article L. 145-39 du code de commerce et que par application mathématique de l'indexation, le loyer, au 1er janvier 2007, s'est trouvé fixé à la somme de 9 252 712,27 euros, que la variation du loyer sur cette période est de 14,34 %, de sorte que la demande de révision ne saurait prospérer ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, pour déterminer la variation d'un quart, il convient de comparer au dernier prix fixé par l'accord des parties, hors indexation, le prix du loyer tel qu'obtenu par le jeu de la clause d'échelle mobile, la cour d'appel, qui a retenu que le loyer indexé réclamé à la date de la demande de révision devait être comparé au prix du loyer calculé au 1er janvier 2007 en fonction de la variation de l'indice, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la SCI 1 Terrasse Bellini aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI 1 Terrasse Bellini ; la condamne à payer à la société Réseau de transport d'électricité la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Réseau de transport d'électricité.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de révision du loyer formée par la société RTE contre la SCI 1 Terrasse Bellini,

AUX MOTIFS QUE, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il convient de rappeler que, suivant acte sous seing privé du 17 décembre 2003, la SCI 1 Terrasse Bellini a consenti à la société RTE EDF Transport, actuellement dénommée RTE Réseau de transport d'électricité, un bail portant sur des locaux à usage de bureaux dans un immeuble dénommé Tour Initiale situé à Puteaux, 92, 1 Terrasse Bellini, pour une durée de douze ans, commençant à courir le 1er janvier 2004, et moyennant un loyer annuel en principal de 6.831.201 euros ; que, suivant acte sous seing privé du 16 juin 2005, les parties ont régularisé un avenant prenant acte de l'extension de l'assiette du bail, par adjonction de divers locaux dans l'immeuble ; que, par avenant du 19 mars 2007, les parties ont retiré 3 parkings de l'assiette du bail ; que le bail comporte une clause d'échelle mobile, selon laquelle le loyer varie chaque année, automatiquement, à la date de prise d'effet du bail, sans qu'il soit besoin de notification préalable, proportionnellement à la variation de l'indice trimestriel du coût de la construction publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) à la condition que ladite variation soit à la hausse, l'indice de base ou de référence étant mentionné aux conditions particulières ; que les conditions particulières prévoient que le loyer sera indexé le 1er janvier de chaque année, mais que toutefois, pour la première année, le loyer sera indexé le 1er octobre 2004, sur la base du dernier indice connu ; que, par acte d'huissier du 18 décembre 2009, la société RTE a notifié à son bailleur une demande de révision du loyer sur le fondement des dispositions de l'article L. 145-39 du code de commerce ; qu'elle a notifié un mémoire le 11 mai 2010 ; que c'est dans ces circonstances que la société RTE a saisi le juge des loyers commerciaux de sa demande de révision du loyer ; que, sur la demande de révision du loyer, l'article L. 145-39 du code de commerce dispose qu'en outre, et par dérogation à l'article L. 145-38, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement, ou par décision judiciaire ; que la société RTE fait valoir que, compte tenu des modifications de surfaces, le montant du loyer s'élevait au 1er janvier 2007, date d'effet de l'avenant n° 2, à la somme de 8.141.844 euros, et qu'il s'élève au jour de la demande de révision, à la somme de 10.570.360 euros ; qu'elle soutient qu'à aucun moment, à l'occasion de la conclusion des avenants n° 1 et n° 2, les parties n'ont entendu remettre en cause les modalités de calcul du loyer, ni fixer ou définir un nouveau loyer ; qu'elle précise que le loyer non indexé au m2 est identique depuis la date de prise d'effet du bail ; qu'elle ajoute que les parties n'ont pas, lors de l'avenant n° 2, fixé un nouveau loyer tenant compte de l'indexation, mais uniquement pris en considération le retrait de parkings ; mais que, l'avenant n° 2 constitue bien un nouveau prix fixé contractuellement au sens de l'article L. 145-39 du code de commerce, peu important que cette fixation ait résulté de la modification de la consistance des lieux loués ; que dès lors, c'est ce nouveau loyer qui doit servir de base pour vérifier s'il y a eu ou non variation de plus de 25% au moment de la demande de révision ; que du fait de la diminution du nombre de parkings et par application mathématique du loyer indexé, le loyer s'est trouvé ramené à un total de 9.252.712 euros ; que sur la période considérée, du 1er janvier 2007 au 18 décembre 2009, le loyer fixé a été indexé deux fois, le 1er janvier 2008, avec comme indice de référence l'indice du 2ème trimestre 2006, (1366), le 1er janvier 2009, avec comme indice de comparaison, celui du 2ème trimestre 2008 (1562) ; qu'ainsi, force est de constater que l'indice a varié sur cette période de 14,34%, de sorte que la variation ne peut excéder 25% et que la demande de révision du 18 décembre 2009 ne saurait prospérer ; que, par voie de conséquence, infirmant la décision déférée, la société RTE sera déboutée de l'ensemble de ses prétentions ;
1°/ ALORS QU' il résulte de l'article L. 145-39 du code de commerce que, dans le cas où le bail commercial est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision du loyer peut être demandée, lorsque celui-ci, par le jeu de cette clause, se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart, par rapport au prix précédemment fixé contractuellement, ou par décision de justice ; que, lorsque la consistance des lieux loués est amenée à varier en cours de bail et que le loyer est fixé à l'unité, le nouveau loyer global, qui découle automatiquement de la nouvelle consistance des lieux loués, sans variation du loyer unitaire, ne constitue pas un nouveau prix fixé contractuellement au sens du texte précité ; qu'en retenant néanmoins, pour dire n'y avoir lieu à révision du loyer, que l'avenant n° 2 du 19 mars 2007 constituait bien un nouveau prix fixé contractuellement, peu important que cette fixation ait résulté de la modification de la consistance des lieux loués, la cour d'appel a violé l'article L. 145-39 du code de commerce ;
2°/ ALORS QU' en toute hypothèse, la fixation d'un nouveau loyer global en suite d'une modification de la consistance des lieux loués imposée par l'autorité administrative ne constitue pas, en l'absence d'accord entre les parties, un nouveau prix fixé contractuellement au sens de l'article L. 145-39 du code de commerce ; qu'en décidant que l'avenant n° 2 du 19 mars 2007 avait fixé un nouveau prix contractuel, bien que les parties n'aient fait que prendre acte du retrait de l'assiette du bail de 3 parkings VIP dont la restitution avait été prescrite par la souscommission départementale pour la sécurité, contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public et les immeubles de grande hauteur, la cour d'appel a violé le texte précité, ensemble les articles 1101 et 1134 du code civil ;

3°/ ALORS QU' en toute hypothèse, l'article 3 de l'avenant n° 2 du 19 mars 2007 stipulait que « les parties conviennent d'insérer un nouvel article 4.1.4 à l'article 4.1 "Loyer" du chapitre I Conditions particulières du bail comme suit : "4.1.4. Compte tenu de la restitution des trois emplacements de parkings VIP, le loyer principal annuel hors taxes, hors charges et hors indexation s'élève à la somme de 8.141.844,91 euros (...)" » ; qu'en retenant que l'avenant n° 2 fixait un nouveau prix contractuel qui devait servir de base pour le calcul de la variation, et que ce loyer s'élevait à la somme de 9.252.712,27 euros, la cour d'appel a dénaturé les stipulations claires et précises de l'article 3 de l'avenant n° 2 et violé l'article 1134 du code civil ;
4°/ ALORS QU' en toute hypothèse, pour déterminer l'augmentation du loyer par le jeu de la clause d'échelle mobile, il convient de comparer le loyer indexé au loyer contractuel initial ; que le loyer contractuel initial s'entend nécessairement hors indexation, sauf à ce que les parties aient, d'un commun accord, incorporé le loyer indexé dans le champ contractuel ; qu'en l'occurrence, l'avenant n° 2 du 19 mars 2007 a modifié la consistance des lieux loués et stipulé en conséquence, à loyer unitaire constant, un loyer global, hors indexation, d'un montant de 8.141.844,91 euros hors taxes et hors charges ; que le loyer contractuel unitaire n'a pas été modifié pour y intégrer le jeu de l'indexation ; qu'en retenant cependant, pour affirmer qu'il n'y avait pas lieu à révision, que le loyer indexé calculé au 18 décembre 2009 devait être comparé, non au loyer stipulé par les parties, mais au loyer indexé calculé au 1er janvier 2007, la cour d'appel a violé l'article L. 145-39 du code de commerce.



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Cette décision est visée dans la définition :
Propriété commerciale


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.