par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 14 décembre 2010, 10-10792
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Cour de cassation, chambre commerciale
14 décembre 2010, 10-10.792

Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Dessaisissement
Sauvegarde des entreprises




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article L. 641-9 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, ensemble l'article 126 du code de procédure civile ;

Attendu que la règle du dessaisissement, qui résulte du premier de ces textes, étant édictée dans l'intérêt des créanciers, seul le liquidateur judiciaire peut s'en prévaloir ; que tel n'est pas le cas lorsque le débiteur ayant formé seul une demande en paiement d'une créance, le liquidateur intervient volontairement pour se substituer à lui ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Morice équipement (société Morice), mise en redressement judiciaire le 4 avril 2006 puis en liquidation le 22 septembre 2006, a présenté seule, le 5 juin 2007, au président d'un tribunal de commerce, une requête en injonction de payer à l'encontre de la société Equip'hôtel 66 (société Equip'hôtel), qui a formé opposition à l'ordonnance accueillant la demande ; que, sur ce recours, le tribunal a annulé la requête et ses actes de signification, et déclaré irrecevable la demande en paiement de la société Morice ;

Attendu que, pour confirmer cette décision, l'arrêt retient que la requête en injonction de payer a été présentée par la société débitrice seule, qui a également signifié l'ordonnance d'injonction de payer, ce qui constitue une irrégularité de fond que l'intervention du liquidateur judiciaire est inefficace à régulariser ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le liquidateur judiciaire était intervenu devant le tribunal saisi de l'opposition de la société Equip'hôtel puis avait interjeté appel du jugement statuant sur ce recours, régularisant ainsi la situation donnant lieu à fin de non-recevoir pour défaut de qualité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;

Condamne la société Equip'hôtel 66 aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la SCP Belat et Desprat, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Morice équipement, la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société Morice équipement et la SCP Belat & Desprat, ès qualités.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR reçu en la forme et au fond l'opposition formée par la société Equip'Hôtel 66 et D'AVOIR en conséquence dit irrecevables les prétentions formulées par la société Morice Equipement et D'AVOIR en conséquence déclaré nulles et de nul effet la requête en injonction de payer en date du 5 juin 2007, l'ordonnance en date du 19 juin 2007 et les significations en date des 25 juillet 2007 et 24 octobre 2007 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE la société Morice Equipement est en liquidation judiciaire depuis le 22 septembre 2006; la société Morice Equipement avec son mandataire liquidateur soutient avoir régulièrement engagé la procédure d'injonction de payer en produisant à la Cour une requête en injonction de payer présentée au Président du Tribunal de commerce de Perpignan le 5 juin 2007 mais qui est dépourvue de toute valeur probante parce qu'elle ne mentionne aucun enregistrement par le greffe et aussi parce qu'elle est faite au nom du liquidateur, la SCP Belat et Desprat, alors que la société Morice Equipement n'était qu'en redressement judiciaire et aurait ainsi dû être représentée par son administrateur; la société Equip'Hôtel 66 présente pour sa part une copie certifiée conforme par le greffier de la requête du 5 juin 2007 formulée au seul nom de la société Morice Equipement et suivie de l'ordonnance en date du 19 juin 2007 rendue par le Président du Tribunal et signée par le greffier ; en admettant qu'il y ait eu oubli du représentant de ia société Morice Equipement par le greffe, il convient de constater qu'en tout état de cause, ce n'est pas le nom du liquidateur qui aurait dû apparaître sur la requête mais celui de l'administrateur; le fait par la société Morice Equipement de dire que la procédure a été régularisée par l'intervention de son liquidateur en cause d'appel montre le peu de crédit qu'elle accorde elle-même à la validité de sa requête initiale; le Tribunal a justement dit que la requête en injonction de payer présentée par une personne morale qui n'aurait plus la capacité d'ester en justice était nulle et que les actes subséquents l'étaient également; le défaut de capacité constitue au regard de l'article 117 du Code de procédure civile une irrégularité de fond affectant la validité même de l'acte ; toutes les significations subséquentes sont également nulles; l'intervention du liquidateur en cause d'appel est inefficace à régulariser la présente procédure, qui est totalement irrégulière;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE la requête en date du 5 juin 2007 et les significations subséquentes en date des 24 et 25 juillet 2007 ont été faites au nom de la société Morice Equipement alors que cette société était en liquidation judiciaire depuis le jugement rendu le 22 septembre 2006 par le Tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse et qu'elle n'avait pas capacité à agir ; le défaut de capacité d'ester en justice constitue, aux termes de l'article 117 du Code de procédure civile, une irrégularité de fond affectant la validité des actes; il convient en conséquence de dire l'opposition formée par la société Equip'Hôtel 66 fondée; en application de l'article 32 du Code de procédure civile, il y au lieu en conséquence de dire que les demandes de la société Morice Equipement sont irrecevables ; il Y a lieu en conséquence de déclarer nulles et de nul effet la requête, l'ordonnance et les significations subséquentes;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE les juges du fond doivent en toutes circonstances observer le principe de la contradiction; qu'en retenant d'office, pour juger nuls la requête ainsi que l'ordonnance et les actes de signification subséquents, que la requête produite aux débats par la société Morice Equipement et son liquidateur ne mentionnait aucun enregistrement du greffe et qu'elle était ainsi dépourvue de toute valeur probante, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur; qu'en jugeant nuls la requête ainsi que l'ordonnance et les actes de signification subséquents, au motif que la requête en date du 5 juin 2007 est dépourvue de toute valeur probante parce qu'elle a été faite au nom du liquidateur, la SCP Belat et Desprat, à une date où la société Morice Equipement était en redressement judiciaire et que cette société aurait ainsi dû être représentée par son administrateur, tout en constatant que cette société était en liquidation judiciaire depuis le 22 septembre 2006, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L.641-9, alinéa 1er, du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi en date du 26 juillet 2005, applicable en l'espèce, ensemble l'article 117 du Code de procédure civile;

ALORS, EN TROISIEME LIEU, QUE les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ; que, pour juger nuls la requête en injonction de payer ainsi que l'ordonnance ainsi que les actes de signification subséquents, la Cour d'appel a retenu qu'en admettant que le greffe du Tribunal ait oublié de mentionner le nom du représentant de la société Morice Equipement, seul celui de l'administrateur aurait dû apparaître sur la requête puisque cette société était en redressement judiciaire ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant que la société Morice Equipement était en liquidation judiciaire depuis le 22 septembre 2006 et que ladite requête avait été présentée le 5 juin 2007, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 641-9, alinéa 1er, du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi en date du 26 juillet 2005, applicable en l'espèce, ensemble l'article 117 du Code de procédure civile;


ALORS. EN QUATRIEME LIEU. QUE peut être régularisée en cause d'appel l'irrégularité de fond qui affecte la validité de la saisine des premiers juges ;
qu'en retenant, pour juger nuls la requête ainsi que l'ordonnance et les actes de signification subséquents, que l'intervention volontaire en cause d'appel de la SCP Belat et Desprat, agissant en qualité de liquidateur de la société Morice Equipement, était inefficace à régulariser l'irrégularité de fond affectant cette requête et les actes subséquents, la Cour a violé l'article 121 du nouveau Code de procédure civile.



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Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Dessaisissement
Sauvegarde des entreprises


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.