par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



SOCIETE DE FAIT DEFINITION
Dictionnaire juridique

Définition de Société de fait

en partenariat avec
Baumann Avocats Droit informatique

Une société est dite, " de fait" :

  • soit que, après avoir fonctionné, sa création ait été jugée non conforme aux dispositions légales du Code de Commerce sur la formation des sociétés, elle est déclarée nulle par un Tribunal et donc elle n'a eu aucune existence légale en tant que personne morale,
  • soit que, ses fondateurs aient souhaité délibérément et dès sa formation, ne pas la soumettre aux dispositions légales qui définissent les conditions indispensables à l'acquisition de la personnalité morale. On dit, dans ce cas, par opposition à la société déclarée nulle par un jugement, qu'il s'agit d'une société "crée de fait".
  • L'exemple type de société crée de fait est celle que des concubins peuvent décider de créer entre eux. L'existence d'une société de fait entre concubins, qui exige la réunion des éléments caractérisant tout contrat de société, nécessite l'existence d'apports, l'intention de collaborer sur un pied d'égalité à la réalisation d'un projet commun et l'intention de participer aux bénéfices ou aux économies ainsi qu'aux pertes éventuelles. Ces éléments cumulatifs doivent être établis séparément et ne peuvent se déduire les uns des autres.

    En conséquence, les éléments versés aux débats relatifs à la participation de la concubine aux travaux d'amélioration de l'immeuble litigieux, caractérisée notamment par la souscription de deux emprunts en qualité de co-emprunteur, sont susceptibles de lui permettre d'obtenir une indemnité devant le juge du fond, mais ne peuvent constituer un titre d'occupation. (TGI Nîmes (Ch. des référés), 2 mars 2005, BICC n°619 du 15 mai 2005). Ainsi il est jugé qu'un concubinage de dix ans ne peut caractériser à lui seul l'existence d'une volonté d'exploiter un centre équestre en commun, sur un pied d'égalité, de partager les bénéfices et de contribuer aux pertes, volonté qui ne peut être présumée. Dès lors, la seule cohabitation, même prolongée de personnes non mariées, qui se comportent en apparence comme des époux ne suffit pas à donner naissance entre elles à une société, à défaut d'éléments objectifs la caractérisant. (C. A. Lyon (3ème Ch. civ.), 14 octobre 2004, BICC n°609 du 1er décembre 2004). Voir à ce sujet la rubrique "Concubinage"

    Dans tous les cas, la société de fait ne peut donc, en tant que telle, participer à la vie juridique, acquérir, vendre, emprunter, engager du personnel ni faire valoir ses droits en justice. Les associé qui se sont présenté à des tiers au nom de la société sont alors personnellement obligés à l'exécution des engagements qu'ils ont souscrits. La Cour d'appel de Lyon a jugé qu'une société de fait, comme toute autre société, exige que soient réunies les conditions posées par l'article 1873 du Code civil. Elle n'existe, en conséquence, que si deux ou plusieurs personnes établissent qu'elles ont eu l'intention de s'associer en vue d'une entreprise commune en y faisant des apports et en convenant que chacune d'elles participera aux bénéfices et contribuera aux pertes de l'exploitation. Dès lors que la participation directe aux activités de la société ainsi que sa direction effective ne sont pas démontrées, l'exécution de simples tâches matérielles ne peut constituer un apport en industrie. De même, la seule cohabitation, même prolongée de personnes non mariées, qui se comportent en apparence comme des époux ne suffit pas à donner naissance entre elles à une société, à défaut des éléments la caractérisant. (Com., 23 juin 2004, Bull., IV, n° 134, p. 148 et C. A. Lyon (3ème Ch.), 14 octobre 2004. BICC n°626 du 1er octobre 2005).

    La dissolution d'une société créée de fait peut résulter à tout moment d'une notification adressée par l'un d'eux à tous les associés, pourvu que cette notification soit de bonne foi, et non faite à contretemps. (Chambre commerciale 10 avril 2019, pourvoi n°17-28834, BICC n°909 du 15 octbre 2019 et Legifrance).

    Bibliographie

  • Auteurs divers, Les situations de fait, Travaux de l'Association Henri Capitant pour la culture juridique française nš11, 1960, Paris, Dalloz.
  • Boutry (C.), L'absence de personnalité morale dans les sociétés, Sem. jur., E., 2001, n°7/8, p.310.
  • Franceschini (P.), Droit et pratique des unions et groupements d'entreprises [Texte imprimé] : sociétés en participation, sociétés de fait, groupements d'intérêt économique, groupements momentanés d'entreprise, Paris, Éd. du Moniteur, 1981.
  • Maubru (B.), Les sociétés créées de fait entre époux, Mélanges offerts à Jean Derruppé, Paris, GLN-Joly, Litec, 1991.
  • Screpel (P.), Les sociétés créées de fait, Thèse Strasbourg, 1965.
  • Vacrate (S.), La société créée de fait, essai de théorisation, [sous la dir. de Hervé Lécuyer] Thèse Université de Paris-Val-de-Marne, 2002.
  • Vallansan (J.), Desmorieux (E.), Société en participation et société créée de fait : aspects juridiques et fiscaux, GLN-Joly éd.

  • Liste de toutes les définitions