par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



REVERSIBILITE DEFINITION
Dictionnaire juridique

Définition de Réversibilité

en partenariat avec
Baumann Avocats Droit informatique

La réversibilité est, dans les contrats informatiques la faculté pour le client (utilisateur du logiciel ou du système objet du contrat) de récupérer ses données lors de la cessation du contrat, ou plus généralement la faculté de reprendre, au terme du contrat, l'exploitation des données ou d'un logiciel ou même d'un système d'information complet, dans le cadre d'une migration chez un autre éditeur de progiciel, un autre infogérant, une autre infrastructure informatique (data center).

Il sera principalement question ici de la réversibilité concernant les données elles-mêmes, qui est la plus fréquemment rencontrée dans la pratique du droit de l'informatique.

La question de la réversibilité donne lieu à un important contentieux informatique car, sans ses données, l'utilisateur se trouve parfois dans l'impossibilité de poursuivre son activité, sauf à faire ressaisir l'ensemble de ses données manuellement, ce qui, à l'heure du « big data » devient de plus en plus difficilement imaginable : les systèmes d'information collectent, gèrent et génèrent, aujourd'hui, même dans une petite entreprise, un volume de données tel qu'il n'est généralement pas possible d'envisager une telle saisie manuelle.

Cette situation est même de plus en plus fréquente compte tenu de la tendance actuelle, des grandes entreprises mais également des PME, à externaliser le système informatique de l'entreprise pour des raisons de flexibilité, de productivité et de réduction des coûts : les DSI optent massivement pour la migration dans le cloud, la dématérialisation, la virtualisation ou la mutualisation de l'informatique.

Or, les contrats de licence de progiciels, les contrats Software-as-a-Service / SaaS, les contrats d'infogérance ou les contrats d'hébergement, qui sont souvent des contrats d'adhésion, rédigés par le prestataire de services informatiques et rarement négociés par le client (si ce n'est sur le prix), ne comportent souvent aucune clause de réversibilité et plus généralement aucune clause prévoyant le sort du client, de son système d'information et de ses données, à la fin du contrat.

L'utilisateur se trouve donc souvent en situation de « client captif » face à un prestataire très réticent à le laisser partir et à se priver de cette source de chiffre d'affaires.

Le prestataire invoque alors le fait qu'il appartenait au client de sauvegarder ses données (ce qui n'est pas toujours matériellement possible dans les solutions hébergées, notamment les logiciels SaaS) ou encore le fait qu'ayant saisi ses données, le client peut les ressaisir (ce qui est faire abstraction, notamment, des données générées par le logiciel à partir des données saisies).

Il est donc indispensable, notamment dans tous les contrats informatiques où le client est « dépossédé » de ses données (contrats d'externalisation, cloud computing : SaaS, IaaS ou PaaS), de prévoir une clause de réversibilité, la plus précise possible.

Une telle clause est tout aussi nécessaire dans les contrats où le logiciel ou la solution informatique est exploitée dans les locaux du client (on-premise) mais où les données ne sont pas directement accessibles et exploitables (par exemple : bases de données cryptées, structure de données complexe et non documentée).

Cette clause doit notamment prévoir le coût de la réversibilité : on distingue souvent selon que c'est le client ou le prestataire qui est à l'origine de la rupture du contrat, selon que le contrat est résilié aux torts de l'un ou de l'autre. Le coût peut aussi varier selon la durée pendant laquelle le contrat est resté en vigueur (prix dégressif), ou selon le volume de données à exporter.

La clause doit également prévoir le support et le format de restitution des données : le client devra en effet ensuite réimporter ses données dans un nouveau logiciel ou un nouveau système d'information et il est impératif que le client ou son nouveau prestataire puisse comprendre la structure des données, pour effectuer la migration des données vers le nouveau système. On prévoit donc généralement dans la clause de réversibilité que le prestataire informatique ou l'éditeur du logiciel devra fournir non seulement les données elles-mêmes, dans un format facilement exploitable, mais également le « modèle de données ».

Il importe que les données restituées par l'ancien prestataire soient exhaustives. Il faut donc prévoir que l'intégralité des données devra être restituée : non seulement les données saisies par le client, mais également les données fournies par les tiers (par exemple par le biais d'interfaces entrantes), et surtout les données générées par le logiciel sur la base des données saisies.

Définition rédigée par Alexis Baumann, avocat spécialisé en contrats informatiques


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